CONCLUSION GÉNÉRALE
De manière générale, il a
été question de s'interroger sur les systèmes juridiques
de protection de l'environnement contre les déches en droit
français et en droit camerounais. Il ressort qu'avant la moitié
du XXe siècle, la protection de l'environnement en
général n'était entreprise que de façon timide.
C'est la Conférence de Stockholm à travers la Déclaration
issue de celle-ci, qui a été le premier jalon dans le processus
de protection de l'environnement. D'autres textes et instruments internationaux
l'ont par la suite emboîtée le pas. Vingt ans après
Stockholm, la Déclaration issue de la Conférence sur
l'environnement et le développement tenue à Rio,
complétée par l'Agenda 21, a définitivement posé
des principes directeurs solides du droit international de l'environnement.
Comme un coup de Trafalgar, les déchets ont surpris
tout le monde. Leur multiplication exponentielle a favorisé leur
vagabondage de part en part dans le monde. Cette croissance inattendue a
été la conséquence de la technologie qui a
évolué, la production des biens avec et du changement du mode de
consommation des hommes. Face à ce danger permanent auquel
l'environnement était exposé, les pays ne sont pas restés
inertes.
Le Cameroun a manifesté une certaine réticence
quant à la transposition des règles juridiques internationales
de protection de l'environnement. La plupart des textes et traités
internationaux relatifs à la protection de l'environnemnt n'ont
été ratifiés qu'une dizaine d'années après
leur signature. Sur le plan national, ce n'est que tardivement que la
protection de l'environnement sera intégrée dans la politique du
pays. Bien que le droit de l'homme à l'environnement ait
été proclamé au préambule de la Loi
constitutionnelle, l'environnemnt n'a été sérieusement
pris en compte qu'en 1996 avec l'adoption et la promulgation d'une Loi-cadre
relative à la gestion de l'environnement. Quant aux déchets et
les principes directeurs qui gouvernent leur gestion, plusieurs dispositions
de la Loi-cadre traitent du sujet. Un autre texte récemment signé
et qui entrera en vigueur dans sa plénitude au 1er Avril 2014
est venu compléter l'élan entrepris par le Cameroun. Ce texte
prescrit dans quelles conditions le déchet doit être
géré ; c'est à dire de sa production jusqu'à
son traitement. Pour accompagner l'arsenal juridique mis en place en
matière de déchets, une stratégie nationale de gestion
des déchets a été adoptée et des institutions ont
été chargées d'accompagner et de rendre
opérationnel ladite structure.
La France, contrairement au Cameroun, avait pris à bras
le corps la question de la protection de l'environnement depuis longtemps.
Dès 1971 un Ministère chargé de l'environnement avait
été mis en place. La question de déchets a aussi
été entamée très tôt ; En 1975, une Loi
fixait déjà les conditions dans lesquelles ils devaient
être traités. La France a été partie prise de la
majorité des traités internationaux relatifs à la
protection de l'environnement en général et aux déchets en
particulier, en l'occurrence la Déclaration de Rio et la Convention de
Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières des
déchets dangereux et leur élimination. Aujourd'hui la
majorité des dispositions régissant le droit des déchets
en France sont contenues dans la loi portant Code de l'environnement. Bien
qu'elle ait eu du mal à être adoptée, cette loi offre
aujourd'hui aux yeux du monde un système juridique de lutte contre les
déchets qui se fonde sur les grands principes de protection de
l'environnement.
Tout au long de ce travail, des traits de ressemblances ont
été relevés entre les deux systèmes
juridiques : Tout d'abord la hiérarchie des déchets est la
même dans les deux législations ; en effet, au Cameroun comme
en France il ya un ordre de priorité à respecter en
matière de gestion de déchets. C'est ainsi que l'action
préventive est prioritaire parmi toutes les autres actions ;
l'objectif étant de réduire les déchets au mieux à
la source. Dans cet ordre de priorité, le dernier recours c'est
l'élimination finale ; un déchet ne peut être
éliminé dans les deux pays que s'il n'est plus
écologiquement valorisable. Ensuite, on a constaté que les
acteurs chargés de la lutte contre les déchets interviennent en
France comme au Cameroun à des mêmes niveaux (central et local).
Au niveau local, le Maire a un pouvoir prépondérant dans les deux
pays en matière de gestion de déchets. Enfin, les sources
juridiques en matière de déchets au Cameroun sont de la
même nature que celles du droit français des déchets.
Quant aux dispositions contenues dans les textes, certaines sont
essentiellement identiques dans les deux systèmes juridiques.
Une autre ressemblance entre le droit camerounais et le droit
français des déchets concerne la politique des déchets qui
est la même à certains niveaux ; en effet, au niveau
national, un plan de gestion des déchets a été
adopté en France comme au Cameroun.
Cette étude révèle néanmoins que
les deux systèmes ne sont pas identiques à tous les niveaux. La
tradition juridique française que le Cameroun a héritée
n'a pas été transposée dans les textes camerounais de
façon absolue ; En effet, le Cameroun a adapté certaines
de ses dispositions à son contexte culturel. C'est ainsi que la
tarification incitative en matière de gestion des déchets
pourtant pratiquée en France est absente au Cameroun.
Ce travail nous a aussi fait constater que contrairement
à la France, une multitude de Ministères sont impliqués
dans la gestion des déchets au Cameroun. Quant aux sanctions
pénales prévues en cas de non respect d'une règle relative
à la lutte contre les déchets, celles en vigueur au Cameroun sont
plus dissuasives que celles en vigueur en France.
Malgré que Les deux systèmes juridiques assurent
une gestion écologiquement rationnelle des déchets, ils font
l'objet de certaines insuffisances. Aussi certains événements
entravent la lutte contre les déchets dans les deux systèmes.
En France, la tarification qui est mise en place est loin
d'être efficacement incitative ; la TEOM et la REOM mises en place
sont beaucoup plus des dispositifs de financement du service public
d'élimination des déchets que des dispositifs d'incitation.
Au Cameroun, les pouvoirs institutionnels dont certains sont
des acteurs à part entière de la lutte contre les
déchets sont, à quelques exceptions près,
presqu'inexistants.
Les obstacles au droit francais des déchets, moins
nombreux, ne sont pas à négliger ; en effet, le pouvoir
judiciaire, garant d'une justice équitable, est confronté
à un domaine dont il n'a pas encore la maîtrise parfaite.
Les obstacles au droit camerounais des déchets, plus
nombreux, sont à prendre au sérieux si le Cameroun ne veut pas
être freiné dans son élan en matière de gestion de
déchets ; la croissance démographique, l'incivisme de la
population, la pauvreté, le manque de moyens financiers,
l'inexpérience du personnel des collectivités territoriales sont
ente autres l'ensemble des obstacles au droit des déchets camerounais.
Alors que le compromis s'impose en France entre une
tarification incitative en amont et une tarification incitative en aval, la
formation du personnel judiciaire à la base constitue aussi une solution
efficace pour la bonne santé de son système juridique de lutte
contre les déchets.
Au Cameroun, la lutte contre la pauvreté et
l'éducation au civisme environnemental de toutes les couches sociales
sont des solutions sûres pour l'efficacité de la lutte contre les
déchets.
Arrivé au terme de ce travail, une question principale
vient à l'esprit. La libéralisation de l'économie
n'est-elle pas en train de freiner la lutte contre les déchets dans le
monde ? Et vice-versa ? Les industriels animés par l'envie du
gain ne rendront-ils pas cette lutte vaine ? Qui laisse faire le trafic
illicite des déchets dans le monde ?
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