B- LA PROTECTION DE L'INDUSTRIEL LOCAL
Par industriel local il faut entendre, tout opérateur
s'activant dans le domaine de la production et de la transformation. Ces
opérations ont sous l'angle économique, une portée
198 Une analyse des articles 15 et suivants permet de se rendre
compte que les dépenses de fonctionnement de la commission sont
rattachées au budget dudit ministère qui fixe par ailleurs le
montant des indemnités des personnes appelées à titre
consultatif. Mais également la commission doit adresser des rapports au
Ministre en charge du commerce. Ceci pourrait permettre de conclure à un
rapport hiérarchique, faisant de la CNC le prolongement de
l'administration centrale chargée de la concurrence. Ce qui jette du
coup une ombre de suspicion sur cet organisme.
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certaine en matière de détermination des prix.
Or le contexte de la concurrence, favorisé par la
déréglementation, contraste avec l'impuissance économique
de ces entités. Il s'impose alors la nécessité d'une
intervention conjuguée de l'Etat et des forces du marché pour
venir à bout des problèmes liés aux prix. Dans cette
optique, la régulation des prix vise à la fois la lutte contre
l'inflation et la multiplication des mesures de soutien à
l'industrialisation.
1- Les mesures de lutte contre l'inflation.
L'inflation consiste en la création de moyens de
paiement en excédent par rapport aux besoins de l'économie ayant
pour conséquence de provoquer une hausse générale et
continue des prix. D'après le Vocabulaire juridique, l'inflation se
présente comme un véritable cancer des économies
étatiques, « une véritable gangrène de
l'économie, nuisible aux opérateurs économiques
», pour reprendre les propos de Maurice
FLAMMANT199. Au Cameroun, la loi fait de la protection de l'espace
économique national, la sécurité économique du pays
et la gestion des situations économiques conjoncturelles, un devoir de
l'Etat.200 La poursuite de cet objectif explique les relevés
des prix effectués par les services compétents du
ministère en charge des prix, d'où l'action pertinente de
l'Institution National de la Statistique. Les relevés de prix ainsi
effectués permettront à l'Etat de prendre des mesures efficaces
de lutte contre l'inflation. Il pourrait s'agit des politiques
budgétaires201, des politiques
monétaires202, de la politique des revenus par une
modération de la hausse des rémunérations, mais surtout
l'Etat peut passer par le contrôle des prix au moyen de subventions de
soutien aux prix, d'importations pour faire chuter les prix ou enfin la
pratique des prix minimums. Cette dernière mesure nécessite le
plus souvent encore plus de contrôle des prix ainsi qu'une rigoureuse
pression fiscale, malheureusement désincitative des investissements.
L'impératif de protection du consommateur contre les
prix insoutenables et celui de protection de l'opérateur
nécessitent souvent des mesures de soutien aux prix, à la
production, à la transformation, à la distribution et même
à la commercialisation ; bref, à tous les stades
199 FLAMMANT (M), l'inflation, Q-S-J ? , PUF, Paris 7e
édition, 1987.
200 Article 62 du Décret d'application de la loi
régissant l'activité commerciale au Cameroun.
201 Agir sur l'équilibre budgétaire, prendre les
décisions en matière fiscale de nature à juguler
l'inflation.
202 Réduction des liquidités au niveau de la
planche à billets encore appelée ponction budgétaire.
Cette mesure est généralement impopulaire et difficile à
réaliser.
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du processus économique. Ceci apparaît en gros
comme une mesure de soutien à l'industrialisation.
2- Les mesures de soutien à
l'industrialisation.
La «jungle» dans laquelle le
libéralisme introduit les Etats du tiers-monde, dans ce contexte de
mondialisation des échanges, exige de fort grands moyens de production
et de transformation pouvant permettre à l'Etat, de pratiquer sur le
marché, le juste prix. Il s'agit du prix qui, sans léser le
consommateur ne nuit pas à l'opérateur. Ceci nécessite un
niveau d'industrialisation dont ne sont malheureusement pas dotés les
pays du Sud. L'industrialisation demeure embryonnaire au Cameroun. Le contexte
est tel qu'à défaut d'abandonner ses activités,
l'opérateur fait subir au consommateur, le surplus des ses coûts
de production. Dans le but de protéger le consommateur et d'encourager
l'industriel, des mesures régulatrices épousent les contours
multiformes de l'aide aux prix. A cet égard, des subventions directes ou
indirectes sont accordées aux opérateurs économiques ; des
exonérations d'impôts et taxes fiscales, des bonifications
d'intérêts, des garanties de prêts ou des conditions
particulièrement favorables de fourniture de biens à titre
préférentiel ainsi que la couverture des pertes d'exploitation et
plusieurs autres mesures sont envisagées203. Toutefois, la
réglementation CEMAC ne permet que « les aides à
caractère social accordées sans discrimination liée
à l'origine du produit ainsi que les aides qui peuvent contribuer au
développement économique d'un Etat membre ou de la sous
région »204
En fait, l'institution d'un cadre juridique et judiciaire
incitatif et favorable aux affaires à travers la promulgation de la
charte des investissements de 2002, autant que l'édiction d'un nouveau
régime financier de l'Etat205 participent de cet objectif.
Ceci se traduit sur le plan normatif par la création d'un
département ministériel spécialement chargé de la
création de petites et moyennes entreprises autant que du retour
à l'existence d'un ministère spécialement chargé
des affaires économiques, séparé du Ministère des
finances, une des actions fortes en faveur d'une industrialisation au Cameroun
avait été cependant l'institution des zones franches et des
points francs, soustraits à tout contrôle des prix.
203 ACDIC
204 Article 2 du règlement 004/99/UEAC-CM-639 portant
réglementation des pratiques étatiques affectant le commerce
entre les Etat membres de la zone CEMAC.
205 Loi n° 2007/006 du 26 décembre 2007 portant
régime financier de l'Etat
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La suppression de ce régime a laissé la place
à d'autres mesures instituées par la nouvelle charte des
investissements telles que les zones économiques et les codes sectoriels
formés afin de rendre plus incitatif l'investissement et favoriser le
développement de l'industrie locale.
La protection d'intérêts économiques
particuliers, et notamment ceux de l'opérateur et ceux du consommateur
constituent donc le light motiv de la régulation des prix,
comme technique d'encadrement social mettant en commun des entités
parfois antagonistes du secteur privé et du secteur public dans une
synergie dont l'objectif ultime, reste somme toute, la préservation de
l'intérêt économique général.
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