Transport de voyageurs en Afrique subsaharienne : le sud Bénin doit-il se réconcilier avec le chemin de fer ?( Télécharger le fichier original )par Sebastien BRION Ecole Supérieure des Transports (Paris) - Manager Transport et Logistique 2012 |
Section 3. Renforcer le dimensionnement du Sud Bénin par le railLe sud du pays, qui ressemble à la base d'un entonnoir, tire parti d'une proximité géographique avec le Togo et le Nigéria, notamment en termes d'échanges commerciaux. Cette zone transfrontalière situe la ville de Cotonou à 150 kilomètres de Lomé, capitale du Togo et place la ville de Porto Novo à 122 kilomètres de Lagos, la plus grande ville du Nigéria. De par sa situation géographique, le Sud Bénin s'insère dans les différents programmes sous régionaux tel que le projet ambitieux d'interconnexion ferroviaire Africarail48(*), initié en 2002, ou encore un autre grand projet d'interconnexion ferroviaire49(*), associant la Côte d'Ivoire, le Burkina Faso, le Niger et le Bénin. Plus réaliste, le développement du réseau ferroviaire voyageur transfrontalier, sur le littoral du Golfe de Guinée, serait une option intéressante. En effet, le prolongement ferroviaire transfrontalier jusqu'à Lomé à l'Ouest (capitale du Togo) et Lagos à l'Est (la plus grande ville du Nigéria) viendrait consolider la métropolisation du littoral Togo - Bénin - Nigéria et ainsi faciliter les échanges entre ces pays. FIGURE 21 - LITTORAL DU GOLFE DE GUINEE. Source : Atlas géographique, 2007 L'intégration transfrontalière50(*), sous réserve d'interopérabilité technique des systèmes de transport et des infrastructures, d'une géopolitique favorable, permettrait également d'inter-régionaliser le Sud Bénin et en faire l'un des plus grands et des plus importants carrefours d'échanges de l'Afrique Subsaharienne. La plupart de ces projets ayant failli, seules quelques sociétés d'autocars assurent aujourd'hui des relations inter frontalières avec l'aérien, grâce à la 5ème liberté51(*) de l'air, que certaines compagnies (principalement RAM) fournissent des liaisons quotidiennes entre Lomé et Cotonou ou Cotonou et Lagos. Le flux aérien de passagers entre ces villes internationales de la région Subsaharienne, correspond plutôt à une clientèle étrangère, en provenance ou à destination du Hub de Casablanca. Section 4. Améliorer la fluidité aux abords des grandes villesComme tous les grands ensembles urbains, Cotonou voit se déverser quotidiennement des milliers de travailleurs en provenance des villes alentours plus ou moins lointaines, à des plages horaires déterminées. Ce sont les migrations pendulaires. Ce phénomène tend aujourd'hui à déborder des limites du Grand Cotonou. Ces trajets domicile-travail expriment clairement une demande de transport périurbain et pourraient justifier l'intégration d'un système de transport collectif de masse, qui viendrait se substituer à tous ces transports individualisés. FIGURE 22 - MIGRATIONS PENDULAIRES DE LA REGION SUD BENIN ET INDICATEURS DE VITESSES MOYENNES EN KM/H. Source : S. BRION, 2012 L'architecture des transports du Grand Cotonou a atteint ses limites et aujourd'hui subsistent donc des problèmes structurels importants. Les temps de parcours sont considérables entre le Grand Cotonou et la moyenne couronne. Le sous-dimensionnement du réseau terrestre routier et l'augmentation du nombre de véhicules entraine une saturation aux abords et dans les grands ensembles urbains. On peut estimer la vitesse moyenne des flux routiers, à 42 km/h, pour l'ensemble du Sud Bénin (analyse des vitesses moyennes au Sud Bénin, en annexe 10). Il faut parfois plus d'une heure et quinze minutes pour parcourir seulement 46 kilomètres. Dans ces conditions, la mobilité devient coûteuse pour la société et peut à force d'aggravation, envenimer le développement économique de la région. Pour les habitants de la moyenne et de la grande couronne, il est un défi d'atteindre le Grand Cotonou et encore plus un exploit de s'y rendre quotidiennement pour le travail. Les flux sont ralentis et épais. On peut illustrer ce phénomène de lenteur, en comparant les villes de Los Angeles et Tokyo52(*). Tandis que Los Angeles peine à relier ses 9 à 10 millions d'habitants par le moyen automobile, la ville de Tokyo est une ville rapide, qui avec son système de transport public performant, donne en une heure de temps, l'accès à une surface de 25 millions d'habitants. Un peu à l'image de Los Angeles, la région Sud Bénin est « lente ». Il faudrait être capable de traverser en un peu moins d'une heure, l'ensemble du Sud Bénin, ce qui reviendrait à une vitesse moyenne de l'ordre de 60 à 100 km/h. La fluidité des déplacements doit pouvoir se faire grâce au train léger, capable de desservir en x temps une surface de y millions d'habitants. Rappelons aussi qu'il existe des TCSP (tram-train, RER, TER) capable d'atteindre une vitesse de 100km/h sur les sections hors agglomération et 25 à 35 km/h sur les portions de voies urbaines (site protégée), ce qui confère au système ferroviaire un large avantage par rapport au mode terrestre routier. En ce qui concerne la vitesse commerciale53(*), celle-ci est relative en fonction du nombre de stations et du temps de stationnement, ainsi que de la nature et la longueur des sections à parcourir (voies urbaines, périurbaines). Le choix d'un tel système de transport permettrait d'améliorer sensiblement une multitude d'indicateurs de mobilité (temps de trajet, prix du transport, nombre de sièges kilomètres offerts, consommation d'énergie finale par mode et par voyageur, nombre d'accidents, ...). * 48 La première phase devait relier la capitale du Burkina, Ouagadougou à Cotonou en passant par Niamey. * 49 [AAF] http://fr.allafrica.com/stories/201203210587.html - article publié le 21 mars 2012 par Adama KONE et consulté le 18 avril 2012. * 50 [BEY, 2011] * 51 Permet à un Etat A d'embarquer/ débarquer des passagers entre deux aéroports situés dans les Etats C et D. * 52 [CER, 2000] * 53 La vitesse commerciale tient compte des arrêts (et de la congestion du trafic si le mode de transport en commun n'est pas en site propre). |
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