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La penalisation de la transmission du VIH/SIDA en droit congolais

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par Dieudonne MULEPU KABANGULA
Avocat au Barreau de Kinshasa/ Matete -  2008
  

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§ 2. Elément moral :

Pour que l'infraction existe juridiquement et que son auteur en réponde pénalement, il ne suffit pas que celui-ci ait accompli un acte matériel préalablement défini et sanctionné par le législateur (ici la transmission sexuelle du VIH/SIDA), encore faut-il que cet acte matériel ait été l'oeuvre de la volonté de son auteur. Ceci constitue l'élément moral de l'infraction.

Dans le cadre de cette incrimination, l'élément moral est la connaissance qu'a l'agent de son statut sérologique positif et sa ferme volonté d'agir. Il s'agit donc de savoir au préalable que son agir produira le résultat délictueux.

L'auteur agit dans le but d'infecter son partenaire sexuel ou en sachant parfaitement que son comportement entraînera une transmission du virus.

C'est autrement dire que la volonté délictueuse présuppose la connaissance de son statut sérologique. Une personne qui ne connaît pas son statut sérologique, ne pourra être accusée de transmission intentionnelle.

En cette matière, il est difficile de savoir si l'accusé connaissait sa séropositivité et les mécanismes de transmission du VIH au moment du prétendu délit, si c'est bien l'accusé qui a infecté le plaignant, ou si la personne séropositive a caché sa séropositivité au plaignant.

Cette difficulté pose le problème de la preuve. Pour qu'une personne soit reconnue coupable, le lien de causalité doit être prouvé entre son VIH et la contamination de la victime, faute de quoi, on doit appliquer le principe in dubio pro reo.

Mais à la lumière des textes légaux constituant la base légale de cette incrimination, nous pouvons retenir que toute personne poursuivie pour avoir transmis sexuellement le VIH/SIDA doit au minimum être consciente de son statut VIH pour que sa responsabilité soit engagée. En outre, elle doit comprendre que le VIH est une maladie transmissible ainsi que ses différents modes de transmission.

C'est une illusion de penser que les campagnes de prévention organisées dans la lutte contre le VIH/SIDA, « nul ne peut prétendre ignorer les règles et modes de transmission », cette approche nous parait pêcher par naïveté : la pratique nous montre qu'il ne suffit pas de dire « protégez- vous » pour que l'ensemble de la population comprenne et surtout intègre ces règles et modes de prévention, sinon il n'y aurait pas beaucoup de nouvelles infections.

Par ailleurs, on semble oublier que les relations sexuelles, amoureuses ou non, puisque c'est principalement de transmission par voie sexuelle dont il est question en RDC, lorsqu'on parle de pénalisation, ne se gèrent pas aussi facilement que l'achat d'un ticket de bus. Il y a de la passion, de l'aveuglement, de la peur, de l'émotion, du sentiment. Garder à l'esprit les préceptes de prévention dans ces moments et les appliquer est difficile. Il ne suffit pas d'énoncer des messages préventifs pour entraîner automatiquement des comportements adéquats.

STRATENWERTH se demande d'ailleurs s'il est admissible de considérer que la simple conscience du risque de transmission suffit déjà à admettre l'intention alors que le risque de contamination se chiffre en (...) pour mille (7).

Il faudra alors se montrer prudent avec cette prétendue connaissance généralisée des vertus de prévention, même s'il est vrai que le lien sexe-risque de sida existe largement dans la population.

Mais y a-t-il possibilité d'appliquer le droit pénal aux activités librement consenties susceptibles d'entraîner une transmission du VIH/SIDA par la voie sexuelle ? Peut-on pénaliser une activité à laquelle les protagonistes ont consenti ?

Le fond de la question est le sens que l'on donne au mot consentement. Indubitablement, une personne qui a des relations sexuelles avec un partenaire , tout en étant informée de son état sérologique et donc du risque de transmission du virus, consent à courir ce risque , aussi significatif soit-il. Pour nous, rien ne justifie que l'on poursuive la personne séropositive dont le partenaire consent à courir un risque connu ou encore une personne qui ignore son état sérologique et, par conséquent, ignore que sa conduite peut causer des dommages à d'autres.

C'est aussi l'avis de KUNZ et compagnie qui estiment que lorsque la victime accepte le risque d'une transmission, c'est-à-dire une mise en danger acceptée par la victime elle-même et sous sa propre responsabilité, il est de bon droit de ne pas poursuivre l'auteur de transmission . Mais si la victime consentante finalement contamine une tierce personne, il en irait de sa responsabilité et non plus celle de l'auteur initial (8).

Si le consentement fait référence à la notion de culpabilité, il en va autrement de la coresponsabilité. En terme de sexualité, il y a une responsabilité partagée entre les partenaires et l'antinomie contaminateur- victime n'y a plus sa place. Il s'agit de deux individus responsables, conscients de leurs actes et des conséquences éventuelles et il est erroné de faire reposer sur un seul partenaire du couple la responsabilité d'une relation sexuelle.

Le tribunal de police de Genève l'a bien dit dans son jugement du 29 août 1994 en ces termes : «  Il est irresponsable de ne pas se protéger, du moins dans le cadre d'une relation sexuelle à caractère instable ou occasionnel. Dans tout rapport sexuel non protégé entre adultes consentants, il y a coresponsabilité en cas de contamination » (9).

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery