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Syndrome de la guerre : lorsque le psychisme ne cesse de rappeler

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par Shqipe BUJUPI
Institut libre Marie Haps - Assistante en psychologie 2005
  

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Chapitre III. Analyse transversale

Pour faciliter l'élaboration de notre partie pratique et pour éviter les répétitions, nous avons décide dans notre analyse transversale de reprendre parfois plusieurs questions ensembles qui vont plus au moins dans le même sens. A travers des réponses obtenues par les professionnels nous allons essayer d'analyser des différents points de vus qui impliquent la notion de traumatisme. Pour diminuer la lourdeur de la lecture, nous avons inclus dans ce chapitre une analyse comparative avec les auteurs de référence de notre partie pratique

1. Autour de traumatisme : (question 1, 2)

Nous avons remarqué que les définitions du traumatisme pointent des similitudes au regard des références théoriques présentées dans cette étude. Pour ceux qui optent pour les conceptions freudiennes, le traumatisme sera un événement qui s'impose par violence (sujets A et D), où l'intégrité physique et/ou psychologique de la personne (sujet B et D), où de ses proches, a été mise en péril (sujet D). La victime se trouve sans ressource et répond par l'effroi (sujet D). Ceci déborde les capacités d'adaptation (sujet C), fait effraction dans le psychisme, déchire l'enveloppe protectrice215(*) (sujet A).

Le sujet B nous parle de rupture : Confrontation à la mort, douleur extrême avec atteinte du point de rupture. Personne n'est immunisé contre le traumatisme, donc c'est une réaction tout à fait normale (sujet C).

Concernant la rencontre de la mort en situation de guerre, le sujet C souligne que même si on n'est pas confronté directement elle sous-entend un danger de mort. Et « la confrontation à la mort est effrayante car, est inhabituelle, parce que personne ne sait ce qu'est la mort : « Personne n'y a été pour nous dire : « voilà, c'est ça !»

Nous voyons que le sujet C perçoit la représentation de la mort, telle qu'elle est décrite par certains spécialistes (Lebigot, Crocq, etc.). « Nous n'avons pas de " représentation mentale " de la mort, pour la bonne raison que nous n'en avons jamais eu de " présentation " préalable » 216(*).

Les sujets ont mis en évidence qu'on peut être traumatisé par différents facteurs. À part d'une confrontation à la mort, viol, torture, etc., d'autres facteurs peuvent aussi déclencher un traumatisme comme le fait de voir sa maison brûler, de perdre toutes ses biens etc. sans pouvoir porter plainte ou réclamer la réparation du préjudice subi, etc. (sujet A), etc. Il existe également d'autres événements qui peuvent entraîner des blessures profondes et qui ne concernent pas la guerre (sujet A et B). Un mauvais regard, le manque d'affection, la perte d'êtres chers, etc. (sujet A) ou encore la maltraitance dans l'enfance, etc. (sujet B).

Toutefois, tous les professionnels distinguent les traumatismes provoqués par les catastrophes naturelles ou accidentelles et les traumatismes infligés par l'humain. Les traumatismes provoqués par l'homme et, précisément, dans un contexte de guerre, ébranlent la foi en l'Homme par le fait que le mal vient de l'humain. Dans ces cas, ils soulignent que la souffrance, la douleur est plus profonde  parce que l'humain présuppose que l'homme est bon et que cette image de l'humain est confrontée à la représentation extrême de l'homme mauvais (sujet C). Non seulement la personne est blessée dans son corps, dans son psychisme, mais quelque chose se déchire au niveau de la confiance en l'homme, en l'être humain (sujet A). Nous trouvons ces considérations aussi dans la théorie.

D'après certains auteurs comme Günter Seidler « Les traumatismes d'origine humaine laissent des traces plus profondes que ceux déclenchés par des catastrophes naturelles, et ils sont d'ailleurs plus difficiles à traiter»217(*).

Suite à notre question consistant à déterminer si l'impuissance, les humiliations, les chosifications dans les cas de tortures, viols, etc., qui touchent directement le narcissisme de base du sujet, ont des répercussions plus graves sur la victime ; les professionnels sont d'accord : il y a des complications en raison de ces composantes supplémentaires.

La bombe est lâchée avec l'intention de détruire mais, au niveau psychique, cela peut être moins destructeur car la victime n'est pas confrontée directement à l'agresseur. Cette situation est plutôt en lien avec la vision de l'horreur. Tandis que, quand il y a une agression directe, ce qui est le cas de la torture ou du viol, « l'autre (la victime) est déshumanisé : c'est un chien, c'est une merde, un inhumain,... ». Par exemple, dans le cas du viol, la femme revoit le visage du violeur qui vient s'interposer dans des situations d'intimité (sujet B). Elle est en face de son bourreau qui dispose d'elle comme il veut (sujet A). Cette incapacité de réaction est autant douloureuse parce qu'on est réduit à l'impuissance totale (sujet C). Cette douleur atteint la dignité de son être. On mesure les répercussions à travers leur relations : peur de se confier à quelqu'un, entrer dans une relation affective, perte d'amour, incapacité à assumer des relations sexuelles, etc. (sujet A). Voici comment Crocq englobe les dires de nos sujets : « Le viol fait intervenir dans le trauma qu'il occasionne les sentiments d'impuissance, de révolte réfrénée, de honte, de dévalorisation, d'inhibition, de rejet social, de frigidité, de culpabilité pouvant conduire au suicide »218(*).

Le sujet A nous parle aussi de l'impuissance à protéger son enfant : il y a une sorte de déception par rapport à sa responsabilité. Le bourreau ne fait pas seulement mal à l'être humain mais également au père, dans son rôle du père protecteur.

Pour Crocq219(*), les violences délibérément exercées, les mauvais traitements infligés sans motif à des sujets sans défense, prisonniers ou déportés, et la torture appliquée avec sadisme, sont des situations traumatisantes qui suscitent un maximum d'horreur et d'incompréhension. Par rapport aux autres traumatismes et agressions, il y a alors violation explicite de la loi qui régit au sein de chaque conscience les droits les plus élémentaires de l'Humanité. Les professionnels vont dans le même sens. Les traumatismes générés par l'homme notamment dans un contexte de guerre brisent les liens avec le monde. Ces blessures sont d'ordre relationnel (sujet C). L'agression provoquée par l'homme rompt les liens familiaux (sujet B), rompt le sentiment d'appartenance, de la communauté, (Le sujet A, C), à la vie en société (sujet B et D), au monde (sujet C). Il y a rupture liée à l'exil  (sujet B). Quelque chose se déchire, s'ébranle au niveau de la confiance en l'homme (sujet A et C) car, tout d'un coup, il y a des transgressions des lois fondamentales  sur lesquelles se construisent la vie collective et sociale (sujet D). Ce sont les liens concrets et symboliques qui permettent normalement de faire face à la douleur et de donner du sens aux expériences (sujet B), sur lesquels on base l'ensemble de relations, des valeurs (sujet D).

Le comportement des victimes qui ont tendance à s'isoler, à se replier sur elles-mêmes, qui deviennent méfiantes par rapport à l'entourage explique cette altération de relation (sujet C)220(*).

C'est ce que nous dit Crocq221(*) : « tout l'environnement, les choses comme des êtres, deviennent agressifs pour la personne traumatisée. C'est une autre manière de percevoir, de sentir, d'agir, etc. »

Les perceptions de nos sujets nous rapprochent de l'expérience de non-sens dans une existence jusqu'alors sensée. Il s'agit des bouleversements à différents niveaux. « A l'instant de l'irruption traumatique, l'espace ordonné du monde physique bascule pour faire place au chaos ; les convictions narcissiques s'effondrent, laissant le sujet désemparé ; les valeurs essentielles de l'existence - paix, morale, prix de la vie et accessibilité au sens des choses - sont tout à coup déniées et remplacées par l'absence d'ordre, de cohérence et de signification ».222(*).

Tandis que Rousseau les décrit comme suit : « c'est qui fonde l'humanité même du sujet qui est touché : les liens sont rompus, la Loi attaquée, l'ordre symbolique bouleversé, les tabous fondamentaux brisés ». (...). Ce type de situation affecte non seulement les individus, mais aussi la famille, le groupe qui se trouvent désorganisés, privés parfois de leur capacité à se protéger les uns les autres »223(*)

Nos sujets parlent aussi des traumatismes liés à l'exil. Pour le sujet D, à part des traumatismes marqués par un événement unique et ceux marqués des événements répétés, il existe également des traumatismes qui restent « à l'oeuvre » : certaines personnes se trouvent momentanément loin des conflits, mais l'état de danger n'est pas terminé. « ...c'est le cas pour pas mal de demandeurs d'asile qui sont dans la procédure où, non seulement ils ont été victimes d'événements traumatiques au sens le plus dur du terme, mais en même temps, ils ne sont pas sûrs, ils n'ont pas la garantie que c'est terminé ». Certains auteurs vont dans même sens : « (...) exil, oui, mais pas garanti, avec le risque de se voir refuser cet asile et de devoir être menacé d'expulsion. On imagine sans peine combien cette insécurité dans la réalité entre en résonance avec le sentiment d'insécurité interne »224(*) .

Pour d'autres encore les traumatismes se répètent ici (sujet C) du à la précarité sociale, rejet, racisme, etc. (sujet B). A côté de cela, il y a d'autres atteintes à la valorisation narcissique : la non reconnaissance professionnelle, la perte du statut social, l'inactivité forcée, etc. (sujet D). Au niveau théorique, nous avons décrit que pour certains auteurs « les réfugiés traumatisés dans leur pays d'origine vivent (...) un triple traumatisme : le traumatisme pré-migratoire, les effets potentiellement traumatiques de la migration et le traumatisme découlant du déni de leur vécu par le pays d'accueil ».

Dans la partie théorique, nous avons mis en évidence que, dans un contexte de guerre, de nombreuses personnes ont vécu des traumatismes multiples. Les auteurs appellent cela le poly-traumatisme. Nos sujets confirment la théorie. La plupart des patients traumatisés par les conséquences de la guerre ont vécu plusieurs événements traumatiques cumulés pendant des mois, voire des années (sujet C). M. Samy décrit la complexité du trauma comme suit : « ...Le trauma suite à la violence politique comme celui qui touche les réfugiés du Kosovo, n'est pas uniquement un trauma ponctuel (exemple: un accident d'auto), (...). Mais c'est également un trauma continu, un trauma du vécu quotidien et qui se prolonge dans le temps (...) »225(*). Pour le sujet C, ces personnes sont dans un contexte de traumatisme complexe auquel s'ajoute toute une co-morbidité psychiatrique et donc plus difficile à traiter. Certains auteurs226(*) citent aussi cette complexité : « les personnes polytraumatisées de guerre sont des groupes à haut risque qui devraient bénéficier prioritairement de soutien psychologique, de suivi et de réinsertion ».

En ce qui concerne les disparus, tous nos sujets mettent l'accent sur la difficulté même de l'impossibilité de faire le deuil. Il est évident que d'avoir vu un être cher et d'avoir pu l'accompagner dans ses derniers moments (sujet A et C), accomplir le rituel, l'enterrer (sujet C), aide à faire le deuil. Dans le cas de la disparition, il est très difficile (sujets A et C), presque impossible (sujet D), de terminer un travail de deuil (sujets A et C). Le deuil devient parfois compliqué et peut même évoluer vers un deuil pathologique (sujet A), car les proches du disparu se trouvent dans l'ambiguïté entre vie et mort (sujets A, B, C, D). Dans ce cas, le deuil est gelé en raison de l'espoir des retrouvailles (sujet B). Les proches pensent que le disparu est peut-être en prison, en train de subir des violences, etc. (sujet C). Les proches ne peuvent même pas dire « maintenant au moins il ne souffre plus » et cela est une source d'angoisse à laquelle on pense moins souvent peut-être (sujet B). Dû à ces sentiments diffus persistant, entre espoir et déception (sujet A), le deuil ne peut pas être définitif (sujet C).

Par conséquent, comme nous l'avons exposé dans la partie théorique, la morbidité psychique se complexifie par la spécificité de la perte des ses proches. Dans ces cas, les auteurs parlent de deuil traumatique. « Pour les deuils traumatiques, la sémiologie est double avec un état de stress post-traumatique et un syndrome "dépressif" caractéristique de l'état de deuil. L'accent est mis sur des considérations étiopathogéniques, en particulier, le lien de causalité traumatogène entre les circonstances de la mort, de la disparition et les réactions psychiques de l'endeuillé» 227(*) .

Malgré le fait que nos sujets mettent en évidence que les traumatismes infligés par l'homme entraînent des dégâts plus profonds et plus compliqués, aucun sujet n'a remis en question (ce que certains auteurs ont mis en évidence) le tableau (de l'état de stress post-traumatique) du DSM IV. Ces auteurs pensent que ce tableau n'est pas suffisant pour désigner les traumatismes issus des conflits, des guerres. « Certains demandeurs d'asile ont été exposés à des souffrances dramatiques et extrêmes. Nous ne pensons pas que nos outils usuels, comme le concept d'état de stress post-traumatique, soient adaptés à ces cas : en raison de la gravité des trauma subis, souvent sous-tendus par une cruauté extrême »228(*).

2. Au moment de l'effroi le sujet se sent-il extrêmement abandonné ?

Ce sentiment d'abandon est un fait récurant (sujet C). C'est ça qui fait le trauma. « Les blessures physiques font mal, mais (...) ce qui fait que la blessure physique devient indépassable, c'est le contexte. Vous la subissez dans une situation de total abandon » (sujet A). « Personne ne vient au secours, il est attendu en vain » (sujet C). Dieu lui-même vous laisse tomber. Vous n'avez personne à qui vous adresser pour arrêter ça, à adresser votre demande de secours. Vous êtes seul devant votre bourreau qui dispose de vous comme il veut » (sujet A). C'est le socle de ce qui fonde l'être humain comme « animal social » qui est brisé, (sujet D). Il y a quelque chose de plus révoltant, c'est explosant, car vous êtes accroché aux parois du néant » (sujet A).

Ces sentiments d'abandon, de rejet persistent chez les réfugiés. Ces personnes arrivent ici avec l'espoir de trouver un espace de sécurité mais elles se trouvent de nouveau confrontés à cette agression humaine parce qu'ils leur rappellent justement ce qu'ils ont vécu (sujet C).

3. Qu'est ce qui fait que cet événement devient indépassable ? Est-ce que le concept de «  résilience » vous est utile pour penser votre pratique ? (question 9).

Les sujets A et D trouvent ces situations complexes. Il y a un élément important et qui reste obscur, c'est le psychisme de chacun ». On ne peut pas se baser uniquement sur des faits (sujet A). Les événements ne sont pas traités de la même manière. On ne sait pas déterminer ce qui est grave ou pas pour elles (sujet D). Certaines personnes ont peu perdu mais sont affectées profondément et d'autres arrivent à relativiser (sujet A). Il faut voir au cas par cas. « On rencontre des gens qui ont assisté à la mise à mort de leurs parents, qui ont subi de grandes violences, on a tué un parent ce qui lui a fait très, très mal. Ils ont été dans un danger de mort eux-mêmes, ce qui leur a fait très mal mais la chose qui leur a fait le plus mal et qu'ils n'arrivent pas à se pardonner, c'est de ne pas pouvoir enterrer dignement ces gens-là (son père, sa mère, etc.) » (sujet A).

Quant à la résilience, « faire référence à des référents hérités de la physique, de la biologie et de l'éthologie ne nous apparaît pas comme le meilleur moyen de comprendre la logique du traumatisme chez l'être humain » (sujet D). Il y a toute une complexité des facteurs qui font que certains s'en sortent et d'autres pas (sujet A). Chez les sujets A et C, nous remarquons des idées de base inverses. C'est-à-dire pour le sujet C, la capacité résiliente est innée et elle dépend du développement psychologique de l'individu. Parfois, elle peut s'acquérir en fonction des expériences dans la vie. Quelqu'un qui a vécu dans une communauté soutenante, qui a acquis des aptitudes de résistance, résiste mieux à certains événements qu'un autre. Le sujet A pense qu'il y a toute une complexité des facteurs qui font que certains s'en sortent et d'autres pas, pour lui la résilience n'est pas une capacité personnelle privé mais plutôt résulte d'une situation : elle est contextuelle. Pour le sujet A, le facteur très important qui permet le développement de la capacité de résilience est celui où l'enfant s'imprègne, s'alimente de toutes les personnes qui sont autour de lui : un ami, un prêtre, une référence qui l'a marqué, qui lui a transmis quelque chose très fort, qui reste référent même s'il n'est pas présent.

Il y en a d'autres qui s'alimentent par le support social. Ceux qui les aident, qui leur donnent de la confiance en l'homme, etc. mais il y en a d'autres qui sombrent dans l'alcoolisme, dans la dépression, qui ne se stabilisent pas dans un emploi, etc. (sujet A).

Pour le sujet B, les personnes qui éprouvent le plus de difficultés à se sortir du traumatisme sont souvent des gens qui ont déjà vécu des traumatismes intenses dans leur vie (abus sexuels, maltraitance, etc.). Ces personnes avaient réussi à trouver plus au moins un équilibre mais le second traumatisme tel que viol, emprisonnement, perte de ses biens, etc. durant la guerre, endommage une personnalité déjà vulnérable.

Cela nous rappelle les propositions de Crocq : les sujets avec des prédispositions névrotiques ne posséderont pas d'énergie quantitative suffisante pour faire face aux événements traumatisantes car toute leur énergie disponible est utilisée pour maintenir leur équilibre névrotique. D'autres peuvent présenter une vulnérabilité d'altération qualitative du mode de réaction : il s'agit des sujets prédisposés qui réagissent en toutes circonstances, de paix ou de guerre, par leur frayeur morbide, névrotique.

Tandis que pour le sujet C, des personnes qui ont été exposées à des événements traumatisantes chroniques finissent par développer des mécanismes adaptatifs, donc à développer des capacités de résilience qui sont surprenantes. « Les traumatisés ont quand même des capacités d'adaptation énormes. Lorsqu'on voit après qu'ils ont été confrontés à des situations dramatiques, parfois on est étonné de voir qu'ils sont encore capables d'établir des liens sociaux. On est parfois surpris de voir qu'ils parviennent à s'intégrer ou à faire des choses malgré ce qu'ils ont vécu ».

Les propos de C manquent peut-être de clarté : quand il nous dit que les personnes qui ont été exposées à des événements traumatisants chroniques finissent par développer des mécanismes adaptatifs. Est-ce qu'il s'agit des traumatismes vécus depuis l'enfance ou encore autre chose ?

Pour le sujet B les individus qui ont une personnalité bien structurée ont la capacité de s'en sortir relativement rapidement. Ces personnes restent marquées, auront des cicatrices et ont besoin d'aide aussi mais réagissent très vite à cette aide. C'est-à-dire vont mieux en quelque mois. À condition que le contexte leur offre une opportunité de se construire un projet de vie. Ca c'est essentiel. (Sujet B). La capacité de résilience dépend aussi de leurs ressources (sujet A et D), de leurs croyances, du soutien qu'elles trouvent autour d'elles (sujet A, B). Le sujet B soutient que l'être humain a une plasticité extraordinaire. Il peut se sortir de situations de souffrance si on lui donne la possibilité de s'implanter quelque part, de trouver un projet, etc. Bien sûr que le traumatisme va laisser une cicatrice mais il va être viable (sujet B). Souvent, ces personnes recherchent un support philosophique ou éthique pour retrouver un sens à la vie (sujet B). Les sujets A et B affirment que parfois le traumatisme va être l'occasion de refaire sa vie sur une base qui a plus de sens pour la personne, par exemple, l'engagement dans des associations humanitaires. Certaines s'engagent auprès des autres. Par exemple, elles investissent leur enfant. « Il y a un investissement à l'extérieur de soi pour pouvoir se soutenir soi-même » (sujet B).

Par contre, même si la personne est solide « et qu'elle met tout en place pour s'en sortir mais que, autour d'elle, on sape toutes ses tentatives de reconstruction de projet de vie, évidemment elle va devenir malade » (sujet B).

Nous remarquons que nos sujets prennent en compte plusieurs facteurs : les ressources de la victime, l'environnement familial et social. Semblable à la théorie, la résilience est un processus multidimensionnel «  car il se situe à la croisée de plusieurs paramètres où convergent différentes variables »229(*). La résilience dépendra alors des facteurs individuels, des facteurs familiaux et des facteurs sociaux.

Malgré cela, le sujet B nous apprend qu'il n'a jamais vu une personne détruite totalement par le traumatisme. « Le fait de rester en vie, d'avoir mis en place un tas de mécanismes adaptatifs qui sont plus au moins efficaces et sains, ça oui ». Cependant, Crocq met en évidence les suicides suite à un traumatisme. Contrairement aux propos du sujet B, pour nous, ce sont des indications que ces personnes décident de se détruire totalement. (Demandons-nous si le sujet B parle uniquement à partir de son expérience clinique ?)

4. Autour des symptômes (questions 4)

Le temps de latence est évoqué par le sujet B et C. Selon les auteurs, le temps de latence est une étape obligée entre le vécu et l'apparition des symptômes psychotraumatiques tels que décrits par le tableau clinique du DSM IV ou à la façon française. Le syndrome post-traumatique ne devient invalidant qu'après un certain temps de latence mais il y a quand même des éléments prédicteurs, tels que l'état dissociatif230(*), qui peuvent montrer réellement que la personne présente des risques. Ces « éléments prédicteurs » correspondent aux propos de Crocq231(*).

Pour l'auteur, pendant ce temps de latence, par une observation attentive, on remarque que les personnes risquant de développer un syndrome psychotraumatique présentent divers états : ruminations perplexes, tristesse avec émission de pleurs ou, à l'inverse, euphorie exubérante. Concernant les états dissociatifs, le sujet C n'a pas donné d'exemple concret.

Concernant les huit modalités du syndrome de répétition, tous nos sujets mettent en évidence que les symptômes principaux sont les reviviscences. Ces reviviscences peuvent survenir pendant la journée ou pendant le sommeil sous forme des cauchemars (sujets C et D), de répétitions232(*) (sujet D). Pendant la journée, il s'agit d'une impression de revivre233(*) l'événement traumatique sous forme de flashs-back (sujet D) suite à un stimulus extérieur, ce qui replonge la victime au sein de l'événement traumatique (sujet B). Donc, les événements reviennent dans les pensées des victimes de façon incoercible234(*), ce qui les handicapent dans leur mode de réflexion mais aussi dans leur travail quotidien parce que, souvent, quand elles sont en train de penser à un problème, ces idées resurgissent (sujet C). Il y a des patients qui présentent ces reviviscences pendant très longtemps (sujet B). Le sujet B nous apprend que, chez certaines personnes, même après des années, les réviviscences peuvent être présentes. Le sujet B nous donne l'exemple d'une de ses patientes : « plusieurs années après avoir été violée, elle avait encore des phénomènes de flashs back. Elle entrait encore dans un état de sidération. Il lui arrivait de se perdre en rue, de tomber parce qu'elle était prise par la reviviscence des événements ».

Le sujet C nous cite aussi des symptômes comme des hallucinations235(*) (visuelles, auditives, etc.),

Concernant les automatismes gestuels et verbaux, notre sujet nous dit que la victime a perdu le contrôle de la situation. Elle n'est plus consciente de ce qu'elle fait. Dans le tableau clinique français, nous trouvons des phénomènes moteurs élémentaires. Ce sont des réactions motrices comme des tics, sursauts ou recroquevillements lorsque le sujet est confronté à des stimuli ou des reviviscences sans un stimulus provoquant. Nous trouvons aussi des conduites à répétition. Ce sont des conduites motrices plus organisées, des actions complexes inconscientes qui sont en lien avec l'expérience traumatique comme des fugues, des récits répétitifs, des jeux répétitifs chez l'enfant, des comportements agressifs, des actes délicieux, etc. Nous pensons qu'il est probable que ces automatismes se trouvent dans ces deux modalités, mais nous sommes incapables d'être plus précis. Le sujet C n'a pas donné d'exemples pour comprendre de quels automatismes il s'agit.

Les sujets A et B parlent de la présence de culpabilité236(*) chez la victime. Pour les auteurs, ce sentiment est très présent chez les victimes et, souvent, il s'agit d'une culpabilité irrationnelle.

« C'est de ma faute, si j'avais fait autrement. » (sujet B). La dépression237(*) est évoquée par les sujets B et C.

Le sujet B nous dit que les victimes de traumatisme se rendent compte qu'elles ont un rythme de fonctionnement qui est devenu différent des autres personnes. Crocq nous parle de personnalité traumato-névrotique. Ce sont des changements des rapports avec soi-même et le monde, une nouvelle manière de percevoir, de ressentir, de penser, d'aimer, de vouloir et d'agir.

Les sujets B et C disent que les victimes des traumatismes deviennent hypervigilantes (blocage de la fonction de filtration). Cette hypervigilance constitue un inconvénient car les victimes sont toujours aux aguets, toujours en attente de danger et cela les perturbe que ce soit au niveau psychologique ou biologique (sujet C). Nous pensons qu'il s'agit d'hyperexcitabilité neurovégétative238(*) : accélération du rythme cardiaque, sudation... (sujet B).

Chez ces victimes, il y a souvent des troubles du sommeil (sujet D). Il s'agit d'une altération de la qualité et de la quantité du sommeil : le sommeil est discontinu, les réveils précoces (sujet C). Les victimes éprouvent des difficultés à s'endormir (sujets C et D). Concernant les troubles du sommeil, Crocq239(*) parle d'une résistance à l'endormissement volontaire. Les victimes deviennent hypervigilantes car elles n'arrivent pas filtrer les stimulations de l'extérieur. Pour elles, toute stimulation est perçue comme dangereuse. Ainsi vivent-elles avec un sentiment d'insécurité permanente, d'où la résistance à l'endormissement, car s'abandonner au sommeil serait se livrer aux agressions venant du dehors.

L'évitement face à un stimulus qui rappelle le trauma est décrit par le sujet C. Les stimuli comptent être des films violents, le fait d'entendre des événements violents, etc.

Cette altération de la personnalité se traduit aussi par un blocage de la fonction d'amour et de relation à autrui. Les professionnels confirment certains symptômes :

Un de ces symptômes est la régression. Chez certains patients, il y a des manifestations de dépendance (sujet D). Une demande d'enfant, une demande d'affection, d'amour. Une sorte de demande de reconnaissance du mal qu'ils ont subi. Ceci est remarqué aussi dans la posture des patients : parfois le patient se présente démuni comme s'il revenait à l'enfance (sujet A). Le sujet A prend l'exemple d'un homme qui adoptait des postures de foetus, se recroquevillait sur lui-même, adoptait un comportement inadapté. Le sujet A a remarqué, chez certaines personnes, une sorte de positionnement dans le statut de victime qui cherche réparation.

Un autre symptôme est l'irritabilité importante des victimes (sujet D). La victime devient allergique aux critiques (sujet A). Elle perd confiance en elle (sujet D) et en l'homme (sujets A et C). Crocq explique que ce blocage - qui se traduit aussi par de l'irritabilité et de l'agressivité envers les autres - est présent parce que tout l'environnement, les choses et les êtres pour la victime est devenu agressif. La peur que l'agresseur suive encore la victime est habituelle dans la névrose traumatique. Alors, la victime met en place des conduites d'évitement et de réassurance. La conséquence est qu'elle perd son autonomie, son indépendance et sa liberté d'action.

Tandis que le sujet B nous dit que, dans son expérience clinique avec ces patients, elle a remarqué que, lorsque les patients commencent à aller mieux, « ils ont envie d'aller vers les autres, ils trouvent une capacité d'empathie pour les autres et d'altruisme et même ils ont besoin d'aller vers les autres ».

Pour rappel, c'est dans la théorie de Ferenczi que nous rencontrons pour la première fois le terme de « régression narcissique »240(*), utilisé à propos des sujets traumatisés par la guerre,. L'auteur avait remarqué que les névrosés de guerre retirent leurs investissements objectaux antérieurs et retournent au stade infantile où ils n'étaient pas capables d'aimer un autre qu'eux-mêmes en raison de lésions graves du Moi. Les effets de cette régression se traduisent par une impuissance sexuelle, une recherche la sécurisation, une extrême dépendance affective. D'autres symptômes encore qui ne sont pas évoqués par les professionnels sont des exigences capricieuses, des réclamations surenchéries envers autrui. Paradoxalement, le sujet exprime des revendications d'autonomie.

Le sujet C a abordé le repli sur soi. Pour notre sujet, cette attitude se traduit par une recherche d'une certaine protection contre un monde qui constitue un danger pour la victime. Parce que, le mal vient de nos semblables. La victime s'aperçoit que l'homme peut aussi être mauvais et dangereux.

Chez des femmes violées, le sujet A nous dit que, fréquemment, il y a perte de l'amour, l'incapacité d'avoir des relations sexuelles avec un homme car elles rappellent le grand trauma. Ceci a des répercussions relationnelles avec leur partenaire. « Il y a des femmes qui n'arrivent pas à s'imaginer se remettre avec un homme ».

Dans le blocage de la fonction de présence, nous trouvons des personnes qui deviennent tout d'un coup passives (sujet D), apathiques, (sujet A) qui perdent le goût en la vie (sujet D).

Nos sujets parlent aussi des symptômes non spécifiques. Le sujet D a remarqué chez les victimes des troubles de la concentration241(*). L'anxiété242(*) est évoquée par les sujets B et C, ainsi que les superstructures psychonévrotiques telles que phobies et comportements obsessionnels (sujet C). Certaines personnes doutent de tout, n'osent plus rien faire (sujet A). Le sujet A nous dit que d'autres sombrent dans l'alcoolisme, n'arrivent pas à se stabiliser dans un emploi, etc. Ces symptômes sont répertoriés dans la catégorie des troubles de conduite. Le sujet A nous a donné l'exemple d'une femme qui, après le traumatisme était devenue très, très active. « Elle était tout le temps en train de faire quelque chose. Elle ne supportait pas le moindre échec. Elle devait toujours réussir ». (Nous nous demandons si ce comportement est de type obsessionnel, ou relève plutôt de l'agitation maniaque, ou...) Les sujets B et C nous parlent de troubles dissociatifs, tels que des amnésies (sujets A, B, C et D), et de troubles psychosomatiques (sujets B et C).

Une autre confirmation théorique repose sur le déplacement ou transposition des symptômes dans la durée à distinguer de l' l'anxiété. Le sujet B dit qu'avec le temps, les réviviscences diminuent et laissent place à l'anxiété, la dépression et les symptômes psychosomatiques. A ce sujet, M. De Clercq243(*) nous explique que, pendant la phase aiguë, les symptômes associés à l'anxiété (les pensées envahissantes, les flash-back, les troubles du sommeil et les cauchemars) sont prédominants. Si on ne traite pas ce stade, l'affection devient chronique (après plusieurs mois ou plus) : l'anxiété diminue et cède le pas à l'abattement, à la dépression, aux troubles sexuels et à la somatisation.

Nous remarquons que nos sujets ont mis en évidence des symptômes qui ne sont pas repris dans le DSM IV. Nous les trouvons par contre dans le tableau clinique du syndrome psychotraumatique français tels que : les troubles psychosomatiques, psychonévrotiques, etc. Malgré cela, aucun de nos professionnels n'a fait une remarque concernant le DSM ni mentionné le tableau clinique du syndrome psychotraumatique française.

5. Autour de la compulsion de répétition (question 5)

Le sujet A donne le même avis que les auteurs exposés dans la partie théorique : le processus de la compulsion de répétition dans le traumatisme (dans le cas des réviviscences chez le sujet traumatisé) est une partie obscure. Le sujet D émet l'hypothèse que la répétition dans le traumatisme est une tentative « archaïque » d'apprivoiser ce qui est arrivé (sujet D), d'élaborer ce qui s'avère stérile, sans succès (sujets A, B et D) car la victime est incapable de digérer l'événement  (le sujet A). Le mécanisme qui maintient ce retour systématique de l'événement et cette impossibilité d'élaboration pourrait être généré par la pulsion de mort (sujet A et D) et lié à une forme de confrontation à la jouissance244(*) (sujet D).

C'est un point d'arrêt sur lequel la personne achoppe ou trébuche tout le temps au même endroit car, le vécu a été tellement fort. Le champ pulsionnel a été tellement chamboulé (le sujet D) que la victime ne peut pas de s'en passer (sujet A et D). Donc, la victime reste calé dans une forme de sidération par rapport à ces événements car le Réel a fait une effraction » (sujet D). C'est une fascination de la personne par rapport à son propre anéantissement (sujet A et D). Lorsque la personne a vécu quelque chose d'extrêmement violent, peut-être que cet évènement s'imprime en elle (sujet A).

Chez les traumatisés, il y a une mise en échec des processus de contrôle d'éléments stockés dans la mémoire (sujet A). En tout cas, c'est la mémoire qui est touchée : soit oublier, soit se rappeler de manière répétitive (sujet B).

Suite à ces propos des professionnels, nous voyons que la compulsion de répétition dans le traumatisme psychique reste un point très discutable sans pouvoir donner une explication plus précise du type de mécanisme psychique dont il s'agit.

Le sujet A se réfère plutôt à la pratique : « Mes meilleures références ce sont les patients; les patients qui racontent comment ils vivent ça ».

Concernant les amnésies, tous les professionnels confirment qu'elles sont présentes chez les sujets traumatisés. Que ce soit des amnésies liées à la vie quotidienne (rappelons la maman qui oublie son bébé dans le bus) que des amnésies liées à un moment de l'événement traumatique : « ici, j'ai un blanc » disent parfois les patients (sujet A et B). Les patients oublient également des noms qui sont en lien avec le vécu traumatique. Ils n'arrivent pas à resituer dans le temps le vécu traumatique (une fois ils disent que l'évènement s'est déroulé le matin, une autre fois, l'après midi); le nombre de personnes concernées (une fois, ils disent que quatre personnes étaient présentes, une autre fois cinq), les lieux, etc. (sujet D). Le sujet C parle de dysmnésie car, la mémoire d'un traumatisé est fragmentée, c'est-à-dire les fragments de l'événement ne surgissent pas dans l'ordre tel que la personne l'a vécu. Nous n'avons pas rencontré cela dans la théorie. Par contre, les auteurs nous parlent qu'une victime, elle manque de cohérence dans son récit du au choc qu'elle vient de subir. (Voir dans le chapitre de la prise en charge immédiate et post-immédiate).

Certains patients, par contre, sont très précis. Parfois, les deux situations peuvent être mêlées : les patients sont confus pour certaines choses et sont hyper précis pour d'autres (sujet D).

Malgré certaines amnésies, tous les professionnels confirment la théorie selon laquelle le problème principal, pour les patients, reste de se souvenir trop (sujet B) ou plutôt de revivre sans cesse l'événement. Ceci rejoint la théorie. Houbballah qui nous parle d'hypermnésie.

Globalement, les propos de nos sujets rejoignent les propos de Sironi245(*) : « le sujet oublie ce qu'il ne devait pas oublier (l'événement non traumatique), et n'arrive pas à oublier ce qu'il devrait oublier (l'événement traumatique) ».

Pour les professionnels, les amnésies en rapport avec l'événement traumatique, sont des tentatives d'effacer ces événements qui les font trop souffrir. « L'inconscient essaye d'éliminer cet intrus parce qu'il est trop douloureux pour lui » (sujet A). Nous rejoignons l'effet paradoxal de la mémoire  dans le traumatisme décrit par Fischer : « d'un coté, il l'empêche de faire son travail d'oubli et, de l'autre, il crée des formes d'amnésies par rapport à l'événement »246(*).

Dans le cas d'un syndrome psychotraumatique, pour Tisseron, cette tentative volontaire d'effacer l'événement s'appelle clivage. « ...l'oubli d'un événement vécu avec une souffrance extrême se fait par l'enfermement de cet événement (avec l'ensemble des sentiments qui l'ont accompagné et des images des protagonistes qui y étaient impliqués) dans un lieu totalement isolé du reste de la personnalité et inaccessible au sujet lui-même.(...) »247(*).

Malgré ce processus actif d'éloignement de quelque chose qui est affectivement pénible, elle revient clandestinement d'une manière symbolique : dans les rêves, les actes manqués, etc. (sujet A)*.

*Nous nous questionnons sur ce point. Ce processus actif d'éloignement de quelque chose qui est affectivement pénible et qui revient clandestinement d'une manière symbolique : dans les rêves, les actes manqué, etc. (sujet A), dans la théorie, nous le trouvons plutôt chez les trauma d'enfance lié avec des désirs sexuels coupables. D'après les auteurs, l'enfant va refouler ses désirs et quand un retour de refoulé a lieu, ils reviennent à travers des symptômes, actes manqués, etc. D'après la théorie, les traumatismes qui sont des conséquences directes à la suite d'une agression, d'une catastrophe, de guerre, d'une maltraitance parental, etc. ne peuvent pas revenir d'une manière symbolique (faute de non-représentation, d'incapacité de symboliser l'événement) mais ils reviennent dans un état brut. La victime revit avec les mêmes émotions l'événement traumatique que le jour inaugural. Pour pouvoir parler de refoulement dans le deuxième type de traumatisme Tisseron dit : « ce n'est que progressivement, au fur et à mesure de son élaboration par la psyché, que le travail du refoulement proprement dit peut s'installer. L'un des signes en est que la situation traumatique ne fait plus retour au psychisme du sujet avec ses caractères originaires, mais sous une forme symbolique. Tel sujet traumatisé par une explosion n'est plus réveillé dans son sommeil par le souvenir de cette explosion, mais par exemple par la menace d'un lion qui rugit de façon menaçante »248(*).

Concernant le clivage, les professionnels n'ont pas donné d'explication car, comme nous l'avons indiqué plus haut, c'est un point qui reste obscur pour eux. Toutefois, le sujet B parle « de dissociation de conscience249(*) qui est invalidante parce que ça se fixe. Au départ, c'est un mécanisme adaptatif qui permet de diminuer cette souffrance et qui peut tendre vers quelque chose qui va plus en profondeur mais où ? ».

En ce qui concerne ces oublis chez les demandeurs d'asile, tous les professionnels mettent en évidence les répercussions par rapport à l'Office des Etrangers lors refus de reconnaissance comme réfugié parce que certains éléments essentiels dans leur histoire étaient effacés. Les auteurs expliquent que: « les troubles mnésiques, incohérences, non réponses, seront généralement interprétées par l'OFPRA comme témoignant de mensonges ou d'affabulations de la part du requérant »250(*).

6. La prise en charge (question 6, 7)

· Pour des vécus spécifiques, un traitement spécifique

Exprimer l'empathie, reconnaître la souffrance, reconnaître la victime, oublier la neutralité sont les points de départ du travail de tous les professionnels face aux sujets qui ont vécu des événements potentiellement traumatiques.

On ne peut pas rester neutre devant certaines choses. Comment peut-on rester neutre devant des crimes pareils (sujet A) ? La neutralité en face de ces personnes n'est pas adéquate, parce qu'elles ont besoin de se sentir dans un cadre relationnel où le danger est exclu ou sans se sentir en danger d'une autre manière (sujet D). Le fait de pouvoir offrir des contextes chaleureux, ré-humanisants, c'est un premier pas pour reconstruire (sujet B). Un être humain est un animal social qui a besoin de l'échange du regard avec les autres pour se construire et c'est pareil dans la guérison. Quand tu es détruit, tu as besoin du regard d'un autre pour te reconstruire. Ce regard est soutenu par les compétences de l'empathie du thérapeute face à son patient » (sujet B).

Par conséquent, quand on a été victime d'une déshumanisation, il y a quelque chose à restaurer qui est plus profond et qui demande une forme de présence thérapeutique dans une forme de re-humanisation du contact, de la relation et de la confiance dans l'autre (sujet D).

- La première étape c'est la reconnaissance de cette victimisation, parce que si on ne reconnaît pas cela, comment peut-on aider le patient ? (sujet C)

- « La première chose pour moi, c'est de créer une sorte d'empathie, leur donner confiance car chez ces personnes la foi en l'être humain telle quelle s'écroule. La deuxième chose que je fait avec ces gens-là qui souffrent, c'est de reconnaître leur souffrance » (sujet A).

- « On pense qu'il ne faut pas rester neutre dans des situations comme ça parce que justement c'est l'humanité qui est atteinte. Souvent les patients me disent "j'ai l'impression de devenir fou", "je ne suis plus comme avant" (...) » (sujet B).

- « Chez beaucoup de victimes qui ont vécu le génocide, torture, etc., il y a vraiment une peur de sombrer dans l'être déshumanisé. Evidemment, le thérapeute ne peut pas se permettre de rester dans la neutralité face à ces situations. Il doit pouvoir reconnaître ce que la personne a vécu comme quelque chose très violent, d'injuste, d'inimaginable » (sujet B).

- Il faut aller au-delà de la position classique des psychologues et il faut pouvoir marquer une forme de présence et d'humanité et d'accueil dans laquelle ces personnes peuvent trouver asile, dans un espace de relation qu'on met en place avec elles. Il faut aussi une condamnation de la violence que la personne a subie et qui continue à subir autrement, lorsqu'elle est soupçonnée de mentir, tenue de prouver que les événements traumatiques ont réellement eu lieu. On est dans une position de soutien, de reconnaissance de sa qualité d'être humain (sujet D).

Au cours de la lecture des ouvrages rédigés par les spécialistes dans ce domaine, nous épinglons la position de Werber et Prieto251(*) qui soutiennent que la reconnaissance solidaire de la souffrance de la victime et de son préjudice, la croyance en ce qu'elle dit et la reconnaissance de l'expérience traumatique comme atteinte à son intégrité sont des étapes importantes et indispensables pour le rétablissement de la confiance, des liens sociaux. Il faut une distinction claire et affirmée de l'agresseur et de l'agressé.

· Comment pourrions faire pour que ça s'arrête ?

Il n'y a pas de recette, c'est par la pratique que la personne doit sentir la récupération, le soulagement (sujet A). Mais, « il faut être claire sur la position que nous nous proposons d'occuper, sans leurrer pour autant la personne sur notre (faible) capacité à tout arranger, à la sauver » (sujet D). Pour ceux qui ont subi ce genre de traumatisme, le premier geste du thérapeute est de reconnaître comme un humain à part entière, dans l'accueil, dans le respect (sujet B). Dans un premier temps, on essaye de voir ce qui est en jeu chez le patient, dans son symptôme douloureux qui suit des événements violents (sujet A). Puis, on essaye de mettre de l'ordre dans les « images du film » que le psychisme de la victime a enregistrés dans l'état brut. C'est-à-dire on essaye de mettre de l'ordre dans ses idées (sujet C). L'aide thérapeutique aide de sortir la victime de sa fascination face à l'horreur, de l'acte insensé et horrible (sujet B) puis, de l'accepter à la limite car on ne peut pas changer ce passé (sujet A). La thérapie consiste à penser ce qui c'est passé autrement (sujet B), sur les mécanismes de perte de confiance en l'humain, des mécanismes de déni, de culpabilité (sujet A). Par exemple, avec les personnes victimes de torture, on analyse l'intentionnalité de l'agresseur pour pouvoir externaliser son influence. « Car la tendance de la victime est d' internaliser : "c'est de ma faute, si j'avais fait autrement", etc. Ce n'est pas elle qui est coupable. Par exemple, dire au patient (pour ceux qui ont livré des informations pendant la torture) que ce n'était pas l'intention de le faire parler parce que le bourreau connaissait déjà ces informations, mais bien de le détruire dans leur groupe, etc. » (sujet B).

Nous sommes dans la composante de la culpabilité et dans la référence théorique de Sironi. Nous avons exposé, dans la partie théorique, que les victimes développent des sentiments de culpabilité en se sentant responsable de ce qui leur est arrivé, d'avoir survécu alors que leurs proches ont perdu la vie.

« La culpabilité est l'expression de la tristesse ressentie du fait d'avoir survécu à un événement qui a coûté la vie à d'autres ou d'avoir une vie meilleure que celles d'êtres chers. La culpabilité peut aussi provenir du fait que l'on se sent en partie ou entièrement responsable de la situation »252(*).

Pour une explication plus claire, basons-nous sur l'expérience des prisonniers politiques au Kosovo. Les accusés sont sommés de livrer des informations concernant leur travail perçu comme étant contraire à l'intérêt de l'Etat. La livraison de ces informations sous la pression de la torture est considérée par leur groupe comme une trahison, ce qui a comme conséquence le rejet du « traître ».

Pour rappel, Sironi nous explique que l'intentionnalité du bourreau vise à briser, brouiller tous les repères, détruire les liens qui reliaient l'individu à son groupe d'appartenance et par lesquels une identité individuelle se construit, de le réduire à un être sans spécificité culturelle, sans singularité, ce qui a pour effet la déstructuration de la personnalité initiale.

· Les patients ont difficile à parler de leur vécus (question 6)

Unanimement, les professionnels expriment qu'il est nécessaire de respecter le rythme du patient. Presque aucun patient ne vient directement pour parler des événements traumatiques, sauf s'ils s'y sentent obligés (sujet D). Certains ne veulent pas parler de ce qu'ils ont vécu. Pour d'autres, parler devient tellement éprouvant qu'il faut prendre du temps. D'autres encore en parlent mais en évitant certains détails (sujet C). « Je ne fais jamais parler le patient du traumatisme. Je trouve ça violent. Faire parler, c'est traumatisant car ça réactive l'événement » (sujet B). Il faut respecter le rythme et ne pas forcer les portes de la mémoire par rapport à l'événement et à la remémoration (sujet D). Dès le début, on est obligé de faire preuve de réticence au niveau de la volonté de savoir. On ne souhaite pas et on ne fait rien pour que la personne aborde ses souvenirs (sujet A). On est dans une position de soutien et on lui montre qu'on est prêt à entendre aussi à un moment donné quand elle souhaite en parler d'elle-même (sujet D). On lui offre un lieu pour aborder ces thèmes quand elle sera prête et ça peut être très long (sujet A).  « On peut parler de traumatisme quand le lien thérapeutique est bien instauré, quand la personne parle dans un lieu qui a du sens pour elle, où elle se sent protégée. Elle peut en parler quand il y a déjà un minimum d'élaboration grâce au soutien thérapeutique ou grâce à ce qu'elle avait mis en place naturellement » (sujet B). Il y a un temps psychique pour digérer certains événements et qu'il ne faut pas se précipiter à vouloir supprimer les choses tout de suite (sujet A). La personne peut venir deux ans sans en parler (sujet D).

· Des problèmes rencontrés avec les réfugiés

Nous remarquons que respecter le rythme des patients n'est pas toujours possible pour les réfugiés demandeurs d'asile. Nous avons un manque théorique à ce sujet. Les professionnels mettent en évidence trois types de problèmes qui se présentent pour ces personnes face à l'Office des Etrangers. Nous voyons qu'il y a des personnes qui ont oublié certains moments de leur vécu, ce qui leur cause des problèmes pour obtenir leur statut de réfugiés. Il y en a d'autres qui en parlent mais en limitant certains détails. D'autres encore ne se sentent pas prêtes à parler de ce qu'elles ont vécu.

Le sujet C nous donne l'exemple d'une personne qui au premier événement a vu une bombe tomber sur sa maison. Les membres de la famille ont été obligés de fuir dans toutes les directions. La famille s'était désintégrée. Seul ce membre était venu en Belgique. Cette personne n'avait aucune nouvelle de sa femme après trois ans. Lui, avait été torturé par les miliciens, etc. « Ce que me disait mon patient, c'est plutôt la façon dont il a essayé de trouver à manger, de survivre etc. Et plus tard, quand il se sentit mieux, il m'a raconté tout le début de son histoire. Ça m'a bouleversé parce que je croyais que c'était quelqu'un qui avait fuit les hostilités, qui n'avait pas été impliqué d'une manière ou d'une autre ».

Le deuil est « gelé » : les victimes préfèrent « mettre au frigo » leur vécu. Il ne faut pas le dégeler. C'est à elles de sentir le moment pour le faire (sujet A). Malheureusement, la procédure de demande d'asile ne nous permet pas d'attendre. Elle nous invite à forcer le retour d'événement pour que le demandeur d'asile, grâce à nous, soit apte à le faire. Ce n'est pas idéal dans un cadre thérapeutique. Nous le faisons parce que la sécurité du droit au séjour doit être assurée. Ca c'est primordial, car sans elle, la perspective de se projeter dans l'avenir, en assumant les épreuves passées, ne peut être travaillée. Donc, on est face à une contradiction : on doit travailler au droit de séjour et, pour ce faire, on doit parfois favoriser de lever les oublis, de faire retour sur des événements alors que la personne n'est pas prête. Cela peut être considéré comme contre-thérapeutique » (sujet D).

· Différents types d'approches utilisées

Pour la plupart des professionnels, la méthode cathartique de Crocq n'est pas préconisée. Ceci nous a poussé à leur poser la question quant à l'utilisation de cette méthode. « Je ne suis pas du tout favorable à des formes de traitement cathartique de l'événement traumatique. La personne peut venir deux ans sans en parler. Donc, selon moi, il faut la suivre dans ce qu'elle veut nous livrer, dans ce qu'elle veut travailler avec nous ici » » (sujet D). Le sujet C pense qu'aucune théorie ne peut se déclarer comme étant la plus adaptée au traumatisme, que ce soit au niveau psychanalytique, au niveau cognitivo-comportementaliste ou au niveau systémique. Par exemple, la méthode cathartique, pour certaines personnes, peut être utile et, pour d'autres, non, voire est tout à fait déconseillée. Nous nous demandons si le sujet C fait référence à une thérapie multimodale253(*) ? Par cette approche, le thérapeute doit être capable de naviguer, selon le cas et selon le moment pour le même cas, entre différents modes thérapeutiques. Pour le sujet C il faut une intervention dans un contexte plus global : une approche multidisciplinaire s'avère indispensable pour ces patients car, « ces personnes n'ont pas seulement des problèmes psychologiques. Le traumatisme se passe aussi dans le corps, il laisse des traces, il laisse des séquelles ». Le sujet D s'inspire de la psychanalyse, mais aussi de la thérapie institutionnelle. La seconde est un modèle d'accueil et de l'institution soignante où chacun peut avoir un rôle et une fonction. Cet accueil est globalement enveloppant et soignant pour la personne : l'institution offre un bien-être, une protection, une relation de confiance avec les victimes de déshumanisation et cela est essentiel.

Le sujet B fait référence à l'approche systémique. Aux différentes ruptures qui ont eu lieu chez les victimes (au niveau individuel, au niveau familial, au niveau social, au niveau communautaire), le sujet essaie d'apporter un support qui va dans un sens de « re-humaniser » et de permettre à la personne de se sentir soutenue dans des liens solidaires qui peuvent être réparateurs. Pour ce faire, le sujet propose aux patients différents espaces où il va pouvoir élaborer sa souffrance dans un lien thérapeutique avec le thérapeute mais aussi leur permettre de se remettre en lien 254(*) avec un groupe de patients, avec sa communauté.

· des inconvénients sur le plan de récupération avec les exilés

Concernant les réfugiés victimes de traumatismes, les professionnels ont mit en évidence un problème essentiel sur le plan de récupération de ces personnes dû à la non-reconnaissance de leur statut et un mauvais traitement dans les centres d'accueil.

- Les réfugiés se sentent obligé à nouveau de se justifier devant l'Office des Etrangers. Et se justifier veut dire raconter toute l'histoire qu'ils ont vécue. Ces personnes se trouvent confrontées à la non-reconnaissance car, souvent, leur mémoire est fragmentée (sujet C).

- Pour le sujet B, une telle expérience représente un risque majeur. Un bon accueil, c'est la prévention énormément de trouble à long terme chez les réfugiés et leurs enfants. La non-reconnaissance dans leurs souffrances constitue un facteur très négatif pour le pronostic de l'évolution de la santé de la victime. Le sujet B nous explique que certains demandeurs d'asile soutiennent qu'ils ont beaucoup souffert mais c'est encore pire maintenant. Pour le sujet B, « cela signifie vraiment que le fait de ne pas être accueilli, de ne pas être reconnu est une souffrance énorme. C'est comme si on t'enfonce la tête dans l'eau. Ils sont plus que déçus, vraiment désespérés ». Les auteurs nous disent à ce sujet qu'« on imagine sans peine combien cette insécurité dans la réalité entre en résonance avec le sentiment d'insécurité interne »255(*).

- La procédure d'asile est, dans beaucoup de cas, un événement traumatique secondaire (sujet D).

- La non-reconnaissance de la souffrance de la personne et l'humiliation de ne pas être reconnue comme personne en péril, physiquement ou psychologiquement, par le pays d'accueil sont ressenties comme une expérience très violente pour la personne. En même temps, cette procédure fait revivre le vécu traumatisant, ce qui n'est pas du tout souhaitable thérapeutiquement (sujet D).

Le sujet B nous parle des répercussions non seulement sur l'individu mais aussi sur la famille entière. C'est la famille comme système qui devient malade : le père qui se referme sur lui-même, la mère, le couple qui éclate puis les enfants qui sont parentifiés, adultifiés pour soutenir émotionnellement leur parents, ou adultifiés pour accomplir les démarches que les parents devraient faire.

Un autre phénomène mentionné par les professionnels - que nous n'avons pas abordé non plus dans la théorie - est la suspension du travail d'élaboration du vécu traumatique chez les exilés non reconnus. Le sujet D dit qu'un des effets de la procédure par rapport au vécu traumatique est la tendance à geler le processus de métabolisation ou d'élaboration de traumatisme.

Les demandeurs conservent leur énergie le temps de la procédure, parce que leur survie est encore en jeux. Dans le temps de la survie, le traumatisme n'est pas nécessairement à l'oeuvre. Certaines personnes peuvent continuer à bien fonctionner tant qu'elles sont dans une logique de survie.

Au moment où ils reçoivent leurs avis positif du commissariat ils se lâchent, décompensent (sujets B et D). A ce moment là, ils vont avoir des symptômes très, très forts liés au traumatisme vécu antérieurement. C'est à ce moment qu'ils se permettent car, ils ne sont plus dans la survie (sujet B).

Le sujet A et C mettent en évidence l'espoir et la déception envers le pays d'accueil pour ces personnes. « Les gens viennent avec l'espoir que plus jamais ça, qu'on va entrer dans un monde de justice, équité, d'amour, etc., (sujet A), avec espoir de trouver un espace de sécurité (sujet C) et quand ils arrivent ici, souvent ce n'est pas ce qu'ils ont espéré (sujet A). Ils se trouvent de nouveau confrontés à cette agression humaine (sujet C). Une fois que ce monde juste les déçoit, certains vont être profondément déçus et blessés » (sujet A) parce qu'ils leur rappellent ce qu'ils ont vécu (sujet C). C'est ainsi dit Fischer : « La croyance en un monde juste donne un espoir de résilience »256(*).

Quant au sujet C, l'incapacité de réparer la souffrance que les demandeurs ont subi par cette reconnaissance du statut de réfugié maintient ces personnes dans une répétition du traumatisme. Par exemple, parmi les facteurs traumatisants subis par les victimes de guerre au Kosovo, pouvant intervenir isolement ou d'une manière cumulée, dans l'étiologie des syndromes psychotraumatiques présentée par L. Crocq, nous trouvons aussi ce facteur : « avoir été accueilli avec hostilité dans un pays limitrophe » 257(*).

Le sujet D fait une distinction entre la régularisation258(*) et la reconnaissance comme réfugié en termes de restauration narcissique. Car, la reconnaissance du statut de réfugié, c'est reconnaître de ce qu'ils ont vécu. Ainsi, le sujet D nous dit qu'il encourage à poursuivre la procédure d'asile même si ces personnes sont régularisées. Nous manquons de références théoriques à ce sujet mais l'idée du sujet D nous parait logique. Cette logique nous la basons sur notre expérience personnelle.

A coté de la non-reconnaissance du statut de réfugié, il y a d'autres atteintes narcissiques (sujet D). Ces personnes sont confrontées aussi à des problèmes existentiels dus aux conditions difficiles dans les centres d'accueil, de dépendance du CPAS, etc. Ces difficultés de la procédure réduisent ces personnes à un mode de dépendance (sujet C), de l'inactivité forcée (sujet D) ce qui n'est pas valorisant pour elles. Pour se reconstruire, il faut aussi être autonome (sujet C). Nous avons trouvé dans plusieurs références les propos de nos sujets. A partir de sa pratique avec les demandeurs d'asile et réfugiés, P. Jacques explique que pour les personnes qui se trouvent dans des situations d'attente de reconnaissance, le temps est suspendu : « Sans papiers. Oisiveté, sentiment d'inutilité. Dépendance, infantilisation, logique "d'assistanat"; atteinte à sa fierté, changement de rôle social (...) »259(*).

7. Quelle importance a le soutien social dans l'accompagnement de la victime ? (Question 9)

Les professionnels mettent l'accent sur l'importance du soutien social mais aussi sur le fait que ce soutien social peut aussi être destructeur. Le sujet D, travaille déjà dans ce sens car son approche thérapeutique se base sur la psychanalyse mais aussi sur la thérapie institutionnelle. Pour lui, « c'est souvent sous le couvert d'un suivi social qu'on peut démarrer autre chose, de plus relationnel » (sujet D). Donc, le contexte social est très important (sujet C), essentiel (sujet B), primordial (le sujet D). Il y a des contextes qui rendent malade comme le contexte de guerre, les conflits interethniques, la répression, ... et il y a des contextes qui permettent de guérir comme les contextes solidaires où les cultures peuvent entrer en dialogue (sujet B).

Suite à des violences systématisées, à des événements qui impliquent toute une communauté, ce soutien social permet, à la majorité de la population, de s'en sortir. « Quand le traumatisme est introduit par l'homme, quand la personne est déshumanisée, il n'y a que la communauté qui peut restaurer cette humanisation, ce sentiment d'appartenance. Les individus qui ont été soutenus par l'entourage parviennent bien à s'en sortir en général. On ne peut pas améliorer quelqu'un dans l'isolement, dans la solitude » (sujet C). Néanmoins, le sujet A nous expose que ce soutien ne peut aider que des gens qui ont déjà des ressources : « On voit ceux qui participent à des groupes de paroles, qui ont des contacts avec d'autres mais qui ne s'en sortent jamais ». Par contre si le soutien social ne relève pas d'une démarche positive, la situation de la victime peut s'en trouver aggravée : cela peut rendre la souffrance encore plus grande. Le sujet C met en évidence que parfois l'entourage ne reconnaît même pas la souffrance de la victime. « Les victimes qui ne sont pas reconnues, parfois on les blâme ou on dit : voilà cette personne veut se victimiser ; elle doit tourner la page ; etc. alors que la personne n'en est pas capable. Cette façon de les ré-humilier, de ne pas reconnaître la souffrance ne favorise pas la récupération » (sujet C). Le sujet B nous dit que ça dépend aussi comment et la victime cherche des ressources. Par exemple, il y a des gens qui font plus facilement confiance à des professionnels. Il y a des gens qui font confiance à n'importe qui et ils seront roulés, ce qui renforce la souffrance.

Le sujet A prend en compte certaines cultures qui prohibent, qui négativisent le fait d'exprimer des souffrances de cette nature. « Tu dois les digérer, tu dois les supporter et faire face, et montrer un visage digne ». Par exemple, au Burundi et Rwanda, souvent, un homme ou une femme digne ne déclare pas ses misères aux autres. Il doit assumer. Parfois, dans certaines situations, ça peut marcher, parfois il faut un long délai pour qu'il y ait une confiance entre les gens (sujet A).

« Donc, la capacité à trouver de l'aide après un événement traumatique est déterminante pour la guérison, sa résolution » (sujet B).

Ces perceptions sont en accord avec tous les spécialistes rencontré dans la théorie. Par exemple, la reconnaissance de la souffrance, l'importance du soutien social, compréhension, tolérance et l'insertion dans la société peut aider la personne se reconstruire et céder graduellement son statut de victime.

« ... le traumatisme psychique est lié à l'événement objectif, mais, surtout, ce qui est traumatisant, c'est l'absence de mots autour de cet événement. Le silence, le non-dit qui entoure le drame, est plus traumatisant que l'événement en lui-même. C'est le désaveu de l'entourage et la non- reconnaissance qui constituent une violence traumatique venant s'ajouter à la violence réelle »260(*).

Nous remarquons que, selon les propos des professionnels et de la théorie, le rôle du soutien social s'avère très important car la construction de l'identité de la personne est indissociable du regard de l'autre. Si la personne a déjà des ressources et si le soutien social a une approche adéquate ça aide à se reconstruire. Par contre, si le social ne reconnaît pas la victime ou s'il a une approche inadaptée, ça rend la souffrance encore plus grande. C'est ainsi nous dit Fischer : « c'est dans la relation à autrui que chacun peut se construire ou peut être détruit (...). On comprendra alors qu'il y a des blessures parce qu'il y a relation »261(*).

Cependant, aucun professionnel ne nous a parlé de l'exclusion, de la marginalisation de certaines victimes comme c'est le cas du viol, surtout dans certains types de sociétés plus traditionnelles. Par exemple, nous avons abordé dans la théorie qu'une femme violée au Kosovo est marginalisée et/ou rejetée par la société. Voici ce que disent les auteurs : « ...après les exactions serbes commises sur des femmes, certains époux ont divorcé. (...). Une fille violée aura énormément de difficultés pour trouver un mari. Alors, beaucoup se taisent. Le viol est vécu comme une honte terrible car c'est à la fois la pire humiliation pour elles et le pire affront pour leur famille »262(*). Le traumatisme reste alors l'axe central de toute relation sociale.

8. La reconnaissance sociale est-elle une voie vers la réparation ? (Question 10)

Pour le sujet D, s'il s'agit de réparation narcissique. Les autres professionnels nous ont donné des réponses diverses. Ils demeurent sceptiques face à certains vécus dramatiques.

Pour le sujet C « c'est une tendance vers une réparation symbolique mais il y a des points d'interrogation ». C'est un problème de l'Etat de reconnaître ces personnes comme victime. Le sujet C se demande si on peut réparer quelque chose : « Est-ce qu'on peut réparer ? Je crois qu'il faut renoncer à ça » (sujet C). De toute façon, quelqu'un qui a tué ton père, ta mère, il ne réparera jamais ça ». Cependant, une chose qui aggrave la souffrance, est quand cet autre ne reconnaît même pas le mal qu'il a fait. La victime est en partie soulagée lorsqu'il y a une reconnaissance que ce qui a été fait est inhumain (sujet A).

Le sujet A pense qu'au moins la justice peut prononcer des condamnations qui aideraient la victime sur le chemin de la réparation. Mais, dans des nombreuses situations, même ce geste symbolique de la justice n'existe pas.

Concernant la réparation chez les exilés, le sujet C nous apprend que l'incapacité de réparer la souffrance que les victimes ont subi par cette reconnaissance du statut de réfugié maintient ces personnes dans une répétition du traumatisme. « La majorité des patients que j'ai sont encore dans le traumatisme parce qu' ils n'ont pas de papiers depuis x années ...».

Même si l'Etat ou l'agresseur reconnaît la victime, pour le sujet A, il ne peut avoir des réparations que si la victime rend possible la réparation, entreprend la démarche de réconciliation. Parce que si c'est le bourreau lui même qui le fait, quand la victime n'est pas prête, ça ne change rien. Le sujet s'appui sur ses observations au Rwanda. Il dit qu'on a condamné à mort certains auteurs du génocide. Le but était de les punir mais en même temps, il y avait un sens de réparation symbolique. Pourtant, certaines victimes n'étaient pas soulagées car on les a tués sans souffrir ce qui était le contraire de ce que les victimes elles-mêmes avaient vécu de la part de leurs bourreaux. Ces propos nous rappellent cette femme albanaise qui demandait vengeance pour la réparation.

Le sujet fait une remarque sur le rôle du clinicien. « Le clinicien ne doit pas bloquer le travail que la personne elle-même peut faire. Le travail de maturation. C'est à la personne elle même de condamner, de pardonner ou de faire de démarche ».

Dans ce sens les auteurs disent que la violation explicite de la loi exige réparation en justice, mais « la justice ne peut réparer que le réparable et il y a toujours une part d'irréparable »263(*). Pour cela, il faut laisser la mémoire de faire son travail qui permet, au moins, l'apaisement et l'instauration d'une culture de la paix.

Les réponses de nos professionnels sont en lien avec cet apaisement de la victime. Néanmoins, nous n'avons pas eu des réponses sur l'autre point qui nous parait important aussi : rétablissement d'une culture de paix. Nous avons mis en évidence dans la partie théorique que l'horreur que la victime traverse, révèle en elle la partie la plus sombre : haine, vengeance, violence, etc. Pour que la Loi soit rétablie, la justice doit représenter une alternative à la vengeance. Elle doit faire son travail qui s'exprime par cette reconnaissance de la victime comme une personne lésée et le coupable comme responsable de ses actes qui doit être condamné.

La reconnaissance du statut de réfugié pour les victimes en exil (sujets A, B, C, D) a un rôle très important pour la récupération. Nous trouvons ces propos aussi chez Sironi264(*) que nous avons décrits dans la partie théorique.

* 215 Dans une métaphore, Freud compare l'appareil psychique à une boule protoplasmique protégée des stimulations extérieures " pare-excitation ", qui a pour fonction de repousser ou de filtrer les stimulations qui viennent d'extérieur. Il y a trauma lorsqu'une grande quantité d'excitation venant de l'extérieur fait effraction au travers de sa couche pare-excitation de l'appareil psychique, et pénétrer au sein du psychisme, où elle demeure comme un corps étranger, provoquant de vains efforts pour l'expulser ou l'assimiler. Crocq, L. Dépassement et assomption du trauma. http://www.enm.justice.fr/centre_de_ressources/dossiers_reflexions/oeuvre_justice2/3_depassement_trauma.htm

* 216 Barrois, C. Crocq, L. Dépassement et assomption du trauma. www.enm.justice.fr/centre_de_ressources/ dossiers_reflexions/oeuvre_justice2/3_depassement_trauma.htm

* 217 Günter Seidler. Une thérapie fait disparaître les symptômes - les cicatrices restent... ARTE 2005 www.arte-tv.com/fr/histoire-societe/935372.html

* 218 Crocq, L. (1999), Les traumatismes psychiques de guerre, Paris, Odile Jacob, p. 155.

* 219 Croq, L. (1999). Les traumatismes psychiques de guerre. Paris : Odile Jacob. Page 350.

* 220 Ce sont des symptômes que nous allons parler plus loin.

* 221 Crocq, L. (1999). Les traumatismes psychiques de guerre. Paris : Odile Jacob, page

* 222Crocq, L. Dépassement et assomption du trauma

http://www.enm.justice.fr/centre_de_ressources/dossiers_reflexions/oeuvre_justice2/3_depassement_trauma.htm

* 223 Le Journal International De Victimologie. Traumas psychiques chez les demandeurs d'asile en France. www.jidv.com/BAUBET,T-JIDV2004_%202(2).htm

* 224 Traumas psychiques chez les demandeurs d'asile en France : des spécificités cliniques et thérapeutiques, année 2, numéro 2, avril 2004, Journal International de Victimologie,

http://www.jidv.com/BAUBET,T-JIDV2004_%202(2).htm

* 225 Mounir Samy. Trauma et événement traumatique : les réfugiés du Kosovo et les autres de la planète. 2003 Association canadienne pour la santé mentale - Filiale de Montréal www.acsmmontreal.qc.ca/ publications/equilibre/refugies.html

* 226 Moro, M.-R. & Lebovici, S. (1995), Psychiatrie humanitaire en ex-Yougoslavie et en Arménie, Paris, PUF, p. 70.

* 227 Grappe, M. (2003), Le deuil traumatique, in Lachal C., Ouss-Ryngaert L., Moro M.-R. et al., Comprendre et soigner le trauma en situation humanitaire, Paris, Dunod, p. 178.

* 228 Le Journal International de Victimologie, Traumas psychiques chez les demandeurs d'asile en France, www.jidv.com/BAUBET,T-JIDV2004_%202(2).htm

* 229 Anaut, M. (2003). La résilience : surmonter les traumatismes. Paris : Nathan université. Page 42.

* 230 « Rupture de l'unité psychique provoquant un relâchement des processus associatifs sur lesquels reposerait le fonctionnement mental », Grand dictionnaire de la psychologie (2000), Larousse.

* 231 Crocq, L. (1999), Traumatismes psychiques de guerre, Paris, Odile Jacob, p. 94.

* 232 C'est la 8e modalité du syndrome de répétition : le cauchemar de répétition.

* 233 C'est la 5e modalité du syndrome de répétition : le vécu comme si l'événement allait se reproduire.

* 234 C'est la 3e modalité du syndrome de répétition : les souvenirs forcés.

* 235 C'est la 1re modalité du syndrome de répétition : l'hallucination de répétition.

* 236 Nous trouvons cette composante dans la 4e modalité du syndrome de répétition : la rumination mentale.

* 237 C'est le premier registre de l'expression du syndrome de répétition. Le DSM IV et le tableau clinique français utilisent le terme « détresse psychique » pour qualifier l'état psychique induit par la survenue des reviviscences. « Etre dépressif n'est pas le trait d'une personnalité dépressive, mais bien la conséquence d'une altération profonde de l'état affectif provoquée par la blessure », Ficher, G-N. (2003), Les blessures psychiques, Paris, Odile Jacob, p. 68

* 238 C'est le 2e registre de l'expression du syndrome de répétition.

* 239 Nous trouvons ces troubles du sommeil dans le registre : altération de la personnalité (blocage de la fonction de filtration). Pour l'auteur, le terme « difficulté d'endormissement », utilisés par les patients et adoptés par beaucoup de cliniciens, est inappropriés. Crocq, L. (1999), Les traumatismes psychiques de guerre, Paris, Odile Jacob, p. 139.

* 240 Ferenczi a étudié surtout les combattants de la Première Guerre mondiale.

* 241 Le tableau clinique du syndrome psychotraumatique les répertorie dans l'asthénie sous les symptômes spécifiques.

* 242 Critère D 2.

* 243 De Clercq, M. et Lebigot, F. (2001), Les traumatismes psychiques, Paris, Masson, p. 108.

* 244 Nous ne disposons pas de théorie à ce sujet.

* 245 Sironi, F. (1999). Bourreaux et victimes. Paris : Odile Jacob.

* 246 Fischer, G-N. (2003), Les blessures psychiques, Paris, Odile Jacob, p. 44.

* 247 Serge Tisseron. Mémoire et création. http://1libertaire.free.fr/tisseron6.html

* 248 Ibidem.

* 249 Nous nous demandons si le sujet B fait référence à Pierre Janet qui parle de dissociation et d'idée fixe. Pour l'auteur, le trauma provoque une «  dissociation »  de la conscience. Cette dissociation réside dans le fait que, d'un coté l'événement traumatisant subsiste au sein du subconscient - comme un corps étranger ou un parasite - et se manifeste automatiquement dans une manière brute par des reviviscences visuelles, cauchemars, bouffées d'angoisse, sursauts, délires et conversions hystériques, etc., et, de l'autre coté, le reste de la conscience continue à fonctionner de façon normale, élaborant des conduites supérieures et adaptatives. Janet donne le nom d'idée fixe à ce corps étranger ou à ce parasite. Pour Crocq le terme « idée fixe » n'est pas adéquat car la souvenance brute de l'événement traumatique n'est ni une représentation mentale ni une cognition.

Crocq, L. Dépassement et assomption du trauma. http://www.enm.justice.fr/centre_de_ressources/dossiers_reflexions/oeuvre_justice2/3_depassement_trauma.htm

* 250 Le Journal International de Victimologie, année 2, numéro 2, avril 2004, Traumas psychiques chez les demandeurs d'asile en France : des spécificités cliniques et thérapeutiques,

http://www.jidv.com/BAUBET,T-JIDV2004_%202(2).htm

* 251 Weber, E. et Prieto, N. (2003), Approche psychothérapeutique du traumatisme psychique, www.iutcolmar.uha.fr/internet/recherche/ Jcerdacc.nsf/0/e5a22d643a51d199c1256d170045b40a

* 252 Document à remettreaux parents Survivre aux traumatismes. www.attachmentacrosscultures.org/ francais/impact/trauma_f.pdf

* 253 Approche pluraliste qui regroupe différentes approches psychothérapeutiques et préconise la flexibilité et l'adaptabilité du thérapeute à utiliser ces différentes approches quand celles-ci s'avèrent nécessaires, pour avoir plus de chance de résoudre un problème qui entrave la vie psychique du patient. Chambon, O. et Marie-Cardine, M. (2003), Les bases de la psychothérapie, Paris, Dunod, p. 35-37

* 254 Nous pensons que le sujet nous parle de différentes activités que le centre met en place pour ces patients, comme par exemple des groupes de paroles pour adultes, etc.

* 255 Le Journal International de Victimologie, année 2, numéro 2, avril 2004, Traumas psychiques chez les demandeurs d'asile en France : des spécificités cliniques et thérapeutiques,

http://www.jidv.com/BAUBET,T-JIDV2004_%202(2).htm

* 256 Fischer, G-N. (2003), Les blessures psychiques, Paris, Odile Jacob.

* 257 Crocq, L. (1999), Les traumatismes psychiques de guerre, Paris, Odile Jacob.

* 258 « La demande de régularisation et la demande d'asile sont deux choses différentes. Elles ont une base juridique distincte, les procédures qui les régissent sont indépendantes et les motifs invoqués pour obtenir l'une ou l'autre sont, en principe, également différents ».  

« Un réfugié, selon la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés de 1951, est une personne qui "craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays". Demander l'asile en Belgique signifie demander la protection des autorités belges ».

« La demande de régularisation faite sur base de l'article 9, § 3 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, doit mentionner les raisons pour lesquelles la personne souhaite séjourner en Belgique ainsi que les circonstances exceptionnelles qui justifient l'introduction de cette demande en Belgique et non auprès du poste diplomatique belge dans le pays d'origine. Il s'agit donc de mettre en avant des éléments d'intégration (notamment la longue durée du séjour en Belgique, même s'il n'est pas légal, l'inscription à des cours de langues, la scolarisation des enfants, des attestations d'amis ou de connaissances, etc.) ou encore des motifs médicaux (une impossibilité de soigner telle maladie dans le pays d'origine) et, en même temps, les motifs rendant un retour dans le pays d'origine impossible ou particulièrement difficile. Cette demande peut être introduite à n'importe quel moment, indépendamment de la demande d'asile »,

Amnesty International, Demander l'asile en Belgique, avril 2005, http://www.amnestyinternational.be/doc/article5212.html

* 259 Jacques, P. (décembre 2004), Souffrance sociale et pratiques de réseaux. http://www.pinel.qc.ca/psychiatrie_violence/articles/jacques1.htm

* 260 Jacques, P. (Mai 2001). Trauma et culture. Psychiatrie et violence. www.pines.qc.ca/psychiatrie_violence

* 261 Fischer, G-N. (2003). Les blessures psychiques. Paris : Odile Jacob. Page 32

* 262 Silvana Miria. (22 mai 1999). Les viols sont une stratégie de guerre orchestrée par le pouvoir serbe.

www.humanite.presse.fr/ journal/1999-05-22/1999-05-22-290017

* 263 Chafaï-Salhi, H. Oublier oui, pardonner peut être. Apparu dans le texte : Restaurer l'humanité dans l'humain. http://www.alliance21.org/2003/IMG/pdf/final_human_fr-3.pdf

* 264 Sironi, F. (1999). Bourreaux et victimes. Paris : Odile Jacob.

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