Section 2 - La situation des victimes.
Les victimes sont toutes les personnes
représentées à l'instance en «Class action». Le
terme peut être plus ou moins vaste selon que l'on envisage l'opt
in «Class action» ou l'opt out «Class
action». Des difficultés apparaissent également au stade de
la fixation des dommages et intérêts dus aux victimes de
préjudice de masse, ce d'autant que la solution est différente
selon qu'il s'agit de l'opt in «Class action» ou de
l'opt out «Class action».
Paragraphe 1 - Une application classique des
règles de procédures dans l'opt-in
«Class action».
Dans le système de l'opt in «Class
action», par définition, les victimes sont connues et donc
identifiées comme telles. L'issue de l'action s'impose à elles
selon le principe de l'autorité de la chose jugé, un des
principes directeurs du procès en France. Les victimes
répertoriées ne pourront plus à posteriori remettre en
cause le bien fondé de l'action en «Class action» qui n'a pas
abouti car elles ont fait oeuvre d'une manifestation active de volonté
de s'associer à ladite action. Ainsi, si une victime refuse
d'intégrer l'opt in «Class action», il aura droit à un
procès individuel. Ce qui ne sera pas le cas de celle qui s'est
préalablement jointe à l'action. Ce raisonnement conduit
logiquement à priver de droit d'action fondé sur les mêmes
préjudices, les victimes insatisfaites. L'echec de l'action
en «Class action» supprime le droit d'action individuelle des
victimes qui se sont jointes à l'action. Il en est autrement pour
celles qui ne sont pas jointes à l'action car celles-ci disposent d'un
droit à un procès individuel.
Il apparaît ainsi que l'opt in «Class
action» est en totale adéquation avec les règles
procédurales françaises en matière de
représentation en justice. Ce qui ne paraît pas être le cas
en ce qui concerne l'opt out «Class action».
Paragraphe 2 - L'inadaptation de la solution de l'opt
out «Class action» et
débat qu'elle suscite en
doctrine.
L'opt out soulève encore des
difficultés au stade du dénouement de l'instance, qui conduisent
à envisager avec circonspection son applicabilité en droit
français. Dans le cadre de l'action du type opt out, le nombre
des victimes n'est pas connu et celles ci ne sont pas identifiées
précisément. Par ailleurs, selon cette technique, il faut
expressément s'exclure du groupe pour y échapper, ce qui impose
des mesures de publicité majeure. Ceci étant, quel serait le sort
de victimes inconnues suite à l'échec de l'action? Autrement dit,
quel serait l'effet de la décision de justice défavorable,
vis-à-vis des victimes qui ne se sont jamais manifestées? En
seront-elles tenues?
La réponse à ces différentes
interrogations constitue l'un des principaux obstacles à l'introduction
de la «Class action» dans le système judiciaire
français. En effet, selon le principe de l'autorité relative de
la chose jugée, en vigueur en France, le jugement n'est valable qu'entre
les parties : présentes ou représentées. Suivant cette
logique, les victimes inconnues dans le système de l'opt out
«Class action» ne sont pas assimilables aux parties. Par
conséquent, elles ne doivent pas être tenues par un jugement
auquel elles sont étrangères. Or, paradoxalement (et c'est toute
l'originalité difficilement admissible de la «Class action»),
dans le système de l'opt out, le problème est
inversé. En effet, ne sont exclus de l'opt out «Class
action» uniquement ceux qui ont manifesté leur volonté
expresse de ne pas en faire partie. Tous ceux qui n'ont pas souscrit à
cette formalité sont considérés comme étant partie
à l'action ; même s'ils sont inconnus. La conséquence
juridique de cette acception est de priver des victimes potentielles de leur
droit d'action en justice. La plupart des auteurs s'appuient sur cette
incompatibilité par rapport au principe de l'autorité relative de
la chose jugée pour rejeter la «Class action». D'autres, avec
à leur tête S. GUINCHARD considèrent qu'il s'agit tout
simplement d'une dérogation au principe de l'autorité relative de
la chose jugée en faveur de la «Class action».
L'incompatibilité de l'opt out «Class
action» à la procédure française constatée
à l'analyse de l'hypothèse d'un échec de l'action
persiste-t-elle dans l'hypothèse d'un succès de la «Class
action? La situation des victimes sera-t-elle identique?
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