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La police de la grève en droit administratif camerounais


par Gaetan Gildas Yamkam Fankam
Université de Yaoundé Il  - Master 2 droit public 2018
  

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Paragraphe 2 : l'extension des pouvoirs de police au-delà des prescriptions légales.

La préoccupation première de la police administrative face aux libertés est selon G. Burdeau326 de s'assurer de l'exercice ou de l'usage desdites libertés sans que celles-ci ne compromettent l'ordre public. En droit camerounais de telles considérations n'entrent pas forcément dans la logique des autorités de police administrative. En effet, s'il est des règles qui régissent l'exercice des libertés publiques au Cameroun, force est de s'apercevoir dans la pratique une attitude récalcitrante de certaines autorités de police qui, passant outre le cadre

323 Idem p.456

324 C'est justement l'une des illustrations de la résurgence de l'idéologie de la construction nationale démontrée par BEYEGUE BOULOUMEGUE M. dans l'article intitulé « la persistance de l'idéologie de construction de l'unité nationale en matière de police administrative. »

325 BEYEGUE BOULOUMEGUE M. parle à cet effet d'une hypertrophie des instruments de puissance publique dans l'armature institutionnelle chargée d'assurer le maintien de l'ordre. Lire à ce propos « la persistance de l'idéologie de construction de l'unité nationale en matière de police administrative. » in ONDOA (M) et ABANE ENGOLO (P) ; de du droit administratif camerounais. Yaoundé, l'Harmattan CERCAF.

326 BURDEAU (G), Les libertés publiques op.cit. p.30

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réglementaire persistent à limiter l'exercice desdites libertés. C'est ainsi que l'on observe chez les pouvoirs publics une tendance générale qui se caractérise par l'instauration de facto d'un régime de police (A) et la rupture d'égalité dans l'activité de police administrative(B).

A- L'instauration de facto d'un régime de police.

Comme le relevait Georges Burdeau, « en face des libertés publiques, l'État peut adopter deux attitudes : la répression ou la prévention. »327 C'est donc à dire en d'autres termes qu'il existe en principe deux régimes relatifs à la règlementation des libertés publiques. Il s'agit du régime répressif d'une part que l'on assimile généralement au régime de droit ; et d'autre part du régime préventif très souvent qualifié de régime de police.

En effet, il y'a régime répressif lorsque « l'État laisse le citoyen libre d'agir selon sa propre détermination quitte à l'obliger à subir les conséquences de ses actes s'ils sont contraires au droit. »328 dans cette hypothèse, précisera G. Burdeau, « l'individu aura été libre d'agir, mais l'usage maladroit ou malfaisant qu'il aura fait de sa liberté l'exposera à des sanctions et à l'obligation de réparer le dommage qu'il aura causé. »329

Par ailleurs, il y'a régime préventif lorsque l'autorité vise à empêcher préventivement les abus dans l'exercice des libertés publiques. C'est un régime qui organise l'exercice des libertés autour de deux modalités, à savoir l'autorisation et l'interdiction330. Cela dit, ce régime est par nature contraire à l'idée même de liberté, puisqu'on est libre seulement si on est autorisé à l'être.331 Autrement dit, cela signifie que les libertés ne s'exercent en principe qu'après la permission de l'autorité, de manière à déconsidérer l'axiome selon lequel « ce qui n'est interdit est permis. » il va de soi que des deux régimes sus présentés c'est le premier qui est le plus favorable à la jouissance des libertés publiques ; dans la mesure où il « laisse libre champs » à l'individu dans l'exercice de ses libertés en engageant pleinement sa responsabilité. C'est donc selon qu'il s'agit de l'un ou de l'autre régime que les manifestations publiques sont organisées autour des modalités que sont la déclaration préalable et l'autorisation.

Dans l'ordre juridique camerounais, du moins au plan textuel depuis les réformes des années 1990, c'est le régime répressif qui est observé dans l'exercice des libertés. Seulement,

327Ibid. p.45.

328 Idem. P.30

329 Ibid.

330 METOU (B-M) ; « vingt ans de contentieux des libertés publiques au Cameroun »,op cit. p.272

331 ALCARAZ (H) ; « La liberté de manifestation dans l'espace public en Espagne »op.cit. p.10

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à bien observer, il se trouve que dans la pratique, il est un usage dévoyé des pouvoirs de police administrative au Cameroun à tel point que l'exercice des libertés à l'instar des manifestations est presque toujours subordonnée à l'intervention permissive des autorités publiques. Cela dit, si la déclaration est dans son principe un avis, une simple communication préalable à l'autorité administrative compétente de l'intention de manifester332, elle s'avère être en pratique assimilée à une « demande d'autorisation ». Il se crée alors un véritable amalgame relatif à l'exercice des libertés. Certaines autorités se prêtent au jeu lorsqu'elles utilisent souvent et ce à contresens des formules tels que « manifestations non autorisées » ou « sans autorisation ». Cette confusion volontaire pour certains333 ou involontaire pour d'autres334 rend davantage complexe l'exercice des libertés publiques au Cameroun. L'on est bien forcé de convenir avec Jean Rivero et Hugues Moutouh lorsqu'ils soulignent que « si le régime répressif est en général considéré comme le plus favorable aux libertés, les modalités selon lesquels il est susceptible d'être aménagé peuvent faire varier ou même faire disparaitre sa valeur libérale. »335 Ce constat se veut plus frappant lorsque l'activité de police administrative devient partisane.

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