L'avis à tiers détenteur: cadre juridique et contentieux au Maroc( Télécharger le fichier original )par Mohammed SADDOUGUI Université Mohamd premier-Oujda-Maroc - Master en droit des contentieux à vocation économique 2008 |
Deuxième chapitre:Les règles procédurales régissant l'A.T.D.Après avoir cerné les règles substantielles de l'A.T.D., notamment en mettant en exergue sa nature juridique; on essayera dans ce deuxième chapitre d'aborder les règles procédurales régissant cette voie d'exécution. La mise en oeuvre de cette procédure implique l'existence d'un champ d'application qu'il faut délimiter, dans un premier temps, avant d'entamer ses aspects procéduraux (Section 1), et les effets qui en découlent dans un deuxième temps (Section2).
Section 1 : Champ d'application et procédure de l'A.T.D.La délimitation du champ d'application de l'A.T.D. (Sous-section1) trouve son importance dans le cadre de la préservation des garanties offertes au contribuable. Elle ne pourra, en effet, que profiter aux destinataires de cette voie d'exécution forcée qui, de par son caractère exorbitant, ajoutée au privilège du préalable dont jouisse l'administration fiscale, pourrait être utilisée à tort par les agents habilités à l'émettre, si ses limites ne sont pas précisées. De telles précisions éviteront certainement certaines situations qui pourraient faire l'objet d'abus de droit. Mais, pour émettre un A.T.D régulier, le comptable chargé de le faire est contraint d'appliquer rigoureusement une procédure (Sous-section 2) qui doit respecter certaines normes prescrites par la loi afin de préserver les garanties du redevable. Sous-section 1 : Champ d'application de l'A.T.D.Pour délimiter le champ d'application de l'A.T.D., on va étudier la nature des créances visées par l'A.T.D. (paragraphe 1) ainsi que les tiers concernés (Paragraphe 2) par cette procédure, qui sont, contre leur gré, appelés à se substituer au redevable du Trésor pour payer sa créance. Paragraphe 1 : La nature des créances visées par l'A.T.D.Dans le cadre du recouvrement des créances publiques, le Trésor dispose d'un ensemble de privilèges dont le plus performant est celui des impôts et taxes73(*). Les créances pouvant faire l'objet de l'A.T.D. sont, justement, celles affectées au privilège du Trésor. Il s'en suit, donc, que les autres créances qui sont étrangères à l'impôt, bien que recouvrées par les comptables des impôts, ne peuvent bénéficier de cette procédure. (Redevances domaniales, dommages et intérêts prononcés par les juridictions de l'ordre judiciaire par exemple)74(*). En application de l'article 102 du C.R.C.P., la procédure de l'A.T.D. s'applique pour le recouvrement de toutes les créances publiques exigibles à la date de notification. Elle n'appréhende que les deniers. Quand il s'agit de valeurs mobilières, effet de commerce ou objets mobiliers, détenu par un tiers, il est procédé par voie de saisie75(*). Font aussi l'objet de l'A.T.D., conséquence de son effet attributif, les créances à terme ou conditionnelles 76(*)que le redevable possède à l'encontre des tiers détenteurs actionnés. Peu importe qu'il s'agisse d'impôt en principal ou pénalités ou de frais accessoires77(*).Il en résulte donc que, les créances dont le recouvrement peut être poursuivi par voie d'avis à tiers détenteur, doivent être affectées au privilège du Trésor et avoir pour objet des sommes d'argent .Il peut s'agir, par exemple, de créances de loyers, du solde créditeur d'un compte bancaire, de salaires, de fonds détenus par un notaire, un avocat ou encore par un huissier de justice78(*). Aux termes de l'article 101 du C.R.C.P, les deniers détenus par les dépositaires, détenteurs ou débiteurs, doivent appartenir ou revenir aux redevables d'impôts et taxes et d'autres créances pour faire l'objet d'un A.T.D. Ils doivent donc faire partie du patrimoine du contribuable. Cette condition est requise pour la régularité de l'A.T.D. Ainsi, la jurisprudence marocaine ou comparée, affirme que "l'A.T.D. est considéré, en soi, comme une saisie conservatoire exercée sur les deniers du contribuable. Par conséquence, seules les deniers qui sont à la propriété exclusive de ce dernier, peuvent être visés par la procédure d'A.T.D."79(*). Selon une jurisprudence de la Cour de Cassation française, l'avis à tiers détenteur ne peut être exercé que si les deniers sont à la propriété incontestable du contribuable80(*). * 73 - Le privilège des impôts et taxes est régi par les dispositions des articles 105 et suivants du C.R.C.P.Le privilège des droits et taxes de douanes, le privilège des créances publiques autres que fiscales, le privilège des collectivités locales et leur groupement prennent tous rang après celui affecté aux impôts et taxes. * 74 -CASIMIR (J.P.), op. cit. p.540. * 75 -Instruction relative au recouvrement des créances publiques, op .cit, p.123 * 76 -Les créances à terme sont celles qui sont payées à une échéance postérieure à la date de notification de l'avis à tiers détenteur (loyer, traites...). - Les créances conditionnelles sont celles suspendues jusqu'à la réalisation d'une ou plusieurs conditions (salaires, marchés publics...). * 77 - Instruction relative au recouvrement des créances publiques, op. cit, p.124 * 78 - SID AHMED (K.), op. cit. p.268. * 79 - C.A.A. de Rabat, arrêt n° 226, dossier n° 2/06/87, du 30/04/2007, affaire Trésorier régional de Meknes c. /Société Huilerie de Méknes. * 80 - Cass.civ.2ème ch.1898; Trib. civ. seine 21déc.1954.Gaz. Pal.1955.cité par PASCAL ANCEL PRIVILEGES, privilèges du Trésor, exercice, Fasc.27p.4. |
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