Les actes de l'état civil et leur impact sur les successions en Droit Civil Congolais( Télécharger le fichier original )par Jacques Bisimwa Bisonga Université de Lubumbashi - Licence 2009 |
SECTION II. MODES DE TRANSMISSION DE LA SUCCESSIONParler des modes de transmission de la succession revient à faire allusion à la dévolution successorale qui est l'ensemble des règles qui déterminent les personnes appelées à la succession. Il s'agit de déterminer ici qui recueille la succession69(*). Autrement dit, la dévolution successorale est le passage tout simplement d'un droit héréditaire conformément à la loi, succession ab intestat, ou selon la volonté du de cujus, succession testamentaire. §1.LA SUCCESSION AB INTESTATLa succession ab intestat ou légale est la succession qui s'opère de plein droit par le fait de la loi lorsque le défunt meurt sans avoir laissé de testement. Dans ce cas, ses biens seront attribués selon l'ordre etabli par la loi au profit de ses heritiers70(*). La succession ab intestat est toujours universelle et les personnes y appelées sont des heritiers. A.Conditions requises pour succeder. L'analyse de certaines dispositions du code de la famille nous permet de distinguer trois conditions qui confèrent la vocation successorale. Il s'agit de l'existence, de la non-indignité et enfin de l'appartenance à la famille du de cujus. 1° L'existence L'existence est la première condition pour prétendre à une vocation successorale. Pour succeder, il faut nécessairement exister à l'instant de l'ouverture de la succession, c'est-à-dire au moment du décès du de cujus. L'existence dont il est fait allusion ici est celle jurique qui commence à courir dès la conception de l'enfant toutes les fois qu'il s'agira de la protection de ses intérèts à condition qu'il naisse vivant.71(*) En conséquence, sont incapables de succeder d'après la loi ceux qui n'ont pas été conçus à l'ouverture de la succession et les personnes déjà décedées.72(*) a. les personnes non encore conçues L'article 839 du code de la famille enseigne que les enfants non conçus au jour de l'acte de donation ou au décès du testateur ne peuvent recevoir aucune libéralité, sous reserve des dispositions relatives à l'institution contractuelle et à la substitution fidéicommissaire. La vocation successorale remonte donc à la conception, grâce à quoi l'enfant posthume hérite de son père mais encore faut-il établir l'antériorité de la conception de l'enfant sur le décès du de cujus.73(*) b. Les personnes déjà mortes. Les personnes déjà mortes avant le de cujus ne figurent pas parmi les successeurs. La mort est définie par MUPILA NDJIKE comme étant la manifestation de l'arrêt définitif du coeur ou de la réspirstion, la fin du fonctionnement simultanée des différents organes nécessaires à la vie, ou l'abolution totale et irreversible des fonctions cérébrales.74(*) Ainsi définie, elle peut être naturelle ou accidentelle. Une autre réalité est le cas de la mort par exécution d'une décision juridiciaire. C'est le cas de l'absence et de la disposition prévues respectivement aux articles 173 et 174 du code de la famille. Aux termes de l'article 202 du code de la famille, une personne en état d'absence déclarée ou même presumée par un jugement au moment où la succession s'ouvre à son profit n'est pas appelée à la recueillir. Cependant, l'article 758 de la loi susvisée reconnaît que les héritiers prédécédés au disposant peuvent se faire repésenter à la succession par leurs decendants ou ascendants selon le cas . De même en cas d'absence, l'article 202 susmentionné renchérit q'en cas d'absence, la succession est dévolue exclusivement à ceux qui l'auraient recueillie au défaut de l'absent sous reserve de dresser inventaire et de donner caution ou cautionnement préalable . Le législateur congolais exclut la représentation en cas de disparution.75(*) Une autre notion est celle de la non-indignité successorale posée comme deuxième condition. 2°. La non-indignité Le code de la famille ne définit pas le concept d'indignité. L'indignité est la déchéance civile entrainant l'exclusion e la vocation héréditaire de certains successibles qui se sont rendus coupables de certains faits graves l'égard du d decujus ou de sa mémoire.76(*) Les causes d'indignité sont limitativement prévues par la loi. En conséquance, l'exclusion pour cause d'indignité n'opère que dans la succession ab intestat. L'article 765 du code de la famille donne ces différentes causes qui rendent l'héritier ou le légataire indigne de succeder. Aux termes de cet article, est indigne de succeder :
La question reste à savoir si l'indignité joue de plein droit. En effet, l'indignité qui précise d'une part la situation juridique que la loi définit à l'article susvisé et d'autre part la sanction elle-même de cet état qu'est la déchéance s'apprécie différement. Nous estimons que les deux premières causes de l'indignité joue de plein droit tout simplement parce que la culpabilité du présume indigne aura déjà été établie par un jugement et l'indignité s'établira par simple constation. Pour les autres causes, l'indignité devra être constatée par un jugement. L'indignité est d'ordre public car elle se constate sur demande de toute personne intéressée ou du ministère public.77(*) Lorsque le tribunal déclare l'indignité établie dans le chef d'un héritier, elle produit pour effets, l'exclusion de ce dernier de l'hérédité. L'indignité sera ainsi considéré comme n'ayant jamais eu vocation héréditaire et devra en outre, restituer tous les biens qu'il tient de la succession. Pour ce faire, il sera rétroactivement considéré comme possesseur de mauvaise foi. Autrementn dit, il devra restituer non seulement les biens mais aussi les fruits et les produits ; encore que les actes accomplis par l'indigne sur le bien qu'il a reçu au moment de la mise en possession devront être annulés. L'indigne sera dépourvu de sa qualité d'héritier à l'égard des tiers à partir du moment où son indignité est déclarée par le tribunal. Cet héritier ne pourra donc plus se prévaloir de sa qualité d'héritier qu'il a perdue par l'effet de l'exclusion pour cause d'indignité.78(*) 3° l'appartenance à la famille du de cujus. Pour succeder, il faut être parent du défunt. La parenté résulte de la filiation d'origine, de la paternité juridique mais aussi de la filiation adoptive nous renseigne l'article 695 du code de la famille. Cette obligation revient à affirmer qu'il faut avoir un lien de sang avec le de cujus. Cependant la loi a mis deux exceptoins: l'enfant adopté vient à la successoin et le conjoint survivant. Quelque soit l'enciéneté et le degré d'amitié avec le de cujus, un ami ne deviendra jamais héritier. B.Le cercle des héritiers. 1.Les catégories d'héritiers. L'article 758 du code de la famille détermine les différentes catégories des héritiers dans une succession ab intestat tout en établissant une hiérarchie entre elles suivant leur ordre d'importance. Il s'agit de trois premières catégories, les autres étant consacrées respectivement par l'article 762 et 763 du code de la famille. 1° La première catégorie Aux termes de l'article 758, littéra a du code de la famille, la première catégorie est constituée de tous les enfants du défunt nés dans ou hors mariage mais affiliés ainsi que les enfants adoptés. Aux enfants nés dans le mariage on ajoute ceux nés dans les 300 jours après la dissolution du mariage.79(*) Les enfants non affiliés peuvent l'être même après la mort du de cujus et prendre part à la succession. On parle de l'affiliation post mortem.80(*) Les enfants qui bénéficient de la filiation issue de la paternité juridique sont exclus des héritiers de la première catégorie par les articles 649 et 758 du code de la famille. L'adoption consacre un double héeritage au profit de l'adopté dès lors qu'elle ne sépare pas l'adopté et ses descendants de leur famille d'origine à laquelle ils restent attachés.81(*) Certains auteurs ont donné quelques propositions pour tenter d'aporter une solution à cette situation qui permet à l'adopté de venir à la succession de son adoptant au même titre que les autres héritiers de la première catégorie. En affirmant que l'adoption crée une inégalité entre les enfants adoptés et les autres de la première catégorie, mais aussi que cette dernière est organisée dans l'intérêt de l'enfant, MUPILA NDJIKE estime que la nécessité de protection de l'enfant adoptif devrait normalement se limiter lui offrir le cadre familial dont il a besoin pour favoriser son épanouissement intégral, grâce à l'encadrement et à l'assistance de l'adoptant qui est tenu de veiller à l'entretien, l'éducation et à l'instruction de l'adopté. Il estime en second lieu que l'enfant adoptif pourrait à la limite, et compte tenu du lieu juridique établi par l'effet de l'adoption, venir à la succession en tant qu'allié dans la quatrième catégorie des héritiers en ce sens qu'il ne puisse pas jouir du double droit successoral.82(*) Le professeur BOMPAKA NKEYI lui pense que la modification de la loi devrait intervenir dans le sens de la réduction de la part successorale de l'enfant adoptif.83(*) Pour sa part, le professeur YAV KATSHUNG, tout en critiquant la position de MUPILA NDJIKE, estime que la position du professeur BOMPAKA NKEYI est partielle.84(*) Pour lui, attaquer le mal à la source serait la meilleure thérapeutique. Pour ce faire, il prône entre autre la rupture des liens de l'adopté avec sa famille adoptive qui s'acomplira par l'assimilation absolue en sa compréhension à considérer les effets de la filiation dans les rapports patrimoniaux ou extrapatrimoniaux: obligation parentale, vocation successorale et alimentaire reciproque. Pour rendre efficace cette solution, il propose le changement des effets de l'adoption en République Démocratique du Congo. Nous proposons que le législateur opte pour les effets de l'adoption plénière comme en France ou en Belgique, qui prônent la rupture des liens avec sa famille d'origine, avec comme conséquence en matière successorale la rupture du lien de parenté entre l'adopté et sa famille d'origine souligne-t-il.85(*) 2o La deuxième cetégorie
L'article 758 du code de la famille consacre trois groupes distincts qui consituent la deuxième catégorie de la succession ab instestat. Il s'agit du conjoint survivant, des père et mère du de cujus et de ses frères et soeurs.
Le conjoint survivant constitue le premier groupe des héritiers de la dexième catégorie. On entend par conjoint survivant, l'époux ou l'épouse régulièrement uni(e) dans le mariage, non divorcé ni même séparé uniletéralement survit qui survit après le décès de son conjoint.86(*) Même non enregistré, le mariage célébré en famille produira les mêmes effets.87(*) Toutefois, le fait que le mariage soit célébré en famille et soit précedent à d'autres, s'il n'est pas enregistré ne fonde pas de droit, le conjoint survivant bénéficiaire de ce dernier à se prévaloir comme héritier de deuxième catégorie. Dans une espèce soumise au tribunal de Grande instance de Kinshasa/Matete, il a été d'ailleurs jugé, en faveur de la seconde épouse reconnue veuve (conjoint survivant), en vertu de son acte de mariage, face à la première épouse, denomée LISA, qui n'avait aucun acte susceptible de prouver son mariage célébré en famille, pourtant antérieur à celui de la seconde épouse. Les temoignages des parents du défunt mari ainsi que de ses associés et amis en faveur de LISA n'ont pu suffire pour convaincre le juge à annuler le mariage de la seconde épouse, qui poussa son arrogance jusqu' à solliciter «que LISA soit jetée en prison pour tentative d'escroquerie ».88(*) Selon le cas, le nombre des conjoints survivants peut passer d'un à plusieurs selon qu'il s'agit du mariage polygénique conclu selon la coutume avant la premier Janvier 1951.89(*) A ce sujet, MUPILA NJIKE nous renseigne que la polygynie est une forme de polygamie qui admet l'union d'un homme avec plusieurs femmes.90(*)
Les père et mère du de cujus constituent le deuxième groupe de la deuxième catégorie. Les articles 595 et 601 du code de la famille réglementent respectivement la filiation maternelle et celle paternelle toute en déterminant le père et la mère qui viennent à la succession de leur enfant à sa mort. C. Les frères et soeurs du de cujus. Qu'il s'agisse des frères ou soeurs germains, consanguins ou utérins du défunts, la loi leur confère une vocation successorale en précisant qu'ils forment le troisième groupe de la premiere catégorie d'héritiers légaux. 3° La troisième catégorie. Les oncles et tantes paternels ou maternels constituent la troisième catégorie. Ils ne se présentent à la succession que lorsque le de cujus ne laisse pas d'héritiers de la première et de la deuxième catégories. 4° La quatrieme categorie L'article 762 du code de la famille prévoit que « à défaut d'héritiers de la troisième catégorie, tout autre parent ou allié viendra à la succession, pour autant que son lien de parenté ou d'alliance soit régulièrement constaté par le tribunal de paix qui pourra prendre telles mésures d'instuctions qu'il estimera opportunes. Le partage s'opère entre ces héritiers par égales portions ». 5° La cinquième catégorie. A défaut d'héritiers de ces quatres catégories, c'est-à-dire qu'en cas de déshérence, la succession est dévolue à l'Etat et ce, provisiorement.91(*) La déshérence est un aspect particulier d'un droit général, celui qu'a l'Etat sur les biens vacants et sans maitre. Une autre situation est celle de l'exhérédation relative à l'exclusion de tous les héritiers du sang et du conjoint survivant prévue à l'article 776 du code de la famille qui produit les mêmes effets que ceux de la déshérence. L'Etat acquiert la succession, soit comme propriétaire des biens vacants c'est-à-dire sans proprietaire ou abandonnés, soit comme successeur substitué aux exhérédés.92(*) 2.La représentation. Le code de la famille pose le principe de la représentation des héritiers. Ce qui signifie qu'on peut venir à la succession soit de son propre chef soit par une représentation. La représentation est une institution légale en vertu de laquelle certains successibles d'une même couche et un concours avec les successibles d'autres couches, exercent les droits qu'aurait eus dans la succession ouverte leur ascendant prédécédé, s'il avait survécu au de cujus.93(*) Il s'agit d'une téchnique destinée à corriger les hasard qui perturbent l'ordre normal des décès grâce à laquelle les descendants de degré plus éloigné occupent la place laissée vacante par les descendants plus proches morts avant le de cujus. a. Conditions de représentation - La représentation exige le prédécès du représenté ou sa déclaration d'absence. - Il faut que le représenté ait été lui-même capable de succeder s'il avait vécu lui mêm et qu'il n'ait pas rénoncé à la succession. - Il faut qu'il y ait absence d'indignité dans le chef du représenté. Cependant, l'enfant de l'indigne ne peut être exclu de la succession s'il y va à titre personnel. - Pour représenter, le représentant lui-même doit avoir la capacité successorale et ne pas être indigne à succeder au défunt. Il devra tout au moins être conçu et naître vivant. b. Les effets de la représentation - Le représentant succede lui-même, en son nom et pour son compte mais au degré du représenté avec les droits et obligations que le représenté aurait eu s'il avait survécu. - En cas de représentation, le partage s'opère par souche et non par tête. En effet, s'il y a plusieurs représentés d'une personne, ils ne prennent à eux tous que la part qu'aurait eu le représenté s'il avait survécu. Entre eux, le partage se fait par tête. La représentation écarte la règle de l'égalité des droits successsoraux résultant de l'équité de degré de parenté. Les représentants, même s'ils sont nombreux ne prennent qu'une seule part, celle du représenté alors que les héritiers préférables se partagent l'hérédité par tête.94(*) * 69 YAV KATSHUNG, Op. Cit., p.29. * 70 Ibidem, p. 55. * 71 Article 211 du code de la famille * 72 A cette catégorie s'ajoutent les absents et les disparus * 73 YAV KATSHNG, Op. Cit, p. 31. * 74 MUPILA NDJIKE, Op. Cit., p. 23 * 75 Article 208 du code de la famille. * 76 KIFWABALA TEKILAZAYA, Régimes matrimoniaux, successions et libéralités, UNILU, 2008, inédit * 77 YAV KATHUNG, Op. Cit., p. 34. * 78 Idem, p.37. * 79 MUZAMA MATANSI, Op. Cit., p. 41 * 80 MBUYI TSHIMBADI, « la preuve de la qualité d'héritier ou de liquidateur », in les analyses juridiques, n°4, Octobre- Novembre- Décembre, imprimerie Saint Paul, Lubumbashi, 2004, p.44. * 81 Article 678 du code de la famille. * 82 MUPILA NDJIKE, Op. Cit., p. 53. * 83 BOMPAKA NKEYI, cite par YAV KATSHUNG, Op. Cit, p. 188. * 84 YAV KATSHUNG, Op. Cit, p.197. * 85 YAV KATSHUNG, pp. 196-200. * 86 MUPILA NDJIKE , Op. Cit..,p.63 * 87 Article 379 du code de la famille * 88 KAMBALE KALUME P., cité par MUPILA NDJIKE, Op. Cit., pp. 71-72. * 89 Article 925 du code de la famille. * 90 MUPILA NDJIKE, Op. Cit, p. 64. * 91 YAV KATSHUNG, Eléments de régimes matrimoniaux et successions, Editions «Droits et justice pour tous», Lubumbashi, p. 42. * 92 MUZAMA MATANSI, Op. Cit., p. 47 * 93 PANIOL et RIPERT, cités par MUZAMA MATANSI, Op. Cit., p. 36. * 94 MUZAMA MATANSI, Op. Cit, p.37. |
|