la protection du salarié dans l'avant projet d'acte uniforme ohada portant droit du travail( Télécharger le fichier original )par Bibiane Irène Deya université de Douala - DESS juriste conseil d'entreprise 2006 |
PARAGRAPHE II : LES GARANTIES SPECIFIQUES DE PROTECTION.Les garanties spécifiques de protection sont ces mesures particulières de protection que le législateur institue pour la protection des salariés issus des couches vulnérables. La vulnérabilité s'entend comme la fragilité face aux attaques extérieures. Le salarié vulnérable est celui qui ne jouit pas de toute son intégrité physique, ou de celui qui, de par sa nature n'est pas physiquement apte à exercer des travaux nécessitant une débauche d'énergie importante. C'est aussi le cas pour le salarié qui exerce son travail dans des conditions de précarité ne lui permettant pas de s'épanouir véritablement sur le plan professionnel. Cette situation fait naître la nécessité d'une protection encore plus accrue des salariés relevant des catégories faibles. En plus des mesures de protection instituées dans un cadre général, l'AVAUDT a institué des mesures spécifiques de protection tant en ce qui concerne les catégories issus des couches vulnérables (A) qu'en ce qui concerne les salariés victimes d'affections professionnelles (B). A- LA PROTECTION DES CATEGORIES ISSUES DES COUCHES VULNERABLES. Les catégories issues des couches vulnérables dont il est question ici sont surtout les femmes, les jeunes gens, les personnes handicapées et les personnes atteintes de maladies graves. L' APAUDT pour assurer la protection de ces couches vulnérables a institué des mesures visant à combattre leurs marginalisation, et exclusions et à favoriser leur insertion sociale. L'OHADA s'est inspiré des conventions internationales ratifiées par la quasi totalité des Etats membres50(*). Ces dispositions sont de nature à corriger les inégalités sociales et aboutissent le plus souvent à la mise sur pied des statuts particuliers. Ce sont les femmes et les jeunes travailleurs en général qui bénéficient d'une protection spéciale. au delà ce devrait être une véritable politique de la femme,des jeunes gens des handicapées et des personnes atteintes de maladies graves et même le VIH SIDA. Pour les jeunes travailleurs, il s'agit des mesures de restriction telles que leur non emploi avant l'âge de 15 ans et des restrictions pour certaines de leurs obligations contractuelles pouvant porter atteinte à leur intégrité physique et morale51(*).Pour les femmes, il est question d'organiser particulièrement la protection juridique et sociale de la maternité (1). L'Avant-projet va même plus loin en interdisant toute discrimination envers les travailleurs handicapés et les travailleurs atteints de maladies graves voire le VIH SIDA52(*) (2) 1- Les jeunes travailleurs et les femmes. L'institution des mesures spécifiques de protection des jeunes travailleurs par le texte communautaire s'articule autour de l'art.5. Cette catégorie de salariés ne peut être employée avant l'âge de 15 ans seulement sous réserve des dérogations résultant des conventions internationales ratifiées par les Etats parties. Jusqu'à nos jours le Cameroun en a ratifié 9 au total. Dans la législation Camerounaise par exemple, les textes proscrivent trois espèces de travaux aux enfants et aux jeunes gens : les travaux qui dépassent la force des enfants, les travaux dangereux ou insalubres et les travaux à caractère immoraux pour les enfants c'est-à-dire « de nature à blesser leur moralité ou à exercer sur eux une influence fâcheuse même s'ils ne sont pas réprimés par la loi pénale53(*)». L'énoncé des droits fondamentaux prévus aux articles 2, 8et 9 de l'APAUDT précise le régime de protection particulier de la femme et spécialement de la femme enceinte. Pour le cas spécifique de celle-ci, l'APAUDT consacre en ses articles 32 et 149, une meilleure protection surtout pour ce qui est des congés de maternité. Cette protection spécifique va dans le sens de la protection contre les travaux excédant leurs forces, insalubres et dangereux ; de la protection de leur contrat de travail avec droit de démission et même de la prolongation des congés de maternité dans certaines circonstances. La protection spéciale s'étend aussi bien chez les handicapés et les personnes atteintes de maladies graves. 2- Les personnes handicapées et les personnes atteintes de maladies graves. Les personnes handicapées sont les personnes atteintes d'une infirmité physique, sensorielle ou mentales dûment constatée par les services de santé agréés d'après la définition tirée de l'art. 150 de l'APAUDT. Les articles 151 à153 sont consacrés aux mesures de protection par l'institution des principes comme celui de la non discrimination, et préconise même en cas de licenciement économique le maintien autant que possible, de l'emploi du travailleur handicapé. Pour les personnes atteintes de maladies graves et surtout celles atteintes du VIH SIDA, l' APAUDT précise qu'elles ne doivent pas être mise de coté à cause de leur état sérologique et ne doivent pas faire l'objet de discrimination aucune lorsqu'elles présentent des aptitudes professionnelles requises pour occuper un emploi54(*). B - LA PROTECTION DES PERSONNES EXPOSEES AUX RISQUES PROFESSIONNELS. Les personnes exposées aux risques professionnels sont celles la qui sont victimes dans le cadre de leurs travaux soit des accidents, soit des affections professionnelles. Nonobstant les mesures de santé et de sécurité prises par les employeurs, certains travailleurs peuvent être victimes de risques professionnels au cours de l'exécution de leurs contrats de travail tels que les accidents de travail ou les maladies professionnelles. Dans l'un comme dans l'autre cas, des dispositions ont été prises pour assurer au salarié victime d'accident de travail ou de maladie professionnelle, une protection toute particulière lui assurant la conservation de ses droits. A cet égard, l'Avant Projet de l'OHADA, dispose que l'employeur est tenu d'aviser l'inspecteur du travail de tout accident de travail survenu ou de toute maladie professionnelle constatée selon les formes déterminées par l'Etat partie dans un délai de quarante huit (48) heures afin que les dispositions soient prises pour permettre au salarié qui en est la victime, de bénéficier de tous ses droits en la matière55(*). 1- Le salarié victime d'un accident de travail. L'Avant Projet ayant donné la liberté à chaque Etat partie de prendre des mesures de protection du salarié victime d'accident ou de maladie professionnelle, c'est la loi n° 77/11 du 13 juillet 1977 portant réparation et prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui assure cette protection au Cameroun. D'après ce texte, l'accident de travail se définit comme « l'accident survenu à tout travailleur par le fait ou à l'occasion du travail ; pendant le trajet d'aller et retour entre sa résidence principale ou une résidence secondaire présentant un certain caractère de stabilité et son lieu de travail, le lieu de travail et le restaurant, la cantine ou d'une manière générale, le lieu où il prend habituellement ses repas ;pendant les voyages dont les frais sont mis à la charge de l'employeur, en application du code du travail»56(*) De cette définition, il faut comprendre que le salarié victime d'un accident de travail se trouve temporairement empêché d'exécuter normalement son travail. Le contrat de travail étant suspendu, la protection réside ici dans le fait que l'employeur n'est pas autorisé à résilier le contrat de travail, la durée de l'arrêt de travail pour accident professionnel est assimilée à une période de travail effectif, la réintégration du salarié à l'issue de la période d'incapacité est obligatoire et son retour devant être validé par un certificat médical, et enfin, le reclassement et la rémunération du salarié sont obligatoires57(*). Certains travailleurs, aux termes de l'article 5 du décret n°76/321 du 2 Août 1976, bénéficient également de la protection d'accidents de travail et de maladies professionnelles assurée par la C.N.P.S58(*). Encore faut il que le fait accidentel lié au travail et tout accident de trajet ne résulte pas de la faute intentionnelle du travailleur et soit couvert par la protection accident du travail et maladie professionnelle59(*). «Pour en bénéficier, le salarié doit avoir passé au moins 6 mois dans l'entreprise avant son invalidité et le délai requis est de 5ans»60(*). 2 - Le salarié victime d'une maladie professionnelle. Par opposition à l'accident de travail qui suppose en principe l'action violente et unique d'un agent extérieur, la maladie professionnelle est une intoxication lente sous l'effet répété de certaines substances ou émanations au contact desquelles ses activités professionnelles exposent de façon habituelle le travailleur61(*). Toute maladie contractée par un salarié au cours de l'exécution de son contrat de travail, est une maladie professionnelle. Mais il faut que le lien de causalité entre la maladie et l'activité professionnelle, soit constaté au moyen des présomptions consignées dans les tableaux des maladies professionnelles établies par décret pris après avis de la commission nationale d'hygiène et de sécurité du travail62(*). Toute maladie professionnelle doit être dûment déclarée et constatée et faire l'objet d'un contrôle par les médecins conseils ou par des médecins agréés. L'Avant projet OHADA portant droit du travail en plus de la sécurisation de l'emploi, institue un véritable arsenal juridique pour la protection de la rémunération du travailleur qui est considéré comme sa principale source de revenus. * 50 Il s'agit essentiellement des conventions émanant de l'OIT dans le cadre de son action normative et destiné à la protection des catégories sociales défavorisées. Il en est ainsi de la convention de l'OIT relative à la protection des enfants et à celle relative à l'interdiction du travail de nuit aux femmes travaillant dans l'industrie. Il importe toutes fois de rappeler que la vocation normative de l'OIT ne doit pas s'entendre au sens littéral car elle se contente d'élaborer des textes qui sont ensuite soumis à l'appréciation des Etats membres qui décident en dernier ressort de ratifier s'ils le jugent opportun * 51 Contrairement au CTC qui précise que les jeunes ne sont employés avant l'âge de 18 ans * 52 Dont les art. 9 à 11 précisent les dispositions générales * 53 Voir par ex. arrêté ministériel 17/MTLS/DEGRE du 27 mai 1969,relatif au travail des enfants in SIM Rémi, Guide social de l'entreprise ( recueil de textes de droit social) tome I coll. Excellence sociale ed. 2005 * 54 Art. 10 de l'APAUDT * 55 Art. 138 de l'APAUDT * 56 Traité de droit social du Cameroun, droit du travail et de la prévoyance sociale, FIDAFRICA, membre de Pricewaterhousecoopers, mise à jour au 31 décembre 2006, p.13 * 57 Jean .Jules FOMCHIGBOU MBANCHOUT l'obligation du reclassement du salarié à la lumière de l'APAUDT, assistant à la FSJP de l'Université de douala in l'effectivité du droit de l'OHADA sous la direction de GATSI Jean pp. 241-271 * 58 Il s'agit du Cameroun, voir les développements faits sur la question, Fidafrica op. cit. p 15 * 59 En application de l'art.37 de la loi n° 77 du 13 juillet 1977 « l'accident résultant d'un crime ou d'un délit commis par la victime ou d'une faute intentionnelle de sa part ne donne lieu à aucune réparation » in Fidafrica p.25.La CA de Yaoundé a qualifié d'accident de travail le décès d'un plombier survenu par la suite d'une recherche ayant une crise cardiaque alors qu'il procédait à une installation sanitaire pour le compte de son employeur * 60 Propos de BEGOUDE J. P., Directeur Juridique et Contentieux de la CNPS du Cameroun lors du séminaire de formation sur le thème : l'entreprise face aux contentieux tenue en avril 2008 du 10-4 * 61 Lamy Social, droit du travail, charges sociales ed. Lamy 2004 citée par Fidafrica op. cit. p13 * 62 Remy SIM op. cit. pp.69 à 75 |
|