Section 2 : Les conséquences de l'absence de
frontières maritimes définies sur le régime juridique des
gisements pétroliers transfrontaliers
Les frontières floues ou inexistantes entre deux
États voisins peuvent conduire à deux situations en parlant du
régime juridique des gisements pétroliers. Soit à un
inexercice unilatéral des droits souverains par les États sur les
ressources pétrolières transfrontalières (§ 1), soit
à une exploitation commune desdites ressources (§ 2).
§. 1. L'inexercice unilatéral des droits
souverains sur les gisements pétroliers transfrontaliers
Le pétrole se retrouve de façon
générale lorsqu'il est en offshore dans les plateaux
continentaux, ceux-ci constituent d'ailleurs la zone maritime qui dispose de
gisements plus dispersés en comparaison avec la répartition des
gisements terrestres22.
20 Id. , p. 237.
21 Id. , p. 237
22 J.-P. BEURIER, « Droits maritimes »,
Paris, Dalloz, 2ème édition, 2009-2010, p. 1086.
La Convention de Montego Bay de 1982 définit ainsi le
plateau continental dans le paragraphe 1 en son article 76 : « Le
plateau continental d'un État côtier comprend les fonds marins et
leur sous-sol au-delà de sa mer territoriale, sur toute l'étendue
du prolongement naturel du territoire terrestre de cet État jusqu'au
rebord externe de la marge continentale, ou jusquà 200 milles marins des
lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la
mer territoriale, lorsque le rebord externe de la marge continentale se trouve
à une distance inférieure. »
Sur cet espace maritime, tout comme sur la zone
économique exclusive, un certain nombre de droits, dits droits
souverains, sont reconnus à l'État côtier. Il s'agit en
fait d'une « compétence d'attribution, de nature fonctionnelle
»23. Puisque selon l'article 77 paragraphe 1 de la
Convention, l'État côtier ne dispose pas d'une pleine
souveraineté sur son plateau continental. Sur cet aspect, la
souveraineté pleine sur le plateau continental signifierait que
l'État « exerçât l'ensemble ou l'essentiel des
compétences qu'intègre ce concept, aussi étendues que sur
son territoire terrestre, ses eaux intérieures ou sa mer
territoriale. »24. C'est dans ce sens qu'il ressort de
l'article 77 paragraphe 1 de la Convention que : « L'État
côtier exerce des droits souverains sur le plateau continental aux fins
de son exploration et de l'exploitation de ses ressources naturelles.
»
Néanmoins, il arrive que les plateaux continentaux se
chevauchent ou que deux États partagent un même plateau
continental pour ainsi dire et par conséquent la même nappe de
pétrolière. Il ne s'agît alors plus d'un État
côtier, mais de deux États qui ont chacun des prétentions
sur la manne pétrolière. Ils ne peuvent exercer les droits
énoncés ci-dessus sans que l'un ou l'autre ne les conteste. C'est
alors que l'on cherche à procéder à une
délimitation. Mais celle-ci n'est toujours pas aisée car les
États n'ont pas pour ambition première de répartir les
ressources mais de bien de maximiser le potentiel de leur économie en
gérant l'entièreté des ressources disponibles.
C'est ce qui explique l'abondance de la jurisprudence en
matière délimitation du plateau continental, depuis l'Affaire
du plateau continental de la mer du Nord du 20 février 1969 ; car
comme nous le soulignions, bien que les États ne le mettent que rarement
en avant, il s'agît presque toujours de manière sous-jacente des
ressources naturelles.
Ainsi, dans le cas d'une absence de frontières
maritimes clairement établies dans le Golfe de Guinée les
États côtiers se heurtent sans cesse à cette
difficulté. Ils se retrouvent dans l'incapacité d'exploiter les
ressources pétrolières transfrontalières de façon
unilatérale. Ce qui les conduit généralement à
opter pour une exploitation commune.
23 J.-P. PANCRACIO, « Droit de la mer »,
Paris, Dalloz, 2010, p. 200.
24 Id. , p. 203.
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