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La protection de la victime devant les juridictions repressives ivoirienne


par Gneneindjomain Moussa OUATTARA
Université Catholique de l'Afrique de l'Ouest (UCAO) - Master en droit privé 2023
  

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Section 1 : L'intégration partielle de la victime dans la procédure

Admettre l'intégration de la victime dans la procédure pénale, c'est le fait de la faire rentrer dans cette procédure comme partie intégrante. Cette intégration ne sera effective ou totale que si elle a pleinement la capacité de mettre en mouvement l'action publique lorsque celle-ci n'est pas déjà mise en mouvement par le ministère public. Or, à ce niveau, quelques difficultés s'imposent à la victime qui veut déclencher les poursuites.

Aussi, cette intégration ne permettra pas la participation efficace de la victime que si celle-ci, pendant la procédure, a les mêmes armes que les autres parties au procès. Malheureusement, cette égalité des armes est ineffective. Il convient donc d'analyser les obstacles à la mise en mouvement de l'action publique par la partie lésée (Paragraphe 1) et l'ineffectivité du principe de l'égalité des armes (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les obstacles à la mise en mouvement de l'action publique

par la victime

La mise en oeuvre de l'action publique par la victime se heurte à certaines difficultés. Certaines d'entre elles rendent impossible l'exercice de ce droit par la victime, elles sont d'ordre procédural, et d'autres dépendent de la situation financière de la victime. Il convient donc d'analyser les obstacles d'ordre procédural (A) et d'ordre économique (B) à la mise en mouvement de l'action publique par la victime.

A- Les obstacles d'ordre procédural

L'action de la victime se trouve irrecevable en raison de la procédure qui est à observer. La personnalité de l'auteur en cause et un choix déjà fait par la victime constituent souvent des obstacles à la mise en oeuvre de l'action, condition pour être intégré dans la procédure pénale.

En effet, il s'agit de la règle « electa una via non datur recursus ad alteram », des immunités et de certains cas spécifiques.

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Relativement à la règle « electa una via non datur recursus ad alteram », consacrée par l'art. 10 du CPP, elle signifie que « une voie choisie, on ne peut revenir à l'autre ». En effet, la victime après la commission d'une infraction a le choix libre de la juridiction devant laquelle elle entend mener son action en réparation156. De ce fait, elle peut choisir soit la voie civile soit la voie pénale : c'est le droit d'option dont bénéficie la victime.

Mais cette option n'est possible que si la voie pénale est ouverte à l'action en même temps que la voie civile, le dommage a pour fondement l'infraction et l'action publique est toujours en vigueur au moment de l'exercice de l'action civile. Une fois la voie choisie, ce choix devient irrévocable en vertu de l'art. 10 qui dispose que « la partie civile qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente ne peut la porter devant la juridiction répressive. Il n'en est autrement que si celle-ci a été saisie par le ministère public avant qu'un jugement sur le fond ait été rendu par la juridiction civile ». De ce fait, la victime qui a engagé son action devant les juridictions civiles ne peut plus revenir devant les juridictions pénales sauf si le ministère public a déclenché les poursuites et que la juridiction civile n'a pas encore rendu un jugement. Dans ce cas, la juridiction civile sursoit à statuer.157

Toutefois, si la juridiction civile saisie est incompétente, la victime doit pouvoir porter son action devant le tribunal répressif si elle le désire.

Cette règle semble protéger le prévenu. Elle évite qu'il soit trainé d'une juridiction à une autre. Elle évite également la perte des preuves et du fait générateur. En outre, la règle « electa una via... » n'étant pas d'ordre public car établie dans l'intérêt de la personne poursuivie, seule cette personne peut se prévaloir de la violation de cette règle et en plus doit la soulever au seuil du procès, le tribunal ne pourrait soulever d'office la violation de cette règle.158

Cette règle, sans doute, constitue un obstacle pour la victime. La victime peut ignorer ou se tromper du caractère infractionnel du fait, il faut lui permettre de saisir les juridictions pénales pour bénéficier des avantages procéduraux. Aussi, si elle change d'avis cela permet de saisir les juridictions pénales de l'infraction, ainsi, la société est informée du fait qui a troublé l'ordre public. Cela permet d'éviter l'impunité.

156 Articles 8 et 9 du CPP

157 C'est la consécration du principe « le pénal tient le civil en l'état ».

158 ALLA (E.), procédure pénale, ABC, éd., 2017, p.189

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A titre indicatif, l'option en faveur de la voie répressive offre de multiples avantages. Elle permet d'obtenir justice avec une plus grande rapidité que devant le juge civil. Elle offre également l'avantage de l'économie. Le choix de la voix répressive procure d'autre part une facilité de preuve incontestable. Il y'a également un avantage d'efficacité. Il faut ajouter enfin que l'option en faveur de la voie répressive permet d'éviter que l'action civile ne se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à une décision pénale sans que la victime ait pu défendre ses intérêts159. Cependant, cette option n'est pas sans conséquence. En effet, la partie civile, étant partie à l'instance, ne peut être entendue comme témoin à l'instruction ni aux débats160. Elle encourt également des sanctions pécuniaires en cas de constitutions abusives de partie civile161. Or, elle sera bien souvent le principal témoin à charge ; son absence risque alors d'affaiblir l'accusation et de conduire à un acquittement qui aurait peut-être été évité, si elle avait été entendue.

A côté de cette règle obstacle, il y a les immunités qui constituent également un obstacle au déclenchement de l'action publique.

Les immunités sont définies comme « la cause d'impunité, qui tend à la situation particulière de l'auteur d'une infraction au moment où il commet celle-ci, s'oppose définitivement à toute poursuite, alors que la situation créant ce privilège a pris fin »162. Ces immunités sont au nombre de trois : les immunités familiales, les immunités politiques et les immunités diplomatiques.

En effet, les immunités politiques concernent le Président de la République163, le médiateur de la République, et les membres de l'Assemblée Nationale164 pour les opinions émises pendant l'exercice de leur fonction.

Les immunités diplomatiques constituent la garantie de l'exercice de la fonction du diplomate165. Quant aux immunités familiales166, celles-ci protègent les liens de famille et interdisent la poursuite d'un membre pour un bien.

Reconnaitre des immunités c'est admettre des causes de limitation à l'exercice de l'action publique empêchant à la victime de la déclencher.

159 STEFANI (G.), LAVASSEUR (G.), BOULOC (B.), Procédure pénale, Dalloz, 18ème éd., 2001, p.266

160 Idem

161 V. infra P.51

162 YAO (E. Y.), l'arrêt de la cour suprême de côte d'ivoire du 10 janvier 2002 et l'exercice de l'action civile à l'occasion d'une infraction pénale : relecture de l'article 4 du CPP, op.cit./ p.213 in NIAMBE (K. R.), op.cit., p.163

163 Article 157 de la constitution du 08 novembre 2016

164 Article 91 de la constitution du 08 novembre 2016

165 Article 104 du CP

166 Article 103 du CP

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Par ailleurs, à titre indicatif, il est interdit à la victime de se constituer partie civile devant la Haute cour de justice167 et devant les juridictions militaires (le droit de mettre en mouvement l'action publique n'est reconnu à la victime par aucune disposition du code de procédure militaire, elle peut simplement déposer une plainte ou faire une dénonciation). De plus, en matière de délit de presse seul le procureur est habilité à déclencher les poursuites.

Dans ces hypothèses le procureur de la République retrouve pleinement et exclusivement son pouvoir d'appréciation des suites à donner aux plaintes déposées ou dénonciations faites au parquet. Il y'a donc le risque que la victime se heurte à l'inertie du procureur. Il serait judicieux d'écarter ce risque en permettant à la victime de saisir le juge du jugement ou le juge d'instruction lorsque le procureur refuse de poursuivre.

En plus de ces obstacles liés à la procédure, la victime doit faire face aux obstacles liés à ses ressources financières.

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