B- Un mode performant
La plainte avec constitution de partie civile est performante
en raison de l'effet pénal de l'action civile par voie d'action qu'elle
déploie78. En effet,
76 Cass. crim., 8 mai 1979, Bull.
crim. n°165.
77 Article 85 al.2 de
procédure pénale (France), Paris, Dalloz, 61ème
éd.,2020, p.343
78 GUINCHARD (S.), BUISSON (J.),
Procédure pénale, 5e
éd.,2009, n°1515 et s. in NIAMBE (K. R.), op.cit., p.123
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contrairement à la plainte simple qui informe la
justice de la commission d'une infraction, la plainte avec constitution de
partie civile permet de mettre en mouvement l'action publique79 et
partant, de saisir le juge d'instruction.
Aussi, cet instrument est-il performant car il permet une
réelle concurrence avec le ministère public dans le
déclenchement des poursuites. En effet, selon le principe de
l'opportunité des poursuites, le ministère public a le pouvoir
d'apprécier les suites à donner aux plaintes
déposées au parquet. Il peut donc décider de poursuivre ou
de classer l'affaire sans suite, sans une motivation obligatoire, lorsqu'il
estime qu'il n'est pas opportun de mettre en mouvement l'appareil judiciaire.
Le procureur de la République jouit d'une liberté totale en
matière d'appréciation des poursuites. Pour cette raison et du
fait que le procureur de la République ne présente pas des
garanties d'indépendance eu égard à sa subordination au
pouvoir exécutif, les victimes courent le risque de se heurter à
l'inertie et aux résistances du procureur à poursuivre. Ces
attitudes du procureur créent souvent une inégalité entre
les victimes. Pour contourner ces différents obstacles et garantir la
réparation des dommages causés aux victimes, la loi a
prévu la plainte avec constitution de partie civile. Par son biais, les
victimes saisissent directement le juge d'instruction qui sera amené
à faire des instructions. En clair, à l'instar de la citation
directe, la plainte avec constitution de partie civile est une solution contre
l'inaction du ministère public.
On peut également noter que la plainte avec
constitution de partie civile est pour la victime ce qu'est le
réquisitoire à fin d'informer80 pour le
ministère public. En ce sens qu'elle permet de saisir le juge
d'instruction aux fins d'ouvrir une information judiciaire.
De ce fait, la saisine du juge d'instruction et de son
obligation d'informer sont également une preuve de la performance de
l'instrument étudié. L'obligation d'informer du juge
d'instruction après saisine se justifie par le fait que la plainte avec
constitution de partie civile permet de mettre en mouvement l'action publique
qui n'est effective que par l'ouverture d'une information judiciaire.
Toutefois, au regard de l'art. 107 du CPP cette obligation
connait quelques limites. En effet, le juge d'instruction n'est pas
obligé d'informer si les faits ne peuvent légalement comporter
une poursuite ou s'ils n'admettent pas aucune
79 Crim, 8 décembre 1906, D 1907, I, 207
80 C'est l'acte par lequel le ministère
public requiert le juge d'instruction d'ouvrir une information, soit contre une
personne désignée, soit contre un inconnu que le juge
d'instruction aura mission d'identifier.
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qualification pénale. Il peut également refuser
d'informer si, formellement, il constate son incompétence ou
l'irrecevabilité de la plainte en raison du non-paiement de la
consignation. Dans ce cas, il rend une ordonnance de non-lieu ou de refus
d'informer. A ce stade, il convient de souligner que la plainte avec
constitution de partie civile fait l'objet d'un encadrement dans le but
d'éviter des constitutions dilatoires et
abusives81.
De tout ce qui précède, les modalités de
constitution par voie d'action permettent à la victime de mettre en
mouvement l'action publique. Après cette influence sur l'action
publique, notons-le, la partie civile n'a plus d'influence sur cette
action82 son exercice étant réservé au
ministère public83. C'est lui qui va soutenir la poursuite
s'il l'estime bien-fondée, ou bien requérir un non-lieu du juge
d'instruction ou une relaxe de la juridiction de jugement s'il estime qu'il n'y
a pas lieu de poursuivre. La partie civile ne sera donc plus en cause que pour
la défense de ses intérêts civils, tout comme dans
l'hypothèse où la constitution de partie civile s'est faite
à titre accessoire. Mais, il n'empêche que, dans tous les cas, la
partie civile se trouve reliée au procès pénal : elle y
devient partie84.
Sous un autre angle, le législateur, dans la recherche
de la protection de la victime, permet à celle-ci d'intégrer la
procédure même si l'action publique est déjà mise en
mouvement. Elle le fera par les modalités d'intégration par voie
d'intervention.
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