5.6.- Les facteurs de durabilité et de
viabilité du projet
La durabilité désigne
généralement la pérennité des améliorations
apportées par le projet. Celle-ci se diffère de la durée
de l'intervention externe qui a rapport avec la longévité des
activités du projet. Elle se réfère classiquement à
la permanence de la situation améliorée que constitue l'objectif
spécifique du projet, mais il est plus logique de prendre
également en compte la pérennité des effets externes
à l'objectif, qui est donc l'impact. La durabilité n'est bien
entendu souhaitable que lorsque les impacts du projet sont positifs. Cependant,
la préférence fondamentale des humains pour les
bénéfices à court terme est un obstacle essentiel à
la durabilité et suggère que son absence soit rarement un
accident. Mais la préférence pour l'immédiat sur le futur
est, en effet, une réalité aussi universelle et répandue
que son corollaire économique : les taux d'actualisation.
Les notions de durabilité et de viabilité sont
souvent utilisées comme deux synonymes dans la plupart des textes de
gestion écrits par les auteurs. Dans certains cas, le terme
viabilité se réfère à la pérennité
d'une activité ou du fonctionnement d'un instrument quelconque de
développement, telle qu'une unité de production ou une
institution. La durabilité se réfère plutôt à
la permanence d'une situation favorable. Par exemple, une unité de
production ou institution est dite viable si elle obtient ou produit en
permanence les moyens pour son fonctionnement. De notre point de vue, cette
viabilité sera souhaitable, si elle contribue à la
durabilité du projet, donc si l'activité, l'institution,
l'unité de production en cause doivent se perpétuer pour assurer
une pérennité de l'impact positif.
D'une manière générale, il existe
plusieurs facteurs clés pour faciliter la viabilité d'un projet
de développement. Ces facteurs correspondrent à la
probabilité que l'innovation introduite par le projet soit
assimilée, plutôt que rejetée, par le milieu
récepteur, ainsi qu'à la motivation et aux capacités
(techniques, économiques et autres...) de voir se perpétuer les
activités nécessaires à l'entretien et au
développement des acquis. La viabilité est notamment liée
à l'insertion du projet dans son environnement et à la
pérennité des ressources naturelles ou des conditions
écologiques dont il dépend (Commission européenne, 2001).
La viabilité d'un projet doit se renforcer continuellement tout au long
du
projet mais, comme pour les critères
précédemment vus (la pertinence, l'efficacité,
l'efficience, etc.), elle doit être envisagée également
dès la phase de conception. Il s'agit donc dans ce cas de se soucier du
choix d'objectifs durables, cumulatifs, capables si possible de briser des
cercles vicieux et de les retourner en cercles vertueux.
À cause du caractère central de notre
étude, nous assimilons les facteurs de viabilité aux facteurs de
qualité d'un projet. Nous pensons donc que ceux-ci convergent
plutôt qu'ils divergent entre eux. Leur rôle est essentiel car ils
permettent d'assurer des bénéfices nets aux groupes cibles plus
ou moins à long terme. Comme l'indique précédemment, la
qualité d'un projet ne doit donc pas être un objectif à
n'envisager que juste dans la phase de fermeture du projet, elle doit
être définie depuis la phase de conception, voire même
l'identication. Faute de n'avoir pas tenu compte de celle-ci dès le
départ, la majorité des projets de développement ne sont
pas parvenus à produire des résultats escomptés sur le
long terme. Dans la foulée de grands débats quotidiens autour de
la responsabilité sociale des projets, il devient difficile voire
impossible de parvenir à terme d'un projet de développement sans
l'intégration de ces facteurs dans les processus de gestion,
c'est-à-dire dans les démarches qui conduisent à
l'élaboration de celui-ci dans les communautés locales.
À l'instar des modèles de gestion de projet,
comme celui développé récemment par la Commission
européenne, 2001, désigné ci-devant modèle GCP,
nous avons donc décrypté l'importance capitale de certains
facteurs clés, dont il est nécessaire de pendre en compte durant
la phase de planification des projets. Notamment, nous citons entre autres :
· Partenariat et dialogue avec les parties
prenantes - la mesure dans laquelle les groupes cibles et
bénéficiaires du projet / programme participent à sa
conception et sont impliqués. Le projet doit obtenir alors leur appui
pour qu'il soit viable, une fois le financement terminé.
· Politique de soutien - la
qualité de la politique en vigueur, et la mesure dans laquelle le
gouvernement prouve son soutien pour la continuation des activités du
projet. Il est important de recevoir pleinement le soutien de la haute
direction.
· Innovation et technologie - il
s'agit de s'assurer que les technologies utilisées par le projet peuvent
continuer de fonctionner à long terme (p.
ex. la disponibilité des pièces
de rechange, réglementations suffisantes en matière de
sécurité, les capacités locales des femmes et des hommes
en termes de fonctionnement et d'entretien). Proprement dit, une technologie
qui utilise les ressources locales.
· Protection de l'environnement - la
mesure dans laquelle le projet préserve ou nuit à
l'environnement, et dès lors, favorise ou entrave la réalisation
des bénéfices à long terme.
· Aspects socioculturels - il s'agit de
savoir : comment le projet prendra en compte les normes et attitudes
socioculturelles locales ; et quelles sont les mesures mises en place pour que
les groupes bénéficiaires puissent accéder de
manière appropriée aux services et bénéfices
découlant du projet pendant et après la mise en oeuvre.
· Analyse de genre et des
minorités - il s'agit de savoir : comment le projet tiendra
compte des besoins et des intérêts spécifiques des femmes
et des hommes ; si le projet permettra aux femmes et aux hommes
d'accéder de manière durable et équitable aux services et
infrastructures mises en place par le projet ; et s'il contribuera à
atténuer les inégalités liées au genre et aux races
« humaines » à long terme.
· Capacités institutionnelles et de
gestion - la capacité et l'engagement de l'équipe
chargée de la planification, de la gestion du projet / programme, et
à continuer à fournir les services au-delà de la
période du financement.
· Viabilité économique et
financière- la mesure dans laquelle les avantages additionnels
du projet dépassent les coûts, et le projet représente un
investissement viable à long terme.
Comme nous l'indiquons plus haut, il est important
d'intégrer ces facteurs pour assurer la survie du projet ou de
l'entreprise. Ce qui signifie donc qu'il faut les tenir compte dans la
planification de ce projet si nous décidons que l'intégration des
questions d'environnement et
de développement durable au sein des entreprises ne
reste pas une question purement hypothétique. L'acceptation d'un projet
dans la communauté peut être difficile voire impossible si ces
considérations font défaut dans les processus
décisionnels. Toutefois, le contenu et l'importance relative de ces
facteurs dépendront du contexte sociopolitique et des
spécificités du projet. La conception d'un projet est susceptible
de changer vers le sens souhaité avec l'intégration de ceux-ci.
Aujourd'hui, les projets de qualité doivent cependant rencontrer trois
(3) objectifs indissociables, dont celui du respect de l'environnement
physique, de l'amélioration de l'équité sociale et de
l'amélioration de l'efficacité économique. Par ailleurs,
un projet de développement durable est un projet qui doit
néanmoins viser une amélioration continue des conditions
d'existence de l'ensemble des acteurs concernés par le projet.
CHAPITRE 6.- INTERPRÉTATION D'AUTRES APPROCHES
DE GESTION: ÉVALUATION, CONFRONTATION ET COMPARAISON AVEC LE «
MODÈLE » PROPOSÉ.
Ce sixième chapitre explique le cas d'un projet de
développement dans une ou plusieurs phases de son cycle de vie. Les
résultats présentés ici découlent d'une
enquête de terrain réalisée dans la province de
Québec. Nous avons pour la plupart rencontré des chefs de projet,
des environnementalistes, des citoyens et d'acteurs locaux, etc. Dans ce
chapitre, nous allons présenter la stratégie de l'entreprise
« promoteur » du projet considéré dans une perspective
de développement durable, surtout dans la gestion des processus
décisionnels.
À l'instar des modèles de gestion
exploités par les entreprises, nous examinerons celui adopté par
un promoteur de projet pour la gestion des parties prenantes écologiques
et sociales. Ce modèle de gestion adopté sera comparé avec
celui dont nous illustrons à cet effet. Ce cadre d'analyse de
développement durable envisagé porte sur le projet
hydroélectrique de l'Eastmain-1-A et dérivation Rupert dans le
Nord du Québec, dont une filiale d'Hydro-Québec est le
promoteur.
6.1.- Description sommaire du projet retenu
6.1.1.- Historique et contexte du projet
La Convention de la Baie- James et du Nord de Québec
(CBJNQ), signée en 1975, prévoyait la mise en place d'un certains
nombre d'aménagements hydroélectriques, notamment le projet
Nottaway-Broadback-Rupert (NBR). Ce projet, de très grande envergure et
pouvant comprendre jusqu'à six centrales hydroélectriques sur la
rivière Rupert, sept centrales sur la rivière Broadback et la
création de plusieurs réservoirs de grande dimension auraient eu
des impacts biophysiques et sociaux indéniables pour les
communautés actuelles de Mistissini, Waswanipi et Waskaganish. Avec la
signature de l'Entente concernant l'établissement d'une nouvelle
relation entre le gouvernement du Québec et les Cris en février
2002 (la Paix des Braves), ce projet est définitivement abandonné
avec la réalisation du projet de centrale de l'Eastmain-1-A et
dérivation Rupert. Le projet vise la
dérivation d'une partie du débit de la
rivière Rupert vers le bassin versant de La Grande Rivière, en
plus d'ajouter deux nouvelles centrales au parc d'équipement du
promoteur par la construction de la centrale de l'Eastmain-1-A et de la
Sarcelle. Le projet comprend également la construction d'ouvrages de
contrôle qui permettront de maintenir des débits
réservés écologiques dans la portion de la rivière
Rupert à débit réduit. La dérivation des eaux vers
le réservoir Eastmain-1 requiert la création de deux biefs, ce
qui entraînera un ennoiement de superficies terrestres.
· Le promoteur du projet
En novembre 2002, Hydro-Québec Production a
déposé aux autorités provinciale et fédérale
les renseignements préliminaires visant la dérivation partielle
des eaux de la rivière Rupert, située à la Baie- James, en
conservant toutefois un régime de débits réservés
écologiques. Le projet comprend également la construction de la
centrale de l'Eastmain-1-A, d'une puissance de 768 MW à la sortie du
réservoir Eastmain 1, et l'implantation de la centrale de la Sarcelle,
d'une puissance de 125 MW à l'exutoire du réservoir Opinaca. La
structure administrative de la société d'État Hydro
-Québec comprend plusieurs divisions, soit Hydro- Québec
Production, Hydro- Québec TransÉnergie, Hydro- Québec
Distribution et Hydro- Québec Équipement. La division Hydro-
Québec Production est le promoteur du projet proposé. Cette
division a le mandat de mettre en valeur et de développer le potentiel
hydroélectrique accessible au Québec et d'exploiter les
installations de production à des fins commerciales. Elle produit
l'électricité, la vend sur les différents marchés,
et fournit un volume d'électricité patrimoniale
représentant un maximum de 165 TW/h par année. En décembre
2004, son parc de production a compté 51 centrales
hydroélectriques, cinq (5) centrales thermiques et un parc éolien
d'une puissance installée totale de 33 473 MW. Hydro-Québec
TransÉnergie est responsable de la conception, de l'exploitation et de
l'entretien du réseau de transport d'électricité du
Québec. Son réseau comprend 32 539 km de lignes, plus de 500
postes et 18 interconnexions avec les réseaux voisins hors
Québec. La division Hydro-Québec Distribution est le principal
distributeur d'électricité au Québec.
Elle dessert près de 2,7 millions de clients
résidentiels, 152,000 clients commerciaux et 255 clients grandes
entreprises au Québec. Sur le territoire régi par Convention de
la Baie- James et du Nord québécois (CBJNQ), Hydro-Québec
Production confie la réalisation des projets d'aménagements
hydroélectriques à la Société d'énergie de
la Baie - James (SEBJ), qui est une filiale d'Hydro-Québec. C'est donc
la SEBJ qui réalise le projet Eastmain-1-A et dérivation
Rupert.
· Les variantes
considérées
Le promoteur a élaboré son projet en soumettant
pour analyse un certain nombre de variantes de dérivation qui ont
été discutées avec les communautés Cris et qui ont
été présentées dans l'étude d'impact. Le
ministère de Développement durable, de l'Environnement et des
Parcs (MDDEP) a retenu dans son analyse des variantes proposées des
critères tel que la superficie terrestre ennoyée, la protection
des terres de catégorie II définies dans la CBJNQ ou la
réduction des longueurs de rivières dont le débit serait
réduit. La variante de dérivation retenue est la variante
Cramoisy du nom d'un lac situé à proximité du passage des
eaux dérivées. Cette dernière protège les terres de
Catégorie II de Mistissini et limite à la fois la superficie
terrestre ennoyée par la dérivation et réduit la longueur
de la rivière où le débit sera réduit.
· Le projet retenu
Le projet autorisé par le Ministère
québécois de Développement Durable, de l'Environnement et
des Parcs (MDDEP) dans le cadre de la procédure d'évaluation
nordique d'examen des impacts sur l'environnement et le milieu social comprend
les composantes suivantes :
1) la construction et l'exploitation de la centrale de
l'Eastmain-1-A d'une puissance nominale totale de 768 MW, à la sortie du
réservoir Eastmain 1;
2) la construction et l'exploitation de la centrale de la
Sarcelle d'une puissance nominale totale de 125 MW, à la sortie du
réservoir Opinaca;
3) la construction d'un barrage en enrochement de 474 m de
longueur et de 29 m de hauteur, avec une crête d'une largeur de neuf (9)
mètres, au point kilométrique PK 314 de la rivière
Rupert;
4) la dérivation d'une partie des eaux de la
rivière Rupert vers le réservoir Eastmain 1, effectuée au
moyen du bief Rupert amont (au sud) et du bief Rupert aval (au nord)
reliés entre eux par un tunnel d'une longueur de 2,9 km qui passe sous
le lac de la Sillimanite. Les eaux dérivées provenant de la
rivière Rupert emprunteront par la suite le parcours des eaux du
réservoir Eastmain 1 jusqu'à l'embouchure de La Grande
Rivière en passant par la rivière Eastmain, le réservoir
Opinaca, le lac Boyd, le lac Sakami, la rivière Sakami, le
réservoir Robert-Bourassa;
5) les eaux dérivées seront turbinées
aux deux nouvelles centrales (Eastmain-1 -A et de la Sarcelle) ainsi qu'aux
centrales existantes (Robert-Bourassa et La Grande 1), permettant ainsi de
maximiser la production d'énergie hydroélectrique à partir
de nouvelles installations et d'installations existantes;
6) la construction d'un ouvrage de contrôle des
débits (évacuateur de crues) au PK 314 de la rivière
Rupert, permettant la restitution de débits réservés
écologiques dans la rivière Rupert. Ces débits,
modulés en fonction des saisons, assureront la protection du cycle vital
des espèces piscicoles présentes;
7) la construction d'ouvrages de contrôle sur la
rivière Lemare, la rivière Nemiscau, le ruisseau Arques et le
ruisseau Kayechischekaw, permettant la restitution des débits naturels
de ces cours d'eau affectés par un bief et assurant
l'intégrité sur le plan biologique;
8) la construction de huit (8) ouvrages hydrauliques sur la
rivière Rupert afin de maintenir les usages sur la rivière en
aval de l'ouvrage de contrôle et de préserver 91 % du domaine
aquatique, ainsi que la fonctionnalité des frayères, des habitats
d'alimentation des poissons et des herbiers aquatiques;
9) la construction de deux lignes de transport d'énergie
à 315 kV, permettant de raccorder les centrales de l'Eastmain-1-A et de
la Sarcelle au réseau québécois;
10) l'aménagement de huit campements pour loger les
travailleurs, dont trois campements existants et cinq campements
temporaires;
11) la construction d'environ 255 km de routes et de chemins et
l'amélioration d'environ 105 km de chemins existants;
12) la construction d'une nouvelle usine de traitement d'eau
potable pour desservir la communauté de Waskaganish, prévue dans
le cadre du projet, permettra de répondre aux besoins de la
communauté jusqu'à l'horizon 2025.
13) ....
6.1.2.- Les arguments de justification du
projet
Pour ce qui est de justification du projet, le Ministère
québécois de Développement
Durable, de l'Environnement et des Parcs (MDDEP) a
récemment tiré les conclusions suivantes :
1) Le promoteur pourra profiter des infrastructures existantes
pour produire de l'énergie additionnelle à un coût
avantageux;
2) Le projet est viable sur le plan économique en
raison du coût de production, des coûts de réalisation et
des prévisions raisonnables de profits sur les marchés internes
et extérieurs;
3) Le projet peut contribuer dans une large part à se
pourvoir de la marge de manoeuvre souhaitée de 15 TW/h qui aidera le
promoteur à parer aux aléas de la demande interne et à
être à même de profiter des marchés d'exportation;
4) En raison de la révision à la baisse des
prévisions des approvisionnements additionnels requis à l'horizon
2014, l'amélioration de la marge de manoeuvre du promoteur et
l'exportation sont les motifs primordiaux du projet, motifs dont le
Ministère reconnaît la légitimité en tant que
stratégie d'entreprise et qui sont conformes à la
stratégie énergétique du Québec;
5) Le projet contribuera à augmenter les dividendes que
le promoteur versera au Gouvernement du Québec, au profit de l'ensemble
de la société québécoise;
6) Il n'existe à ce jour aucune solution ou aucune
combinaison de solutions de rechange pouvant garantir les mêmes avantages
opérationnels et économiques que le projet;
7) La production éolienne représente un
complément intéressant au projet et sera avantagée par sa
réalisation, mais elle ne saurait le remplacer.
8) ...
6.1.3.- Les principaux enjeux du projet
À partir des enseignements tirés des
aménagements hydroélectriques réalisés au
Québec, en particulier dans le territoire de la Baie- James, et des
consultations dans les communautés Cris et jamesiennes, le projet
possède plusieurs enjeux majeurs. Les plus directement liés au
projet sont les suivants:
1) la conservation de la communauté de poissons et de ses
habitats dans la rivière Rupert;
2) la poursuite des activités de chasse, de pêche
et de piégeage par les Cris;
3) l'intérêt récréatif et paysager de
la rivière Rupert;
4) les retombées économiques pour les
communautés cries et jamesiennes.
Le maintien de la communauté de poissons constitue un
enjeu majeur : soit la capacité de production et des fonctions d'habitat
du tronçon à débit réduit de la rivière
Rupert (en aval du PK 314). Une attention spéciale doit être
accordée aux activités de pêche traditionnelle du cisco de
lac anadrome au site de Smokey Hill (près de Waskaganish), ainsi qu'aux
espèces suivantes : l'esturgeon jaune, le doré jaune, le grand
brochet et le grand corégone. Le projet affectera une trentaine de lots
de trappe rattachés à six communautés cries. Les
utilisateurs du territoire provenant de la communauté de Mistissini
seront surtout affectés par la création des deux biefs, alors que
ceux de Nemaska et de Waskaganish le seront par la
réduction des débits de la rivière
Rupert. Les utilisateurs provenant des communautés d'Eastmain et de
Wemindji seront affectés par une augmentation des débits du
réservoir Opinaca, du lac Boyd et du lac Sakami, alors que ceux de
Chisasibi auront à s'adapter à une augmentation des débits
de La Grande Rivière. Dans le tableau 12 ci-dessous, nous
présentons en détails les superficies des lots de trappe Cris qui
seraient ennoyés par les biefs pour le projet retenu.
Tableau 12.- Superficies des lots de trappe Cris
ennoyés par les biefs
Lot
|
Communauté(s)
|
Perte (Km2)
|
Pourcentage (%)
|
M25
|
Mistissini
|
214.9
|
15.5
|
M18
|
Mistissini
|
54.6
|
4.9
|
M33
|
Mistissini
|
34.8
|
1.5
|
M26
|
Mistissini
|
15.8
|
2.3
|
R21
|
Nemaska
|
11.5
|
1.7
|
R19
|
Nemaska
|
4.9
|
0.4
|
N25
|
Nemaska
|
1.5
|
0.1
|
Source : MDDEP, 2006
La rivière Rupert est très utilisée par
les Cris de Waskaganish, de Nemaska et de Mistissini lors de leurs
déplacements en embarcation ou en motoneige et sert également
à des activités de transmission des traditions chez les Cris,
telles les randonnées de brigades de canots. Plusieurs campements
permanents et temporaires cris ont été construits le long de
cette rivière. Certains, tels les campements en rive gauche, à
l'est du lac Nemiscau ainsi que ceux de Vieux-Nemaska et de Gravel Pit,
comprennent plusieurs habitations. De plus, la rivière Rupert fait
l'objet d'expéditions en canot et en kayak à des fins
récréatives. Le maintien de la navigabilité, de
l'intérêt récréatif et paysager de la rivière
et la mise en valeur de son potentiel touristique ont suscité de fortes
préoccupations chez les utilisateurs. Les populations cris et
jamesiennes ont exprimé le souhait de voir le promoteur
privilégier les retombées économiques dans leur milieu, en
terme de l'attribution des contrats, du fractionnement des travaux et des
achats de biens et de services afin d'accorder aux entreprises
régionales une participation aux appels d'offre, à la
création d'emplois et à la formation de la main d'oeuvre.
Le projet retenu par le promoteur se situe dans la partie sud
d'un vaste territoire où des aménagements hydroélectriques
majeurs ont été réalisés au cours des trente
dernières années. Le complexe La Grande y a d'abord
été implanté entre les années 1970 et 1990 et,
récemment, le projet Eastmain-1-A y a été
réalisé et devrait être déjà
complété depuis 2007.
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