B. La justice pour les crimes de génocide :
facteur de réconciliation
Pour conduire à la réconciliation nationale
après le génocide, le problème le plus immédiat
consistait à lancer un processus de justice transitionnelle permettant
d'étudier les demandes des survivants et de traiter le nombre
considérable des suspects de génocide. Comme nous l'avons vu, les
individus accusés d'avoir ourdi le génocide et capturés
à l'étranger ont été transférés au
TPIR. Le mandat du Tribunal expirant déjà, quelques demandes
seront et sont déjà transférées au Rwanda où
le pays jugera le restant des suspects. Nous soulignons que le Rwanda a
satisfait à plusieurs des conditions de tels transferts, notamment avec
l'abolition de la peine de mort en 2007, l'adoption d'une loi sur le transfert
des prisonniers du TPIR, l'amélioration des installations
carcérales et l'autorisation des visites au Rwanda effectuées par
le TPIR. En plus, des tribunaux classiques qui ont montré leurs limites,
le système judiciaire transitionnel mis en place par le Rwanda, connu
sous le nom de Gacaca, lequel est fondé sur les
mécanismes communautaires traditionnels de résolution des
conflits, est largement perçu comme un pas en avant vers la
réconciliation nationale et semble jouir de la légitimité
populaire malgré quelques inconvénients.
Par ailleurs, un autre instrument qui a joué un
rôle important pour instaurer et favoriser unité et
réconciliation a été la constitution de la Commission
nationale pour l'unité et la réconciliation (CNUR) en 1999. La
Commission a un mandat constitutionnel pour
202 Philip Gourevitch, Op. cit., p. 227.
203 Idem.
La mobilisation de la démarche judiciaire dans le
processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit :
le cas du Rwanda.
promouvoir, coordonner et surveiller tous les projets
nationaux et régionaux destinés à favoriser l'unité
et la réconciliation.
D'autres initiatives méritent également
d'être signalées pour leur impact positif sur l'unité et la
réconciliation nationales. Il s'agit notamment de la planification
participative au niveau local, des programmes de démocratisation, de
transparence et de responsabilisation, des dispositions de la constitution
contre la discrimination, de l'élimination de la mention de l'ethnie sur
les cartes d'identité204, de l'intégration des forces
armées dans la `Rwanda Defence Force' (RDF) la Force rwandaise de
défense, des progrès enregistrés en matière de
règlement d'un grand nombre de différends fonciers et de
réinstallation ainsi que de la semaine annuelle de deuil national pour
les victimes du génocide de 1994.
Soulignons pour finir que toutes ces activités sont le
signe d'un programme fort et propre au Rwanda destiné à favoriser
la réconciliation. Toutefois, nous reconnaissons que le processus de
réconciliation au Rwanda doit encore aller plus loin. Si beaucoup de
terrain a déjà été fait, un défi
considérable reste à relever pour restaurer la confiance au sein
de la société.
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