4.4.4.- La période d'universalisation
La période d'universalisation est
caractérisée par de bouleversements majeurs à
l'échelle planétaire. Celle-ci correspond également
à l'éclatement des grandes structures politico-économiques
(l'URSS) et la formation de nouveaux blocs économiques (ALENA, CEE,
...). L'économie mondiale se globalise et la concurrence
s'internationalise davantage. Les entreprises ne peuvent plus produire comme
auparavant et sont forcées par conséquent à repenser leurs
stratégies pour survivre. Le changement constant devient le nouvel ordre
établi et la routine s'estompe progressivement. L'ingénierie
simultanée ; la ré-ingénierie des processus ; l'Internet
et les nouvelles formes d'organisation sont devenues des expressions courantes
dans les milieux d'affaires. Ces expressions sont déjà devenues
des réalités pour un nombre croissant d'entreprises de toute
nature.
4.5.- Les nouvelles formes d'organisation en gestion de
projet
Ce paragraphe se réfère aux idées
d'Hervé Serieyx et Toms Peters qui sont les deux éminents gourous
les plus écoutés aujourd'hui par les dirigeants d'entreprises et
d'institutions publiques. Leur message indique qu'il est temps de
réaliser un changement radical de la structure et du mode de
fonctionnement de nos entreprises. Les entreprises qui ne marchent pas dans
cette voie risquent de s'auto destituer dans ce nouveau monde qui se
crée. Les nouvelles valeurs, comme la responsabilité sociale, la
dissémination du pouvoir et l'initiative deviennent des facteurs
essentiels de réussite dans le monde des affaires au renoncement de la
responsabilité narcissique; de la centralisation du pouvoir et la
docilité, a souligné Serieyx (1993) dans son ouvrage «
Le Big Bang des organisations ». Aussi, les réseaux, la
souplesse, la subsidiarité devront remplacer respectivement
l'information verticale, les encadrements et le prêt du pouvoir qui sont
de techniques traditionnellement
utilisées dans nos entreprises. Dans plusieurs
rapports publiés sur l'environnement, il a été
démontré que l'intégration des objectifs du
développement durable, particulièrement l'environnement, dans les
stratégies de gestion des entreprises, est une méthode importante
afin d'acquérir un avantage décisif au sein de l'univers
concurrentiel (Porter & Van der Linde, 1995 ; Hart, 1995 ; et Persais,
2004).
4.6.- Les nouvelles approches à la conception des
processus en gestion de projet
Parmi les nouvelles approches à la conception des
processus organisationnels, nous identifions aujourd'hui l'ingénierie
simultanée et la ré-ingénierie comme étant deux
nouvelles approches qui sont très utilisées par les entreprises
dites « progressistes ».
La première approche concerne surtout les projets de
développement de nouveaux produits. C'est une approche
systématique au design et intégré d'un produit et de ses
procédés qui incluent la fabrication et le support technique.
D'après Serieyx, le but est d'inciter le concepteur à
considérer depuis au début tous les éléments du
cycle de vie de projet, de la conception à la phase de fermeture,
incluant les objectifs de qualité, de coûts et de délais
ainsi que les besoins du client. Au terme d'idées maîtresses,
l'accent est mis sur les besoins et les priorités du client. La
qualité passe par l'amélioration des procédés et
repose sur l'utilisation des nouvelles technologies de l'information. Au terme
d'impact organisationnel, il faut mentionner l'intégration hâtive
de tous les joueurs importants, les communications ouvertes et
instantanées, et l'apparition d'un partenariat avec l'externe
(fournisseurs, sous traitants, ...). À cela s'ajoutent le changement de
culture de gestion, des attitudes et des habitudes qui font partie de ce type
d'impact.
La seconde approche s'adresse à l'ensemble des
processus de l'entreprise, qu'ils soient reliés aux systèmes de
production ou aux systèmes administratifs. Elle est une remise en cause
fondamentale et une redéfinition radicale des processus
opérationnels d'une organisation. Le but est d'obtenir une meilleure
performance en termes de délais, de coûts, de qualité et de
service à la clientèle. Comme dans le premier cas, la
ré-ingénierie repose sur l'utilisation des nouvelles technologies
de l'information mais, elle rejette tout ce qui
n'engendre pas une valeur ajoutée au produit ou
service pour le client. Elle entraîne une réduction de la
paperasse et aussi encourage l'élimination des activités non
nécessaires. Les équipes de travail sont alors devenues
multifonctionnelles dans les choix de processus organisationnel.
En fonction de l'environnement, les incidences concernant ces
nouvelles approches sur la gestion de projet sont importantes comme l'indique
le tableau 3 suivant .
Tableau 3.- Nouvelles approches de gestion de
projet
Environnement
|
Traits caractéristiques
|
Incidence sur la gestion de projet
|
Économique
|
- Incertitude et imprévisibilité
- Rythme accéléré de changements
- Danger de perte de contrôle sur les coûts.
|
- Gestion de risques
- Analyse de la valeur - Gestion de conflit
|
Technologique
|
Prolifération de la microinformatique
|
Accessibilité à une multitude
de logiciels de gestion de projet (MS Project, etc.)
|
Social
et écologique
|
Nouveaux concepts et nouvelles approches tels que la
qualité totale, le développement durable, le commerce
équitable, les certifications environnementales, ect ...
|
Accent plus marqué sur la
gestion de la qualité des projets
|
|
Source : Ménard, 1995 ; repris par le professeur
Pierre Cadieux, UQAR, automne 2005
Tout au long des paragraphes précédents, il
s'est avéré de véritables arguments quant aux
problématiques liées à l'intégration
l'environnement et du développement durable dans les processus
décisionnels des entreprises. Nous avons examiné en quoi
l'approche des parties prenantes peut constituer un cadre de réflexion
utile pour les chefs de projet, c'est-à- dire un cadre qui est capable
d'opérationnaliser le développement durable. La théorie
des parties prenantes est une approche théorique qui est susceptible de
contribuer à développer et à renforcer les fondements de
notre réflexion. Celle-ci peut servir de base solide pour
concrétiser les efforts de l'intégration du développement
durable et du respect de l'environnement.
Dans plusieurs études, telles que les études de
O'Shaugnhessy (1992), de Shrivastava & Hart (1996), et celles de Persais
(2004), il est rapporté que peu d'entreprises accordent une importance
relative à l'écologie. Ces études ont montré encore
que les efforts pour faire accepter socialement un projet dans les
collectivités ne sont encore pas une option envisagée par les
entreprises. Plusieurs parmi ces entreprises se voient une obligation de se
lancer, mais d'autres sont encore à leur stade de réflexion. Les
cadres théoriques qui permettent de structurer une réflexion de
fond sur les pratiques sociales et environnementales au sein des entreprises
font défaut, à l'exception de l'approche des parties
prenantes.
Tout au long de ces paragraphes, plusieurs concepts ont
été abordés et analysés, dont le but est de
démontrer la relation positive qui pourrait exister entre l'approche
partie prenante et les questions d'environnement, puis de l'entreprise et de
son milieu social. Cette relation n'est pas encore évidente selon
certains chercheurs, comme le démontrent plusieurs études
(O'Shaughnessy, 1992 ; Shrivastava & Hart, 1996 et Persais, 2004). Dans
l'optique de trouver quelques pistes de solutions par le développement
d'une nouvelle réflexion, nous expliquons, dans les chapitres qui
suivent, comment les objectifs du développement durable, notamment
l'environnement, pourraient bien être insérés au sein des
entreprises, que ce soit dans leurs activités et dans leurs interactions
avec leurs parties prenantes. Nous allons élaborer une approche
intégrée et participative basée sur les outils du
modèle de gestion du cycle de projet (GCP), ayant à la base le
cadre logique. Celle-ci sera orientée vers l'analyse des parties
prenantes, l'analyse des problèmes, l'analyse des objectifs et l'analyse
des stratégies. Elle pourra donc servir de bases méthodologiques
pour la conception d'un modèle de planification « socialement et
écologiquement » responsable pour la conduite des projets sensibles
à l'environnement.
Pour ce qui est de ce travail de recherche, nous allons
privilégier une approche de participation et de concertation
comparativement à une approche « monolithique ».
CHAPITRE 5.- COMMENT INTÉGRER LES QUESTIONS
D'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE DANS LA GESTION DE PROJET.
UNE APPROCHE PARTICIPATIVE ORIENTÉE VERS L'ANALYSE DE L'OUTIL «
CADRE LOGIQUE »
Ce cinquième chapitre illustre une approche de gestion
visant à intégrer les objectifs du développement durable
dans l'ensemble des méthodologies de la gestion de projet. Cette
nouvelle réflexion repose sur l'analyse de l'outil « cadre logique
» en gestion de projet. Une telle réflexion devrait en effet se
placer au centre de la méthodologie d'identification d'un projet. Comme
le soulignent Ledant et Leroi, dans une étude européenne
publiée en 2005, les bases méthodologiques du cadre logique
devraient donc se situer au coeur de la démarche d'identification de
projet. En même temps, elles constituent la cible centrale à viser
par les efforts consacrés à l'intégration des questions
d'environnement et du développement durable dans la démarche de
conception de projet, si l'on souhaite que l'intégration de cette grande
question transversale ne reste pas purement hypothétique. Mais le cadre
logique ne semble connu que de manière superficielle par une
minorité de chefs de projet.
Ce travail de recherche est donc à la fois pour
rappeler à des professionnels de projet, tels que les
économistes, les ingénieurs, les agronomes, les
environnementalistes, les administrateurs, les banquiers, ... l'importance de
l'approche cadre logique (ACL) dans le développement de leurs projets,
et montrer surtout comment celle-ci peut leur permettre
d'opérationnaliser l'environnement et le développement durable
tout au long du cycle d'un projet.
5.1.- Projet et cycle de projet
5.1.1.- L'idée de projet
Dans notre démarche, il est considéré
qu'un projet de développement est un effort collectif et
organisé, limité dans le temps, qui vise à obtenir une
situation améliorée pour un groupe cible, cela en tant que
contribution durable à, et donc jamais au détriment, d'une
situation améliorée générale. Sans cette
dernière condition, il y aurait encore projet mais non
pas projet de développement (Ledant & Leroi,
2005). Un projet particulier se distingue d'un autre par la situation
améliorée particulière qu'il cherche à obtenir,
comme contribution à un mieux général. Cette situation
particulière visée par le projet constitue son objectif direct et
opérationnel, qualifié de spécifique au sens où il
lui est propre : à moins que n'arrivent des facteurs favorables
inattendus, l'amélioration en cause sera imputable au projet
lui-même, qui ne se contentera pas d'y apporter une simple contribution,
diluée parmi d'autres.
L'objectif spécifique est en principe unique. En
effet, lorsqu'un projet prétend poursuivre deux ou trois objectifs qui
ne convergent pas en un seul objectif, il sera qualifié de double ou de
triple... car c'est l'objectif spécifique qui caractérise un
projet (Commission européenne, 2001). Un projet idéalement
conçu se définit donc par son objectif et non par les
institutions impliquées. Ces dernières peuvent être
nombreuses ou variables, se joindre au projet ou le quitter, sans mettre
nécessairement en cause l'identité du projet.
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