IV.6 : Construction et
exploitation d'une carte cognitive
Pour arriver à construire une carte cognitive, puis
l'exploiter, Rod Tabber a défini cinq phases :
1) La sélection de la source d'informations.
2) L'acquisition de la carte cognitive.
3) La conversion de la carte en forme de matrice.
4)
L'inférence.
5) La construction de la base de connaissance globale.
6.1 : La sélection de la source d'informations
Axelrod a proposé deux méthodes pour la phase
suivante « L'acquisition de la carte cognitive » :
a) Dériver une carte à partir d'un document.
b) Dériver une carte à l'aide d'un groupe
d'experts (par questionnaire).
Donc on a deux sources d'information : les documents et
les experts.
Selon Axelrod, la dérivation d'une carte cognitive
à partir d'un document est une méthode couteuse en terme de temps
puisqu'elle exige la codification d'un texte donné, phrase par phrase et
elle nécessite un codeur assez compétant. Donc dans cette
méthode, le principal déterminant est la longueur du document. Il
semble jusqu'à maintenant, qu'il n'y a pas une manière pour
automatiser la codification. Travaillant à la main, la vitesse typique
de codification est dans l'intervalle de deux à quatre heures par mille
mots, bien entendu que le tout dépend de la compétence du codeur
et de l'intensité d'assertions causales dans le texte. Il faut en plus
une heure ou deux par mille mots pour des activités
complémentaires, comme vérifier la sureté entre les
codeurs et construire une carte finale ; en résumé on a
besoin de trois à six heures de travail par mille mots. Avant de se
lancer dans la création d'une carte cognitive à partir d'un
document sur un certain domaine, il est préférable de
vérifier si on a bien choisi le bon document, c'est-à-dire, si le
document contient des idées claires ; afin d'atteindre ce but on a
quatre exigences que le document devrait vérifier :
1) Le document doit contenir suffisamment d'assertions
causales, pour fournir du matériel à analyser.
2) Le document doit avoir de l'information suffisante sur le
domaine de manière à ce que le codeur puisse comprendre la
signification des mots.
3) Le document doit être complet, c'est-à-dire,
il contient toutes les informations nécessaires et pertinentes sur le
domaine.
4) Le document doit être une représentation
fiable de la réalité.
Pour la méthode utilisant des questionnaires, c'est le
temps des répondants (experts) qui est le facteur majeur. Le nombre de
question autour les liens causaux est 2n-n, où n
représente le nombre de concepts. Utiliser un panneau d'experts pour
créer une carte cognitive est un bon choix. Dans ce cas, la carte
cognitive est généralement plus précise qu'une carte
construite avec l'opinion d'un seul expert.
6.2 : L'acquisition de la carte cognitive
6.2.1 : L'acquisition à partir d'un document
Une fois le bon document est choisi, il faut suivre les
étapes de ce processus :
Etape1 : Produire deux listes, une pour les concepts et
autre pour les assertions causales, où ces deux listes sont extraites
à partir du document et reflètent les concepts et les relations
de cause à effet.
Remarque : il n'est pas nécessaire de conserver le
mot original qu'il était dans le texte, c'est-à-dire, les noms de
concepts peuvent être similaires mais pas forcément identique.
Etape2 : Placer les concepts pour construire la carte.
Etape3 : Relier les concepts par les relations
causales.
6.2.2 : L'acquisition à l'aide d'un groupe
d'experts
Pour commencer à construire la carte cognitive il faut
suivre ces étapes :
Etape1 : Identifier les concepts pertinents, où on
peut demander aux experts d'écrire une liste de tous les concepts
pertinents pour le domaine à analyser.
Etape2 : Limiter le nombre de concepts en évaluant
leur importance.
Etape3 : Choisir les arcs et ses poids (les relations
causales).
Cette étape se fait comme suit :
1) Distribuer des questionnaires au panneau d'expert avec
toutes les combinaisons possibles des concepts précédemment
sélectionnés.
2) Les experts doivent assigner un signe parmi {-,0,+} pour
chaque paire de concepts différents.
3) Rassembler les cartes de chaque expert et les
intégrer dans une seule carte cognitive.
Etape4 : Retourner la carte résultante aux experts
pour des discussion et modifications. Les désaccords devraient
être identifiés et analysés. La carte est
généralement modifiée plusieurs fois avant que les experts
soient satisfaits du résultat final.
6.3 : La conversion de la carte en forme de
matrice
A vrai dire, la forme graphique de la carte cognitive sert
seulement à faciliter sa conception et sa compréhension. Pour
exploiter la carte cognitive il faut la transformer sous une forme matricielle,
où tous les mécanismes d'inférence se basent sur la
représentation matricielle. Donc avant de passer à la phase
suivante « Inférence », il faut extraire la matrice
d'adjacence de la carte cognitive.
6.4 : L'inférence
Selon Larousse 2008, inférence est une opération
intellectuelle par laquelle on passe d'une vérité à une
autre vérité. Une caractéristique importante des cartes
cognitives réside dans le fait qu'on peut faire des inférences et
voir comment tel ou tel concept influence sur tel ou tel autre concept.
L'inférence causale donne des réponses aux
questions de type « qu'arrivera-t-il si ». Pour pouvoir
obtenir la réponse à cette question, il faut suivre cet
algorithme : supposons qu'on a une carte cognitive de n concepts
1. Extraire la matrice d'adjacence Adj.
2. Préparer le vecteur exciteur E1.
a. Initialiser le vecteur exciteur à zéro
(0).
b. Chaque valeur i représente l'état de concept
i.
c. Mettre
à + les concepts voulus. C'est-à-dire les concepts qu'on veut
voir qu'arrivera-t-il s'ils sont activés.
d. Ajouter E1 à la mémoire de travail
MT (cette mémoire contient tous les vecteurs-résultants du
processus d'inférence).
3. Faire le produit matriciel Ei+1=
Ei Adj /i=1,2...
4. Si Ei+1 appartient à la mémoire de
travail alors on a obtenu un comportement typique.
Sinon
a. Remettre à + les concepts voulus du départ
pour le vecteur Ei+1.
b. Mettre à 0 les valeurs négatives pour le
vecteur Ei+1.
c. Ajouter Ei+1 à la mémoire de
travail.
d. Incrémenter i et aller à 3
En résume le processus est comme suit Ei+1 =
F[Ei x Adj] /i=1,2,..,Imax .où F est la fonction de seuil (la
fonction de seuil est représentée par les deux premier point
après le « sinon » dans le l'algorithme
ci-dessus).
Soit on laisse l'algorithme se stabilise à
soi-même ou on le fixe par un nombre d'itérations maximal Imax.
Cet algorithme donne comme sortie un vecteur-résultant
de dimension 1xn qui contient la liste des réponses. Chaque
élément i de ce vecteur qui est différent à 0
indique que le concept i va avoir une augmentation si les concepts voulus du
départ ont une augmentation et vice-versa.
On prend comme exemple, la carte cognitive de la figure 4.1,
si on veut connaitre « qu'arrivera-t-il si l'infection virale est
activée », on fait l'inférence comme suit :
Vecteur stimulant (exciteur) E1 = (0,+,0,0)
E1 x Adj = (0,0,0,+)-->Fonction de seuil-->(0,+,0,+) =
E2
E2 x Adj = (0,+,0,+)-->Fonction de seuil-->(0,+,0,+) =
E3 = E2
Et l'interprétation sera comme suit : si le
concept « Infection virale » est activé, alors le
concept « Personne contagieuse » aura une augmentation.
Remarque : il y a une autre alternative pour ce qui
concerne la fonction de seuil, où Tabber et Peurish donnent
« -» pour toutes valeurs négatives. Dans ce cas on va
trouver aussi les concepts dont vont avoir une diminution si les concepts
sélectionnés au départ ont une augmentation.
6.5 : La construction de la base de
connaissance globale
Enfin, on peut construire notre base de connaissance globale
par l'inférence sur tous les scénarios possibles,
c'est-à-dire, voir qu'arrivera-t-il si n'importe quelle combinaison
possible de concepts est activée.
A la fin de ce chapitre, on peut supposer qu'on a compris les
cartes cognitives : ses types (simple, floue et neutrosophique) et ses
éléments de base (concepts et liens causaux). Aussi on a vu la
notion d'effet indirect et effet total (deux notions très importantes
pour le processus d'inférence) et la relation des cartes cognitives avec
les trois chapitres précédents, et en fin on a vu comment
construire et exploiter une carte cognitive afin de nous aider dans la prise de
décision.
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