La distinction pouvoir constituant et pouvoirs constitués au Cameroun( Télécharger le fichier original )par NENEO KALDAYA Université de Douala - Cameroun - Diplôme d'études approfondies option droit public interne 2008 |
PARAGRAPHE II : L'ENCADREMENT JURIDIQUE DES DIFFERENTS CHAMPSDE COMPETENCES DES POUVOIRS CONSTITUES PAR LEPOUVOIR CONSTITUANTLe pouvoir constituant est un « bon père de famille » qui a tout prévu pour la bonne conduite et la stabilité des institutions étatiques. Pour GEORGES VEDEL, « La constitution dit ce qu'il faut faire, elle ne peut pas dire ce qu'on en fera »282(*) La constitution est comprise dans ce sens comme « un acte qui informe au sens de donner une forme, une structure, une signification à la société »283(*). Les missions assignées aux pouvoirs constitués sont énormes, c'est ce qui explique la précision des textes constitutionnels (A) dont la sincérité doit se vérifier par l'institution de contrôle de constitutionnalité (B). A- La précision des dispositions constitutionnelles dans l'encadrement juridique desdifférents pouvoirs de l'Etat Les textes constitutionnels sont plus que précis dans la définition des modalités d'organisation et du fonctionnement des pouvoirs étatiques. A la lecture des textes constitutionnels camerounais, les principaux maillons de l'Etat obéissent à des règles de séparation des pouvoirs (1), laquelle séparation porte par endroit une teinture de la rationalisation (2). 1-De l'expression de la séparation des pouvoirs au Cameroun Transposition du sacro-saint principe de théorie de la séparation classique des pouvoirs,284(*) le constituant camerounais a fait sien la distinction des pouvoirs au sein de l'Etat. Longtemps resté calculateur, le pouvoir constituant de 1996 a opté pour une séparation totale avec l'institution d'un pouvoir judiciaire, même si le problème d'un sevrage immédiat du pouvoir exécutif tarde à être appliqué. En principe, la séparation des pouvoirs prône l'indépendance des institutions étatiques avec à la clé l'absence de tout assujettissement entre lesdits pouvoirs de peur de fausser le jeu démocratique. Dans le contexte camerounais en effet, il s'est agi de doter les institutions suscitées de pouvoirs de contrôle de nature à limiter les excès ou inconstitutionnalités ; option que le Cameroun a fait sienne depuis sa fondation285(*) dont les coutumes et usages constitutionnels ont jeté aux oubliettes, au profit du développement d'une monarchie constitutionnelle, avec à la clé l'émergence de la prépondérance de l'exécutif, donc présidentielle dans toute l'histoire constitutionnelle du pays. La nouvelle donne constitutionnelle de 1996 apporte une amélioration conséquente de type nouvelle axée sur la rationalisation des rapports entre les pouvoirs. 2- L'introduction de la rationalisation des rapports des pouvoirs au Cameroun Jugée très dangereuse pour les jeunes Etats africains en général pour cause de sa rigidité, la séparation stricte des pouvoirs présente des effets moins reluisants notamment la paralysie du système institutionnel des Etats. Le mouvement en faveur de la démocratisation des sociétés politiques des années 1990 a vu une certaine réorientation de la théorie de la séparation des pouvoirs allant ainsi dans le sens de la collaboration. Nous en sommes arrivés à la séparation souple où le constituant camerounais a voulu explicite à travers la constitutionnalisation des rapports exécutif et législatif en matière de l'initiative de révision de la constitution. Cependant, convient-il de souligner, le risque d'une dictature de la majorité parlementaire, un problème qui semble moins ressenti pendant la cohabitation, notamment dans l'expérience française. L'expérience de la rationalisation a longtemps contribué aux multiples dérapages se justifiant par des modifications intempestives et excessives de la constitution, ceci dans le seul but de satisfaire aux appétits de pouvoir politique des dirigeants. Le fait majoritaire relayé par la crise de la représentativité constatée çà et là dans les démocraties modernes remet donc en doute l'efficacité de la rationalisation des rapports de pouvoirs. Et comme pour préserver ces rapports, le constituant camerounais a prévu une mesure de sauvetage avec l'institution du conseil constitutionnel. * 282 Cité par O. Duhamel et Y. Mény, dictionnaire constitutionnel, précité, page 221. * 283 Idem. * 284 Il s'agit ici de penser aux théories développées par les philosophes politiques du 18è siècle en l'occurrence John Locke, Montesquieu et autres. * 285 Lire Maurice Kamto, Dynamique constitutionnelle du Cameroun indépendant, précité, page 9. |
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