A-L'instabilité du territoire
Les années 2000 ont fait place l'émergence de
groupes sous-nationaux dont les activités ont menacé
l'intégrité territoriale et la sécurité de
l'État nigérian. Leurs exigences et modus operandi ont
rallumé la « question nationale »131 et ont
gravement creusé des tendances centripètes. Mais le plus
important et inquiétant est le fait que ces groupes ont utilisé
des actes terroristes pour semer la peur, bombarder des installations
pétrolières et kidnapper de nombreuses personnes pour obtenir une
rançon. En fait, ces groupes créaient une atmosphère
d'incertitude et d'anarchie dans leur zone d'action. Il s'agit, entre autres,
des groupes de la milice du delta du Niger (abrégé en anglais
MEND132) ; de Boko Haram, du Mouvement pour l'Actualisation de
l'État Souverain de Biafra (abrégé en anglais
MASSOB133) et de l'aile militante du mouvement nationaliste yorouba
: Oodua People's Congress (OPC). Grâce à la connivence de certains
militaires en service, l'organisation s'est fortifiée en se dotant en
armes mortelles. Entre 2007 et 2010, plus d'une centaine de personnes ont
été enlevées et des millions d'argent ont
été payés comme rançon.
Certaines des personnes enlevées ont été
tuées, même après avoir payé la rançon
spécifiée134 . L'une des conséquences
économiques fut une réduction drastique des exportations
quotidiennes de pétrole. Elles ont chuté de 2,2 millions de
barils par jour au premier trimestre de 2009 à 800 000 barils par jour.
Par exemple, la production quotidienne de la firme Royal Dutch Shell en 2009,
est
131 On appelle « question nationale
» l'ensemble des problèmes, dans un pays donné, qui
émanent de la cohabitation, souvent contre leur gré, de
populations se revendiquant de nations différentes au sein de ce
même pays.
Ces problèmes incluent souvent des enjeux tels que
la souveraineté ou l'autonomie
nationale, le contrôle des richesses et du territoire, la
liberté de langue et de religion, la discrimination sur base ethnique,
etc. MUSA B., « Political Leadership and Responsibility in Nigeria
», Lecture delivered at the 50th Anniversary Ceremonies.Faculty of
Social Sciences, University of Ibadan (Nigeria) , 4th November 1998.
132 MEND : Movement for the Emancipation of the Niger
Delta
133 MASSOB : Movement for the Actualisation of the Sovereign
state of Biafra
134 Akani C. Corruption in Nigeria : The Niger Delta Experience.
Enugu : Fourth Dimension Publishers, 2001.
82
passée de 1 million de barils par jour à 250 000
barils par journée. Le pays a, par conséquent, perdu une
énorme quantité d'argent estimée à 3 milliards de
« naira135 ».
Tout cela a nécessité le programme d'amnistie du
président Umaru Musa Yar'Adua conformément
à l'article 175 de la constitution de 1999 telle qu'amendée. Les
miliciens qui ont renoncé à leurs actes terroristes dans un
délai donné ont été graciés. Aussi, cette
initiative a engendré la cession de plus de 2 000 fusils d'assaut «
G3 », 600 Ak 47, et environ 40 mitrailleuses « GPMGs »
(general-purpose machine gun) et 2 lance-roquettes. Plus de 65 ex-militants ont
également rendu plus de 10 cartouches de munitions, plus de 50 fusils AK
47 et quatre autres fusils136 .
Mais, depuis 2009, on a assisté à une
radicalisation de Boko Haram, une soi-disant secte islamique, qui
débuté à lancer une série d'attaques audacieuses et
d'actes odieux qui ont imprimé le mot « terrorisme » sur la
conscience de la nation nigériane de sorte que le mot est devenu un nom
familier et entré dans le quotidien « Lexique » du
nigérian moyen. Ce groupe terroriste a été fondé en
2002 par Ustaz Mohammed Yusuf, né le 29 janvier 1970 dans le village de
Girgir, dans l'État de Yobe.
Le nom officiel de la secte est « Jama'atu Ahlis
Suna Lidda'awati wal Jihad », un nom arabe qui en français
signifie « les gens engagés à la propagation de
l'enseignement du Prophète et le Jihad ». La secte est
cependant populairement connue sous le nom de Boko Haram, un nom Haoussa qui se
traduit par « l'éducation occidentale est interdite
».
Les militants de cette secte se sont engagés dans le
recrutement de jeunes impressionnistes de la région et ardemment
engagés à l'intronisation d'une idéologie islamiste dans
le pays. Ceci explique leur attaque magistrale contre les institutions
publiques, notamment les maisons des médias, les églises, les
postes de police et les institutions d'apprentissage. Ce groupe est
prétendument financé et soutenu par des politiciens.
En 2009, ils avaient enregistré leur formidable
implantation dans les grandes villes de Maiduguri, Yobe, Bauchi et Kano. Le
meurtre de Mohammed Yusuf et de ses collègues par la police a rendu
l'organisation virulente : une série d'attentats meurtriers ont
coûté la vie à de nombreuses personnes ainsi que la
destruction de propriétés. Cela a entraîné une
baisse des activités économiques dans la région.
135 Monnaie officielle du Nigeria
136 Adeniyi O. Power, Politics and Death. Prestige Press, Lagos,
2011
83
L'armée nigériane a déclaré que de
2009 à 2012, plus de 1 200 personnes ont été tuées
dans des attaques liées à Boko Haram, alors qu'en 2011, la police
a déclaré que 308 personnes ont été tuées
dans plus de 118 attaques lancées par Boko Haram dans six des
États du Nord du Nigeria. Selon Daniel Benjamin, coordonnateur du Bureau
du Coordonnateur pour la lutte contre le terrorisme, du Département
d'État des États-Unis, en 2011, il y a eu 978 attaques
terroristes en Afrique. Le Nigeria a enregistré 20% de ces cas avec 136
attaques, soit 11,95% de plus que l'année 2011. Par ailleurs, selon un
rapport intitulé START par le Consortium national pour l'étude du
terrorisme et les réponses au terrorisme basé à
l'Université du Maryland, États-Unis, 1 842 personnes ont
été tuées dans plus de 525 attaques terroristes en 2012
par les talibans. Ces derniers étaient dès lors au sommet dans le
classement global, tandis que Boko Haram a terminé deuxième avec
1.132 décès dans plus de 364 attaques terroristes. Le rapport a
aussi relevé que des dix plus grandes attaques terroristes, Boko Haram
est arrivé quatrième en nombre de décès et
cinquième dans la plupart des attentats terroristes en 2012. START a
également noté que Boko Haram était "responsable des
attaques extrêmement meurtrières en 2012 incluant une série
de bombardements coordonnés et des assauts secrets à Kano qui ont
tué environ 190 personnes 137.Dans le même ordre
d'idées, le 6 juillet 2013, le journal Leadership a
rapporté que Boko Haram avait attaqué et tué 29
élèves de l'école secondaire gouvernementale Mamudo dans
l'État de Yobe .En raison de toutes ces exactions ,les États-Unis
ont annoncé environ 7 millions de dollars de rançon pour toute
personne qui peut arrêter Abubakar Shekau,
éminent dirigeant de Boko Haram.
Ce groupe terroriste, semble-t-il, bénéficie de
soutien externe pour réaliser des attaques coûteuses et mortelles
sur ses cibles. Il est également possible que Boko Haram ait
bénéficié de largesses financières, d'Al-Qaïda
et de certains gouvernements terroristes. Par exemple, entre 1983 et 1988, le
gouvernement de l'Iran a dépensé environ 50 à 150 millions
de dollars pour financer des organisations terroristes dans le Proche-Orient.
Les activités de Boko Haram ont été fermement
condamnées. Le président du Sénat nigérian l'a
décrit comme un « mal formidable », en raison de son attaque
du 25 décembre 2011 ayant été vivement condamné par
plus de vingt-neuf organisations internationales et des États, y compris
par les entités comme le comité juif américain, le cercle
islamique d'Amérique du Nord, le Conseil suprême islamique du
Canada, le Conseil musulman de Grande-Bretagne, d'Espagne, de Turquie et
d'Afrique du Sud. Il est important de dire à ce stade que la menace
« Boko Haram » peut être interprétée à
partir de deux principales raisons :
137 The Guardian Newspaper, 11 juin 2013
1.
84
Le taux de pauvreté dans la partie nord du pays.
2. L'héritage colonial ayant consisté à
placer perpétuellement certaines ethnies dans la classe bourgeoise sans
cesse en train de diriger les affaires de l'État du Nord.
Ainsi, pour faire face à ces problèmes, les
autorités fédérales du Nigeria ont, dès les
premières heures, opté pour « une réponse violente
face à la violence du mouvement fondamentaliste »138. En
pratique, cette réponse s'est manifestée par des mesures
sécuritaires et militaires n'ayant globalement eu que peu d'effet et
ayant même été contreproductive, conduisant à
l'exacerbation des tensions déjà existante.
Cela étant, l'État nigérian a
adopté des lois (appelées « Act » en anglais)
pour conforter ses efforts et sa bonne foi à lutter dans le respect des
normes contre le terrorisme, et la secte islamiste BOKO HARAM, en particulier.
Deux normes récentes de l'ordre juridique interne nigérian
concernent principalement la prévention et la lutte contre le
terrorisme.
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