1.3.3 Les
mouvements de déménagements liés à la
dépendance automobile
Dans son article, escaping car dependence in the outer
suburbs of Paris (2009), Benjamin Motte-Baumvol propose d'étudier
les mouvements résidentiels de trois catégories de
ménages: les ménages non-motorisés (le plus souvent des
modestes), les ménages modestes, c'est à dire des ménages
d'ouvriers ou d'employés, et les ménages aisés, c'est
à dire les cadres supérieurs et les professions
intermédiaires. En s'appuyant sur la différenciation spatiale des
communes selon leur niveau de dépendance automobile (cf figure
1) ainsi que sur les données des recensements de 1982, 1990 et 1999, il
va alors définir la représentation de chacune de ces
catégories dans les déménagements de la grande couronne
périurbaine parisienne.
Dans un premier temps, il met surtout l'accent sur les
ménages non-motorisés, qui peuvent être
considérés comme les plus impactés par le
phénomène de dépendance automobile. Ceux-ci,
possédant les revenus les plus faibles, sont évidemment
sur-représentés dans les déménagements des communes
les plus dépendantes à l'automobile vers des communes où
celle ci est moins forte. Ainsi, ils représentent 13,7% des
ménages ayant déménagés de la grande couronne
parisienne, alors qu'ils ne représentent que 10,4% des ménages de
ce territoire. L'émigration de ce type de ménage est
sur-représenté de 3,3 points. Cette sur représentation est
encore plus significative pour les communes les plus dépendantes,
où elle atteint 8,5 points. Cela confirme de manière claire la
volonté des non-motorisés de se rapprocher des centres, où
l'offre de transports en commun est plus présente, et ainsi des services
et de leur travail. Les modestes, propriétaires de voitures,
représentent eux 36,9% des déménagements, mais 39,3% de la
population. Mais dans les communes les plus dépendantes, leur
émigration est sur représenté de 4,9 points. On peut donc
noter une sur-représentation de l'émigration des modestes,
motorisés ou non, dans les communes les plus dépendantes.
En terme de destination, la majorité des
ménages non-motorisés qui quittent les communes de la grande
couronne déménagent vers le centre de la région, c'est
à dire Paris et sa petite couronne (51,2% des cas, contre 18% des
ménages motorisés). Par ailleurs, quand un ménage non
motorisé déménage au sein de la grande couronne , cela se
fait généralement vers un centre secondaire, dans 67% des
déménagements. Ce pourcentage est plus faible (50%) pour les
ménages motorisés. De manière générale, 73%
des déménagements des non-motorisés se font soit vers
Paris et sa petite couronne, soit vers une autre commune bien
équipé en services, contre 40% pour les autres ménages.
L'offre de logements sociaux dans ces territoires peut en partie expliquer ce
mouvement.
Tableau 4: Destination des migrations
résidentielles (en %)
Type de ménage
|
Paris et petite couronne
|
Grande couronne
|
Hors d'Ile-de-France
|
Non-motorisé
|
51,2
|
32,5
|
16,3
|
Modeste
|
12,2
|
57,1
|
30,7
|
Aisé
|
17,8
|
52,1
|
30,1
|
Ensemble
|
20,3
|
51,3
|
28,4
|
Source: Recensement national (Motte, 2009)
Les destinations par type de ménages sont
confirmées par ce tableau. Les modestes de la grande couronne restent
généralement dans ce territoire, mais déménagent
vers des centres secondaires, mieux équipés et souvent mieux
desservies. L'impossibilité de gagner la petite couronne est surtout
dû à une réalité économique. Pour eux, il est
impossible de cumuler les dépenses liées à l'automobile et
l'augmentation sine qua non des prix des loyers ou du foncier. Le
choix de rester en grande couronne, malgré une dépendance
automobile encore présente, même si elle est moindre dans un
centre secondaire, reste contraint.
Les ménages aisés suivent les mêmes
tendances que les ménages modestes, la majorité d'entre eux
restant en grande couronne. En terme de nombre toutefois, ils vont être
plus nombreux à rejoindre la petite couronne (17,8%), où les
loyers plus élevées ne les rebutent pas.
A la lumière de ces résultats, on peut conclure
sur le fait que cette mobilité résidentielle est due à la
dépendance automobile pour les ménages modestes, et encore plus
pour les ménages non motorisés. Cette affirmation est
basée sur deux faits majeurs: ces ménages sont
sur-représentés parmi les ménages ayant
déménagé des communes les plus dépendantes; et
leurs trajectoires résidentielles se font soit vers Paris et sa petite
couronne, soit vers des communes moins dépendantes, au sein de la grande
couronne.
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