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Placement des cadres béninois dans les organisations internationales: analyse diagnostique et prospective

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par Wilson GAKPETOR
Université d'Abomey-Calavi (Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature) - Diplome de fin de cycle I en Diplomatie et Relations Internationales 2006
  

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Paragraphe II : Les entraves financières et socioculturelles

La promotion des cadres se trouve aussi entravée par les difficultés financières (A) qu'aggravent des pesanteurs socioculturelles (B).

A- Les difficultés financières

Elles sont relatives à la faiblesse de la contribution du Bénin au budget des institutions d'envergure universelle (1) et à la modicité des moyens déployés pour les campagnes (2).

1) L'état de la participation financière aux organisations

internationales

Il semble important pour la compréhension de la portée du problème de procéder à un bref aperçu.

Classiquement, les OI se dotent de deux types de budget à savoir, un budget ordinaire dont les ressources proviennent principalement des contributions obligatoires des Etats membres76 et un " budget opérationnel", qui sert à exécuter les programmes spéciaux et dont les financements proviennent des contributions volontaires. Les fonctionnaires internationaux étant rémunérés par l'organisme qui les emploie sur son budget propre, à quelques exceptions près77, il s'ensuit que le taux de participation financière d'un Etat a des répercussions sur la situation de ses ressortissants au sein de l'institution. De même l'accumulation des arriérés de contribution par un pays entrave le succès de sa candidature. Ces remarques préliminaires permettront de cerner aisément les trois points sur lesquels l'accent sera mis.

75 Voir infra P : 51 et suivantes.

76 Les contributions obligatoires au budget ordinaire sont calculées suivant un barème de quote-part en fonction du produit nationale brut (PNB) de chaque Etat membre.

77 Il arrive en effet que des Etats acceptent de payer des agents qu'ils mettent à la disposition d'une OI pendant une période généralement assez courte.

33

En effet, à partir de 1982, en raison de la crise économique qu'a traversé le pays, le Bénin a éprouvé de réelles difficultés à s'acquitter de ses obligations financières vis-à-vis des OI dont il était membre78. Le montant des arriérés s'était progressivement accru et s'élevait, en mai 1987, à deux milliards trois cent soixante quinze millions cent quatorze mille deux cent quinze (2.375.114.215) francs CFA. La situation était telle que l'éventualité de l'exclusion pure et simple du pays -ou à tout le moins la perte de ses droits- de certaines organisations comme l'ONU et l'OMS était

envisageable79. Le Bénin était ainsi en perte de crédibilité dans les OI. Au minimum, cette situation n'était pas propice à l'émergence de ses ressortissants et constituait un handicap à leur recrutement dès lors que s'appliquaient les critères relatifs à la participation financière du pays membre.

Depuis 1990, le Bénin est considéré comme «un bon contributeur»80. Il n'en demeure pas moins que sa participation financière aux OI demeure problématique pour au moins deux raisons.

D'une part, en raison de la faiblesse de son PNB, la contribution obligatoire du pays au budget ordinaire des institutions dont il est membre, notamment celles à caractère universel, est généralement modeste. En conséquence, la quote-part des postes lui revenant au titre du facteur contribution s'en trouve amenuisée. C'est le cas par exemple à l'ONU où le Bénin ne pourrait avoir plus d'une dizaine de postes au titre de la répartition géographique.

D'autre part, la question de la participation du Bénin au financement des projets exécutés grâce aux ressources extrabudgétaires est de l'ordre du symbolique. Pendant ce temps, d'autres Etats, des plus développés (Etats-Unis d'Amérique, France etc.) aux moins nantis (Sénégal81 par exemple), prenant «conscience de l'importance d'une

78 Isidore Bio, Robert Djimon Zantan, op. cit, P: 70.

79 A titre d'exemples, nous pouvons citer les cas de :

- l'OMS où l'accumulation des arriérés a conduit la 41é Assemblée de cette organisation en 1988 à voter la résolution WHA 4.120 qui stipule : « Si à l'ouverture de la 42è Assemblée (...), le Bénin et consorts sont encore redevables d'arriérés de contributions (...), leur droit sera suspendu ». Voir www. who.org/archives

- l'Agence de la coopération culturelle et technique d'où le Bénin « a été exclu pour non payement de ses cotisations au titre des exercices 1984 et 1985 ». Voir Isidore Bio, Robert Djimon Zantan, op. cit, P:70.

- l'ONU où le Bénin, cumulant 273.280 dollars US d'arriérés de contributions, était sous la menace d'une suspension. Cf. Isidore Bio, Robert Djimon Zantan, op. cit, p: 70 et suivantes.

80 Voir Infra P : 49

81 Le Sénégal fait partie des Pays les Moins Avancés (PMA) comme le Bénin.

34 représentation (...) de qualité au sein des OI»82 octroient des subventions extraordinaires à celles-ci, de façon à pouvoir présenter leurs ressortissants pour mener à bien les programmes financés par ces contributions.

La conjugaison de ces paramètres limite sensiblement les ambitions des cadres béninois bien désireux de faire carrière dans la fonction publique internationale.

Au demeurant, les difficultés financières inhérentes au placement des cadres resteraient entières s'il était fait abstraction du problème de l'inconsistance des budgets de campagne débloqués à cette fin.

2) L'inconsistance des budgets de campagne

La question de la mobilisation des budgets de campagne, découle de l'inconsistance des crédits alloués par le budget national au Ministère des Affaires Etrangères pour la mise en oeuvre de la politique extérieure du gouvernement83. Il n'y est jamais prévu de fonds destinés à la promotion des cadres. Or, la conduite des dossiers de candidature pour l'obtention des postes de responsabilité dans les OI commande de mener en temps opportun une campagne de proximité auprès des autorités au plus haut niveau des Etats concernés afin de faire valoir les compétences du postulant. Autrement dit, pour mener une opération efficiente, il faut mobiliser des moyens substantiels. Il n'est pas possible, a priori, de chiffrer les frais nécessaires pour une bonne propagande. Il s'élève globalement à des dizaines de millions de francs CFA84.

Cependant, et quel que soit le cas de figure, le résultat de la campagne (sa réussite ou son échec) est en partie tributaire des ressources financières déployées à cette fin, et des délais dans lesquels elles ont été décaissées. Or généralement, aux

82 Circulaire no3121/SG du 14 mars 1986 relative aux fonctionnaires français dans les organisations intergouvernementales, op. cit.

83 Cf. Honorat Hountogbédé, op. cit.

84 Les données varient considérablement et sont fonction de :

- l'importance du poste (tel poste de responsable de l'UEMOA n'a pas la même portée qu'un autre poste d'adjoint) ;

- l'envergure de l`institution (sous-régionale, régionale ou universelle) ;

- la personnalité même du candidat (il est relativement moins onéreux de promouvoir une personnalité de forte aura et ayant des appuis personnels dans l'arène internationale) ;

- les circonstances.

35 dires des autorités du Ministère85, il arrive souvent que le budget prévisionnel de campagne élaboré par les services techniques ne soit jamais débloqué et, quand il l'est, c'est avec du retard et vidé de ses plus importants postes. Toutes ces réalités paralysent l'action et vouent à l'échec des activités initialement prévues.

A ce stade de l'analyse, il reste à aborder un aspect de la question qui ne manque pas de délicatesse, parce que lié à des considérations sociales et culturelles.

B- La dimension socioculturelle du problème

Elle se révèle comme la plus difficile à circonscrire parce que relevant de l'ordre du social (1) et entretenue par la puissance des media (2).

1) Les pesanteurs des traits caractériels

S'il est un aspect de la question qui a été soulevé par la quasi-totalité des personnes ressources rencontrées dans le cadre de cette étude, c'est celui relatif au manque de patriotisme et d'esprit de sacrifice des uns et des autres. Ces inquiétudes se révèlent comme la manifestation des facteurs diagnostiqués par les études nationales de perspectives à long terme comme étant les maux qui minent la société dans tous les domaines d'activité et empêchent l'éclosion et l'épanouissement des valeurs individuelles pour le bien-être collectif.

En effet, 64% des citoyens estiment que leurs compatriotes sont «animés d'un esprit de régionalisme, de népotisme et d'ethnocentrisme»86. Nourris à la source de ces considérations (réelles ou supposées), la plupart n'appréhendent pas à sa juste valeur l'importance de la promotion de leurs concitoyens.

Ces considérations largement partagées et longtemps véhiculées à travers des adages populaires87 s'incorporent au vécu quotidien des populations en général, du

85 Entretien avec M. Séraphin Lissassi, Directeur de l'Intégration Africaine au MAE.

86 Ministère d'Etat chargé de la coordination de l'action gouvernementale, du plan, du développement et de la promotion de l'emploi, (2003) « Etudes nationales de perspectives à long terme, Bénin 2025 Alafia», Imprimerie CACI, P : 28.

87 Au nombre de ces adages, peut être cité « celui-là qui signifie littéralement `'seul mon maïs doit cuire». En dehors de moi, personne d'autre ne doit réussir. Ainsi, tous les moyens sont bons (...) pour empêcher son prochain d'aller de l'avant et le maintenir dans une situation de subordination par rapport à soi. Cf. Nouroudeen Laleyè, « Béninoiserie, quand tu nous tiens», In La Marina, n°004, novembre décembre 2004, P : 37.

36 cadre en particulier, et atténue son ardeur à servir la cause patriotique dès lors que ses intérêts immédiats ne se dégagent clairement. Elles se traduisent par des négligences coupables, des querelles de personne autour de la désignation des candidats, etc.

En somme, c'est la survivance de ce que les études précitées notent comme étant «les traits caractéristiques qui définissent le nouveau champ identitaire du citoyen béninois». Ils conduisent à privilégier «la préséance de la parenté (...) dans l'action politique, la réhabilitation de la conscience tribale dans la vie institutionnelle»88.

Par ailleurs, ces traits caractériels transparaissent dans les media dont les écrits desservent plus d'une candidature.

2) L'influence nocive des media

Depuis l'avènement du renouveau démocratique, le Bénin fait l'expérience de la libéralisation de l'espace médiatique. Le champ de liberté des médias s'est agrandi, hissant le pays au rang de leader africain en matière de liberté de la presse. Pourtant les journaux béninois n'ont pas mis ces acquis au service du rayonnement de l'intelligentsia. Bien au contraire, leurs colonnes furent des espaces de dénigrement des potentialités de cadres aspirant à des postes internationaux89. Au lieu d'oeuvrer à la propagande de leurs compatriotes, des journalistes s'attèlent plutôt à révéler leurs faiblesses (réelles ou imaginaires), les vouant ainsi aux gémonies90. «On assiste à une floraison de titres ultra fragiles qui cachent mal leur malaise»91 et portent atteinte à l'honorabilité des postulants. Or, depuis que les progrès techniques et scientifiques ont transformé le monde en un village planétaire, les informations véhiculées par les médias nationaux produisent des impacts significatifs sur la scène internationale, influencent l'attitude des dirigeants étrangers et affectent leurs choix. En analysant le rôle de l'information dans les relations internationales, Marcel MERLE faisait observer que, à bien des égards, l'image que véhicule d'un pays et de ses cadres la

88 Yaovi AKAKPO, (2003) « Solidarités émergentes et mentalité inventive », In Mosaïque1, P : 95.

90 Ce comportement est dénoncé au sein même du monde médiatique béninois. Le quotidien `'La Nation» du 7 décembre 1992 consacrait un article à ces journalistes qu'il qualifie de « prostitués de la presse béninoise ».

91 Quotidien malien L'Aurore du 1er octobre 1992.

37 presse locale est déterminante dans « le comportement politique des dirigeants à l'égard du pays concerné »92. Dès lors, on ne s'étonnera point de constater que les révélations de la presse béninoise font perdre aux candidats le capital sympathie nécessaire pour susciter le soutien des Etats "amis"93. C'est ce que révèle cette expérience vécue dans un pays anglophone d'Afrique, en 2001, par un diplomate, (alors membre d'une délégation de campagne) :

« ...Après nous avoir attentivement écouté vanter les mérites de notre candidat, le Chef de l 'Etat hôte sortit de son tiroir des coupures de journaux béninois révélant des informations très peu élogieux concernant notre compatriote. Et au Président de conclure `'J'aurais bien voulu vous apporter tout mon soutien...» »94.

Lorsque de tels agissements sont sporadiques, ils témoignent d'un manque de professionnalisme de certains acteurs du monde des media. Mais quand ils sont réguliers et persistants, ils dénotent de la désintégration du `'rôle patriotique» dévolu à la presse95.

En somme, tant au niveau endogène qu'exogène, de réelles difficultés entravent la promotion des cadres béninois. Il reste à s'interroger sur le degré de pertinence des hypothèses de départ.

Vérification des hypothèses

De l'analyse des données, il résulte que :

- au sein des organisations faisant l'objet de cette étude (exception faite de l'UEMOA), le Bénin est globalement sous représenté, numériquement et qualitativement;

92 Cf. Marcel Merle, (1981) « Forces et enjeux dans les relations internationales », Paris, Economica.

93 Les Etats n'ayant que des intérêts, l'amitié ici se mesure, souvent, en termes de promesse de soutien ultérieure.

94 Entretien avec M. Séraphin Lissassi, Directeur de l'Intégration Africaine au MAE.

95 Vue sous cet angle précis, la presse sénégalaise mérite bien la palme que lui décerne A.-J. TUDESQ dans son ouvrage « Les media en Afrique » (Ellipses, Paris, 1999, p. 104), car, sans être inféodée au gouvernement, elle «sait reconnaître des mérites» et promouvoir les individualités nationales. Sa réputation en la matière est loin d'être surfaite. Le « rôle citoyen » de la presse sénégalaise est une valeur culturelle dont les premières manifestations remontent au début du siècle précédent puisque, dès 1914 déjà, le premier député noir du Sénégal, Blaise DIAGNE fut élu grâce à «La Démocratie du Sénégal».

- la diplomatie béninoise déploie des efforts pour placer des cadres; en témoignent les résultats enregistrés au sein de certaines institutions interafricaines. Depuis 2001, le placement des cadres est expressément inscrit au nombre des priorités de la nation, du moins dans les textes; ceci s'est traduit, entre autres, par la création de la Cellule d'Analyse Stratégique .

Par conséquent, nous ne saurions affirmer qu'il n'existe point de politique. Tout au moins, il existe un cadre théorique pouvant déboucher sur une véritable politique. Ainsi il apparaît que l'hypothèse n°1 (selon laquelle si le Bénin est sous-représenté dans les organisations internationales, c'est parce qu'il n'existe pas une politique de placement des cadres nationaux dans la fonction publique internationale) n'est pas vérifiée. Certes, le problème de sous représentativité est avéré mais la cause présumée ne semble pas la plus plausible.

Toutefois, une politique, c'est, au-delà du simple cadre théorique, une stratégie bien pensée au service de laquelle sont mobilisées des ressources conséquentes. Or l'analyse du `'mécanisme» actuel de placement des cadres révèle de réels imperfections dont les implications se traduisent par la rareté des cadres béninois aux postes de direction des OI. Ces constatations accréditent l'hypothèse n°2 (ainsi formulée: les cadres béninois ne sont pas promus aux postes de direction dans les organisations internationales parce qu'il n'existe pas une politique dynamique à cet effet).

Face à cette situation, il est souhaitable que le Bénin se dote d'une politique efficace et d'une stratégie offensive de positionnement de ses cadres au sein des organisations internationales.

ELEMENTS DE CONCEPTION ET DE
MISE EN OEUVRE D'UNE POLITIQUE
DYNAMIQUE DE PROMOTION DES
CADRES BENINOIS DANS LES
ORGANISATIONS INTERNATIONALES

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La promotion des cadres dans les organisations internationales est devenue mieux qu'un enjeu diplomatique, une gageure politique et un facteur de puissance (section I). Eu égard à la complexité des actions à entreprendre dans ce sens, seuls les Etats qui se dotent d'un instrument de veille stratégique, capables d'anticiper les grandes mutations intervenant dans l'environnement international en général et au sein des OI en particulier parviennent à influencer le cours de l'histoire. Il en résulte pour le Bénin la nécessité de combler le déficit structurel en la matière afin de se donner les moyens de surpasser le stade de la gestion quotidienne pour s'approprier une dynamique proactive, orientée vers l'avenir (section II).

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery