Paragraphe I- La déclaration initiale
25- L'obligation essentielle de l'assuré réside
dans la déclaration initiale. Du point de vue de l'assureur, elle lui
permet, eu égard aux réponses fournies par l'assuré,
d'envisager, d'accorder ou pas une garantie. Le candidat à l'assurance
doit faire connaître à l'assureur le risque qu'il souhaite
garantir et lui fournir tous les éléments susceptibles de lui
faire évaluer le risque qu'il prend en charge et d'en déterminer
le coût. De la part de l'assuré, cette déclaration va lui
permettre de pouvoir cerner le contours de sa futur assurance et de voir sa
prime ajustée aux réponses avancées par lui. C'est, en
quelque sorte, la référence unique de l'exactitude de ses
réponses, lors d'une éventuelle vérification par son
assureur.
Cette déclaration a une technique spécifique
développée chronologiquement par la pratique professionnelle.
L'assuré était obligé, avec la déclaration
spontanée (A), de transmettre à l'assureur toutes les
informations qu'il estime lui-même utiles à l'appréciation
du risque par l'assureur. Alors qu'avec le système du questionnaire (B),
il attend que l`assureur pose des questions pour lui répondre
A- La déclaration spontanée
26- Le système de la déclaration
spontanée veut que l'assuré, lui-même, signale toutes les
circonstances connues de lui, qui sont de nature à influer sur
l'appréciation du risque, alors même que l'assureur ne lui aurait
pas posé des questions à leur propos. L'assuré avait donc
un devoir d'initiative. C'est ainsi, avant la loi n° 89-1014 du 31
décembre 1989, que le candidat à l'assurance devait
déclarer dans la proposition d'assurance, « toutes les
circonstances connues de lui »33 et qui sont de nature
à renseigner l'assureur sur le risque pris en charge. L'assuré
était tenu de faire une déclaration spontanée. Il devait
donc, de son propre chef, indiquer les éléments liés au
risque et qui sont susceptibles de permettre à l'assureur
d'apprécier la nature et l'étendue de ce risque34.
27 - Tout le problème consistait à savoir
comment l'assuré peut déterminer, parmi les
éléments connus de lui, ceux qui aient effectivement une
incidence sur l'opinion que l'assureur peut se faire du risque35. Il
est possible qu'il déclare quelques informations inutiles. Il en est de
même le fait qu'il oublie de transmettre ou n'arrive pas à
préciser celles, particulièrement, importantes à
l`appréciation du risque par son assureur.
Certaines décisions ont affirmé que
l'assuré doit déclarer, spontanément, les circonstances
« qu'il doit savoir susceptibles d'influencer l'opinion du risque et
d'amener l'assureur, soit à le refuser, soit à majorer le taux de
prime »36. Le juge du fond relève que «
l'assuré ne pouvait manquer de savoir » que la fracture
d'une vertèbre était de nature à modifier
l'appréciation du risque par l'assureur37.
28- Le principe même du caractère spontané
de la déclaration est resté longtemps rappelé dans toute
sa rigueur : alors que le questionnaire établi par l'assureur à
propos du risque garanti n'avait pas été remis à
l'assuré, celui-ci ne pouvait arguer de cette
33 L'art. L. 113-2 dans son ancienne rédaction.
34 P. FIL, L'obligation d'information et de conseil en
matière d'assurance, op, cit, p.82.
35 Sur cette question, v. Lamy assurances, op, cit, p. 144 et
suivant.
36 Cass. 1re civ. 2 nov. 1954, RGAT 1955, p. 37, note
BESSON et Cass. 1re civ. 26 janv. 1948, RGAT 1955, p. 48, note
BESSON.
37 Cass. 1re civ. 18 janv. 1989, n°87-11.116,
RGAT 1989, p. 404, note J.- L. AUBERT.
opinion pour justifier le défaut de déclaration
spontanée38 . Il s'agit, en l'espèce, une
société qui avait souscrit un contrat d'assurance contre le vol
sur ses magasins sans déclarer que son précédent contrat
avait été résilié à la suite de plusieurs
sinistres. La nullité du contrat réclamée par l'assureur a
été refusée par la Cour de Paris au motif que le
questionnaire n'avait pas été soumis à l'assuré. La
Cour de cassation avait rappelé dans son arrêt que la
déclaration doit être spontanée. C'est l'application
rigoureuse de la jurisprudence traditionnelle de la Cour de cassation qui ne
tient pas compte de l'évolution qui s'annonçait depuis quelques
années39.
29- L'arrêt de la première chambre civile du 2
juillet 1985, avait annoncé un revirement en considérant que
l'exactitude des déclarations de l'assuré, selon l'ancien article
L. 113-2 2°, devait s'apprécier en fonction des questions
posées. Les circonstances non visées dans le questionnaire sont
présumées sans influence sur l'opinion de l'assureur. Il n'y a
pas un devoir de renseignement au-delà du questionnaire40.
Si l'assuré a déclaré par écrit
les circonstances du risque qu'il veut faire assurer, notamment dans la
proposition d'assurance, on peut y trouver les déclarations inexactes et
en déduire les déclarations non réalisées par le
biais de la comparaison. En revanche, si aucun élément de preuve
ne permet d'établir le contenu de la déclaration, on ne saurait
pour autant en conclure que la déclaration n'aurait pas
été faite, mais il serait également inimaginable que
l'assureur a accepté de garantir un risque sans information.
Dès lors, puisqu'il incombe à l'assureur de
prouver l'inexactitude ou le défaut de la déclaration, il a
été jugé que s'il ne fournit en justice aucun
élément sur les indications que l'assuré lui a
présentées lors de la conclusion du contrat, il devient
impossible de déterminer si elles ont été
incomplètes ou inexactes. La fausse déclaration ne peut donc
être reprochée à l'assuré41.
30- La Commission des clauses abusives a critiqué le
principe de la déclaration spontanée, qui laisse l'assuré
dans l'ignorance des circonstances qui ont une incidence
38 Cass. 1re civ. 7 févr. 1990,
n°88-13.957, RGAT 1990, p. 311, note R. MAURICE.
39 Cour de cassation 1rè ch. CIV/ 07/02/1990, RGDA, 1990,
p. 313, note R. Maurice
40 1re civ. 2 juill.1985, D. 1986. p. 509, note H.
GROUTEL.
41 Cass. 1re civ. 4 déc. 1984, n°8
3-14.460, D. 1985, I. R., p. 190, obs. C-J. BERR et H. GROUT.
sur l'opinion de l'assureur quant au risque qu'il prend en
charge42. Elle a notamment recommandé l'usage
systématique du questionnaire clair et précis. La loi
n°89-1014 du 31 décembre 1989 a écarté le
régime de la déclaration spontanée pour adopter celui du
questionnaire, consacrant ainsi cette évolution jurisprudentielle.
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