SECTION II- LES SANCTIONS CONSECUTIVES AUX
INVESTIGATIONS
226 Cf. art. 157 AUSC.
227 Les autorités interpellées se sentant dans
l'obligation d'apporter une réponse séance tenante.
77
A la suite d'une procédure d'alerte ou du rapport de
l'expert, les actionnaires peuvent déclencher les hostilités
envers tout contrevenant à leurs droits, notamment, mettre en jeu sa
responsabilité, demander l'annulation des décisions jugées
abusives, ou la nomination d'un administrateur provisoire, etc.
En ce qui concerne la nomination d'un administrateur
provisoire, il convient tout de suite de signaler que l'essentiel de sa
procédure de déclenchement est similaire à celle de
l'expert de gestion228. Et tout comme pour cette dernière,
elle a pour effet pervers de favoriser l'immixtion des tiers dans la vie de la
société229. De la même manière, le
législateur OHADA n'a pas non plus organisé la
responsabilité de l'administrateur provisoire230.
Dans cette perspective, le respect des prérogatives
reconnues aux actionnaires est un impératif pour les dirigeants sociaux,
la société commerciale étant créée dans
l'intérêt commun des actionnaires231. Les dirigeants ne
sauraient donc impunément abuser des investissements faits par les
actionnaires. Mais ceux-ci ne sont pas seuls à pouvoir porter atteinte
aux droits des actionnaires. En effet, la jouissance des attributs de ces
derniers peut être entravée aussi bien par les tiers que par
d'autres actionnaires.
Présentent donc dans ce contexte, un réel
intérêt, La responsabilité des dirigeants pour les actes
fautifs commis dans l'exercice de leur fonction (§1), de même que
celle des commissaires aux comptes (§2).
§1- LA RESPONSABILITE CIVILE DES DIRIGEANTS
SOCIAUX
Une mauvaise administration de la société peut
être la source de préjudices considérables pour les
créanciers sociaux mais surtout pour les actionnaires232.
Aussi, le législateur OHADA s'est-il investi à déterminer
avec le plus grand soin les circonstances dans lesquelles la
responsabilité des dirigeants peut être mise en
oeuvre233. Assurément et avec le nouveau contexte juridique
et économique, ces circonstances sont nombreuses ; ce qui se
conçoit si l'on tient compte non seulement
228 C'est ainsi que la procédure commence par la saisine
du juge : la demande est présentée devant le tribunal, le plus
souvent par la voie du référé en raison de l'urgence qui
la caractérise.
229 Tel le juge
230 En effet, ce dernier peut être à l'origine de
nombreuses fautes, préjudiciables aux actionnaires. Face à cette
lacune, on peut tout légitimement estimer que les fautes susceptibles
d'être commises par l'administrateur provisoire seront
sanctionnées à l'image de celles des dirigeants sociaux.
231 Cf., ici encore, art. 4 AUSC.
232 RIPERT (G.) et ROBLOT (R.), Traité de droit
commercial, 15e éd. Tome1, LGDJ, 1993, n° 1360, p.
1041.
233 Cf. livre III de l'AUSC intitulé « Action en
responsabilité civile contre les dirigeants sociaux »
de l'étendue des prérogatives des dirigeants
sociaux, mais aussi du cadre légal et contractuel dans lequel elles
s'exercent234. Il s'agit donc de mettre en relief les exigences
régulièrement durcies qui assurent désormais un contre
pouvoir à leur puissance235.
Au-delà de ces développements, il convient de
dégager l'organisation de la responsabilité des dirigeants (A)
afin d'apprécier l'exercice de son action (B), sans préjudice
d'une éventuelle révocation des ces derniers (C).
A- L'organisation de la responsabilité civile des
dirigeants sociaux
La responsabilité des dirigeants varie selon les
circonstances vis-à-vis des actionnaires, mais notre
préférence va pour les deux régimes suivants : une
responsabilité des dirigeants de la société in bonis (1),
et une responsabilité aggravée en cas de faillite (2).
1- La responsabilité des dirigeants de la
société in bonis
Il s'agit d'une responsabilité ordinaire envers les
actionnaires236. Les dirigeants sont responsables, aux termes de
l'art. 740 AUSC, « individuellement ou solidairement envers la
société ou envers les tiers237, soit des infractions
aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux
sociétés anonymes, soit des violations des dispositions des
statuts, soit des fautes commises dans leur gestion »238.
Une lecture attentive de cette disposition démontre que tous les actes
susceptibles d'enclencher la responsabilité des dirigeants ne sont que
des tentacules de la notion globale de « faute
»239, et sont relatifs à la violation des lois et
règlements (a), à la violation des statuts et à la faute
de gestion (b).
234 NJEUFACK TEMGOUA (R.), << La responsabilité des
dirigeants des sociétés commerciales (OHADA) »,
Mémoire de DEA en Droit Communautaire et Comparé UDEAC/CEMAC,
Uds, 1999, p. 5.
235 NJOYA NKAMGA( B), << Les dirigeants sociaux »,
Thèse de Doctorat/Ph.D., Uds, 2006-2007, p. 9.
236 RIPERT (G.) et ROBLOT (R.), op. cit., n° 1360, p.
1042.
237 La notion de <<tiers » est ici largement entendue
et inclut les actionnaires.
238 A lire avec les art. 161 et 165 AUSC.
239 NJEUFACK TEMGOUA (R.), op. cit., p. 6.
91NJOYA NKAMGA (B.), op. cit., n° 686, p. 344.
79
a) Responsabilité pour violation des lois et
règlements
La responsabilité des dirigeants pour violation des
lois et règlements dans l'accomplissement par ceux-ci d'actes contraires
à ces dispositions, était déjà en vigueur dans la
quasi-totalité des Etats membres de l'OHADA, par l'effet conjugué
du code civil, du code de commerce, des lois de 1867, 1925 et bien d'autres
textes240. Le droit réformé de l'OHADA l'a reprise et
rénovée.
L'idée est simple: la violation par les dirigeants
d'une règle prévue dans l'espace concerné entraîne
sa responsabilité. De façon précise, la violation d'une
disposition législative ou règlementaire gouvernant le droit des
sociétés, qu'il s'agisse de la constitution ou de la direction de
la société, de la convocation ou du fonctionnement des
assemblées ou des conditions d'exercice des fonctions de dirigeants
constituent, indépendamment des sanctions spécifiques qu'elles
comportent (opposabilité, nullité), un fait
générateur de la responsabilité du
dirigeant241.
Dans cette perspective, le législateur africain s'est
servi d'un critère temporel pour fixer les comportements
blâmables. La cause de la responsabilité peut être
liée à la constitution, au fonctionnement ou à la
dissolution de la société ; l'essentiel étant qu'elle soit
survenue dans l'exercice des fonctions de dirigeants. Ainsi, les premiers
dirigeants ont par exemple le devoir de s'assurer que la société
a été régulièrement constituée. Une incurie
de leur part entraîne leur responsabilité pour violation de l'art.
78 AUSC qui dispose que « Les fondateurs, ainsi que les premiers
organes de gestion, de direction ou d'administration sont solidairement
responsables du préjudice causé soit par le défaut d'une
mention obligatoire dans les statuts, soit par l'omission ou l'accomplissement
irrégulier d'une formalité prescrite pour la constitution de la
société ».
Au cours de la vie sociale, la responsabilité des
dirigeants est susceptible d'être engagée en cas d'annulation
d'actes ou de délibérations, pour défaut de convocation ou
irrégularité de convocation d'une assemblée par exemple
prévue par les textes242. De même, les dirigeants d'une
S.A. verront leurs responsabilités engagées pour défaut de
désignation d'un commissaire aux comptes243 ou de provocation
d'une délibération sur l'option à prendre en cas de
réduction du capital en dessous du minimum légal.
Il en irait de même de la violation des statuts et des
fautes de gestion.
241VIDAL (D.), cité par NJOYA NKAMGA (B.), op.
cit., n° 690, p. 345.
242 Cf. art. 35 AUSC.
243 V. pour désignation d'un ou des commissaires aux
comptes dans les SA, art. 694 et 702 AUSC.
b) Responsabilité pour violation des statuts et
pour faute de gestion
La violation des statuts de la société et la
faute de gestion du dirigeant constituent aussi des causes de
responsabilité civile des dirigeants reprises par l'Acte uniforme. Mais
contrairement à la violation des lois et règlement qui
s'apparente plus à l'expression d'un souci législatif d'encadrer
la fonction de dirigeant en soi, ces deux types de causes semblent être
la conséquence plus ou moins voulue de la qualité de mandataire
des dirigeants244.
i- La violation des statuts
Dans le cadre de la gestion de la société, les
dirigeants voient, en principe, leurs pouvoirs déterminés par les
actionnaires dans l'acte de société ou tout acte ultérieur
auquel les statuts ou la loi renvoie le cas échéant. Dans cette
optique, la violation des statuts par le dirigeant sera très souvent une
faute, une inexécution des exigences de son mandat. Il pourra dès
lors s'agir de toutes sortes de règles concernant le fonctionnement de
la société, pour la fixation desquelles, sauf disposition
législative contraire, les actionnaires disposent d'une grande
liberté : mesures concernant les pouvoirs internes des dirigeants, la
répartition des bénéfices, etc. De même, les
dirigeants sont responsables en cas de méconnaissance par eux d'une
disposition statutaire les obligeant à obtenir exceptionnellement
l'accord des actionnaires245.
Signalons cependant que cette cause de responsabilité
n'est pas nécessairement une faute.
ii- La faute de gestion
C'est le type de faute le plus difficile à
établir -pourtant le plus invoqué-, car il suppose une
appréciation sur l'attitude qu'aurait dû avoir un administrateur
diligent, actif mais prudent, à l'époque et dans les
circonstances de l'espèce. La notion est protéiforme, recouvrant
aussi bien des actes positifs que négatifs246.
D'une manière générale, cette faute doit
être prouvée par les actionnaires demandeurs. Elle
s'apprécie donc « in abstracto », c'est-à-dire
par référence à la conduite d'un dirigeant prudent,
diligent et actif. Ce qui ne signifie pas qu'on refuse
244 NJOYA NKAMGA (B.), op. cit., n° 690, p. 346.
245 Cass. Crim., 10 mars 1976, n° 74-14, 680, JCP,
éd. G., 1977, II, n° 18566, note CHARTIER.
246 MERLE (PH.), Droit commercial, sociétés
commerciales, 3e éd., Précis Dalloz, 1992, n°
406, p. 362.
81
de tenir compte des éléments
concrets247. Non seulement la conduite de l'intéressé
sera jugée par référence à celle d'un dirigeant de
même catégorie mais encore on placera ce type de comparaison dans
les mêmes circonstances que l'auteur du dommage248. Et cet
autre dirigeant ne peut être que l'homme normalement prudent et
avisé, celui que certains textes du code civil - surtout en
matière contractuelle et quasi-contractuelle- appellent « le
bon père de famille »249. Tout au plus, la faute
doit s'apprécier en tenant compte du contexte existant au moment
où elle a été commise. L'inverse accablerait les
dirigeants sous le poids d'une perspicacité rétroactive
suscitée par la connaissance de la catastrophe finale.
La gestion d'une entreprise suppose l'acceptation de certains
risques250. Ce n'est pas parce que tel ou tel d'entre eux se
réalise que le dirigeant sera nécessairement fautif. Ce que l'on
est en droit d'exiger des dirigeants ce n'est pas un don prophétique,
mais le souci d'éviter des mesures que l'on devait considérer
comme déraisonnables au moment où elles ont été
prises251.
Il ne saurait donc être question de tenter de dresser
une liste des fautes préjudiciables aux actionnaires que pourraient
commettre les dirigeants. Celles-ci peuvent être volontaires, notamment
lorsque les dirigeants utilisent leurs pouvoirs à des fins personnelles
et non dans l'intérêt de la société252.
Mais la faute de gestion peut être aussi une imprudence253 ou
une négligence254, du moment que celle-ci est suffisamment
caractérisée255.
Soulignons que la responsabilité des dirigeants peut
être individuelle ou solidaire, d'après l'art. 740
précité256. En cas de solidarité, les
actionnaires peuvent donc poursuivre l'un quelconque des dirigeants ayant
coopéré au fait fautif257 ; la réparation
effectuée, il appartient à celui qui a payé de se
retourner contre ses
247 GUYON (Y.), Droit des affaires, 12e éd.,
tome1, Economica, 2003,n° 459, p. 448
248 On ne doit par exemple pas exiger les mêmes diligences
du dirigeant d'une petite société anonyme de dimension familiale
et du président du conseil d'administration d'une société
côtée en bourse.
249 FLOUR (J.), AUBERT (J.L.), SAVAUX (E.), Droit civil, les
obligations, sources: les faits juridiques, vol. II, coll. U., 10e
éd., Armand colin, n° 113 p. 108.
250 GUYON (Y.), op. cit., n° 459, p. 448.
251 LAGARDE (G.), cité par GUYON (Y.), op. cit.
252 Tel est par exemple le comportement d'un dirigeant qui
verse des commissions occultes à des tiers, exposant la
société à une réintégration fiscale et
empêchant du même coup aux actionnaires d'exercer un contrôle
normal de la marche des affaires sociales.
253 Com., 18 juin 1973, Rev. Soc., 1974, 300, note
Hémard.
254 Com., 4 février 1980, Bull. civ., IV n° 55, p. 43
- Aix, 9 avril 1974.
255 Constituent ainsi une imprudence, la dissimulation aux
actionnaires de la véritable situation de la société par
les rapports inexacts faits à l'assemblée ; le fait de ne pas
informer les actionnaires de la gravité de la situation sociale et de ne
pas avoir appelé de leur part une décision couvrant sa
responsabilité même si les pertes n'avaient pas encore atteint la
moitié du capital social, dès lors que le prolongement de la
société dans les conditions déplorables ne pouvait aboutir
qu'à absorber la substance même de la société par
l'addition aux pertes anciennes de pertes nouvelles et continues
256 Elle est individuelle lorsqu'une faute précise peut
être imputée à un administrateur déterminé,
les autres membres du conseil étant totalement étrangers à
cette faute. Elle est solidaire s'il est par exemple prouvé que
plusieurs administrateurs ont commis une faute commune
coresponsables chacun pour sa part contributive,
conformément aux règles gouvernant les rapports d'obligations en
droit civil.
Le souci manifeste du législateur de faciliter la
prospérité des entreprises et d'éviter autant que possible
des difficultés de nature à provoquer l'insolvabilité de
la société et par conséquent, à compromettre les
intérêts des actionnaires, l'a amené à
dégager une responsabilité particulière des dirigeants
sociaux en cas de faillite de la société.
2- L'aggravation de la responsabilité des
dirigeants en cas de faillite de la société
On a très souvent dénoncé les scandales
auxquels donnait lieu, sous l'empire de la loi française de 1867,
l'irresponsabilité de fait des dirigeants en présence de la
faillite de la société qu'ils avaient provoquée par leur
incurie ou leur négligence258. Différents
procédés ont été imaginés en droit
français pour éviter cet inconvénient; d'abord en
jurisprudence, puis dans des dispositions légales. Le législateur
OHADA a pour sa part entériné ces procédés aussi
bien dans l'AUSC que dans l'Acte uniforme portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif259.
Il sera question pour nous de mettre en relief les
répercussions que le redressement ou la liquidation judiciaire de la
société peut entraîner sur le patrimoine ou la personne des
dirigeants. Elles peuvent ainsi consister en l'incessibilité des droits
sociaux des dirigeants ou leur comblement au passif de la société
(a). Mais les dirigeants peuvent aussi être déclarés
personnellement en état de redressement judiciaire et s'exposer à
la faillite personnelle (b).
a) Incessibilité des droits sociaux des
dirigeants et comblement du passif
Dès le jugement déclaratif, les actions des
dirigeants cessent d'être librement négociables. A peine de
nullité, leurs actions ou tous autres droits sociaux ne peuvent
être cédés qu'avec l'autorisation du juge-commissaire et
dans les conditions fixées par lui260. Le législateur
manifeste par là même son souci de limiter la liberté du
dirigeant véreux dans l'administration et la disposition de ses droits
sociaux. Dans cette optique, la juridiction compétente a le pouvoir
d'ordonner à l'encontre des dirigeants fautifs, l'expropriation de leurs
actions afin de maintenir l'entreprise pour
257 COZIAN (M.), VIANDIER (A.) et DEBOISSSY (FL.), op. cit.,
n°744, p. 274.
258 RIPERT (G.) et ROBLOT (R.), op. cit., n° 1379, p.
1054.
259 Ci-après AUPC.
260 Cf. art. 57 AUPC.
83
des raisons d'intérêt public, économique
et social261. Et les dirigeants en cause sont tenus de
déposer entre les mains du syndic, les titres constatant leurs droits
sociaux, lequel peut même mettre en demeure les dirigeants
récalcitrants de le faire.
L'incessibilité des droits sociaux des dirigeants
constitue une mesure conservatoire qui prépare la saisie.
S'agissant du comblement du passif et selon les termes de
l'art. 183 de l'AUPC, lorsque la procédure révèle une
insuffisance d'actif, la juridiction compétente peut, en cas de faute de
gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif,
décider, à la requête du syndic ou même d'office, que
les dettes de la personne morale seront supportées en tout ou en partie,
avec ou sans solidarité, par tous les dirigeants ou certains d'entre
eux. Cet article met en évidence une double exigence: la preuve d'une
faute de gestion et la démonstration d'une causalité entre ce
comportement fautif et l'insuffisance d'actif ; peu importe en revanche que la
faute soit séparable ou non262.
Il s'agit donc d'une mesure à la fois redoutable - pour
les dirigeants- et protectrice - pour les actionnaires, car elle peut
être déclenchée indépendamment même de ces
derniers mais leur en profiter-.
Le ou les dirigeants condamnés doivent supporter tout
ou partie du passif. Faute de s'exécuter, ils courent le risque de se
voir mis eux-mêmes, comme de simples commerçants, en redressement
ou en liquidation judiciaire, sans compter l'éventuelle sanction de
faillite personnelle.
b) Extension des procédures collectives et
failite personnelle
Bien qu'ils ne soient pas commerçants, les dirigeants
peuvent être déclarés personnellement en état de
redressement ou de liquidation judiciaire (i) et être exposés
à la faillite personnelle (ii).
i- Extension des procédures collectives aux
dirigeants fautifs
Cette mesure est réglementée par les articles
189 à 193 de l'AUPC. Mais la condamnation au comblement du passif ne
conduit pas inéluctablement à l'ouverture d'une procédure
collective à l'encontre des dirigeants ; elle ne produit cet effet que
si
261 Cf. art. 185 AUPC.
262 Contrairement, en effet, à la loi française
du 25 janvier 1985 sous l'empire de laquelle l'action en comblement du passif a
toujours fonctionné sur des présomptions, l'AUPC exige pour sa
part que soient établis, conformément au droit commun de la
responsabilité, le dommage résidant dans l'insuffisance d'actif,
la faute et le lien de causalité.
ces derniers ne s'exécutent pas. Toute autre est donc
la conséquence d'une action en extension qui étend au dirigeant
concerné la procédure ouverte à l'encontre de la
société, dans ce cas le passif comprend, outre celui du
dirigeant, celui de la société. L'énergie des effets de
l'action en extension commande cependant de réserver cette sanction aux
cas particulièrement graves.
Ainsi, aux termes de l'art. 189 de l'AUPC, cette extension
s'applique à tout dirigeant de société même s'il
n'est pas l'actionnaire qui a, sans être en cessation des
paiements263 lui-même ; exercé une activité
commerciale personnelle soit par personne interposée, soit sous le
couvert de la personne morale masquant ses agissements ; disposé du
crédit ou des biens de la personne morale comme des siens propres ;
poursuivi abusivement, dans son intérêt personnel une exploitation
déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des
paiements de la personne morale.
Bref, l'extension des procédures collectives vise les
dirigeants qui se sont comportés comme les véritables
maîtres de l'affaire. Il est donc logique qu'ils répondent sur
leurs patrimoines personnels lorsque la société est en
état de cessation de paiement.
ii- La faillite personnelle des
dirigeants
D'après les dispositions de l'art. 194 de l'AUPC, la
faillite personnelle s'applique entre autres aux personnes physiques dirigeants
des personnes morales assujetties aux procédures collectives, aux
personnes physiques représentants permanents des personnes morales
dirigeantes. Les dirigeants des personnes morales ainsi visés sont des
dirigeants de droit ou de fait, rémunérés ou non,
apparents ou occultes.
Une lecture attentive des dispositions de l'Acte uniforme
conduit à distinguer deux cas de faillite personnelle : la faillite
personnelle obligatoire et la faillite personnelle facultative.
Dans la première hypothèse, sont obligatoirement
frappés de faillite personnelle, les dirigeants sociaux qui ont
soustrait la comptabilité de leur entreprise, détourné ou
dissimulé une partie de son actif ou reconnu frauduleusement des dettes
qui n'existaient pas, etc.264
263 L'art. 25AUPC définit la cessation des paiements comme
le fait pour un débiteur d'être dans l'impossibilité de
faire face à son passif exigible avec son actif disponible.
264 Cf. art. 197 AUPC.
85
Dans la seconde hypothèse, l'art. 198 de l'AUPC liste
trois cas de faillite personnelle265.
Conscient de la gravité de cette mesure et de ses
implications en guise de sanctions266 à l'endroit des
dirigeants, le législateur permet au dirigeant malheureux déchu
de ses droits, de solliciter auprès de la juridiction compétente
une réhabilitation267.
L'aggravation de la responsabilité civile des
dirigeants vise à rendre effective leur responsabilité. En effet,
le dirigeant d'une société soumise à un redressement ou
une liquidation judiciaire ne bénéficie plus de la moindre
immunité. Les victimes des fautes de gestion268vont pouvoir
agir à son encontre pour obtenir réparation.
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