Le cadre juridique de la lutte contre le terrorisme en Afrique de l'Ouest( Télécharger le fichier original )par Akpélé Aimé Timalelo KOUASSI Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr - Master 2 Droit international public 2017 |
B-Les ConventionsLes conventions et protocoles contre le terrorisme sont des traités internationaux et, de ce fait, sont régis par les dispositions du droit international des traités inscrits dans la Convention de Vienne de 1980 sur le droit des traités. Bien que la règle du « pacta sunt servanda » constitue l'un des principes fondamentaux du droit international des traités, il est intéressant de noter que le Conseil de sécurité des Nations Unies a estimé nécessaire de rappeler cette obligation internationale en demandant aux États, dans sa Résolution 1373 (2001), « ...d'appliquer intégralement les conventions et protocoles internationaux relatifs au terrorisme... ». À deux exceptions près, toutes ces conventions, qui seront plus tard détaillées, obligent les États Parties à incriminer les actes qui y sont décrits. Dans le cas de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, par exemple, les États doivent ériger le financement du terrorisme en infraction spécifique, et non en infraction accessoire, et cela peu importe que les fonds aient ou non été utilisés pour commettre des actes de violence. La règle « pacta sunt servanda », qui s'applique aux conventions, signifie aussi que les États doivent exercer leur compétence à l'égard de ces infractions lorsque l'auteur présumé de l'infraction est présent sur leur territoire et qu'ils ne l'extradent pas. Les États sont donc tenus d'établir une sorte de compétence universelle .Le principe de droit pénal international selon lequel il faut « extrader ou poursuivre » n'est pas inscrit dans ces conventions, mais il a été confirmé dans les paragraphes 2(c), (d) et (f) du dispositif de la Résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité et a été énoncé explicitement dans les Résolutions 1456 (2003)22 et 1624 (2005)23 du Conseil de sécurité. 1-Instrument concernant la protection du personnel recruté sur le plan international La Convention de 1973 sur la prévention et la répression des infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale22 Ce traité, entré en vigueur le 20 février 1977, a été conclu le 14 décembre 1973 à New York. Il affiche pour but d'assurer le maintien des relations internationales normales indispensables pour la coopération entre les membres des Nations Unies. Les agents diplomatiques et autres personnes physiques jouissant d'une protection internationale méritent une action particulière car leur personne constitue en elle-même la continuité de service de leur pays ou organisme. 22Pour savoir plus :< https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19730363/201208060000/0.351.5.pdf> 33 L'article premier de cette Convention, en son paragraphe 1, définit l'expression « personnes jouissant d'une protection internationale » sous deux angles. Il s'agit d'une part « de tout chef d'État y compris chaque membre d'un organe collégial remplissant en vertu de la constitution de l'État considéré les fonctions de chef d'État ; de tout chef de gouvernement ou de tout ministre des affaires étrangères, lorsqu'une telle personne se trouve dans un État étranger, ainsi que des membres de sa famille qui l'accompagnent ; » et d'autre part « de tout représentant, fonctionnaire ou personnalité officielle... partie de son ménage ; » De même, la Convention vise la participation directe à la commission effective d'un enlèvement, d'un meurtre ou d'une autre attaque contre la personne, les locaux officiels, le logement privé ou les moyens de transport d'agents diplomatiques et autres « personnes jouissant d'une protection internationale », la complicité en de tels actes, ou tout simplement la tentative ou la menace dans le fait de réaliser de telles actions. Aux termes de la Convention, toute Partie est tenu de prendre les mesures nécessaires pour établir sa compétence aux fins de connaître des infractions visées ; rendre ces infractions passibles de peines appropriées ; placer en détention les auteurs présumés d'infractions, les poursuivre ou les extrader ; coopérer aux activités de prévention ; et communiquer les renseignements et les éléments de preuve nécessaires dont il dispose aux fins de la procédure pénale. Les auteurs d'infractions prévues dans la Convention peuvent être extradés en vertu de traités d'extradition en vigueur entre les Parties et en vertu de la Convention elle-même. 2-Instrument relatif la prise d'otages23 La Convention internationale contre la prise d'otages a été adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies, le 17 décembre 1979. L'objectif de cette norme épouse la politique générale de la lutte contre le terrorisme. Elle précise que l'infraction de prise d'otages vaut pour «quiconque s'empare d'une personne (ci-après dénommée «otage»), ou la détient et menace de la tuer, de la blesser ou de continuer à la détenir afin de contraindre une tierce partie, à savoir un État, une organisation internationale intergouvernementale, une personne physique ou morale ou un groupe de personnes, à accomplir un acte quelconque ou à s'en abstenir en tant que condition explicite ou implicite de la libération de l'otage
»24. A cela, il Notons que ladite Convention insiste sur les points suivants : 23 Pour faire une lecture exhaustive, voir : https://treaties.un.org/doc/db/Terrorism/french-18-5.pdf 24 Article 1 de la Convention internationale contre la prise d'otages 25 Article 2, Ibid. 34 -l'entraide judiciaire entre les États -la rapidité d'exécution des procédures d'extradition On peut le dire sans doute de se tromper que le terrorisme est explicitement pris en compte à travers cette Convention. 3-Instruments se rapportant aux matières nucléaires Certes l'Afrique de l'Ouest ne compte pas de pays doté de capacité de production de matières nucléaires même si un pays comme le Niger dispose de grandes réserves d'uranium qui fournissent les centrales nucléaires françaises. Les textes dans ce domaine relèvent pour autant de la lutte contre le terrorisme. Notre recherche ici s'est appesantie sur une convention ainsi que son amendement. La Convention de 1980 sur la protection physique des matières nucléaires Cette norme a été adoptée à Vienne le 26 octobre 1979, puis ouverte à la signature le 3 mars 1980. Elle est, enfin, est entrée en vigueur le 8 février 1987. ; »26 La Convention exprime la volonté des parties contractantes « d'écarter les risques qui pourraient découler de l'obtention et de l'usage illicites de matières nucléaires ». Aux fins de la présente Convention, l'expression « matières nucléaires » fait référence au plutonium dont la concentration isotopique en plutonium 238 dépasse 80%, l'uranium 233, l'uranium enrichi en uranium 235 ou 233, l'uranium contenant le mélange d'isotopes qui se trouve dans la nature autrement que sous forme de minerai ou de résidu de minerai, et toute matière contenant un ou plusieurs des éléments ou isotopes ci-dessus La mission principale de cette Convention est d'obliger les parties à veiller au transport en toute sûreté de matières nucléaires entre les États afin d'éviter que des individus malveillants comme les terroristes puissent s'en accaparer. Des consignes sont précisées quant aux incriminations à prendre en compte pour chaque partie dans leur législation nationale. En revanche, un amendement à cette Convention a été pris. 26 Article 1er paragraphe a de la Convention de 1980 sur la protection physique des matières nucléaires 35 L'amendement de 2005 à la Convention sur la protection physique des matières nucléaires Ce texte a été adopté le 8 juillet 2005 par les États-parties à la Convention de 1980 citée plus haut. Au titre dudit amendement, le titre de la Convention sur la protection physique des matières nucléaires du 26 octobre 1979 est remplacé par le titre suivant : « Convention sur la protection physique des matières nucléaires et des installations nucléaires »27. Il vient ainsi élargir le champ d'application de la Convention de 1980 en définissant clairement « des objectifs de protection auxquels doivent répondre les systèmes législatifs et réglementaires nationaux ». Il est fait obligation d'empêcher toute « soustraction frauduleuse » de ces matières. D'ailleurs, ce texte admet des « obligations de protection des installations et des matières nucléaires contre des actes de sabotage, de type terroriste »28. 4-Instruments concernant les matières explosives La Convention de 1991 sur le marquage des explosifs plastiques et en feuilles aux fins de détection29 Signée le 1er mars 1991, cette Convention est entrée en vigueur le 21 juin 1998. Tous les pays de la CEDEAO (Communauté Economique des États de l'Afrique de l'Ouest) sont parties à ce texte. C'est, en effet, « conscients des incidences des actes de terrorisme sur la sécurité dans le monde »30 que la plupart des États sont parvenus à cet engagement. Il est indéniable de pouvoir nier que près de 80% des attentats sont commis grâce à des explosifs de tout type. L'idée principale de cette Convention est l'obligation qui est faite aux États parties de « prendre les mesures nécessaires et effectives pour interdire et empêcher l'entrée sur son territoire ou la sortie de son territoire d'explosifs non marqués »31. De plus, la Convention indique que tout État partie prendra les mesures nécessaires pour détruire les stocks d'explosifs non marqués, à l'exception de ceux qui sont détenus par ses autorités exerçant les fonctions militaires ou de police32. Une « Commission » internationale technique des explosifs voit également le jour grâce à ce cet instrument juridique. Elle a pour attribution d'évaluer 27 Amendement de 2005 à la Convention de 1980 sur la protection physique des matières nuléaires , disponible à l'adresse :< https://www.admin.ch/opc/fr/federal-gazette/2008/1121.pdf > 28 Ibid. 29 Pour une lecture exhaustive :< https://treaties.un.org/doc/db/Terrorism/Conv10-french.pdf > 30 Préambule de la Convention de 1991 sur le marquage des explosifs plastiques et en feuilles aux fins de détection 31Ibid., article 2 32 Ibid. 36 « l'évolution technique de la fabrication, du marquage et de la détection des explosifs et de communiquer ses conclusions » aux États parties et aux organisations internationales qui y trouvent un intérêt33. 5-Instrument relatif au financement du terrorisme « L'argent est le nerf de la guerre » (du latin « pecunia est nervus belli ») 34. En d'autres termes, aucun combat ne pourrait être entrepris sans moyens. Et les moyens bien évidemment proviennent de sources ayant une valeur pécuniaire. Cet aspect a bien été pris en compte par les États dans la lutte antiterroriste puisqu'ils ont décidé de couper toutes les origines de revenus du terrorisme islamiste ainsi que de la criminalité terroriste35. La Convention internationale de 1999 pour la répression du financement du terrorisme C'est un document à portée générale signé le 9 décembre 1999 à New York. Il est particulier en ce sens qu'il crée un régime d'incrimination de l'acte de financement du terrorisme. Cet acte est dorénavant sanctionné comme tel, « non comme accessoire »36 d'une action terroriste mais de manière autonome. Ce texte a imposé une modification de l'arsenal juridique des États parties. Il apporte une définition de l'infraction de l'acte de financement du terrorisme en son article 2. La Convention met à la charge des États parties qu'ils « adoptent, conformément aux principes de leur droit interne, les mesures nécessaires à la détection et au gel, à la saisie ou la confiscation des fonds utilisés ou destinés à être utilisés pour la commission de l'infraction considérée. Ces infractions sont réputées cas d'extradition et les États parties ont l'obligation d'établir leur compétence à leur égard, de les ériger en infraction pénale et de les punir de peines appropriées, d'en mettre les auteurs présumés en détention, de les poursuivre ou de les extrader, de coopérer à la prise de mesures préventives et de contremesures et d'échanger les informations et éléments de preuve nécessaires dans les procédures les concernant. Les infractions visées par la Convention sont réputées cas d'extradition entre les États parties conformément aux traités d'extradition en vigueur et conformément à la Convention elle-même »37. 33 Disponible à l'adresse : < https://fr.sputniknews.com/russie/2007072669750223/ > 34Raymond Aron, Paix et Guerre entre les nations, p.249, Calmann-Lévy, 1962 36 Banifatemi Yas. La lutte contre le financement du terrorisme international. In : Annuaire français de droit international, volume 48, 2002. pp. 103-128. 37 Lire : http://www.un.org/french/millenaire/law/cirft.htm 37 Au-delà de ce système de prévention et en quelque sorte de sensibilisation, l'instance onusienne a bien sûr pensé à la répression. |
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