La protection de la victime devant les juridictions repressives ivoiriennepar Gneneindjomain Moussa OUATTARA Université Catholique de l'Afrique de l'Ouest (UCAO) - Master en droit privé 2023 |
Section 1 : Les droits de facilitation de la procédure à la victimeLa procédure pénale revêt une certaine complexité et une certaine technicité. Ce qui fait qu'elle n'est pas à la portée de tous. En plus, elle se veut fortement secrète. La victime, généralement un profane, devenue une partie intégrante au procès aura du mal, sans savoir et assistance, à participer efficacement à la manifestation de la vérité et partant, à la recherche de sa protection devant les juridictions pénales. Par conséquent, pour faciliter la procédure à la victime et lui permettre d'être utile dans la recherche de la manifestation de la vérité, le législateur lui accorde le droit de savoir l'état et l'avancement de la procédure pénale (Paragraphe 1) et le droit à l'assistance pendant la procédure (Paragraphe 2). Paragraphe 1 : Le droit de savoirSelon le dictionnaire Le Robert, savoir c'est « être conscient de ; connaître la valeur, la portée de ». Ici, le droit de savoir, c'est le droit reconnu à la victime de connaitre ses droits pendant la procédure et l'état ainsi que l'avancement de la procédure. Il s'agit concrètement de son droit à l'information (A) et son droit d'accès aux dossiers de la procédure (B). A- Le droit à l'information« L'exercice effectif d'un droit n'est possible que si la personne concernée en a connaissance ».102 Une personne victime d'une infraction bénéficie de plusieurs droits devant les juridictions répressives. Mais comme l'a souligné le conseiller référendaire Madame Frédérique AGOSTINI, cette panoplie de droits ne sera effectivement exercée que si leur titulaire connaît leur existence ou si cela est porté à sa connaissance. 102 AGOSTINI (F.), « les droits de la partie civile dans le procès pénal » [en ligne] https://www.soulie-avocat.fr/categories/actualites-102/articles/les-droits-de-la-partie-civile-dans-le-proces-penal-8.htm, consulté le 17 octobre 2023 à 23h23 30 En raison de l'importance du droit à l'information de la victime, les juridictions répressives sont tenues d'informer la victime de ses droits, de la durée et de l'avancement de la procédure. Mais ce droit de savoir, qui permet de faciliter la procédure à la victime et d'y intervenir efficacement, connaît une application lacunaire en droit ivoirien. En effet, le législateur ivoirien n'exige pas aux juridictions répressives d'informer la victime, dès l'entame de la procédure, des droits dont elle est titulaire. Il s'agit entre autres du droit d'obtenir la réparation du préjudice subi, le droit de se constituer partie civile, le droit à l'assistance judiciaire ou d'un avocat, le droit d'être informée en cas d'ouverture d'une information judiciaire et le droit d'accès aux actes de procédure. Pour une meilleure protection de la victime, il serait judicieux que les juridictions répressives avisent les victimes de leurs droits dès leur première comparution comme le fait le juge d'instruction lors de la première comparution de la personne mise en cause. En effet, selon l'art. 133 du CPP, lors de la première comparution du mis en cause, le juge d'instruction l'informe de son droit à l'assistance d'un avocat, à ne faire aucune déclaration. A notre sens, la personne qui a subi un préjudice mérite également un traitement similaire. En revanche, force est de reconnaître que le législateur ivoirien, à travers plusieurs dispositions, garantit l'exercice du droit à l'information de la victime. En effet, la victime constituée partie civile par le biais de son conseil a connaissance des ordonnances de renvoi et toute ordonnance dont la partie civile peut interjeter appel103. La victime est également avisée par le juge d'instruction, pour faire des observations, en cas de demande de mise en liberté du détenu104. La décision ordonnant l'expertise est également notifiée à la partie civile.105 Le juge d'instruction convoque la partie civile et lui donne connaissance des conclusions de l'expert106. La procédure est communiquée à la partie civile vingt-quatre heures au plus tard avant l'audition de celle-ci107. Pour garantir l'effectivité de ce droit qui est une obligation à la charge de l'appareil judiciaire répressif, le législateur ivoirien exige de la partie civile dont le conseil ne réside pas au siège de l'instruction la communication au greffe du 103 Article 217 du CPP 104 Article 172 alinéa 6 du CPP 105 Article 196 du CPP 106 Article 204 du CPP 107 Article 135 du CPP 31 juge d'instruction une adresse géographique, téléphonique ou électronique pour recevoir les avis et convocations.108 En réalité, cette exigence d'élire domicile a pour but de simplifier la notification des actes et de prévenir les contestations. Les droits sus mentionnés permettent à la victime d'être informée plus ou moins de l'avancement de la procédure. Toutefois, aucune obligation ne pèse sur le juge d'instruction d'informer la victime de la durée et de l'avancement de la procédure. Cela n'est donc pas assorti de sanctions. En tout état de cause, l'on devrait permettre que toutes les décisions importantes qui jalonnent la procédure soient notifiées à la partie civile. Par ailleurs, le droit à l'information est aussi permis et renforcé par un autre droit. Il s'agit du droit de la victime d'accéder aux dossiers de la procédure. |
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