Le cadre juridique de la lutte contre le terrorisme en Afrique de l'Ouest( Télécharger le fichier original )par Akpélé Aimé Timalelo KOUASSI Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr - Master 2 Droit international public 2017 |
II- la répression dans l'initiative anti-terroriste onusienneSelon le dictionnaire Larousse « réprimer » s'entend du fait d'exercer des contraintes afin d'empêcher le développement d'une situation jugée dangereuse. En effet, face à la barbarie du terrorisme islamiste, les mesures les plus draconiennes se sont érigées en tant que modèle pour contrer ce phénomène qui répand le désordre aussi bien sur les superficies dévolues à la compétence exclusive des pays qu»au-delà des frontières comme dans les zones maritimes internationales. La répression dans ce cadre consiste à l'édiction de textes qui vont interdire, incriminer et prévoir les sanctions pour toute contribution pouvant constituer un frein à la préservation ou au rétablissement de la « paix et la sécurité internationales »38 . On s'élève au-delà de la voie de la prévention, de la sensibilisation même si nous évoquerons ici certains textes ici qui rassemblent ce double aspect prévention-répression. 1-Instrument relatif aux attentats terroristes à l'explosif La Convention internationale pour la répression des attentats à l'explosif de 199739 Bien que conclue le 15 décembre 1997 à New York, il a fallu pourtant attendre 2001 pour voir son entrée en vigueur. Commet une infraction, au sens de la Convention en son article 2, « quiconque illicitement et intentionnellement livre, pose, ou fait exploser ou détonner un engin explosif ou autre engin meurtrier dans ou contre un lieu public, une installation gouvernementale ou une autre installation publique, un système de transport public ou une infrastructure, dans l'intention de provoquer la mort ou des dommages corporels graves, ou des destructions massives entraînant ou risquant d'entraîner des pertes économiques considérables. Commet également une infraction au sens de la Convention quiconque tente de commettre une des infractions ci-dessus ou se rend complice d'une telle infraction, ou en organise la commission ou donne l'ordre à d'autres personnes de la commettre ou contribue de toute autre manière à sa commission par un groupe de personnes agissant de concert ». 38 Comme le stipule la charte des Nations Unies 39 Pour lire le texte en entier : < https://treaties.un.org/doc/db/Terrorism/french-18-9.pdf > 38 Les États parties à la Convention sont pleinement compétentes pour connaître des infractions mentionnées dans le texte. Ainsi, ces États doivent « extrader ou traduire en justice les personnes accusées d'avoir commis ou aidé à commettre ces infractions et accorder l'entraide judiciaire dans toute procédure pénale engagée dans le cadre de la Convention. Les infractions prévues dans celle-ci sont considérées comme cas d'extradition entre Parties en vertu des traités d'extradition en vigueur et en vertu de la Convention elle-même. » 2-Instrument concernant le terrorisme nucléaire La Convention internationale de 2005 pour la répression des actes de terrorisme nucléaire40 Elle a été ouverte à la signature le 14 septembre 2014. Elle vient compléter un ordonnancement juridique appelant à une coopération internationale. D'une manière générale, la Convention indique d'une manière précise dans son article 6 : lorsqu'un État légifère pour incorporer ces dispositions, en particulier lorsque les actes terroristes ont pour intention ou sont calculés pour semer la terreur dans le public ou dans un groupe de personnes ou chez les particuliers, ils ne peuvent en aucune circonstance être justifiée par des considérations de nature politique, philosophique, idéologique, raciale, ethnique, religieuses ou de tout autre nature et doivent être puni par des peines qui soient en cohérence avec la gravité de la nature de ces actes41. 3-Instruments relatifs à l'aviation civile La Convention de 1963 relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bord des aéronefs42 Signée à Tokyo le 14 septembre 1963, la Convention a pour visée d'assurer la sûreté au sein des aéronefs. Les images des déviations d'avions sur les tours jumelles en 2001 aux États-Unis sommeillent encore en nous. Ce texte avait donc anticipé ce cas de figure. L'article premier de la Convention détermine son champ d'application comme suit « 1. La présente Convention s'applique : « a) aux infractions aux lois pénales ; 40 Lire :< https://treaties.un.org/doc/db/Terrorism/french-18-9.pdf > 41 Ibid. 42 Consulter le texte en entier : < https://treaties.un.org/doc/db/terrorism/conv1-french.pdf > 39 b) aux actes qui, constituant ou non des infractions, peuvent compromettre ou compromettent la sécurité de l'aéronef ou de personnes ou de biens à bord, ou compromettent le bon ordre et la discipline à bord.
La Convention de 1970 pour la répression de la capture illicite d'aéronefs43 Elle a été signée le 16 décembre 1970. Commet une infraction au sens de ce texte « toute personne qui, à bord d'un aéronef en vol, illicitement et par violence ou menace de violence s'empare de cet aéronef ou en exerce le contrôle ou tente de commettre l'un de ces actes, ou est le complice d'une personne qui commet ou tente de commettre l'un de ces actes. »44 Son but à l'instar de la plupart des normes en matière d'aviation civile est de garantir la sécurité à bord des aéronefs. La Convention de 1971 pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile45 Ce document a été conclu à Montréal le 23 septembre 19 septembre 1971. Dès le premier article de ladite Convention, l'on retrouve l'infraction qui relève de la compétence de cette Convention. Elle prévoit également plusieurs nouvelles infractions pénales internationales. D'ailleurs, c'est ce texte qui fait entrer dans la qualification juridique la nouvelle définition d'aéronef « en service ». 43 Pour une lecture exhaustive : https://treaties.un.org/doc/db/Terrorism/Conv2-french.pdf 44 Article 1 de la Convention de 1970 pour la répression de la capture illicite d'aéronefs 45 Voir ladite Convention : https://treaties.un.org/doc/db/Terrorism/Conv3-french.pdf 40 L'entrée en vigueur de ce texte en janvier 1973 ainsi que le fait qu'il soit appliqué par la quasi-totalité des États prouvent que la communauté internationale était bien consciente du fait que l'augmentation de la fréquence et de la violence des incidents menaçaient gravement les voyageurs aériens. Les instances gouvernementales des différents pays revendiquaient même une base d'incrimination plus large. Le Protocole de 1988 pour la répression des actes illicites de violence dans les aéroports servant à l'aviation civile internationale, complémentaire à la Convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation46 Ce traité vient élargir la mise en oeuvre des dispositions de la Convention de Montréal aux actes de terrorisme occasionnés dans les aéroports servant à l'aviation civile internationale. Il s'agit d'un texte « complémentaire » à ladite Convention. Il y a ajouté une disposition faisant obligation d'incriminer les attaques violentes perpétrées contre des personnes se trouvant dans un aéroport servant à l'aviation civile internationale ou à l'encontre d'installations aéroportuaires, de leurs services ou d'aéronefs en stationnement. La Convention de 2010 sur la répression des actes illicites dirigé contre l'aviation civile internationale47 Il nous est apparu important, vu son objet, de mentionner cette Convention même si elle n'est pas encore entrée en vigueur. Elle a été réalisée à Beijing (Pékin en français) le 10 septembre 2010. Contrairement à la Convention de Montréal qui utilise dans son intitulé, le terme « dirigés contre la sécurité internationale », cette Convention utilise plutôt la formulation « dirigés contre l'aviation civile » sans doute pour accroitre son champ d'application. Lorsque ce texte aussi dénommé « Convention de Beijing » entrera en vigueur entre ses États parties, ses dispositions remplaceront aussi bien la Convention de Montréal de 1971 que le Protocole de 1988 relatif aux aéroports. Pour les États qui n'auront pas adopté la Convention de Beijing mais qui sont parties à la fois à la Convention de Montréal et à son Protocole relatif aux aéroports, la Convention de Montréal telle que modifiée par le Protocole relatif aux aéroports continuera de produire ses effets. Pour les États qui ne sont parties qu'à la Convention de Montréal, 46Voir le texte en entier : http://www.icao.int/secretariat/legal/List%20of%20Parties/VIA_FR.pdf 47Pour savoir plus : < https://www.unodc.org/tldb/fr/2010_convention_civil_aviation.html> 41 et pas à son Protocole relatif aux aéroports, seule la Convention de Montréal continuera de s'appliquer, et ce tant qu'ils n'auront pas adopté la Convention de Beijing48. -Le Protocole additionnel de 2010 à la Convention pour la répression de la capture illicite d'aéronefs49 Comme la Convention précédente, il est lui aussi pas encore en vigueur. Ce protocole est complémentaire à la Convention pour la répression de la capture illicite d'aéronefs dans la mesure où il étend son application à différentes formes de capture illicite d'aéronefs, notamment avec les moyens technologiques modernes En effet., l'idée maîtresse adoptée dans le Protocole de Beijing est différente de la manière dont le Protocole de 1988 relatif aux aéroports a amendé la Convention de Montréal. Le Protocole de 198850 aux aéroports vient compléter la Convention de Montréal non seulement sur le plan des effets juridiques mais aussi sur celui du contenu linguistique. Si le Protocole de 1988 a introduit une nouvelle infraction et a apporté des changements à la Convention de Montréal, il n'a pas représenté une réécriture d'ensemble de l'accord précédemment établi. Par contre, ce Protocole remplace complètement le libellé de la Convention de La Haye de 1970. Ses articles non seulement ajoutent des dispositions mais remplacent également complètement les articles 1, 2, 3, 4, 5 et 8, de même que des paragraphes et termes d'autres articles51. Aussi, un État partie au Protocole de Beijing de 2010 est ipso facto obligatoirement lié à la Convention de La Haye de 1970. -Protocole de 2014 portant amendement de la Convention relative aux infractions et à certains autres actes survenant à bord des aéronefs52 Si l'on considère que la Convention de Tokyo de 1963 est parvenue à régir les infractions générales survenant à bord des aéronefs, il est cependant apparu impérieux que des modifications devaient y être apportées pour être en phase avec les réalités actuelles du secteur de l'aviation civile 48ONUDC, Programme de formation juridique contre le terrorisme, MODULE 5 Infractions terroristes dans le domaine des transports (aviation civile et navigation maritime ),2015.Disponible à l'adresse :< https://www.unodc.org/documents/terrorism/Publications/Module_on_Transport/Module_5_Transport_offe nces_F.pdf > 49Voir :< https://www.unodc.org/tldb/fr/2010_protocol_convention_unlawful_seizure_aircraft.html > 50 Pour en savoir plus : Protocole de 1988 pour la répression des actes illicites de violence dans les aéroports servant à l'aviation civile internationale, complémentaire à la Convention pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation 51ONUDC,Programme...,op.cit.,< https://www.unodc.org/documents/terrorism/Publications/Module_on_Transport/Mod ule_5_Transport_offences_F.pdf > 52Le texte intégral :< http://www.icao.int/secretariat/legal/list%20of%20parties/montreal_prot_2014_fr.pdf > 42 Ainsi, ce Protocole amende la Convention de Tokyo de 1963 en la modernisant, notamment en instaurant des chefs de compétence pénale supplémentaires et en accordant expressément une reconnaissance juridique et certaines protections aux agents de sûreté en vol53. 4-Instruments relatifs à la navigation maritime S'il est vrai que les médias ne parlent la plupart du temps que des attaques terroristes à bord des aéronefs ou dans les aéroports, l'on a aperçu que la route maritime était aussi parsemée de menées terroristes, en l'occurrence le golfe de guinée en ce qui concerne notre analyse sur l'Afrique de l'Ouest. On peut évoquer, par exemple, le détournement d'un pétrolier appartenant à une société française au large des eaux ivoiriennes en février 201554. Une pléthore de normes interviennent dans ce secteur. La Convention de 1988 pour la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime55 La Convention pour la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime a été adoptée en mars 1988 lors d'une Conférence tenue à Rome. Elle affiche pour but principal de « garantir la prise de mesures appropriées à l'encontre des auteurs d'actes illicites commis contre des navires, à savoir notamment la capture d'un navire par la force, les voies de fait contre des personnes se trouvant à bord ou l'introduction à bord de dispositifs propres à détruire ou à endommager le navire. » En vertu de la Convention, États parties ont l'obligation d'extrader ou de poursuivre en justice les auteurs présumés de ces actes. En outre, il importe de souligner que des amendements importants à la Convention de 1988 et à son protocole ont été adoptés lors de la Conférence diplomatique sur la révision des instruments concernant la sécurité de la navigation maritime, tenue du 10 au 14 octobre 2005. Ils ont été adoptés sous la forme de protocoles56. 53ONUDC,Programme...op.cit., 54RFI, la piraterie dans le golfe de guinée touche la Côte d'Ivoire, (Publié le 04-02-2013 Modifié le 05-02-2013 à 09:14 ) , Consulté le 21/11/16.Disponible à l'adresse : http://www.rfi.fr/afrique/20130204-piraterie-golfe-guinee-touche-cote-ivoire-navire-gascogne 55Pour le texte complet, voir: https://treaties.un.org/doc/db/terrorism/Conv8-French.pdf 56Pour consulter les textes : http://www.imo.org/fr/About/Conventions/ListOfConventions/Pages/SUA-Treaties.aspx 43 Protocole de 2005 à la Convention pour la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime57 Cet instrument apporte de nouvelles particularités surtout en matière d'incrimination. A cet effet, le fait d'utiliser « un navire pour commettre un acte de terrorisme » est reconnu comme une infraction. « Le transport de diverses matières à bord d'un navire, en sachant que celles-ci sont destinées à provoquer ou à menacer de provoquer la mort ou des dommages corporels ou matériels graves, dans l'intention de perpétrer un acte de terrorisme » devient également répréhensible. Aussi constitue-t-il en lui-même le simple fait d'assurer « le transport à bord d'un navire de personnes ayant commis un acte de terrorisme ». Enfin, le Protocole complète la Convention de 1988 relative à la sécurité de la navigation maritime en instituant des procédures d'arraisonnement des navires soupçonnés d'être impliqués dans la commission d'une infraction au regard de ladite Convention. Le Protocole de 1988 à la Convention pour la répression d'actes illicites contre la sécurité des plateformes fixes situées sur le plateau continental58 Ce Protocole se démarque dans la mesure où il met en place « un régime juridique applicable aux actes perpétrés contre les plateformes fixes situées sur le plateau continental », régime semblable aux régimes établis pour l'aviation internationale. Il vient combler un vide juridique sur la scène internationale. Le Protocole de 2005 relatif au Protocole pour la répression d'actes illicites contre la sécurité des plateformes fixes situées sur le plateau continental59 D'une manière générale, il est venu adapter au contexte des plateformes fixes situées sur le plateau continental les modifications apportées à la Convention pour la répression d'actes illicites contre la sécurité de la navigation maritime. 57 Pour en savoir plus : https://treaties.un.org/doc/db/terrorism/Conv8-French.pdf 58 Lire à l'adresse : < https://treaties.un.org/doc/db/terrorism/Conv8-French.pdf > 59 Voir : < https://www.unodc.org/tldb/pdf/Protocol%20Fixed%20Platforms%20FR.pdf > 44 La Convention internationale de 2005 pour la répression des actes de terrorisme nucléaire60 Elle a été conclue le 13 avril 2005 à New York, et est entrée en vigueur le 7 juillet 2007. Sa visée est d'assurer aussi bien l'interdiction que la prévention d'actes de terrorisme pouvant survenir dans le domaine nucléaire. En outre, la Convention s'applique à un large éventail d'actes et de cibles possibles, y compris les centrales et les réacteurs nucléaires ; Cela concerne les menaces ou tentatives de commettre de tels crimes ou d'y participer en tant que complice. Son champ d'application tourne aussi autour « des situations de crise (assistance à apporter aux États pour régler la situation) et de la gestion de l'après-crise [mesures à prendre pour assurer la sûreté des matières nucléaires avec l'aide de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA)]. » Notre analyse nous a permis de voir une pléiade de dispositifs à portée contraignante à l'égard la majorité voire l'ensemble des membres de l'ONU. L'instance onusienne s'est érigée ainsi en tant que « modèle » pour impacter les pays à s'investir dans des projets de lutte plus communautaires. Des textes régionaux et sous régionaux vont abonder dans ce sens comme ceux adoptés en Afrique. |
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