la protection du salarié dans l'avant projet d'acte uniforme ohada portant droit du travail( Télécharger le fichier original )par Bibiane Irène Deya université de Douala - DESS juriste conseil d'entreprise 2006 |
SECTION II : LA SECURISATION DE LA REMUNERATION DUSALARIE. Le terme « salaire » signifie, au sens de l'APAUDT, quels qu'en soient la dénomination et le mode de calcul, la rémunération ou les gains susceptibles d'être évalués en espèces et fixés, soit par accord des parties, soit par des dispositions règlementaires ou conventionnelles qui sont dues en vertu d'un contrat de travail par l'employeur à un travailleur, en contrepartie de la prestation de travail63(*). Dans son article 9, l'Avant-projet de l'OHADA énonce que : « A conditions égales de travail, de qualification, de rendement et de qualité de service, la rémunération est égale pour tous les travailleurs ». Le salaire a un caractère alimentaire car il constitue pour les salariés l'essentiel de leurs revenus, leur permettant ainsi d'assurer la subsistance de leurs familles. La rémunération du salarié est la juste contre partie de son travail, de sa prestation de service, que l'employeur a l'obligation de lui apporter (para. I) et cette rémunération qui est composée de plusieurs éléments et modalités de paiement, ainsi que sa protection font l'objet d'une réglementation précise (para. II). PARAGRAPHE I : LA REMUNERATION DU SALARIE : UNE OBLIGATIONSUBSTANCIELLE DE L'EMPLOYEUR. La question du salaire constitue sans aucun doute une question centrale en droit du travail. En un sens c'est tout le droit du travail qui a pour objet de dire comment est déterminé et aménagée la rémunération du travail. Le salaire n'est pas autre chose qu'un élément du contrat de travail. Il constitue la contre partie, fournie par l'employeur, du travail exécuté par le salarié. Il existe une relation très étroite ente la prestation de travail et le salaire : OLLIER dirait « pas de salaire en dehors d'un contrat de travail et pas de salaire sans travail64(*) » Avant l'intervention d'une réglementation de la rémunération qui est venu l'encadrer, l'obligation de payer les salaires n'avait pour autre source que le contrat du travail et lorsqu'on sait que le contrat n'est que l'expression de la volonté des parties on peut comprendre que les patrons vont s'octroyer la part belle en signant un contrat de travail qui leur sera largement favorable. La protection de la rémunération trouve son fondement dans le fait qu'elle est la principale source de revenus de l'employé. Ce dernier a besoin de son salaire pour se nourrir, se vêtir, se soigner, bref pour sa subsistance. C'est la raison pour laquelle l'employeur qui s'octroie le privilège de priver un travailleur de son salaire est fortement sanctionné. Le paiement du salaire obéit à un régime particulier (B) qu'il serait important de présenter ici, juste après avoir exposé comment le salaire est déterminé (A)
A- LA DETERMINATION DU SALAIRE. D'après l'Avant-projet portant droit du travail, le terme « salaire » signifie, quelqu'en soient la dénomination et le mode de calcul, la rémunération ou les gains susceptibles d'être évalués en espèces et fixés soit, par accord des parties, soit par des dispositions réglementaires ou conventionnelles qui sont en vertu d'un contrat de travail par l'employeur à un travailleur, en contre partie de la prestation de travail ».De cette définition de l'art. 113, le salaire désigne soit une somme d'argent, soit un avantage en nature que l'on peut chiffrer en argent. Cette définition légale du salaire ne dépend pas de l'appellation retenue pour les parties, une convention collective ou une législation. Elle ne dépend pas non plus de la manière dont la prestation du travailleur est évaluée (par exemple salaire au temps, salaire aux pièces, salaire à la tâche)65(*). Le salaire est en principe fixé librement par les parties. Toutefois, les conventions collectives et le code du travail dans chaque Etat partie y apportent un certain nombre de limites. Le salaire se compose de plusieurs éléments : le salaire de base (1) auxquels s'ajoutent des sommes ou avantages dénommés accessoires de salaire (2) 1- Le salaire de base. L'article 115 de l'Avant projet dispose : « à travail de valeur égale, le salaire est égal pour tous les travailleurs ». L'employeur n'a pas le droit de faire des discriminations en fonction de la religion, du sexe, de l'âge ou de l'origine du salarié. On peut donc comprendre que, lorsque les salariés ont les mêmes capacités personnelles d'occuper un emploi et que les circonstances de travail sont les mêmes, ils doivent de ce fait percevoir le même salaire. Le salaire de base doit être la rémunération stable que l'employeur s'engage à fournir au salarié. Le salaire de base peut être calculé au temps, à la tâche ou encore aux pièces (rendement).le salaire de base peut également être constitué en totalité et en partie des commissions ou primes et prestations diverses ou indemnités représentatives de ces prestations. Dans le souci d'éviter les abus de la part de certains employeurs véreux et en raison du caractère alimentaire du salaire, les salariés de capacité moyenne, travaillant normalement à la tâche ou aux pièces, doivent percevoir une rémunération au moins égale à celle du travailleur rémunéré au temps effectuant un travail similaire. La protection intervient ici par l'interdiction faite à tout employeur de ne pas rémunérer le salarié en dessous d'un certain seuil. Toutes les informations y afférentes doivent être affichées dans les locaux de l'emploi et sur les lieux de paie. Il s'agit du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) dont le taux est fixé par chaque Etat Partie. L'AVAUDT précise dans son article 114 alinéa2 que « le salaire de base catégoriel est fixé pour chaque profession par les conventions collectives ou à défaut par l'Etat Partie ». C'est dire que la liberté est laissée à chaque Etat partie de fixer le taux de son S.M.I.G.66(*). La rémunération du salarié ne se compose pas seulement du salaire de base mais aussi de plusieurs éléments qui viennent grossir son montant. 2- Les accessoires du salaire. Le travailleur perçoit en plus de son salaire de base diverses sommes et peut bénéficier de divers avantages en nature et de remboursement de frais. Ce sont en réalité des compléments de salaire que l'on peut regrouper en deux rubriques : les accessoires en espèces et les accessoires en nature. Les compléments en espèces sans constituer le salaire de base revêtent le caractère de salaire. Ce sont: Les commissions, les primes (ancienneté, rendement), et les indemnités (de logement, de transport).Ces deux derniers accessoires sont prévus pour rétribuer le travail ou la fidélité du travailleur à l'entreprise. La prime est calculée sur le salaire minimum catégoriel ; c'est à dire celui afférent à l'échelon A de la catégorie quel que soit l'échelon où se trouve classé le travailleur. La prime d'ancienneté s'impose à l'employeur et au travailleur et ne peut être supprimé par convention ou par décision unilatéral de l'employeur en ce sens qu'elles sont institutionnalisées et réglementées. Au Cameroun par exemple, depuis le décret n° 75/90 du 22 janvier 197567(*). Les accessoires en nature sont constitués par le logement du salarié dans le cas où son contrat lui impose le changement de résidence ou une indemnité compensatrice de logement ; art. 116 de l'APAUDT; mais aussi de la fourniture en denrées alimentaires68(*). Après avoir déterminer le salaire et ses accessoires, il importe de rentrer dans les mesures instituant le paiement du salaire. B- LE PAIEMENT DU SALAIRE. La contre partie du travail effectué par le salarié est le salaire. Son paiement est une obligation pour l'employeur du fait de son particularisme et du caractère alimentaire de la créance de salaire, la loi a toujours protégé le salaire par une réglementation impérative et très stricte. Après le cadre de la détermination du salaire, s'en suit la phase de paiement qui obéit à un régime particulier. Il est convenable de préciser ici que sans travail effectué, il ne saurait y avoir salaire. L'article 113 de l'Avant projet en son alinéa 1 précise que le salaire ne saurait être dû en cas d'absence du salarié,exception faite des cas prévus par les lois en vigueur sur la question ou l'accord des parties. Le particularisme du paiement du salaire (1) impose certaines garanties (2)
1- Les particularités sur le paiement du salaire. Ce qui fait la particularité du salaire, c'est l'ensemble des dispositions prises afin d'assurer le bon déroulement de la paie. Le salaire doit être payé en monnaie ayant cours légal dans chaque Etat partie à peine de nullité. L'article 123 de l'Avant projet OHADA ne fait pas obstacle à un paiement par chèque ou virement à un compte bancaire ou postal. Le salaire doit être payé à intervalle de temps réguliers ne pouvant excéder 15 jours pour le travailleur payé à l'heure, un mois pour le travailleur payé au mois et les travailleurs journaliers doivent être payés quotidiennement avant la fin du travail. Il est clairement disposé dans l'APAUDT que les paiements mensuels doivent être effectués sous huitaine après la fin du mois de travail qui donne droit au salaire69(*). Le paiement du salaire est organisé de telle sorte que les modalités de paiement ne peuvent faire l'objet de dispositions contraires. L'APAUDT y a consacré toute une section. C'est dire combien cette phase très importante dans la vie du salarié. C'est à ce titre que le paiement du salaire est entouré de certaines mesures protectrices. 2- Les garanties entourant le paiement du salaire. La garantie qui entoure le paiement du salaire est la preuve de son paiement effectif. L'article 127 de l'Avant-projet OHADA est clair la dessus, dans la mesure où il dispose que : « si l'employeur n'est pas en mesure de produire le double des bulletins de paie dûment émargé par le travailleur, une certificat d'un établissement financier ou postal ou tout autre écrit attestant le paiement au travailleur, le non paiement est présumé ». Il ne fait aucun doute que cette disposition met l'accent sur la preuve du paiement du salaire qui doit être constatée par un « bulletin de paie », dont le double est conservé par l'employeur pendant une période de cinq (5) ans et doit être présenté à toute demande de l'inspecteur du travail. Ce bulletin est destiné à renseigner le salarié sur les éléments constitutifs de la rémunération et à fournir le contrôle pour les taux de salaire par l'inspecteur du travail. Les mentions contenues dans le bulletin de paie sont fixées par l'Etat partie. Lorsque le salarié a accompli son travail, et n'a pas perçu sa rémunération, il peut intenter une action en réclamation de salaire contre son employeur. Cette action en réclamation tire son fondement de l'article 133 de l'APAUDT qui dispose : « une action en paiement du salaire est reconnu eau travailleur.»L'action en paiement du salaire se prescrit par cinq (5) ans70(*). * 63 Art.113 al.2 de l'APAUDT * 64 D. Ollier Pierre, le droit du travail col U Armand collin 1972 p172 * 65 L'art. 120 précise « la rémunération d' un travail à la tache ou au pièce doit être calculé de tel sorte qu'elle procure au travailleur de capacité moyenne et travaillant normalement un salaire au moins égal à celui du travailleur rémunéré autant effectuant un travail analogue. Le contrat de travail doit préciser le mode de calcul de la rémunération » APAUDT p.45 * 66 Le SMIG a été revalorisé tout récemment au Cameroun et est passé de 23514 FCFA à 28216FCFA * 67TCHOKOMAKOUA V., KENFACK P. E., op. cit. p.102 * 68 L'art. 117 précise « dans le cas le travailleur ne peut par ses moyens obtenir pour lui et sa famille, un ravitaillement régulier en denrées alimentaires de première nécessité, l'employeur est tenu de lui assurer dans les conditions prévues par l'état partie * 69Art.124 al.2 de l'APAUDT * 70 Cette disposition est très avantageuse pour le salarié, même en cas d'interruption par comparaison avec le CTC qui prévoit plutôt 3 ans. |
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