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Les impacts des incitations monétaires sur l'effort des salariés: positifs ou négatifs?

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par Pheakdey VIN
Université Lumière Lyon 2 - Master 2 Recherche 2007
  

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1-2- L'effet de sélection

Le salaire à la performance est aussi un instrument de sélection des meilleurs salariés par les entreprises [Lazear, 1986; 1999; 2000a; 2000b; 2004]. La question du recrutement est en général conçue comme un problème de sélection adverse. Les caractéristiques des candidats à l'embauche ne peuvent qu'être imparfaitement connues et ceci est à l'origine de rentes informationnelles détenues par les candidats opportunistes ou tricheurs. Dans la mesure où l'hétérogénéité des candidats au recrutement peut être forte, cela rend d'autant plus étendue la rédaction du menu de contrats [Malgrange et al., 2004].

Alors que la rémunération à la performance se justifie originellement dans un contexte d'aléa moral, Lazear montre que ce dispositif incitatif peut être aussi mis en oeuvre pour organiser le recrutement par un mécanisme de criblage des employés. Cette capacité de sélection tient au fait que les meilleurs éléments tendent à préférer le salaire à la performance dans la mesure où ils savent que leur performance est plus élevée que celle du reste de la main-d'oeuvre. Les salariés qui ne peuvent pas produire un niveau suffisamment élevé de l'output ne travailleront pas pour la firme qui paye à la performance. Les salaires (ou les salaires horaires) qui paie sur la base d'une mesure imparfaite d'effort encourage les salariés de qualité inférieure à venir à la firme [Lazear, 1986]. Par conséquent, les employés de haute qualité choisissent de travailler aux entreprises qui payent des salaires à la pièce et ceux de basse qualité choisissent des salaires horaires. La différence de la qualité à travers des entreprises pourrait mener à conclure que le mouvement aux contrats incitatifs basés sur l'output augmente l'output total.

L'illustration

Pour illustrer le double effet de la rémunération à la performance : l'incitation et la sélection, nous prenons l'exemple des « chauffeurs de taxi New-Yorkais » de Lazear [1995 ; 2004].

Il y a beaucoup de manières de payer des chauffeurs de taxi. Une possibilité est de leur louer le taxi et leur permettre de garder tout ce qu'ils gagnent pour eux-mêmes après avoir payé la location. C'est l'arrangement qui s'est juste avéré optimal. L'histoire des chauffeurs de taxi compte cependant un certain nombre d'exceptions. Par exemple, une règle de partage répartissait la valeur du kilométrage au compteur entre les chauffeurs et l'entreprise. Ainsi, un chauffeur acquittait un droit fixe restreint, voire nul, à l'entreprise pour la location du taxi, mais il ne conserve que 50% du produit des courses au compteur. Ce schéma crée à la fois de mauvaises incitations et une mauvaise sélection des travailleurs.

Parmi les problèmes les plus évidents est que puisque l'entreprise ne peut pas surveiller la quantité de conduite faite, le chauffeur de taxi et le passager peuvent faire une négociation pour payer seulement 75% de ce que le compteur montrerait et ne pas déclencher le compteur. Le passager et le chauffeur de taxi sont monétairement bénéficiaires aux dépens de l'entreprise, c'est-à-dire que le passager va payer moins et le chauffeur de taxi va obtenir tout ce qu'il gagne même si ce montant est inférieur à celui qui est montré par le compteur (75% par exemple). Ceci prouve qu'il convient de donner un résiduel complet au chauffeur de taxi pour résoudre ce problème.

Le second schéma de rémunération soulève un autre problème d'incitation. Considérons un chauffeur de taxi qui a travaillé pendant onze heures dans un jour particulier et il se demande s'il continue encore une heure (i.e. douzième heure) ou s'il ramène le taxi chez lui pour regarder la télévision. Il raisonne que s'il conduit le taxi, il peut encore gagner 10 dollars en une heure. Supposons qu'il évalue son loisir lié à cette douzième heure de travail à 8 dollars. C'est le salaire de la réservation du chauffeur. S'il partage le gain au compteur avec son entreprise, il ne gardera que 5 dollars (= 10 dollars * 50%) et il décidera donc de rentrer chez lui dans la mesure où cette somme est inférieur aux 8 dollars nécessaires pour le convaincre de continuer à travailler. En revanche, s'il garde la totalité des 10 dollars après avoir loué le taxi pour la journée, il continuera à travailler encore une heure. Par conséquent, rémunérer des travailleurs en totalité en fonction de leur performance les incite à plus d'effort.

En plus des incitations, le mécanisme de sélection fournit une autre raison importante pour louer le taxi aux travailleurs et leur permettre de conserver la totalité de la recette au-delà des coûts de location.

Figure 3 : La sélection des chauffeurs de taxi

Q

Q*

0

Rémunération

Q - á

RQ

- á

En examinant la figure 3, la politique de rémunération à 100% au-delà de la location est représentée par la droite qui commence sous l'origine à -á et a une pente de 1 (taux de bonus = 1). La droite RQ, qui représente la politique de partage des gains au compteur sans droit de location du taxi, commence à l'origine et a une pente inférieure à 1, par exemple 0,5.

Le résultat est la sélection. L'entreprise qui paye (Q - á) attire les travailleurs les plus productifs, alors que l'entreprise qui partage les gains kilométriques attire les travailleurs les moins productifs.

En règle générale, en payant tous les travailleurs RQ, l'entreprise perd de l'argent sur tous ceux qui produisent moins que Q* parce que le taxi tout comme la plaque ont une valeur et un coût. Ainsi, les travailleurs attirés par l'entreprise RQ sont ceux qui ne sont pas rentables. Par conséquent, le schéma de rémunération (Q - á) domine. Même en l'absence d'effet incitatif, il vaudrait mieux pour l'entreprise payer (Q - á), ne serait-ce que pour attirer les travailleurs de meilleure qualité.

Cette illustration montre que la rémunération liée aux résultats a une capacité d'attraction pour les travailleurs les plus habiles et les plus motivés qui peuvent ainsi améliorer leur revenu.

Outre cette illustration, il y a d'autres évidences empiriques qui soutiennent que les incitations monétaires (ici le salaire à la performance) incitent les salariés à offrir leur effort maximal au travail et donc augmentent leur performance, et aussi attirent les salariés les plus productifs.

Les évidences empiriques

Dans notre recherche, nous prenons quelques études empiriques des économistes pour mettre en lumière des effets positifs de la rémunération à la performance sur l'effort des salariés. La première évidence empirique que nous présentons est réalisée par Lazear. Cette étude est basée sur des données de Safelite Glass Corporation, une grande entreprise qui installe des pare-brise à travers tous les Etats-Unis. Un diagramme simple de Lazear illustre des mécanismes et les prédictions de la théorie. Durant 1994 et 1995, Safelite a changé son mode de rémunération en passant d'un salaire horaire à un salaire à la pièce pour les ouvriers. Il existe des données relatives à la performance à la fois avant et après le changement, ainsi que des statistiques sur la performance individuelle. Il est ainsi possible d'isoler les effets incitatifs et les effets de sélection.

Avant le changement, tous les travailleurs étaient payés à un salaire horaire. Ce type de salaire est représenté par la droite horizontale correspondant à W et il y a aussi un seuil Q0 en dessous duquel la rémunération devient nulle, i.e. l'individu est licencié (Voir Figure 4). Ainsi, même si les travailleurs reçoivent un salaire horaire, ils doivent respecter un certain standard minimum s'ils ne veulent pas perdre leur emploi. Face à ce mode de rémunération, un salarié devrait préférer se situer au point A puisque l'effort est coûteux, que les courbes d'indifférence ont une pente positive et que le point A lui offre la meilleure rémunération pour un moindre effort.

Figure 4 : Le schéma de compensation chez Safelite

Rémunération

0

Q*

Q0

B

âQ - á

A

W

- á

Salaire horaire

Output, Q

Quand le nouveau mode de rémunération (ici, le salaire à la pièce) est introduit à Safelite, les travailleurs payés à la pièce sont assurés de ne pas toucher moins qu'avec l'ancien système. Un paiement à la pièce avec une pente indiquée par la droite (âQ - á) offrirait aux travailleurs une rémunération moindre que celle qu'ils obtenaient avec une production inférieure au niveau Q*. Ainsi, tous les travailleurs qui réalisent une production comprise entre Q0 et Q* obtiennent toujours un gain W. En revanche, un travailleur qui produit plus que Q* obtiendra le montant correspondant au salaire à la pièce. L'arrangement utilisé est que : compensation = max [W, âQ - á], où W est le salaire garanti, â est le taux à la pièce basé sur le montant des unités de l'output Q et á est une limite constante pour satisfaire la contrainte de rationalité individuelle.

Dans la figure 4, les travailleurs avec des courbes d'indifférence en pointillés sont les plus ambitieux : ils sont plus enclins à échanger l'effort contre le revenu en n'importe quel point. Ils préféreraient donc le point B plutôt qu'au point A. Par contre, un salarié avec une courbe d'indifférence solide préférerait le point A au point B. Donc, le salaire à la pièce n'aura aucun effet sur les individus avec une courbe d'indifférence solide mais conduira à accroître le produit parmi les individus avec des courbes d'indifférence en pointillés, i.e. les travailleurs plus productifs. Alors, le produit moyen devrait augmenter. En outre, cette étude montre que les travailleurs embauchés sous le nouveau régime sont, en logarithme, 0,24 fois plus productifs que leurs collègues. L'entreprise donc attire les travailleurs les plus productifs.

Le principal résultat du changement de mode de la rémunération est que Safelite a connu une augmentation de sa productivité d'environ 44%. Cette augmentation est imputable pour moitié aux incitations (22%) et pour moitié à la sélection (22%). Donc, l'intérêt du salaire à la pièce est que ce schéma prend en compte à la fois l'hétérogénéité et les incitations des travailleurs.

En résumé, il y a trois implications dans cette étude34(*). En premier lieu, l'effort moyen ne diminue pas et généralement augmente quand l'entreprise passe des salaires horaires aux salaires à la pièce. Par conséquent, l'output moyen augmente. C'est l'effet incitatif. En second lieu, les capacités moyennes de la main-d'oeuvre augmentent parce que les capacités de l'ouvrier moins qualifié ne changent pas en raison du changement dans l'arrangement de compensation, mais les capacités de l'ouvrier plus productif montent. Le changement aux salaires à la pièce a pour effet d'améliorer la conservation et le recrutement des ouvriers les plus productifs. C'est l'effet de sélection. En troisième lieu, la variance de capacité de l'ouvrier et la quantité de l'output augmente après le passage aux salaires à la pièce.

Dans ce qui suit, nous montrons une autre évidence empirique qui supporte un effet incitatif d'une rémunération à la pièce35(*). Autrement dit, le salaire à la pièce incite des travailleurs à faire des efforts dans le travail, et donc la productivité augmente. Cette évidence statistique, réalisée par Paasch et Shearer [2000], est tirée du registre du personnel dans une compagnie qui s'occupe de plantation d'arbres en Colombie-Britannique. Les résultats de cette étude suggèrent que l'augmentation de la productivité résultant du passage d'une rémunération fixe à une rémunération à la pièce soit de 22.6%. Les résultats confirment la présence d'un effet incitatif, c'est-à-dire que les ouvriers payés à la pièce sont plus productifs que ceux avec des salaires fixes.

L'évidence d'une expérience sur le terrain de Shearer [2004] soutient également l'effet incitatif de système des salaires à la pièce. Les données de cette expérience sont utilisées pour estimer le gain dans la productivité qui est réalisée quand les ouvriers sont payés aux salaires à la pièce plutôt qu'aux salaires fixes. L'expérience a été entreprise au sein d'une compagnie qui s'occupe de plantation d'arbres et fournit des observations quotidiennes sur la productivité de chaque ouvrier sous les deux systèmes de compensation. L'analyse sans restriction des données expérimentales estime que le gain de productivité est de 20%.

Les résultats des études de Lazear [2000b], de Paash et Shearer [2000], et de Shearer [2004] semblent compatibles avec l'étude de Gielen et al. [2006] sur un panel de 1166 firmes hollandaises durant 1995-2001. Le résultat montre que l'introduction de système de la rémunération à la performance augmente la productivité du travail de 9%. Cette augmentation provient partiellement de l'effet incitatif et partiellement de l'effet de sélection.

En conséquence, l'exemple des chauffeurs de taxi New-Yorkais et les données des évidences empiriques ci-dessus confortent à la fois le rôle de la sélection et le rôle des incitations dans le choix de la rémunération à la performance. En asymétrie d'information, ce mode de rémunération a pour effet de signaler la qualité des individus. La rémunération à la performance a été donc justifiée comme mécanisme contractuel efficace pour résoudre le problème « principal-agent » parce qu'il aligne les préférences des firmes et ceux des employés.

Outre le système de la rémunération à la performance, il y a un autre système qui est un mécanisme d'incitation très efficace, à savoir le modèle à paiement différé. Analogue à la rémunération à la performance, les salariés avec le contrat à paiement différé sont payés sur la base de leur performance, mais c'est la performance dans le passé, pas la performance courante. C'est pourquoi la rémunération dans ce modèle est croissante avec l'ancienneté des salariés.

* 34 Lazear, E. P. [2000a], « The Future of Personnel Economics », Economic Journal, vol. 110, n° 467, p. F621-F622.

* 35 Cette évidence empirique existe dans l'article de Paasch, H. J. et Shearer, B. [2000], « Piece Rates, Fixed Wages, and Incentive Effects: Statistical Evidence from Payroll Records», International Economic Review, vol. 41, n°1.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault