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La police de la grève en droit administratif camerounais


par Gaetan Gildas Yamkam Fankam
Université de Yaoundé Il  - Master 2 droit public 2018
  

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B- L'extension de la compétence des tribunaux militaires dans la répression des civils.

Il est un certain nombre de garanties reconnues aux justiciables dans la protection de ses droits devant les juridictions. Au rang de celles-ci, figure le droit à un procès équitable. En effet, considéré comme un élément central et essentiel de l'État de droit,369 le droit à un procès équitable a été consacré au plan international dans la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948370, dans le pacte international relatif aux droits de l'homme de 1966, entré en vigueur en 1976371 ; et au niveau régional dans la charte africaine des droits de l'homme et

364 MESSING (J.L), la problématique de du maintien de l'ordre dans les États d'Afrique noire francophone : le cas du Cameroun. p.165.

365 JOBARD (F), « peurs entretenues ; quand la police fait l'armée, l'armée fait la police. » 2005/1 n° » p.60.

366 EMINI (Z) « la police au Cameroun : de l'autoritarisme à la gouvernance sécuritaire » in revue de droit et de science politique 16e année de parution 2005, n° 63 P.64

367 JOBARD (F), « peurs entretenues ; quand la police fait l'armée, l'armée fait la police. » op.cit. p.60.

368 ATEBA EYONG (R) « l'évolution du fondement idéologique du droit administratif camerounais » op.cit. p. 275.

369 Lire NGUELE ABADA (M). « la réception des règles du procès équitable dans le contentieux du droit public » in revue de droit et de science politique 16e année de parution 2005, n° 63 p.19 ; lire également NGONO (S), « l'application des règles internationales du procès équitable du juge judiciaire » de la même parution p.34

370 Article 10 et 11.

371 Article 14.

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des peuples372. Le Cameroun à son tour a ratifié ces conventions qu'il a d'ailleurs réaffirmées dans le texte constitutionnel de 1996.373

Cela dit, la réalisation voire la concrétisation du droit à un procès équitable se traduit nécessairement par l'exigence d'une juridiction indépendante et impartiale. Si ces deux exigences se confondent en pratique et semblent redondantes374, la réalité est qu'elles se distinguent intrinsèquement et même substantiellement. En effet, la première exigence, notamment celle relative à l'indépendance, constitue une précondition de la seconde c'est à dire de l'impartialité. Ainsi un juge doit être libre de toute influence extérieure susceptible de vicier son jugement. Par ailleurs, soulignera le professeur Nguélé Abada un juge indépendant et a fortiori impartial est un juge sans préjugés.375

De telles conditions ne s'intègrent pas toujours dans l'ordre juridique camerounais, lorsque l'on observe la répression de certaines libertés publiques devant la juridiction militaire. En effet, instituée pour connaitre des infractions purement militaires, les juridictions militaires se caractérisent par un régime juridique spécial376 et fortement coercitif. À l'analyse de la loi n°2008/015 du 29 décembre 2008 portant organisation et fixant des règles de procédure applicable devant les tribunaux militaires, il en ressort que les juridictions militaires n'ont en principe pas à juger des civils exceptés dans des cas particuliers prévus par la loi.377

Seulement, très souvent, les questions de sureté nationale et d'intégrité territoriale servent de prétexte justifiant l'extension de la compétence des tribunaux militaires au-delà des infractions militaires, prenant au passage de fortes propensions politiques. Ainsi, des notions telles que l'insurrection, la rébellion ou le terrorisme entre autres ; aux contenues vagues et imprécis concourent à élargir le champ d'action des juridictions militaires sur les civils et par voie de conséquence à renforcer de manière significative la répression des libertés publiques au Cameroun.

372 Article 7 et 26.

373 Article 37.

374 NGUELE ABADA (M) « la réception des règles du procès équitable dans le contentieux du droit public » op.cit. p.23

375 Idem. P.23.

376 L'article 2 de loi de 2008 portant organisation et fixant des règles de procédure applicable devant les tribunaux militaires, dispose justement que « les tribunaux militaires sont des juridictions à compétence spéciale. » 377Article 8 de la loi de 2008 susmentionnée.

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C'est fort de cela que la reconnaissance de la compétence des tribunaux militaires pose un véritable problème du point de vue des garanties liées au procès équitable et davantage relativement à la construction d'un État de droit.

D'emblée, les juges militaires se caractérisent par leur soumission au pouvoir central représenté à l'occasion par le ministre délégué à la présidence en charge de la défense, dont dépend leur carrière. Au vu de cela, que retenir des « juges militaires » ? Sont-ce des juges ou alors des militaires ?378 Cette interrogation aux allures d'oxymore relève d'autant plus de la bizarrerie juridique dans la mesure où, « l'essence du juge est son indépendance alors que (celle) du militaire est l'obéissance c'est-à-dire le contraire »379. Par ailleurs, lorsque l'on observe la composition ou la formation de l'instance décisionnelle telle que décrite dans l'article 6 de la loi de 2008 en question, celle-ci soulève de sérieux doutes au regard de la connotation martiale et par conséquent partiale des juges militaires face au justiciable qui d'emblée est considéré comme un ennemi. Assiste-t-on alors à ce que M. Fabrice Bikié qualifie de « droit pénal de l'ennemi par opposition à un droit pénal du citoyen. »380 Comment donc dans un tel contexte garantir les libertés publiques contre les abus de l'administration étatique ? Cette question pose inexorablement le problème du contrôle des autorités administratives investies du pouvoir de police.

378 GARRETON (R), « La compétence des Tribunaux Militaires et d'Exception ; rapport de synthèse » in juridictions militaires et tribunaux d'exception en mutation : perspectives comparées et internationale ; UMR de droit comparé de Paris, Mai 2007. P.15

379 Idem.

380 BIKIE (F.R) ; « le droit pénal à l'aune du paradigme de l'ennemi » ; op.cit. P.

CHAPITRE II: L'INCONSISTANCE DU CONTROLE RELATIF AUX POUVOIRS

DES AUTORITES DE POLICE ADMINISTRATIVE.

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Poser la liberté n'est rien s'il s'agit seulement d'une affirmation verbale.381 Ce qui importe c'est de lui faire sa place dans un ordre social viable.382 Une telle initiative met nécessairement en jeu les mécanismes de protection, d'effectivité voire de contrôle des libertés dans un ordre juridique bien déterminé.

En effet, le contrôle s'appréhende ici au sens de OST F. comme « le droit ou le pouvoir dont dispose une personne ou une institution, à effet de s'assurer du respect d'un ensemble de règles »383 ou d'objectifs384. L'objectif visé ici est donc la garantie des libertés publiques contre les dérives d'un pouvoir autoritaire.

La réalité étant celle de l'existence en Afrique et partant au Cameroun d'un exécutif fort,385 et d'une administration véritablement puissante. Cet état des choses ne rend pas évidente l'émergence des contres pouvoirs chargés d'assurer la garantie des libertés face aux abus de l'administration étatique.

Ainsi, si dans une démocratie effective, le pouvoir est censé contrôler voire arrêter le pouvoir, force est de relever que le contrôle de l'exécutif se présente comme une tache hargneuse, dont l'effectivité reste encore purement fictive386. C'est donc à dire en clair que la garanties des libertés publiques face à l'arbitraire administratif se caractérise généralement par L'insatisfaction relative au contrôle juridictionnel (Section I); et par l'inconsistance du contrôle non juridictionnel. (Section II)

381 G. BURDEAU, Les libertés publiques, op.cit., p. 23.

382 Idem.

383 OST (F.), « Juge pacificateur, juge arbitre, juge entraîneur : trois modèles de justice », in fonction de juger et pouvoir judiciaire, Publications des facultés universitaires de Saint-Louis, 1983, p. 1et s

384 KHADIM (T), Le contrôle de l'exécutif dans la création de l'État de droit en Afrique francophone. Droit. Université de Bordeaux, 2018. Français. P.19.

385 AIVO (F.J), Le Président de la République en Afrique noire francophone, genèse, mutation et avenir de la fonction, Paris, l'Harmattan, 2006

386 KHADIM (T), Le contrôle de l'exécutif dans la création de l'État de droit en Afrique francophone op.cit., p.21.

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SECTION I : L'INSATISFACTION RELATIVE AU CONTRÔLE JURIDICTIONNEL DES AUTORITES DE POLICE ADMINISTRATIVES.

La garantie juridictionnelle des libertés publiques contre l'exécutif présente un certain nombre de lacunes imputables à l'organisation de la justice au Cameroun, qui rendent insatisfaisante voire insignifiante la mission de contre-pouvoir institutionnalisé qui incombes aux organes juridictionnels. Un tel état des choses se concrétise d'une part, par la difficile mise en oeuvre du contrôle par le conseil constitutionnel (P1) ; et d'autre part, par l'insuffisance du contrôle par les juridictions ordinaires. (P2)

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius