L'avis à tiers détenteur: cadre juridique et contentieux au Maroc( Télécharger le fichier original )par Mohammed SADDOUGUI Université Mohamd premier-Oujda-Maroc - Master en droit des contentieux à vocation économique 2008 |
Paragraphe 2: Les tiers concernés par la procédure d'A.T.DLa procédure de l'A.T.D peut être utilisée à l'égard de tous ceux qui détiennent des fonds pour le compte d'un redevable ou qui sont ses débiteurs, à quelque titre que se soit (employeur en tant que tiers détenteur des salaires de leur personnel, établissements bancaires en ce qui concerne les comptes de dépôt de leur clients, par exemple)81(*). Ainsi, aux termes des articles 100 et 101 du C.R.C.P, afin d'élargir la base des garanties offertes au Trésor pour appréhender ses créances, le législateur a autorisé l'agent comptable chargé du recouvrement à contraindre les tiers82(*) détenteurs et les dépositaires des fonds des redevables par les mêmes moyens que les contribuables eux-mêmes, à l'exception de la contrainte par corps, de lui verser les sommes qu'ils détiennent et affectées au privilège du Trésor. Sous-section 2 : La mise en oeuvre de la procédure de l'A.T.D.Avant de recourir à cette procédure, le comptable chargé du recouvrement doit, d'abord, s'assurer que les créances objet de l'A.T.D. sont exigibles et qu'elles sont effectivement à la propriété du redevable83(*). Ainsi," la délivrance d'un avis à tiers détenteur avant l'exigibilité de l'impôt et la conservation par le Trésor des deniers appartenant au redevable est une faute que commet le comptable, auteur de l'A.T.D., susceptible d'entraîner une condamnation pécuniaire sous forme d'intérêts sur toute la période allant de la date de l'acte de conservation des fonds jusqu'à la date d'exigibilité"84(*). Le comptable chargé du recouvrement est donc dans l'obligation de respecter certaines conditions préalables (Paragraphe 1) à la notification de l'ATD (Paragraphe 2). Paragraphe 1: Les conditions préalables à la notification d'un A.T.D.L'A.T.D. doit toujours être précédé d'un avis de mise en recouvrement authentifiant une créance fiscale. La mise en recouvrement, distincte des opérations d'assiette et de liquidation, résulte de l'émission du rôle. C'est un acte valant titre exécutoire85(*). Cependant, il n'est pas un acte de poursuite, il représente la phase préliminaire aux poursuites susceptibles d'être engagées par le comptable, dès constatation de non paiement de l'impôt86(*). IL est un acte d'importance fondamentale, puisqu'il constitue le point de départ de toute procédure de recouvrement, et ouvre le délai de réclamation contentieuse (le contentieux d'assiette) ainsi que celui de la prescription quadriennale de l'action en recouvrement. En outre, la date d'exigibilité des créances publiques est subordonnée à celle de la mise en recouvrement et constitue le délai ultime de la phase du recouvrement amiable87(*). Toutefois, le redevable dispose, après la date d'exigibilité, d'un délai supplémentaire de 30 jours avant l'engagement d'une action en recouvrement forcé. Le cour de ce délai ne concerne pas la procédure d'A.T.D.88(*). Le comptable doit aussi adresser un dernier avis sans frais au redevable au moins 10 jours avant de procéder à la notification de l'A.T.D.89(*). La date d'envoi de cet avis doit être constatée au rôle ou sur tout autre titre exécutoire. Cette mention fait foi jusqu'à inscription du faux90(*).Tout A.T.D. est de nul effet s'il n'est pas précédé d'un avis sans frais. La jurisprudence est ferme sur ce point. En effet , la Cour d'appel administrative de RABAT, dans un arrêt du 29/01/2007, à confirmé une ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de RABAT , lorsqu'il a donné gain de cause aux requérants ( des héritiers) en ordonnant le sursis de la procédure de la saisie des deniers de la partie demanderesse jusqu'à avoir statué au fond .L'arrêt affirme qu'"en l'absence de preuves, de la part de l'appelant, d'avoir respecté l'ordre dans lequel doivent être entamées les poursuites pour le recouvrement forcé ,comme le dispose l'article 36 et suivant du C.R.C.P. , avant d'exercer l'A.T.D. , le jugement de la juridiction du premier ordre est fondé "91(*). Mais, qu'en est-t-il de la forme de l'A.T.D? Etant donné que l'objectif visé par le législateur par l'institution de cette procédure, est de mettre à la disposition du comptable chargé du recouvrement des créances publiques une procédure qui requiert simplicité, facilité et rapidité. Il est donc logique que l'A.T.D. soit soumis à un formalisme moins contraignant en comparaison avec les autres voies d'exécution de droit commun. D'ailleurs en pratique, l'A.T.D. résulte d'un simple imprimé adressé au tiers sous forme de lettre recommandée avec accusé de réception. Or, si la loi formant code de recouvrement des créances publiques n'a défini ni la forme ni le contenu de l'A.T.D., l'impératif de garantir les droits des redevables et des tiers détenteurs tout en sauvegardant les intérêts du Trésor, impose le respect d'un minimum de formalisme de l'A.T.D. A cet effet, l'administration a édité un imprimé spécial et l'adresse en recommandé pour des raisons de preuve92(*). Par ailleurs, tout engagement de poursuites en vue de recouvrement d'impositions, et entre autres l'A.T.D., relève de la compétence exclusive du comptable qui en est chargé de les exercer. Par conséquent, il n'a pas la possibilité de déléguer ses pouvoirs à son supérieur hiérarchique ou à un agent placé sous son autorité, au risque de voir annuler sa contrainte pour incompétence du signataire93(*). * 81 -CASIMIR (J.P.), op. cit, p.540-541. * 82 -aux termes de l'article 101,2ème alinéa, sont considérés comme tiers détenteurs: - Les comptables publics; - Les économes; - Les locataires; - Et tous autres détenteurs ou débiteurs de sommes appartenant ou devant revenir aux redevables d'impôts et taxes et autres créances jouissant du privilège du Trésor. Par autres détenteurs ou débiteurs, il faut entendre notamment: - Les employeurs en tant que tiers détenteurs des salaires de leur personnel; - Les établissements bancaires en ce qui concerne les comptes de dépôt de leurs clients; - Les centres de chèques postaux qui tiennent des comptes aux noms des redevables; - Les mandataires chargés de recevoir le prix d'une vente ou de loyer; - Les gérants, les administrateurs ou directeurs de sociétés qui détiennent des sommes appartenant ou devant revenir aux dites sociétés; Aux termes de l'article 100, sont considérés comme dépositaires ( ce sont aussi des tiers détenteurs , mais ils sont investis d'une mission d'auxiliaires de justice) : - Les liquidateurs judiciaires; - Les notaires; - Les séquestres; - Les liquidateurs de sociétés dissoutes; - Les secrétaires greffiers; - Les huissiers de justice; - Les avocats;... * 83 -Instruction sur le recouvrement des créances publiques perçues par l'administration de douane et impôts indirects. (Circulaire n°4659/432 du 3 novembre 2000, p.11. * 84 -T.A, de RABAT, jugement n°1520, dossier n°Ô Ö 00/419, du 30/12/2004, affaire P.D.G de la société SOTGIN c. / Trésorier Almanzah Rabat. * 85 -TROTOBAS.L/COTTRET.J.M, Droit fiscal, DALLOZ, 1985, p.78. * 86 -DOUAY (M.), op .cit, p.25. * 87 - ÌåÏ ßÇä ÍÌíÉ ÊÍÕíá ÇáÏíæä ÇáÖÑíÈíÉ Èíä ÞÇäæä ÇáãÓØÑÉ ÇáãÏäíÉ æÎÕæÕíÇÊ ÇáÊÔÑíÚ ÇáÖÑíÈíÇáãØÈÚÉ æÇáæÑÇÞÉ ÇáæØäíÉÇáØÈÚÉ Çáæáì ãÑÇßÔ 2006Õ67 * 88 -Instruction relative au recouvrement des créances publiques, op .cit, p.15. * 89 -Ibid., p.126. * 90 -Article 36 du C.R.C.P. * 91 -C.A.A. de RABAT, arrêt n°20, dossier n°2/06/34, du 29/1/2007, affaire Trésorier Yaacoub Almansour Rabat c. /Héritiers Alyagouti. * 92 -CASIMIR (J.P.), op. cit, p.542. * 93 -REZEK (S.), op. cit, p.25. |
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