I.2.2. Volet social de
l'aménagement durable des forêts
L'un des objectifs de l'aménagement durable des
forêts est la prise en compte des aspects socio-économiques lors
de l'élaboration et la mise en oeuvre des plans d'aménagement.
L'évaluation sociale permet de mesurer les impacts ou effets des projets
sur les populations affectées par la mise en oeuvre ou l'implantation de
ceux-ci. La prise en compte des aspects sociaux dans tout processus
d'évaluation environnementale est maintenant largement reconnue (Burdge
et Rabel, 2002). L'évaluation des impacts sociaux permet l'incorporation
des enjeux sociaux soulevés par la mise en oeuvre d'un projet de
politique, de programme ou de plan (Vanclay, 2003 ; Burdge et Rabel,
2004). L'évaluation des impacts sociaux est considérée
comme l'une des voies permettant aux populations d'exprimer leurs opinions.
Elle constitue une plate-forme pour une meilleure identification des enjeux
sociaux afin d'atteindre les objectifs du développement durable
associés à l'aménagement forestier.
Malgré les progrès perceptibles
enregistrés au Cameroun en particulier dans la mise en place du volet
social de l'aménagement et de la certification des forêts, la
gestion des concessions forestières ne conduit encore
véritablement pas au bien-être des populations riveraines. Parmi
les dysfonctionnements qui empêchent d'atteindre les résultats
escomptés, on note, d'un côté, le fait que la part des
bénéfices destinée aux populations ne soit pas le plus
souvent négociée entre les gestionnaires forestiers et ces
dernières, mais plutôt définie par l'Etat ou par les
entreprises forestières elles-mêmes et,de l'autre
côté,la corruption qui constitue un obstacle majeur à la
redistribution des bénéfices ainsi définis. A cela
s'ajoute la marginalisation de certains groupes notamment les peuples
autochtones Pygmées et les femmes qui très souvent, sont sans
voix ou alors très peu ou presque pas écoutés (Waouo,
2010). Les élites intellectuelles et politiques locales (fonctionnaires
retraités, leaders villageois scolarisés, élus locaux,
présidents des comités, etc.) s'accaparent les
bénéfices de la gestion des concessions forestières. Bien
que des réalisations soient faites dans les villages avec la part des
redevances destinées aux communautés villageoises, dans les
domaines de l'éducation, de la santé, de l'agriculture, de la
religion et de la culture, les conditions de vie des populations riveraines
restent précaires (Mbadi et Akam, 2008).
Sur le plan socio-économique, la certification FSC
demande à ce que le dialogue social et la consultation des populations
soient réels et effectifs (principes 2 et 3). Cela passe par une
plate-forme de concertation, véritable structure de communication qui
permet de créer un dialogue, et aboutit à une contractualisation
des accords. Au-delà de la définition de série de
développement agricole, intégrée dans tout plan
d'aménagement, la certification nécessite des mesures plus
précises telles que la définition des Forêt à Haute
Valeur pour la Conservation (FHVC) ou le Consentement Libre, Informé et
Préalable (CLIP). En matière sociale, les nouveaux cadres
législatifs sont assez semblables d'un pays à l'autre et reposent
sur trois niveaux d'obligations faites aux titulaires d'une concession
forestière à savoir :
- assurer des conditions de vie convenables sur les chantiers
forestiers et les sites industriels pour les salariés de l'entreprise et
leurs « ayants droits » légaux ;
- contribuer au développement local par le financement
d'infrastructures et d'équipements sociaux collectifs au
bénéfice des populations riveraines ;
- assurer la coexistence des différentes fonctions et
usages de l'espace et des ressources de la forêt pour garantir aux
populations locales la préservation de leurs droits d'usage
légaux (Pierre et Cassagne, 2005). D'après les mêmes
auteurs, jusqu'à très récemment, les aspects sociaux de
l'exploitation forestière étaient pris en compte par le
concessionnaire simplement pour assurer l'activité de production et
avoir accès à la ressource ligneuse dans de meilleures conditions
de « paix sociale ». Ces aspects n'affectaient pas, sauf
cas rare de conflits locaux, la commercialisation du bois d'oeuvre.
Aujourd'hui, les aspects sociaux doivent être économiquement
intégrés afin d'assurer la production, contribuer à une
paix sociale devenue de plus en plus fragile, mais aussi et surtout favoriser
la commercialisation des produits forestiers à travers un engagement de
l'entreprise qui répond à deux demandes croissantes du
marché, à savoir :
- justifier d'une bonne pratique sociale de la gestion
forestière ;
- acquérir une certification de la gestion durable, qui
aujourd'hui, est de plus en plus demandée sur les marchés
internationaux occidentaux (Tekam, 2012).
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