TITRE 2. LES PROFESSIONNELS DE L'IMMOBILIER FACE AUX
OBLIGATIONS RESULTANT DE LA LUTTE CONTRE LE BLANCHIMENT DE CAPITAUX ET LA
FRAUDE FISCALE
Les agents immobiliers, les commerciaux et mandataires
immobiliers sont souvent les premiers acteurs dans le cadre d'opérations
immobilières.
A ce titre, intervenants avant même le notaire ou les
établissements financiers, ils ont souvent connaissance d'informations
ignorées par ces différents autres acteurs.
D'autant plus, que l'examen des déclarations
émises par le notariat fait apparaître que près de 50 % des
cas signalés à cet organisme portent sur des biens immobiliers
qui se situent dans des régions différentes de celles oil les
notaires rédacteurs d'actes sont installés23.
Mais qu'en est-il de leur connaissance face à leurs
obligations de lutte contre le blanchiment, la fraude fiscale ?
Est-il possible de dresser un état des lieux des
opérations de fraude fiscale et de blanchiment en France ?
Dans le cadre de cette étude et afin d'établir
un constat, le plus exhaustif possible, nous avons contacté les
différents syndicats professionnels de l'immobilier (FNAIM, SNPI, FFCI,
FNCI) afin qu'ils servent d'interfaces pour l'envoi de notre questionnaire
à leurs différents affiliés.
Cette même démarche a été entreprise
auprès des plus gros franchiseurs immobiliers (ERA, ORPI, CENTURY21, GUY
HOCQUET, FONCIA, LAFORET, ~). Malheureusement, à ce jour, nos demandes
ne semblent avoir eu aucun écho favorable auprès de ces personnes
: certaines ne nous ayant jamais répondu, d'autres prétextant
qu'elles ne pouvaient donner une suite favorable à notre requête
car « leurs affiliés étaient juridiquement
indépendants et qu'ils ne pouvaient les contraindre à
répondre à un tel questionnaire ».
Devant ce manque de coopération certain de la part de
ces organismes, nous avons été contraint d'adresser par mail,
environ 2000 questionnaires à des agents, commerciaux et mandataires en
immobilier.
23 Rapport d'activité de TRACFIN
2008, page 45
Une autre difficulté a été de
sélectionner un nombre équivalent de personnes par région,
toujours afin de préserver l'exhaustivité de cette
étude.
Un peu plus de 200 professionnels ont bien voulu collaborer, nous
amenant aux conclusions suivantes.
I. Quel constat aujourd'hui ?
A. Des professionnels encore trop peu concernés ou
mal informés ?
En 2000, la mission parlementaire présidée par
M. PEILLON24, indiquait que les « agents immobiliers
» étaient une profession encore très peu sensibilisée
au risque de blanchiment.
De même, cette dernière précisait de
surcroît, que TRACFIN n'était pratiquement jamais destinataire des
déclarations de soupçons, lors de doutes sur l'origine de fonds
destinés à la réalisation d'opérations
immobilières. Les professionnels préférant alerter
directement les services de police ou fiscaux.
La mission concluait que la législation française
de 1998, relative à la lutte contre le blanchiment apparaissait donc
comme totalement ignorée, de ces professionnels.
Qu'en est-il aujourd'hui, sachant que ces professionnels se sont
vus confier depuis 2009, une nouvelle obligation de déclaration de
soupçons en matière de fraude fiscale ?
Il semble que la situation ne se soit pas
améliorée. En effet, les réponses fournies par ces
professionnels, au questionnaire qui leur a été adressé
traduit un constat similaire aujourd'hui.
Une méconnaissance totale des dispositions
légales de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du
terrorisme et la fraude fiscale et de leur mise en °oeuvre,
puisque seulement 6% des personnes interrogées connaissent cette
législation et sont capables de mettre en oeuvre les obligations qui
leur sont imposées.
24 Rapport d'information n° 2311,
du 30 mars 2000, sur les obstacles au contrôle et à la
répression de la délinquance financière et du blanchiment
des capitaux en Europe, président M. Vincent PEILLON ,,
Rapporteur M. Arnaud MONTEBOURG -- Tome II : La lutte contre le blanchiment des
capitaux en France : un combat à poursuivre
Connaissez-vous les dispositions légales de
lutte contre le blanchiment, le financement du terrorisme et la
fraude fiscale ?
Non, je n'ai reçu aucune information/formation
Oui, je reçois régulièrement des
informations, toutefois je ne sais pas I quelles obligations je suis
soumis ou je ne sais pas comment les mettre en oeuvre.
Oui, je reçois des informations/formations. Je connais les
différentes obligations qui me sont imposées et
je sais les mettre en oeuvre.
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10% 6%
84%
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Connaissez-vous les obligations auxquelles les
professionnels de immobiliers sont soumis dans le cadre de ces
dispositions légales ?
Je ne sais pas
Je suis soumis I une obligation de vigilance
Je suis soumis I une obligation de
déclaration de soupçons
Je suis soumis I une obligation de vigilance
et I une déclaration de soupçons
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6%
11%
20%
63%
Toutefois, à la suite d'une prise de contact avec le
dirigeant d'une agence spécialisée dans la vente de produits de
prestige (ch~teaux, demeures de luxe, ), il semble que ces structures et leurs
personnels soient plus au fait, de ces dispositions législatives et de
leur mise en °oeuvre.
Un manque cruel de formation : 70% des
professionnels déclarent n'avoir jamais eu aucune formation dans le
cadre de ces dispositions.
Le reste des formations étant dispensées en interne
ou par des formateurs externes, à l'initiative des
fédérations de l'immobilier.
Quels organismes vous fournissent
régulièrement des informations/formations dans le cadre de ces
dispositions légales?
Aucun
Formations en interne
Fédération de l'immobilier (FNAIM, SNPI...)
Intervenants exterieurs
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16%
9% 5%
70%
Après avoir pris attache avec de nombreux
professionnels, il s'avère, qu'effectivement les principales
fédérations de l'immobilier (FNAIM, SNPI,, ) fournissent des
informations concernant la lutte contre le blanchiment ou la fraude fiscale
mais en fait, il ne s'agit que de parutions d'articles de Loi, voire une
alerte, en cas de modification/d'abrogation.
Ces personnes regrettent par exemple, que les formations
proposées par la FNAIM soient non seulement payante, 215€/personne
mais de surcroît qu'elles soient organisées sur PARIS. Ce dernier
point, étant d'ailleurs selon eux, le plus contraignant.
Les formations externes sont quant à elles
facturées entre 250€/personne et 2.500€/groupe.
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