La problématique de l'application des règles minima des nations unies en RD Congo: analyse et perspectives( Télécharger le fichier original )par Ali BASHIMBE BUGONDO NKUNZI Université de Kinshasa - Licence 2010 |
Section III. Les règles minima des Nations Unies à l'épreuve des réalités congolaisesLa constitution du 18 février 2006 qui régit la RD Congo à son article 41 concernant les enfants mentionne leurs droits fondamentaux et garantit leur protection119(*). La République Démocratique du Congo a ratifié ces instruments internationaux relatifs à la protection de l'enfant en conflit avec la loi par l'ordonnance-loi n°90-48 du 22 Août 190 et a défendu son rapport initial en Mai 2001 devant le comité des droits de l'enfant de Genève en vertu de l'article 44 de la CCDE120(*). Elle a présentement déposé audit comité pour examen son second rapport périodique cumulant les 3ème et 4ème rapports sur la mise en oeuvre de ces instruments, lesquels, à vrai dire, connaissent des obstacles liés à plusieurs facteurs d'ordres politique, social, économique, etc. En effet, malgré l'organisation des élections et la mise en place de nouvelles institutions étatiques, la République Démocratique du Congo est toujours confrontée aux multiples difficultés déchirant le pays depuis plus d'une décennie par des guerres et conflits interminables. Ceux-ci ont entrainé de lourdes conséquences notamment de millions de morts parmi lesquels les populations civiles, des déplacements massifs au niveau interne et externe, des pillages des ressources naturelles, l'insécurité des personnes et de leurs bien à l'Est tout comme à l'Ouest du pays, des attaques ciblées, etc. La reconstruction de l'Etat est rendue difficile faute des infrastructures physiques de communication ou de l'amélioration du fonctionnement de la fonction publique et de l'administration à tous les niveaux. Le budget de l'Etat demeure toujours insignifiant. Une part notable de l'assistance au budget vient de l'extérieur. L'on assiste au fil des années à la confiscation du pouvoir par un groupe de gens, aux violations massives des droits des enfants caractérisée par le déficit d'applicabilité au niveau interne des dispositions contenues dans les instruments juridiques et conventions internationales. §1. Les difficultés socio économiques.La situation socio économique n'est pas encore améliorée, malgré les efforts fournis par le gouvernement congolais et d'autres acteurs. Les défis de la reconstruction sociale et économique sont multiples. Le démarrage économique et handicapé par le cycle d'endettement qui freine d'ailleurs le développement des capacités productives. La République Démocratique du Congo perd chaque année sa croissance économique à cause de l'instabilité. L'Etat se doit en temps de paix, de répondre ou tout au moins de veiller à la disposition des citoyens des structures et infrastructures nécessaires à leur promotion et bien-être socio économique, tels le travail rémunéré, les structures sanitaires et scolaires. Si dans les pays occidentaux le développement a atteint un niveau où l'offre en matière de travail est supérieur à la demande malgré la forte industrialisation et la robotisation, dans les pays du tiers-monde par contre la faible industrialisation, l'équipement insuffisant, le faible taux de scolarisation, et l'inadéquation formation emploi conduisent inévitablement l'homme au chômage et à la misère. En effet, l'époque de l'Etat providence est dépassée surtout en ce qui concerne les pays sous-développés, caractérisés par l'insuffisance alimentaire, monétaire, une démographie galopante et où l'on vit en dessous du seuil de pauvreté. Toutes ces tares conduisent inévitablement à l'errance des jeunes et des enfants, et surtout rend critique la cohésion sociale. Dès lors, pour beaucoup d'enfants, creuseurs de diamants. Ils sont exploités par des adultes espérant des gains rapides qui les font travailler pendant de longues heures, parfois au péril de leur vie (boyaux de mine non étayés), pour quelques pièces qui leur permettent tout juste de se nourrir. Ce travail de creuseur, souvent illégal, les expose aussi aux rafles des gardes. S'ils sont pris, ils sont arrêtés et placé en cellule, sans égard pour leur âge, dans des conditions particulièrement pénibles121(*). Certains même s'enrôlent par désespoir, situation que les « recruteurs » exploitent fréquemment. Ils sont utilisés dans des zones d'exploitation des ressources et sont rétribués avec une modique somme d'argent mais cela constitue pour eux un revenu. 1. Difficultés sociales De manière générale, les indicateurs sociaux sont très alarmants. Au niveau du système éducatif, ce sont les parents qui paient tous les frais. Le taux de scolarisation est de 33 % et le taux général d'analphabetisation est de 52 % en 2010. La qualité de l'instruction est en baisse et les enseignants touchent un salaire modique qui ne leur permet pas de satisfaire leurs besoins vitaux. Selon le rapport sur le développement humain publié en 2010, la République Démocratique du Congo est classé 177ème sur 177 avec un revenu national par habitant à la parité des pouvoirs d'achat de 705 dollars par an. Environ 1200 personnes dont la moitié constituée des enfants meurent chaque jour à cause de la violence, des maladies et de la malnutrition. Cette dernière touche entre 60 et 70 % des femmes et des enfants. a. Les dimensions multiples de la pauvreté des enfants en RD Congo Pour l'organisation des Nations Unies, la pauvreté peut être définie comme étant « la condition dans laquelle se trouve un être humain qui est privé de manière durable ou chronique des ressources, des moyens des choix, de la sécurité et du pouvoir nécessaires, politiques et sociaux122(*).« La pauvreté se rapporte à la privation des biens et services de base, mais elle englobe également des carences en qui concerne d'autres dimensions essentielles des droits de l'homme qui, telles que la réponse et les loisirs et la protection contre la violence et les conflits, élargissement les choix des individus et leurs capacités. Vu que, pour les enfants, la pauvreté dont ils font l'expérience, mut à leur développement mental, physique, affectif et spirituel, il importe tout particulièrement d'élargir la définition de la pauvreté chez les enfants en dépassant les conceptualisations classiques, telles que la faiblesse du revenu du ménage ou les faibles niveaux de consommation. La pauvreté met en péril chacun des droits de l'enfant en RD Congo, l'empêche d'acquérir ce dont il a besoin pour survivre, se développer et s'épanouir. Les enfants manquent le plus de biens et de services essentiels : plus d'un tiers de tous les enfants souffrent de malnutrition, ne vont pas à l'école. La pauvreté illustre la nature multidimensionnelle des menaces qui pèsent sur les enfants : chaque privation exacerbe les effets des autres, et lorsque deux d'entre elles, voire les trois, conjuguent leurs effets, l'impact sur la vie des enfants est catastrophique. Les enfants qui vont chercher de l'eau à une source éloignée ont moins de temps pour aller à l'école et ce problème touche particulièrement les filles. Ces privations, et d'autres, telles que l'absence d'un logement adéquat et d'accès aux services sociaux, empêchent les enfants à jouir de leurs droits à l'éducation, à une bonne nutrition et aux soins de santé, l'enfance restera menacée. La pauvreté met souvent les enfants en contact avec la loi ; et les systèmes de justice pénale, qui ne tiennent pas compte des droits des enfants accusés d'avoir commis des infractions, peuvent perpétuer la pauvreté123(*). Lorsque les enfants sont accusés d'infractions (telles que le vol de nourriture), et lorsque la seule solution est la détention, on les sépare de bonne heure de leur famille et du reste de la communauté, ce qui les empêche d'acquérir, l'éducation de base pour évoluer dans la société et échapper à la pauvreté une fois adultes. Même après leur remise en liberté, ils sont souvent désignés à l'opprobre public et peuvent éprouver des difficultés à se réinsérer dans la collectivité ; facteurs qui aggravent leur marginalisation et leur pauvreté par la suite. Dans tous ces cas, les séquelles de la pauvreté, loin de ne concerner que la première génération, peuvent se transmettre aux générations à venir. En mettant en lumière les façons dont la pauvreté empêche les enfants de donner le meilleur d'eux-mêmes et de participer sur un pied d'égalité à la vie de la société. Les enfants en RD Congo sont privés d'un grand nombre de leurs droits : survie, santé et nutrition, éducation, participation et protection contre tout préjudice, exploitation et discrimination. Ces privations plongent les enfants dans la détresse à court terme. Elles sont généralement associées à trois facteurs structurels : faible revenu du ménage ; absence d'infrastructures physiques dignes de ce nom, souvent liée à la faiblesse des investissements publics et faiblesse des institutions. b.La pauvreté prive les enfants de leurs droits en RD Congo Lorsqu'ils vivent dans la pauvreté, les enfants sont privés de bon nombre de leur droits, dont notamment le droit à la survie, à la santé et à la nutrition, à l'éducation, à la participation et à la protection contre la violence, l'exploitation et la discrimination. La pauvreté met en péril l'enfance de la façon la plus directe qui soit : en menaçant le droit qu'a un enfant de vivre. La survie de l'enfant a toujours été au coeur de l'action de la communauté internationale de développement et sauver la vie de nourrissons et protéger la santé des mères et des enfants demeurent l'une des principales priorités de l'UNICEF. Sur le plan de la santé et nutrition, la pauvreté met en péril l'enfance en exposant des millions d'enfants à des maladies qui pourraient facilement être évitées ou guéries au moyen de médicaments et de vaccins peu coûteux. Tous les ans, cinq milles enfants meurent en RD Congo faute de ne pas avoir pu bénéficié de vaccins pourtant courants. La malnutrition joue un rôle dans environ la moitié de ces décès. Les carences en micronutriments entrent également en ligne de compte : un enfant atteint de carence en Vitamine A. même lorsqu'elle ne met pas directement en danger les jours de l'enfant, la malnutrition peut causer chez un jeune enfant des retards de croissance ou des handicaps et nuire au développement du cerveau et aux facultés d'apprentissage de l'enfant, l'empêchant d'acquérir les compétence dont son avenir dépend. Le manque d'accès à l'eau salubre et à des installations sanitaires adéquates est un facteur de transmission des maladies, d'aggravation de la malnutrition et d'affaiblissement de la santé. En ce qui concerne l'éducation : 12 millions d'enfants en âge d'aller à l'école en RD Congo qui ne sont pas scolarisés sont privés de leur droit à l'éducation du fait de la pauvreté, parce que leur famille n'a pas les moyens de s'acquitter de frais de scolarité, parce que l'insuffisance des budgets nationaux empêches de construire des établissements scolaires adéquats, ou parce qu'ils doivent travailler pour pouvoir manger124(*). La majorité de ces enfants sont des filles, qui sont souvent les premières à ne plus aller à l'école en cas de difficultés financières. Même lorsque les filles sont scolarisées normalement, il se peut qu'elles obtiennent de moins bons résultats du fait des stéréotypes sexistes qui subsistent ou des responsabilités ménagères qui les empêchent d'aller régulièrement à l'école. Non seulement la pauvreté met en péril la vie des enfants, mais elle accroit également leur vulnérabilité face à d'autres dangers, en favorisant la violence et l'exploitation, notamment le travail des enfants. Les prédateurs qui vendent des esclaves ou l'exploitation sexuelle ne vont pas chercher leurs proies dans les bans lieux aisées ; ils recrutent dans les bidonvilles les plus pauvres ou dans les régions rurales les plus défavorisées, là où la pauvreté extrême rend souvent les enfants plus vulnérables. Les projets de développement nationaux et internationaux présentent souvent les enfants comme les bénéficiaires de la charité, plutôt que comme des participants actifs à l'élaboration de leur propre avenir, et tiennent trop rarement compte de l'avis des enfants dans les stratégies mises ou point en leur faveur. Pourtant, la réduction de la pauvreté peut accroître le pouvoir d'action des enfants, tout comme la pauvreté peut les condamner au silence. 2. Difficultés économiques. La RD Congo dispose d'une économie non compétitive par rapport à d'autres pays africains. Selon la banque mondiale, l'économie congolaise occupe en 2010, la 178ème position c'est-à-dire la dernière place sur la liste des pays du monde considérés d'après leurs capacités à offrir des réelles facilités pour réaliser des affaires125(*). Plus de la moitié des enfants congolais travaillent durement dans des environnements insolubles pour contribuer aux charges des ménages, indique l'enquête socio-économique réalisée dans quelques villes du pays. Les résultats de cette étude démontrent que la RD Congo est encore loin de respecter les droits fondamentaux relatifs à la liberté, à la santé et au loisir des enfants. La population vit avec une moyenne de 0,30 dollars par jour soit une valeur de trois beignets de 100 francs congolais par jour. Aujourd'hui en RD Congo douze milles enfants travaillent dans les mines, un enfant qui travail dans les mines, le fait par cause de pauvreté126(*). Le système éducatif n'est pas bien organisé et l'Etat alloué un quota dérisoire à l'éducation et à la formation technique et professionnelle. Avec cette précarité qui engouffre les ménages au Congo, les enfants ne bénéficient pas d'une éducation suffisante. Le problème souvent, c'est la pauvreté, c'est le chômage des parents ; tout dépend de la gestion et de la volonté politique de l'Etat. Les crises politiques à répétition que connait la RD Congo depuis son indépendance jusqu'à ce jour n'ont pas entraîné que la violence et les guerres civiles127(*). Nous avons souligné plus tant qu'elles avaient aussi entrainé une délinquance de l'Etat qui s'est soldé par le démantèlement du tissu socio-économique du pays, un phénomène qui a fini par rendre les parents incapables d'assumer leurs obligations familiales, ce qui a placé l'enfant congolais devant issue fatales : ~ Quitter l'école que les parents ne peuvent plus payer pour aller travailler pour sa survie ou celle de sa famille ; ~ Se délocaliser de la famille vers la rue où il est entraîné dans l'engrenage drogue, violence et criminalité ; ~ Prendre le raccourci de la prostitution. Ceux qui réunissent à résister à cette triple fatalité ont beaucoup de chance d'être chassés par la force du tout familials vers la rue, à la faveur des fausses croyances au phénomène « enfant sorcier », qui constitue par ailleurs un idéal prétexte utilisé par certains parents moins scrupuleux, ne pouvant plus assumer leurs obligations familiales. Les garçons et les filles accusés de sorcellerie sont souvent victimes de services corporels et affectifs, tenus à l'écart des autres enfants, retirés de l'école et privés de tout contact physique avec d'autres membres de la famille. Il se peut que des parents, des tuteurs ou des frères et soeurs plus âgés accusent un enfant de pratiquer la sorcellerie ou d'être « possédé » lorsqu'une maladie ou un décès survient dans la famille, qu'un revenu ou un emploi fixe est perdu ou qu'un comportement anormal est perçu chez l'enfant128(*). L'impossibilité pour les parents ou les tuteurs de payer les frais de scolarité et autres coûts liés à l'enseignement primaire était l'une des raisons pour lesquelles les enfants commençaient à passer du temps dans les rues, ces enfants restent chez eux sans avoir rien à faire et très vite, ils sont dans la rue pour chercher du travail ou s'amuser. Ils peuvent facilement être exploités par des adultes qui les paient très peu, souvent pour des tâches très dures. Ou ils commencent à fréquenter des enfants qui vivent dans la rue depuis quelques temps. Ils risquent de commencer à boire de l'alcool, à se droguer ou à commettre des délits. Une fois habitués à la vie de la rue, ils quittent leur foyer et rejoignent des gangs de délinquants de rue129(*). Vue l'impossibilité pour les parents de payer les frais à leurs enfants s'entraîne la déscolarisation des enfants. Plusieurs parents, ont exprimé leur inquiétude pour « l'avenir de leurs enfants qu'ils ne peuvent plus scolariser faute de moyens ». Pourtant, soulignent-ils, « l'article 43 de la constitution du pays affirme que l'enseignement primaire est obligatoire et gratuit dans les établissements publics130(*). Tandis que l'article 44 dit que l'éradication de l'analphabétisme est un devoir national pour la réalisation du quel le gouvernement doit élaborer un programme spécifique131(*). Il n'existe aucun programme politique en matière d'enseignement dans notre pays. La souffrance des parents, qui supportent l'enseignement en payant de leurs poches les salaires des enseignants, afin par dévoiler, depuis les années 1980, l'incapacité totale du gouvernement à prendre en charge le domaine de l'éducation. * 119 Art. 41 de la constitution de la République Démocratique du Congo, in journal officiel, Février 2006. * 120 Art. 44 de la convention relative aux droits de l'enfant, in journal officiel, numéro spécial, Avril 1999. * 121 HABIBU,J.B ,Effectivité du statut de la cour Pénale international, éd. ACAT,BUKAVU,2008,p.51 . * 122 Gordon, David, et al. Child poverty in the developing world, the policy press, Bristol, October 2003, p. 75. * 123 Nations Unies : nous les enfants, examen de fin de décennie de la suite donnée au sommet mondial pour les enfants, A/S-27/3, Nations Unies, New-York, 4 mai 2009. * 124 PNUD ,Rapport sur le Développement humain 2010 p98 * 125 * 126 VANISTENDAEL,S,. « Resilence and spirituality »,dans Barbara Monroe, David Olivier,Resilence in Palliative Care,Oxford University,Press,Oxford,2007 ,p81 * 127 * 128 TOUCHARD, L., Enfants de la rue, C.R.I.S.P, Bruxelles, 2009, p. 89. * 129 LOKASOLA, F., RD Congo, Quel avenir ? les enfants de la rue, Safari, Kinshasa, 2009, p. 113. * 130 Art. 43 de la constitution de la République Démocratique du Congo, in journal officiel, février 2006. * 131 Art. 44 de la Constitution de la République Démocratique du Congo, in journal officiel, février 2006. |
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