DEUXIEME PARTIE : BILAN MITIGE DE LA DEMARCHE
JUDICIAIRE DANS LE PROCESSUS DE JUSTICE TRANSITIONNELLE AU RWANDA
La mobilisation de la démarche judiciaire dans le
processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit :
le cas du Rwanda.
La mobilisation de la démarche judiciaire dans le
processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit :
le cas du Rwanda.
Après le génocide de 1994 pendant lequel ont
péri 800 000 Tutsi et Hutu modérés rwandais sur une
période de 100 jours, le pays a dû faire face à un
défi sans précédent pour reconstruire la
société dévastée et divisée. Au sortir du
génocide, les priorités ont été la justice
transitionnelle par le biais de la réconciliation et des poursuites,
l'aide aux survivants, la réinsertion des rapatriés et la
reconstruction. La démarche judiciaire dans le processus de justice
transitionnelle est un élément essentiel de la construction de la
paix sans laquelle il ne peut y avoir de développement durable. Les
processus de reconstruction, de réconciliation et de
développement économique du Rwanda après le
génocide ont été ancrés à un changement
radical de la gouvernance et à des mesures destinées à
améliorer les performances au sein de l'économie. La justice
transitionnelle est ainsi perçue comme une formidable opportunité
d'aller de l'avant, de panser les plaies du passé, d'être le
moteur de paix et du développement et beaucoup de progrès ont
été faits dans ce sens. Cependant, cette même justice
transitionnelle a souligné un certain nombre de lacunes également
que nous mettons en lumière en vue d'apporter des suggestions et de se
pencher à un avenir meilleur de la justice transitionnelle. Cette
deuxième partie de l'étude est ainsi subdivisée en deux
grands chapitres : notamment la justice transitionnelle vue comme une
contribution significative à la consolidation de la paix et du
développement au Rwanda et la justice transitionnelle comme contribution
insuffisante à la dynamique de retour à la paix au Rwanda.
CHAPITRE TROISIEME : LA DEMARCHE JUDICIAIRE DANS LE
PROCESSUS DE JUSTICE TRANSITIONNELLE : UNE CONTRIBUTION SIGNIFICATIVE A
LA CONSOLIDATION DE LA PAIX ET AU
DEVELOPPEMENT
La mobilisation de la démarche judiciaire dans le
processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit :
le cas du Rwanda.
La mobilisation de la démarche judiciaire dans le
processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit :
le cas du Rwanda.
SECTION I : L'MPACT POSITIF DE LA JUSTICE
TRANSITIONNELLE SUR LE RWANDA : ETAT DE DROIT ET RECONCILIATION NATIONALE
Paragraphe I : Le droit aux garanties de
non-répétition à travers le respect de l'Etat de droit
De façon globale, le droit aux garanties de non
répétition des violations graves des droits de l'homme traduit
l'obligation pour les Etats de veiller à ce que les victimes ne puissent
de nouveau subir une violation de leurs droits. Ce droit à la
non-répétition implique un ensemble de réformes
institutionnelles et de mesures qui sont à même de garantir le
respect de l'état de droit, de susciter et d'entretenir une culture du
respect des droits de l'homme, et de rétablir ou de restaurer la
confiance de la population dans ses institutions publiques. Nous nous
intéressons dans ce paragraphe au respect de l'état de droit.
A. Justice transitionnelle : soutien au
rétablissement de l'Etat de droit
La justice transitionnelle vise à affronter le legs
d'exactions graves en vue de soutenir le rétablissement de l'Etat de
droit et la réconciliation nationale. Lorsque l'on parle de l'Etat de
droit, il se trouve que le public ait confiance dans les règles de la
société et les respecte, le public a confiance à
l'efficacité et à la prévisibilité du
système judiciaire. L'Etat de droit se réfère
également à l'ampleur des crimes, à leur niveau et
à leur incidence dans la société ainsi qu'à la
capacité du système judiciaire à gérer ces crimes.
Au Rwanda, la mobilisation de la démarche judiciaire dans le processus
de justice transitionnelle a permis en partie l'égalité et
l'efficacité de l'accès des citoyens à la justice, y
compris aux systèmes judiciaires traditionnels ; elle s'est
penchée en particulier sur les Juridictions Gacaca. Ainsi, au
regard du retard dans les dossiers de crimes de génocide à
traiter, les Juridictions Gacaca ont joué un rôle
prépondérant dans l'administration de l'Etat de droit.
Lorsque la confiance a été gravement
érodée au sein d'une société, la reconstruire et
résoudre les conflits demande l'application juste et équitable de
règles par une tierce partie impartiale. Au Rwanda, comme dans d'autres
pays qui se remettent d'un conflit, le capital social et la confiance ont
été gravement détériorés. Dans ce contexte,
il a été essentiel d'appliquer la règle de droit de
manière juste et équitable afin de surmonter la méfiance
et les divisions et d'administrer rapidement la justice pour tous les auteurs
et les victimes du génocide et d'autres crimes, restaurant ainsi la
confiance dans l'avenir.
La mobilisation de la démarche judiciaire dans le
processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit :
le cas du Rwanda.
Il est crucial que les organismes assurant le respect de la
loi et le système judiciaire disposent d'un haut degré
d'indépendance et d'intégrité afin d'assurer
impartialité et non ingérence dans les dossiers. L'accès
à la justice constituant l'un des piliers de la justice transitionnelle
est un objectif vital mais qui reste difficile dans le contexte de pays
à faible revenu qui ne disposent pas d'une infrastructure et d'un
système d'aide judiciaire très développés.
L'efficacité et l'efficience sont également des
éléments essentiels pour que la justice puisse être rendue
dans un laps de temps raisonnable. Pour ce faire, il est nécessaire que
les effectifs et les ressources financières soient suffisants afin de
disposer de la capacité voulue en matière d'application de la
loi, d'enquête et de procédures judiciaires.
Avant 1994, le Rwanda n'avait pas l'expérience
véritable d'un système judiciaire professionnel et
indépendant. Par ailleurs, ce qui était en place avait
virtuellement été détruit durant le génocide au
cours duquel beaucoup de juges et d'avocats ont été tués
alors que d'autres fuyaient le pays. Les moyens juridiques ont dû
être totalement reconstruits alors même que le pays devait
gérer un nombre considérable de dossiers de suspects du
génocide en attente de procès. En 2000-2001 le Rwanda a
entamé un programme de grandes réformes judiciaires dans le but
de renforcer l'indépendance du système judiciaire, d'en
améliorer le professionnalisme, de réduire le nombre des cas en
souffrance et de veiller à la bonne qualification des juges et des
avocats. Parallèlement à l'instauration de ces réformes,
le Rwanda a modernisé son cadre de lois, notamment avec une
révision en profondeur du Code pénal en 2004. Progressivement, le
pays a développé les capacités du personnel du secteur
juridique.
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