Paragraphe III : L'effacement des preuves du
génocide de 1994
Dix-huit ans viennent de passer après le
génocide perpétré contre les tutsi. Malgré l'action
de mémoire des tutsi tués pendant ce temps, il est toujours
difficile de savoir comment et dans quels endroits, au niveau des collines, ces
innocents ont été tués, pour les rescapés qui
veulent savoir comment les leurs ont été tués, et les
responsables de tels actes. Plusieurs pratiques illustrent cependant
l'effacement des traces du génocide qui entravent le processus de
justice
La mobilisation de la démarche judiciaire dans le
processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit :
le cas du Rwanda.
transitionnelle et un retour à la paix. D'après
nos différentes lectures par exemple, la façon fréquente
d'effacement des traces du génocide se remarque dans la fuite des
informations recueillies au cours de la période de collectes
d'informations au niveau des cellules, de telle sorte que les informations
qu'on donne après, au cours des procès, sont loin de celles dont
ont disposait avant. Ceci a d'ailleurs eu des conséquences
négatives.
A. Les responsables des massacres, les lieux ou les
Tutsi ont été tués et le patrimoine pillé
Il est difficile de connaitre les responsables des massacres
parce que leur objectif est de continuer d'effacer les traces. Un rwandais nous
affirme que « la responsabilité de chacun ne peut être
connue. Si X est accusée par exemple d'avoir tué quelqu'un, et
que dans le cadre des processus Gacaca c'est sa soeur ou un membre de famille
qui est élue comme personne intègre des Juridictions Gacaca, le
témoignage précédent sera confisqué...
»255.
De plus, à l'heure actuelle, certains rescapés
du génocide ne savent toujours pas les lieux où les corps des
leurs ont été jetés. Avant le génocide, les
relations entre les hutu et les tutsi étaient bonnes, mais après
le génocide, il est difficile qu'un voisin dise la vérité
sur ce qu'il a vécu et sa responsabilité. Le constat c'est que de
façon générale, personne ne veut révéler
l'endroit où les gens ont été jetés, à moins
qu'il y ait d'autres efforts pour servir de base dans la recherche des
données.
S'agissant du patrimoine pillé, pour le moment, il est
encore très difficile d'identifier le patrimoine pillé pendant le
génocide. Les rescapés du génocide ne cessent de demander
au Gouvernement du Rwanda d'aider dans le remboursement de leurs biens
pillés, et les rescapés ont souvent un problème à
localiser leurs biens si ce n'est avec l'assistance des responsables des
massacres. Concernant l'effacement des preuves sur le patrimoine pillé,
ceux qui ont plaidé coupables acceptent leur participation aux attaques
et précisent souvent leur compagnie mais refusent de parler du
patrimoine pillé. On remarque ainsi une différence dans
l'effacement des traces du génocide. Certains disent qu'ils ont
pillé peu de choses et de moindre importance. Ce fait, entrave tout
simplement le processus de réparation de la justice transitionnelle.
255 Entretien mené auprès d'un Rwandais, Kigali, 24
février 2012.
La mobilisation de la démarche judiciaire dans le
processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit :
le cas du Rwanda.
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