Paragraphe 2 : la répression des rassemblements
illicites.
La répression des rassemblements illicites au Cameroun
se caractérise par un éventail de sanctions diverses visant
à réprimer l'organisation illicites des manifestations publiques.
(A) Dans cette logique sanctionnatrice, le législateur offre aux
autorités la possibilité d'étendre la répression
des rassemblements illicites à des infractions relativement graves et
dont le régime se veut davantage coercitif. (B)
273 Les peines encourues sont de 10 à 20 ans
d'emprisonnement. Article 116 de la loi n°2016/007, op.cit.
274 Article 116 de la loi n°2016/007 op.cit.
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A- les sanctions relatives à l'exercice
illégal des manifestations publiques.
La liberté de manifester en droit public camerounais
représente au sens du professeur Brusil Metou, «
une liberté strictement encadrée et contrôlée
».275 Cet encadrement se révèle d'autant plus
rigoureux au regard des sanctions relatives à l'inobservation des
obligations légales qui conditionnent le déroulement des
manifestations publiques. À cet effet, de manière
générale dans l'ordre juridique camerounais, les textes
organisant les libertés publiques comportent dans certains cas et ce
systématiquement,276 des dispositions réservées
aux sanctions ou à la répression des infractions commises en
violation desdits textes. Dans d'autres cas, « lorsqu'ils n'organisent pas
eux-mêmes leur système de répression, ils
établissent une cloison avec le code pénal.
»277C'est ainsi qu'en matière de répression des
manifestations spontanées, c'est-à-dire organisées sans le
dépôt préalable d'une déclaration ou alors en
dépit d'une notification expresse d'interdiction ; le législateur
prévoit notamment dans la loi n°90/055 du 19 décembre 1990,
un chapitre intitulé « des dispositions pénales et diverses
». En effet, ce chapitre traite de la sanction des manifestations
organisées illicitement en reprenant presque littéralement les
dispositions du code pénal.278
D'entrée de jeux l'article 9 de la loi régissant
les réunions et manifestations publiques reprendra à son compte
l'article 281 alinéa 1 du code pénal qui dispose : « est
puni d'un emprisonnement de quinze (15) jours à six (6) mois et d'une
amende de cinq mille (5000) à cent mille (100.000) celui qui :
a) participe à l'organisation d`une réunion
publique qui n'a pas été préalablement
déclarée ;
b) fait une déclaration de nature à tromper les
autorités publiques sur les conditions ou l'objet de la réunion
;
c) avant le dépôt de la déclaration
préalable ou après interdiction légale d'une
manifestation, adresse par quelques moyens que ce soit, une convocation
à y prendre part ;
d) fait une déclaration incomplète ou inexacte
de nature à tromper sur les conditions de la manifestation
projetée. »
En substance au terme de la lecture de cette disposition, il
en ressort que l'État camerounais par l'entremise du législateur,
entend véritablement condamner non seulement les
275 BRUSIL METOU « vingt années de contentieux des
libertés publiques au Cameroun. » ; op.cit. P.275
276 Ibid.
277 Ibid.
278 Article 231 de la loi n°2016/007 portant code
pénal, op.cit.
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irrégularités dans l'effectuation de la
déclaration en amont ; mais également, la participation à
des manifestations non déclarées ou formellement interdites en
avale. Toujours dans ce sens, l'alinéa 2279 du même
article dispose que les organisateurs des manifestations non
déclarées ou interdites sont passibles des mêmes peines
susmentionnées dans l'alinéa 1.
L'article 231-1 du code pénal va plus loin encore dans
la répression en sanctionnant les manifestations à
caractère politique exercées dans l'enceinte des
établissements publiques ainsi que dans les milieux éducatifs
à l'instar des établissements scolaires et universitaires. C'est
donc à dire en fin de compte que le régime des manifestations
publiques au Cameroun est in extenso rigoureux. Cela dit, s'il n'est plus
possible de douter plus d'un siècle après
Clémenceau de l'existence de la réalité
d'un droit de manifester, l'on pourrait cependant s'interroger au Cameroun en
ce qui concerne la « tolérance de manifestation »
;280 surtout lorsqu'il s'agit des manifestations à
caractère revendicatifs ou contestataires,281 face auxquelles
les autorités n'hésitent pas à étendre la
propension répressive de la législation camerounaise
vis-à-vis des libertés publiques.
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