Dans le cas où le risque de non -réalisation
d'une condition retenue comme hypothèse et donc aussi le risque de non-
atteinte d'un objectif sont trop élevés, il convient de:
· chercher à transformer l'hypothèse en
objectif ou en résultat attendu pour le projet, donc de mettre en oeuvre
des activités qui garantissent la réalisation de cette condition
;
· réviser à la baisse les ambitions
(Objectifs, Résultats attendus, Indicateurs objectivement
vérifiables ) tout en vérifiant que si le projet mérite de
continuer ou non ;
· renoncer éventuellement au projet
envisagé. Par rapport à ces hypothèses retenues, la
gestion du cycle de projet devra, grâce à une flexibilité
suffisante, s'adapter à la situation réelle des variables
correspondantes, qu'il importe donc de surveiller.
5.4.1.3.- Bien identifier les moyens nécessaires
: moyens physiques et non physiques
Un projet requiert des moyens physiques, financiers et
humains, qu'il faut identifier, caractériser et quantifier, cela
dès le départ. L'estimation des moyens est en effet indispensable
pour établir le budget, puis de s'assurer qu'ils seront disponibles et
que le projet sera donc réalisable. Elle est également
nécessaire pour apprécier l'efficience du projet :
vérifier que ses coûts sont raisonnables. Les moyens requis sont
tant ceux qui servent les activités opérationnelles qui tendent
vers les résultats attendus que ceux nécessaires au
fonctionnement propre du projet, y compris le suivi-évaluation. Les
moyens financiers sont les fonds nécessaires au fonctionnement du projet
et qu'il ne faut pas
confondre avec les coûts. Une réflexion
explicite est souhaitable sur la nature et l'origine de ces moyens
envisagés. Les technologies doivent être appropriées,
c'est-à-dire adaptées au contexte et au but poursuivi, favorables
à l'environnement, maîtrisables, aptes
à être mises en oeuvre durablement sans soutien extérieur,
à coûts récurrents limités et supportables. Les
ressources locales, y compris le personnel spécialisé, sont
à valoriser mais cela dans les limites strictes où elles ne sont
pas détournées de meilleurs usages. Des normes sociales et
écologiques devront être respectées dans le choix et
l'acquisition des moyens, de même que dans leur utilisation. Le choix des
moyens met en jeu l'efficacité, l'efficience, la durabilité,
l'impact... Le personnel est habituellement considéré comme
moyen, même si chaque être humain est également une fin en
soi... le choix des moyens humains pose de délicats problèmes
spécifiques :
· Comme les moyens matériels, ce sont les
compétences et qualités nécessaires pour mener les
activités définies en fonction des résultats attendus et
des objectifs à atteindre, qui doivent guider le recrutement ;
· L'équipe doit dans son ensemble être
capable de mener toutes les activités prévues dans le cadre
logique et les activités de gestion du projet, sans vide ni sans
personnel excédentaire ni de recouvrements de responsabilité, qui
risqueraient de créer des conflits ou des relations de
compétition ;
· Les tâches à confier aux personnes
recrutées doivent être clairement définies en fonction du
cadre logique du projet, communiquées aux acteurs concernés et
acceptées par eux dès la signature du contrat ;
· Les barèmes sont à ajuster aux pratiques
du lieu : décents et conformes aux lois sociales mais pas trop
élevés non plus, pour éviter la surenchère et le
débauchage de personnel ;
· Finalement, il ne faut pas négliger l'avenir du
personnel après la fin du projet : il sera notamment influencé
par les formations et capacités reçues en cours de projet,
d'éventuels pécules de sortie, un appui à la
réinsertion, ou la pérennisation de l'emploi par la
création d'activités financièrement viables.
La gestion de tous ces moyens peut impliquer des normes de
sécurité et de conditions de travail apparentées aux
normes environnementales et qui peuvent leur être associées. La
survie d'un projet va dépendre largement de la prise en compte de tous
ces aspects pré- définis. En terme de développement
durable, ils sont essentiels pour les chefs de projet de viser l'efficience,
l'efficacité et la durabilité de leurs activités.
5.4.1.4.-Bien estimer les coûts du projet : en
termes monétaires, environnementaux et sociaux
L'estimation prévisionnelle des coûts, sur la
base des moyens jugés requis, est évidemment nécessaire
pour préparer les budgets. Elle l'est aussi pour évaluer
l'efficience ou le rapport coût-efficacité du projet et l'ajuster
en conséquence, au niveau des moyens, des activités ou des
résultats visés. L'estimation des coûts doit
également permettre d'apprécier la probabilité que les
fonds et les moyens seront disponibles; à défaut de
probabilité satisfaisante, une révision des paramètres
techniques du projet serait bien envisageable.
Pour élaborer le budget, l'estimation des coûts
aura été purement financière. Dans une perspective de
développement durable, pour évaluer l'efficience, des
appréciations non monétaires et la prise en compte de coûts
externes ou de coûts non payés sont à intégrer dans
la réflexion. Ainsi, les ressources rares et celles d'emploi polluant
(hydrocarbures) devront être considérés comme
coûteuses indépendamment de leur prix monétaire. De
même l'effort humain n'est pas toujours bien corrélé
à son coût monétaire (en particulier lorsque l'on compare
le coût du travail dans les pays riches par rapport aux pays pauvres).
Dans les pays pauvres, l'emploi d'un personnel local dont les qualifications
sont rares peut représenter un coût d'opportunité non nul,
puisque ces personnes sont devenues indisponibles pour d'autres tâches
utiles.
Les projets utilisent de l'argent qui, disponible en
quantité limitée, doit être géré de telle
sorte qu'il produise le plus de bénéfice de développement.
Les coûts à considérer sont donc notamment les
dépenses financières. Toutefois, dans un souci de
développement durable,
les ressources physiques et humaines sont également
à prendre en compte, au besoin: indépendamment des coûts
financiers, il s'agit de s'interroger sur ce à quoi on renonce en
affectant la ressource à ce projet plutôt qu'à une autre
utilisation. Une attention particulière devra donc être
portée à l'emploi économe de moyens rares et utiles, comme
certaines ressources naturelles (l'eau en région aride), ou certaines
compétences spécialisées que les grands projets ont
souvent tendance à débaucher. De même il s'agira de
minimiser les coûts externes, tels que les impacts négatifs sur
l'environnement ou les coûts supportés par des tiers. Un manque
d'efficience peut résulter des mêmes facteurs que ceux qui
handicapent également l'efficacité, comme les contraintes
externes (notamment environnementales) ou des moyens inadaptés, non
disponibles à temps, ou mal utilisés, éventuellement
détournés à des usages étrangers aux objectifs
poursuivis... Elle peut ouvrir des conflits car ceux-ci dispersent les
énergies. Elle peut pâtir d'un excès de moyens, qui
n'encouragent pas à les économiser, ou au contraire de la
pénurie de certains moyens, qui limite la pleine utilisation de ceux
rendus disponibles en suffisance. Le manque d'efficience peut encore
découler d'une logique où le dévouement, l'effort, la mise
en oeuvre des moyens sont davantage valorisés que le résultat.
Au niveau de la conception du projet, il s'agit de veiller
à choisir correctement les moyens, d'organiser la répartition des
tâches de manière à limiter les conflits de
compétence et de définir un ensemble d'activités
synergiques, explicitement conçues pour atteindre l'objectif :
éviter notamment la multiplication d'activités qui se corrigent,
se compensent ou se contrarient les unes les autres. D'une manière
générale, tous les efforts pour plus d'efficience limitent les
pressions exercées sur l'environnement.
5.4.2.- Vers une approche GAR : un cadre d'analyse et
de gestion axé sur les résultats du projet
Dans la plupart d'ouvrages et de documents consultés,
on définit le concept «Responsabilité Sociale
d'Entreprise » par rapport à la situation où une
entreprise intègre à la fois les préoccupations sociales,
environnementales et économiques dans ses activités
sur une base volontaire (Dubigeon, 2005). Selon cette
définition, il est donc important d'évaluer un projet de
développement en termes d'extrants, d'effets et d'impact que
plutôt sur la base de processus de travail ou sur les comportements.
Adoptée depuis au début des années 90
par l'ACDI, l'approche GAR (Gestion Axée sur les Résultats) a
été mise en évidence en 1964 par le canadien Peter Drucker
(1909-2005). La définition des résultats représente
l'aspect le plus crucial des phases de planification et de conception du
projet. Un résultat est un changement qui peut prendre la forme d'une
amélioration, d'une augmentation, d'un renforcement, d'une
réduction ou encore d'une transformation dans les attitudes et le
comportement d'un groupe donné (PUCD, 2006).
L'approche GAR devrait être examiné afin de
s'assurer que les résultats du projet se conforment à la
hiérarchie suivante:
· Les extrants mènent aux effets;
· Les effets réalisent les objectifs et
mènent à l'impact;
· L'impact mènera au but du projet.
Le diagramme qui suit est une illustration de la version
simplifiée d'un exemple de cadre GAR développé par
l'organisme Partenariats Universitaires en Coopération et
Développement (PUCD) en 2006. Cette illustration reprend le formalisme
du modèle de Peter Drucker. Ses composantes demeurent identiques dans
tous les projets financés par l'ACDI pendant ces dernières
années.
Figure 7.- Approche de Gestion Axée sur les
Résultats (GAR)
Intrants
Les intrants correspondent aux ressources humaines,
organisationnelles ou matérielles, directes ou indirectes requises pour
mettre en
oeuvre et exécuter les activités prévues du
programme ou du projet.
Activités
sont
Les
mesures requises pour produire les résultats.
Résultats
Activités
activités
les
Les extrants sont les conséquences à court
terme des activités terminées. Les extrants sont les «
sousrésultats » ou les
réalisations clés requis pour produire ls effets
du projet.
Extrants
Effets
Les effets sont les résultats logiques
des
extrants du projet. Ils
devraient continuer d'existe une fois le financement du
projet
terminé. Les effets représentent les changements
nécessaires à la réalisaton des objectifs
du projet.
Objectifs
Effets
Les impacts se produisent
généralement
après la fn du projet
à une échelle
nationale ou
internationale et consistent en des changements
aux conditions de vie des populations. Ils sont
attribuables, en
partie,
à la réalsation des effets. Les
résultats au
niveau e l'impact
sont
les changements nécessaires à
l'atteinte
du but du projet.
Impact
But
Source : établi à partir des données
du guide PUCD produit en 2006, p-12
À ce point de vue, nous passons en revue une
série de questions qui doivent être abordées ou
débattues. Nous adoptons la grille d'analyse développée en
2005 par le chercheur Ledant dans son modèle d'identification de projet.
Selon la réponse obtenue, il faudra revoir l'identification ou passer
à la formulation, ou encore de poser de nouvelles questions.
Pour ce cadre d'analyse du projet, dans une perspective du
développement durable, nous formulons les questions suivantes :
1).- L'objectif du projet est-il pertinent
compte tenu des principaux problèmes environnementaux et sociaux qui se
posent dans le contexte actuel ?
Pour répondre à la question, il convient
d'examiner :
· Les problèmes environnementaux dont souffre
la population cible (dépendance envers des ressources peu productives ou
peu accessible, maladies, inconfort ou insécurité liés
à l'environnement, ...) ;
· Les tendances régressives du patrimoine
environnemental ou des ressources naturelles, risquant d'affecter la
capacité à satisfaire les besoins futurs ou de créer des
difficultés futures ;
· La possibilité matérielle de
résoudre ces problèmes, compte tenu des contraintes naturelles ou
de l'échelle des phénomènes impliqués ;
· La mesure dans laquelle l'objectif spécifique
du projet s'attaque à ceux de ces problèmes qui sont le plus
résolubles ou, dans le cas contraire, à des problèmes
(sociaux, économiques...) prioritaires.
Selon la réponse, il convient de réagir comme
suit:
Si la réponse est oui, passer à la question
suivante.
Si la réponse est non ou très incertaine,
reconsidérer l'objectif spécifique et identifier un projet plus
pertinent.
Si la réponse nécessite des compléments
d'information, demander ceux-ci à l'étude de
faisabilité.
2).- Le projet est-il suffisamment
adapté aux questions environnementales qui vont conditionner l'atteinte
durable de l'objectif spécifique ?
Pour répondre à la question, il convient
d'examiner :
· Les conditions environnementales dont dépendent
l'efficacité, l'efficience ou la durabilité (viabilité) du
projet ;
· L'évolution probable de ces conditions, sous
l'effet du projet ou de facteurs extérieurs ;
· Les conséquences probables de cette
évolution pour l'atteinte efficace, efficiente et durable des objectifs
du projet ;
· Les contraintes et obligations légales qu'il
convient de respecter par rapport à l'environnement et aux populations
locales.
Selon la réponse, il convient de réagir comme
suit:
Si la réponse est oui, passer à la question
suivante, tout en ajustant au besoin les hypothèses du cadre logique (y
inscrire la situation probable espérée des facteurs
environnementaux externes au projet).
Si la réponse est non, réviser au besoin le
cadre logique, en particulier la logique d'intervention (stratégie). Si
la réponse est incertaine et nécessite des compléments
d'information, demander ceux-ci à l'étude de
faisabilité.
3).- Les effets externes, autres que les
résultats attendus et objectifs propres au projet, sont- ils acceptables
et optimaux ? Sinon, y a-t-il les moyens d'atténuer cela ?
Pour répondre à la question, il convient
d'examiner :
· Les activités et leurs effets autres que les
résultats attendus ;
· Les résultats attendus et leurs effets autres que
les objectifs ;
· Les implications de ces effets pour les populations
locales et pour le patrimoine environnemental ;
· Les possibilités de les améliorer par un
ajustement du projet.
Selon la réponse, il convient de réagir comme
suit:
Si la réponse est oui, passer aux questions suivantes.
Si la réponse est non, réviser le cadre logique. Si la
réponse est incertaine, demander les compléments d'information
nécessaires à l'étude de faisabilité.
4).- Les moyens prévus sont-ils
adéquatement choisis, compte tenu de leurs implications
environnementales? N'y a-t-il pas d'autres alternatives ?
Pour répondre à la question, il convient
d'examiner :
· La pression exercée sur l'environnement par les
moyens prévus, compte tenu de l'origine des matières
premières incorporées (ressources non renouvelables, rares,
surexploitées, ou issues d'écosystèmes fragiles) et du
caractère plus ou moins polluant de leur production, de leur emploi, ou
des déchets en résultant ;
· Les autres usages qui pourraient être faits
avec ces mêmes moyens et ressources si le projet ne les consommait pas
;
· L'existence de moyens alternatifs, plus favorables
à l'environnement ;
· Les opportunités d'améliorer l'efficience
d'utilisation des moyens à forte pression environnementale. Selon la
réponse, il convient de réagir comme suit :
Si la réponse est oui, passer aux questions suivantes.
Si la réponse est non, réviser les activités ou les moyens
(tout en adaptant le reste du cadre logique en conséquence); si ce n'est
pas possible passer à la question 5.
Si la réponse est incertaine, passer à la question
5 ou demander les compléments d'information aux études de la
phase de formulation27.
5). -Le bilan des impacts du projet est-il
positif, négatif ou optimal ?
Pour répondre à la question, il convient
d'examiner :
· Les résultats et objectifs visés par le
projet et la probabilité qu'ils soient atteints ;
· Les conséquences des activités externes
à la logique d'intervention ;
· Les implications environnementales de la mise en oeuvre
des moyens ;
· Le bilan total de ces effets, intentionnels ou non, en
tenant compte des attentes et jugements de valeur posés par les parties
impliquées au projet;
· Les opportunités d'améliorer ce bilan, dans
l'absolu et par rapport au coût financier du projet. Selon la
réponse, il convient de réagir comme suit:
Si la réponse est oui, passer à la question
suivante. Si la réponse est non, renoncer au projet ou réviser le
cadre logique (stratégies ou situations alternatives, autres moyens ou
technologies, reformulation des activités ou du calendrier, mesures
d'atténuation ou de compensation spécifiques...).
Si la réponse est incertaine faute d'informations
quant aux effets du projet, se référer aux questions 3 et 4, si
elle est incertaine en raison des difficultés d'appréciation du
bilan,
27 Communément appelées études de
fasabilité, effectuées au cours de la formulation, qui permet de
s'assurer que le projet proposé est bien-fondé, et susceptible de
répondre aux besoins des groupes cibles/bénéficiaires
prévus. Elle devrait décrire la conception du projet dans tous
ses détails opérationnels, en tenat compte de tous les aspects
politiques, techniques, économiques, financiers, institutionnels, de
gestion, environnementaux, socioculturels, de genre. Les études de
faisabilité nous fournissent les informations suffisantes pour justifier
l'approbation, la modification ou le refus du projet proposé en vue d'un
financement (CEE, 2001, p.41).
renvoyer la question à l'analyse économique
(coûts- avantages) et à l'analyse multicritère à
mener en formulation.
6). Les risques du projet
représentent-ils un risque sérieux d'impact négatif ?
Représentent- ils une menace pour la population locale?
Pour répondre à la question, les
éléments à prendre en compte sont :
· La probabilité d'échec du projet (ou de non
réalisation de ses hypothèses ;)
· Les effets généraux de ce qui aura pu
être réalisé en cas d'échec.
Si la réponse est non, alors qu'elle est positive aux
questions précédentes, le projet peut être
réalisé (si la réponse est négative à
certaines questions précédentes se référer à
celles-ci).
Si la réponse est oui, renoncer au projet ou
réviser le cadre logique (choix des stratégies, localisation,
moyens ou technologies, activités, calendrier, mesures
d'atténuation ou de compensation spécifiques...).
Si la réponse est incertaine et nécessite des
compléments d'information, demander ceux-ci à l'étude de
faisabilité.
En pratique, la durée et l'importance de chaque phase
d'activités varient d'un type de projet à l'autre. Pourtant la
plupart des chefs de projet songent adopter une même méthodologie
de gestion à tous les projets de développement. Les facteurs de
qualité sont des critères connus pour leur impact significatif
sur la viabilité des bénéfices
générés par ces projets dans le passé. Les
critères d'efficacité, d'efficience... devraient normalement
être envisagés dès la phase de conception ou la phase
d'exécution du projet afin d'assurer la qualité des projets. Pour
viser celle-ci, il faut donc procéder comme suivant :