Problématique d'administration de la preuve de l'infraction de viol en droit pénal burundais( Télécharger le fichier original )par Axelle Nzitonda Université Lumière de Bujumbura - Licence en droit 2007 |
VII. Viol en temps de guerreCes dernières décennies, les viols commis durant le génocide au Rwanda et au cours de la guerre au Burundi, au Libéria et plus récemment au Congo ont fait l'objet d'une attention croissante de la communauté internationale.43(*) Comme son appellation l'indique, cette forme de viol s'observe en temps de conflits armés. En effet, ces conflits armés exposent les femmes à un risque accru, souvent massif de violences sexuelles. On distingue différents types de viols en temps de guerre comme par exemple : 1° Viol comme arme de guerre : cette forme de viol vise l'exclusion symbolique du sujet par destruction de l'identité individuelle, culturelle et ethnique. Il s'agit généralement des viols de masse (perpétrés sur de nombreuses victimes), de viols multiples (une victime est agressée à plusieurs reprises) et des viols collectifs (la victime est agressée par plusieurs assaillants) accompagnés le plus souvent de brutalité et de coups.44(*) En effet, les femmes sont vues comme l'incarnation de l'identité culturelle adverse et leur corps comme un territoire à conquérir ou comme un moyen d'humilier les hommes de leurs communautés. Dans certains cas, le viol est une stratégie délibérée visant à corrompre les liens communautaires. Il constitue une forme d'attaque contre l'ennemi et caractérise la conquête et l'avilissement de femmes et des combattants. 2° Viol opportuniste : les belligérants profitent de l'avantage que leur procurent leur armes pour exiger les faveurs sexuels des femmes de la communauté adverse, voir de la leur. Ainsi lors des conflits armés au Burundi, les femmes n'étaient pas violées uniquement par les combattants ennemis mais également par les hommes de leur propre camp.45(*) 3° Les viols perpétrés par des individus infectés par le VIH en vue de contaminer volontairement les femmes de la communauté adverse. 4° Les violences sexuelles comme monnaie d'échange : certaines femmes sont contraintes de consentir à des relations sexuelles pour survivre, en échange de nourriture, d'un abri de protection.46(*) 5° Les mariages et les grossesses imposés par la force. 6° L'esclavage sexuel imposé aux enfants soldats ainsi qu'aux jeunes filles et aux fillettes chargés des tâches domestiques des belligérants. 7° La prostitution forcée ou l'esclavage sexuel imposé aux femmes emmenées comme butin de guerre. En somme, on dirait que malgré la fin de la guerre, le viol n'a cessé de se répandre à l'échelle nationale comme nous le montre le graphique de l'évolution des statistiques sur le viol ci-dessous présenté. Source : Rapport annuel de la Ligue « ITEKA » sur la situation des droits de l'homme, Bujumbura, inédit, 2007, p.101. Au vu de ce graphique, les statistiques ci-dessus montre une allure plutôt ascendante de la situation. Le nombre de victimes de viol a presque doublé de l'année 2003 à 2006. Trois réalités entourent cette montée selon la ligue«ITEKA ». D'une part le phénomène de viol a pris des dimensions inquiétantes. D'autre part, les victimes de ce crime sortent de plus en plus de l'ombre, encouragées par l'existence des structures de leur prise en charge. Enfin, même les communautés de plus en plus sensibilisées encouragent les victimes à dénoncer ce mal ou le dénoncent elles-mêmes.47(*) - Répartition des victimes selon la fonction Nous remarquons que le phénomène de viol touche presque toutes les catégories sociales : les écolières, les élèves et étudiants, les cultivatrices, les fonctionnaires, les commerçants, les domestiques, etc.
Source : Bulletin d'information de la Ligue « ITEKA » n°69, p.22. A voir ce graphique, ce sont les cultivatrices, les écolières, les élèves qui sont le plus souvent touchés. On pourrait penser que c'est dû au fait que les cultivatrices passent beaucoup plus de temps dans leur champs et que ces champs sont le plus souvent loin de leur maison ; pour les écolières et les élèves, en raison de leur vulnérabilité du fait de leur âge et le fait de prendre le même chemin de l'école tous les jours en allant à l'école les exposes beaucoup à ce crime. -Catégories d'auteurs du viol Source : Rapport annuel de la Ligue « ITEKA » sur la situation des droits de l'homme, Bujumbura, inédit, 2007, p.102. Ce graphique montre que sur un total de 359 cas de viol rapportés à la Ligue « ITEKA » et dont les auteurs présumés ont été identifiés, 63,2% de viol ont été commis par des voisins. Ceci est une preuve que l'entourage immédiat de la femme et de l'enfant est devenu le moins sécurisant au moment où dans le temps, il constituait plutôt le garde-fou le plus sûr. Cette situation déplorable est par ailleurs plus difficile à combattre et à éradiquer puisque même ceux qui devraient prendre part dans le combat pour protéger les victimes de viol ont rejoint le rang des criminels.48(*) * 43 JOSSE E, Violences sexuelles et conflits armés en Afrique : http://www.resilience.netfirms.com.(27/08/2007) * 44 JOSSE E, Violences sexuelles et conflits armés en Afrique : http://www.resilience.netfirms.com.(27/08/2007) * 45 JOSSE E, Violences sexuelles et conflits armés en Afrique : http://www.resilience.netfirms.com.(27/08/2007) * 46 JOSSE E, Violences sexuelles et conflits armés en Afrique : http://www.resilience.netfirms.com.(27/08/2007) * 47 Ligue Burundaise des Droits de l'homme « ITEKA », Rapport annuel sur la situation des droits de l'homme, Bujumbura, inédit, 2007, p.101. * 48 Ligue Burundaise des Droits de l'homme « ITEKA », Rapport annuel sur la situation des droits de l'homme, Bujumbura, inédit, 2007, p.102. |
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