Section 1 : La dualité des modalités
d'intégration par voie d'action
La voie d'action est celle qui permet à la victime de
se constituer partie civile et de mettre en mouvement l'action
publique43. C'est la constitution de partie civile à titre
principal car elle déclenche, à elle seule, les poursuites
pénales. Elle offre un effet « moteur », c'est-à-dire
elle entraine la mise en mouvement de l'action publique44. Cette
voie d'intégration de la victime n'est possible que lorsque l'action
publique n'est pas mise en mouvement par le ministère public ou par une
autre partie s'estimant lésée. En outre, cette possibilité
offerte à la victime de mettre en mouvement l'action publique concourt
sans nul doute à la recherche de sa protection.
Par ailleurs, l'intégration de la victime par la voie
d'action peut se faire devant les juridictions de jugement par le moyen de la
citation directe (Paragraphe 1) et devant les juridictions d'instruction par le
moyen de la plainte avec constitution de partie civile (Paragraphe 2).
La victime emploiera la modalité de la plainte avec
constitution de partie civile ou la citation directe, suivant que le
procès pénal doit être ou non précédé
d'une instruction préparatoire.
Paragraphe 1 : La citation directe
La citation directe est l'acte de procédure par lequel
le ministère public ou la victime saisit directement la juridiction de
jugement en informant le prévenu des coordonnées de
l'audience45. Elle est délivrée à la
requête du procureur général, du procureur de la
République, de la partie civile et de toute Administration qui est
légalement habilitée46. La définition de cet
acte de commissaire de justice47, permet de voir son utilité
en ce sens qu'il permet à la victime de saisir directement
43 Article 6 alinéa 2 du CPP
44 SOYER (J-C), Droit pénal et
procédure pénale, Paris, L.G.D.J., 12ème éd.,
1995, p.279
45 GUINCHARD (S.), DEBARD (T.), op.cit., 2019,
p.186
46 Article 586 du CPP
47 Article 585 du CPP
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le tribunal répressif (A). Toutefois, le champ
d'application et le formalisme requis pour la mise en oeuvre de ce
procédé font qu'il est inadéquat (B).
A - Un instrument utile au regard de ses effets
L'utilité de la citation directe se perçoit
d'abord par le fait qu'elle permet à la victime de se constituer partie
civile. En effet, par cette constitution, la victime intègre la
procédure pénale puisqu'elle devient partie au procès
pénal. Ce nouveau statut lui accorde de nombreux droits
procéduraux48 dont l'exercice permet de rechercher sa
protection.
En outre, cet instrument est utile pour la victime dans la
mesure où il lui permet, en se constituant partie civile, de saisir
directement la juridiction de jugement et de mettre en mouvement l'action
publique49. C'est ce qui ressort de la lecture combinée des
articles 6 al. 2 et 586 du CPP qui consacrent respectivement la mise en
mouvement possible de l'action publique par la partie lésée et la
délivrance de la citation à la requête de la partie
civile.
Ainsi, une personne qui est victime d'un délit ou d'une
contravention peut, en se constituant partie civile, respectivement saisir le
tribunal correctionnel50 et le tribunal de simple
police51pour demander la réparation du préjudice
subi.
En effet, la saisine directe du juge favorise la protection de
la victime en raison de la rapidité qu'elle offre dans la
résolution de l'infraction commise. La victime aura donc la chance de
voir son affaire jugée dans un délai raisonnable52. En
effet, la célérité permet d'éviter la disparition
des éléments de preuve ou l'oubli de certains détails des
faits par les témoins. Autrement dit, le principe de
célérité permet l'efficacité du système
judiciaire.
De même, l'utilité de cet instrument trouve sa
fortune dans le fait que la victime d'une contravention ou d'un délit,
dans l'exercice de son action civile, n'est pas soumise obligatoirement
à la saisine du juge d'instruction ou du
48 V. infra p.28
49 Crim, 8 décembre 1906, D 1907, I, 207.
Trib. Correct. Abidjan, Section de Tiassalé, jugement n°17 du 21
janvier 1997, R.J.C.A.T., n°2-2000, p.130
50 Article 396 du CPP
51 Article 543 du CPP
52 Ce principe directeur de la procédure
pénale est prévu par l'article 5 alinéa premier qui
dispose : « Il doit être définitivement statué sur
la cause de toute personne poursuivie dans un délai raisonnable
».
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ministère public. Elle ne va donc pas se heurter au
filtrage du juge d'instruction et à son éventuelle information.
Aussi, évite-elle le pouvoir d'appréciation du procureur de la
République des suites à donner aux plaintes
déposées et aux dénonciations faites au
parquet53. Ainsi, la citation directe est un palliatif à
l'inertie du procureur de la République et au juge d'instruction
vis-à-vis d'une affaire dont ils sont saisis par la victime. En effet,
au regard de l'art. 51 al. 1 du CPP le procureur peut décider de ne pas
donner suite à la plainte.
Aussi le juge d'instruction peut rendre une ordonnance de non
informer ou de non-lieu54.
En cas de classement sans suite du procureur et en cas de
refus d'informer du juge instructeur, la victime peut, directement, porter
l'affaire en cause à la connaissance du juge de jugement pour un
éventuel jugement.
En sus, la citation directe est bénéfique pour
la victime en ce sens qu'elle permet de suspendre à son profit la
prescription de l'action publique.55
Par ailleurs, le tribunal saisi par une citation directe est
obligé de statuer sur l'action publique même si la partie civile
se désiste. En fait, le désistement de la partie civile n'a en
principe aucune influence sur l'action publique. Mais pour un certain nombre
d'infractions, le désistement de la victime partie civile par le retrait
de sa plainte emporte l'extinction de l'action publique. Il s'agit des
infractions dont la poursuite est subordonnée à la plainte de la
victime. C'est le cas par exemple du délit d'adultère
subordonné à la plainte du conjoint offensé. Cette
extinction exceptionnelle de l'action publique peut se justifier soit par le
fait que les infractions en question lèsent les intérêts de
la partie civile sans constituer des atteintes graves à l'ordre publique
; soit parce que la poursuite est de nature à troubler l'honneur de la
victime ou de sa famille.
L'analyse que voici a permis de voir l'utilité de la
citation directe à travers les effets qu'elle produit. Mais,
malgré cette utilité, cet instrument, au regard de son champ
d'application et de son formalisme, parait inadéquat.
53 Article 51 alinéa 1 du CPP
54 Article 221 du CPP
55 C'est l'article 12 du CPP qui prévoit les
délais de prescription de l'action publique en fonction de l'infraction
en cause. Selon cette disposition, en matière criminelle, l'action se
prescrit par 10 années révolues ; en matière
délictuelle, elle se prescrit par trois années révolues et
en matière contraventionnelle, elle se prescrit par une année
révolue.
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