B- La répression des atteintes au fonctionnement du
service public.
Le service publique peut être appréhendé
tant au sens matériel qu'au sens formel. Dans son sens matériel,
il désigne toute activité destinée à satisfaire
à un besoin d'intérêt général.266
Au sens formel le terme renvoie à un l'ensemble organisé de
moyens matériels et humains mis en oeuvre par l'État ou une
collectivité publique en vue de l'exécution de ses
tâches.267 Outre mesure, les services Publics dont il est
question ici sont généralement considérés par la
doctrine comme la base de l'État et sa raison
d'être268. Vu de la sorte, l'exercice des libertés
publiques ne devrait en aucune façon nuire au fonctionnement des
services publics. Cela dit, la protection du service public implique
également la préservation des moyens dont il dispose dans la
réalisation de ses missions.269
C'est sur la base de telles considérations que
s'expliquerait alors la tendance de la police administrative à favoriser
la prééminence de la continuité des services publics par
rapport aux libertés publiques ; et le fort déploiement des
forces de police lors des mouvements de grève, non pas pour la
sécurité des personnes, mais davantage pour la sauvegarde du
service public contre les atteintes susceptibles de le
compromettre.270 Cette réalité correspond alors
à l'axiome selon lequel « le service public justifie toute
extension de l'État et toute restriction des libertés
».271
En droit camerounais, du moins au plan textuel, cette
protection du service public contre toute atteinte est mise en oeuvre dans le
code pénal qui incrimine les troubles dans le service272 et
prévoit à cet effet une peine d'emprisonnement de six jours
à un mois ou d'une amende de
266 Lexique des termes juridiques, 25e éd.,
Dalloz, Paris, 2017-2018.
267 Idem
268 KERKATLY (Y) ; Le juge administratif et les
libertés publiques en droits libanais et français. Thèse
pour obtenir le grade de docteur de l'université de Grenoble. 5 novembre
2013. P.281
269 Il s'agit notamment des infrastructures et ouvrages publics
qui sont souvent en proie à des actes de dégradation lors des
mouvements de grève
270 KERKATLY (Y) ; idem. p.280
271 DELVOLVE (P), « Service public et libertés
publiques », RFDA1985, cité par BOYER-CAPELLE (C), le service
public et la garantie des libertés ; thèse en vue de l'obtention
du grade de docteur à l'université de Limoges ; P.11.
272 Article 185 de la loi n°2016/007 portant code
pénal
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mille à cinquante mille francs pour celui qui trouble
le fonctionnement d'un service auquel il est étranger.
Également, dans la même perspective, le
législateur prévoit que les actes de dégradation de
destruction ou de vandalisme, notamment qui pourraient survenir lors des
manifestations constituent des infractions réprimées dans
l'article 187 du code pénal qui dispose : « est puni d'un
emprisonnement de un(01) mois à deux (02) ans et d'une peine d'amende de
vingt mille (120 000) francs celui qui détruit ou dégrade soit un
monument, statue ou autre bien destiné à l'utilité public
ou à la décoration publique et élevé par
l'autorité publique ou avec son autorisation soit un immeuble, objet
mobilier, monument naturel, ou site inscrit ou classé. » tout bien
considéré, il ressort à la lecture de cette disposition
que le législateur se pose ici en défenseur des
intérêts de l'État et en protecteur du bien public.
Une telle attitude du législateur se conforte davantage
au regard de l'article 116(a) du code pénal qui démontre une fois
de trop la posture sanctionnatrice du législateur vis-à-vis des
libertés. En effet aux termes de cette disposition, l'on relève
que les peines encourues en matière de destruction ou de
dégradation peuvent être aggravées273 lorsque
les infractions en question sont considérées comme relevant de
l'insurrection274.
Il parait donc clair que l'exercice des manifestations,
mêmes celles organisées licitement, doivent se dérouler
dans un cadre restreint, minimal qui ne soit pas de nature à porter
atteinte à l'ordre, encore moins au fonctionnement du service public.
C'est donc à retenir en fin de compte que la règlementation au
Cameroun en matière de rassemblements publics du moins ceux
organisés licitement ; est véritablement stricte et fortement
restrictive. Que dire alors des manifestations illicites ? C'est-à-dire
organisées dans l'irrespect de la règlementation en vigueur.
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