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La police de la grève en droit administratif camerounais


par Gaetan Gildas Yamkam Fankam
Université de Yaoundé Il  - Master 2 droit public 2018
  

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Paragraphe 1 : la difficile mise en oeuvre du contrôle par le conseil constitutionnel.

La mise en oeuvre du contrôle de l'administration étatique par la juridiction constitutionnelle au Cameroun en l'occurrence le conseil constitutionnel, se heurte à un certain nombre de contraintes à la fois statutaires (A) et fonctionnelles voire procédurales. (B)

A- les contraintes statutaires dans l'activité du juge constitutionnel.

L'exercice de la fonction de juge, de surcroît constitutionnel, nécessite un ensemble de garanties à la fois personnelles et organiques387. Ce sont selon le professeur Nguélé Abada « les garanties statutaires organisant l'indépendance et la dignité dans l'exercice des fonctions au sein de la juridiction constitutionnelle. »388 Cela dit, dans ses rapports avec le pouvoir politique, le juge fait face à un certain nombre de contraintes389 qui ne rendent pas toujours évidente son office de contrepouvoir d'une part et de défenseur des libertés d'autres part.

En effet , soulignera le professeur Aba'a Oyono dans ce sens, « la fonction de protection contre les abus du pouvoir administratif n'est pas exercée dans des conditions de

387 NGUELE ABADA (M) ; « l'indépendance des juridictions constitutionnelles dans le constitutionnalisme des États francophones post guerre froide : l'exemple du conseil constitutionnel camerounais. » p.3

388 AVRIL (P) et GUIQUEL (J), Le conseil constitutionnel » cité par NGUELE ABADA (M) ; op.cit. p.3

389 DIALLO (I) ; « à la recherche d'un modèle africain de justice constitutionnelle. » in annuaire international de justice constitutionnelle 20-2004, 2005. P.105.

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sérénité institutionnelle, ce qui matériellement en mine l'essence. »390 Ce postulat démontre notamment la fragilité du juge constitutionnel à plusieurs égards.

En première analyse, l'article 51(2) de la constitution camerounaise de 1996 dispose « (...) les membres du conseil constitutionnel sont nommés par le président de la république. » et désignés par lui-même et quelques autorités de la république.391 Si d'emblée selon le professeur Jean-Louis Atangana Amougou, un effort est perceptible relativement la démocratisation dans la désignation des conseillers392, il n'en reste pas moins vrai que la pratique institutionnelle met clairement en relief une image de « transactions douteuses de nature à subodorer une certaine collaboration de fait393» au profit de l'exécutif. Ce qui induit naturellement une forte implication, une prégnance du chef de l'État dans la désignation et dans la nomination des conseillers.

Quoi qu'il en soit, ou plus exactement quels que soient les modalités de désignation ou de nomination des membres du conseil constitutionnel, cela ne saurait justifier la passivité des juges dans le contrôle de l'État. D'ailleurs R. Badinter ne préconisait-il pas un devoir « d'ingratitude » des juges du conseil à l'égard des autorités les ayant nommés ? C'est donc à dire que la véritable contrainte qui entrave la fonction des juges constitutionnelles c'est davantage l'influence des pouvoirs politique sur la durée du mandat des juges constitutionnels que les modalités de leur désignation.

En effet, le constituant camerounais lors de la création du conseil constitutionnel avait comme son homologue français fixé le mandat des juges constitutionnel à neuf ans non renouvelable.394 Mais les modifications du texte observées à la faveur de l'adoption de la loi n°2008/001 du 14 avril 2008395, ont fortement fragilisé le statut du juge constitutionnel au Cameroun. Le mandat des juges constitutionnels est passé de neuf ans non renouvelable à « six ans éventuellement renouvelable. »396 Au-delà de la durée du mandat, qui elle-même n'est pas une curiosité en Afrique,397 la disposition en question pose un véritable problème du

390 ABA'A OYONO (J-C) ; « les fondements constitutionnels du droit administratif (...) » op.cit. P.18

391 Il s'agit du président de l'assemblée nationale qui désigne trois membres sur les onze ; du président du sénat qui en désigne trois et du conseil supérieur de la magistrature qui lui désigne deux membres.

392 ATANGANA AMOUGOU (J.-L) « la constitutionnalisation du droit en Afrique : l'exemple de la création du conseil constitutionnel camerounais. » in Annuaire international de de justice constitutionnelle, 19-2003, 2004. P.52

393 Idem.

394 Article 56 de la constitution française du 04 octobre 1958.

395 Ce texte de loi sera d'ailleurs une des raisons des protestations sociales observées dans la même année dans plusieurs régions du pays.

396 Article 52(1) de la constitution camerounaise de 1996 modifiée en 2008.

397 La durée du mandat des conseillers est de six ans au Sénégal, en Côte d'ivoire ; de cinq ans au Bénin, au Gabon.

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point de vue de l'État de droit, en ce qu'elle renforce une fois de plus les possibilités de

pression du pouvoir politique sur les juges à travers le caractère
« éventuellement »398renouvelable si ce n'est révocable399 du mandat des conseillers.400 Dans ces conditions, le juge ne peut qu'être prudent car il se sait vulnérable.401

Dans ce contexte juridico-politique incertain où l'indépendance des juges ne tient qu'au bout d'un fil, comment véritablement assurer la protection des libertés face à un pouvoir exerçant une mainmise dans le fonctionnement des institutions de la république402? Cette réflexion conduit inexorablement à se pencher sur la question des contraintes procédurales mettant à mal la protection des libertés publiques par le juge constitutionnel.

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