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Placement des cadres béninois dans les organisations internationales: analyse diagnostique et prospective

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par Wilson GAKPETOR
Université d'Abomey-Calavi (Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature) - Diplome de fin de cycle I en Diplomatie et Relations Internationales 2006
  

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Section II- Diagnostic des difficultés liées au placement

optimal des cadres béninois dans les organisations
internationales

Plusieurs facteurs peuvent expliquer la sous représentation du Bénin au sein des organisations internationales. L'accent sera mis, d'une part, sur les facteurs politiques et organisationnels (paragraphe 1), et d'autre part, sur les entraves d'ordre socioculturel (paragraphe 2).

Paragraphe I : Les facteurs politiques et organisationnels

Du défaut d'engagement politique (A) aux incohérences techniques et organisationnelles (B) avec leurs implications respectives, nombreux sont les dysfonctionnement dont la conjonction limite les velléités de positionnement des cadres béninois dans les OI.

A- Les obstacles politiques

Les obstacles constatés au plan politique se manifestent par un manque de volonté politique affichée que corrobore l'inexistence d'une structure chargée du placement des cadres.

1) Le manque de volonté politique affichée

L'observation du contexte politique révèle que les autorités politiques béninoises, à qui il revient la responsabilité de déterminer les priorités de la nation, ont souvent accordé peu d'importance à la présence de hauts cadres béninois dans les institutions internationales. De fait, la promotion des cadres est considérée comme une activité budgétivore, sans valeur ajoutée nationale, destinée à la gloire et au prestige

27 d'une individualité. Des nombreux paramètres à l'aune desquels le faible engagement des politiques peut se mesurer, trois seront mis en exergue, à titre illustratif.

D'abord, avant le milieu des années 1980, comme le notaient Isidore Bio et Robert D. Zantan: «On ne saurait (...) soutenir (...) qu'il existait au Bénin une politique de placement des nationaux à des postes de responsabilité au sein des OI»59. Il a fallu attendre la veille de l'ère du renouveau démocratique pour que les jalons d'une «politique aux contours encore imprécis»60 soient jetés.

Le deuxième paramètre est relatif à la suite réservée aux recommandations issues du séminaire sur la diplomatie béninoise à l'heure du renouveau démocratique. Ces suggestions ont été réaffirmées en 1998 lors du séminaire sur l'évaluation de la diplomatie béninoise sous le renouveau démocratique. En fait, lors des travaux de ces réunions, les diplomates ont mis en lumière la nécessité de veiller à «une meilleure représentation du Bénin au sein des OI à travers une politique bien définie de placement des cadres nationaux »61 et suggéré des actions à concrétiser à cette fin. Ces recommandations sont demeurées à l'étape de propositions.

Enfin, il se dénote clairement, à la lecture des programmes qui ont sous-tendu l'action des gouvernements successifs, un manque d'intérêt au problème du placement des cadres, d'où l'inexistence d'une structure nationale en charge de la question.

2) La limite structurelle

Contrairement à la pratique en vigueur dans plusieurs autres Etats, le Bénin ne dispose pas d'une structure ayant pour vocation d'oeuvrer à la promotion des cadres dans les organisations internationales.

Or, la France, ayant pris conscience dès le début des années 1980, des enjeux liés à la promotion des cadres, et «soucieuse de (...) développer une présence

59 Isidore Bio, Robert Djimon Zantan, op. cit, p: 36.

60 Ibidem

61 Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération, « Séminaire sur l'évaluation de la diplomatie béninoise sous le renouveau démocratique, compte rendu des travaux », op. cit, P : 13. Voir aussi MAEC, « Eléments de réflexion en vue de l'élaboration d'une charte de la diplomatie béninoise », P : 6.

28 française de qualité et d'assurer le recrutement de Français de haut niveau dans ces institutions»62, a adopté une série de mesures dont, entre autres, la nomination d'un «délégué interministériel aux fonctionnaires internationaux»63. Grâce à la mise en oeuvre des grandes orientations de cette politique, la fonction publique internationale est aujourd'hui considérée comme le prolongement de la fonction publique française. En Afrique, cet exemple sera suivi par le Sénégal, le Mali etc. qui ont mis en place des structures nationales chargées exclusivement d'oeuvrer au placement des cadres nationaux dans les organisations internationales.

Il faut attendre l'année 2001 pour assister aux premières manifestations de volonté dans ce sens au Bénin, lesquelles se sont traduites par la création, au sein du Ministère des Affaires Etrangères et de l'Intégration Africaine, de la Cellule d'Analyse Stratégique qui a pour tâche, entre autres, aux termes de l'article 34 du décret no 2004- 094 du 24 février 2004, de faire «des propositions et recommandations pour le placement des cadres béninois et le renforcement de leur présence dans les organisations internationales ou interafricaines, y compris l'élaboration de la stratégie de campagne pour les candidats à des postes électifs ». Cependant, la multiplicité des responsabilités dévolues à la Cellule, combinée à la modicité des moyens mis à sa disposition hypothèque la concrétisation de ses initiatives.

Ainsi, le placement des cadres béninois dans les organisations internationales est perçu et géré de manière peu professionnelle, avec un suivi empreint de bureaucratie et de lourdeur qui entravent le dynamisme et le pragmatisme nécessaires à l'obtention de résultats probants en la matière. De cette carence structurelle, découlent les nombreuses incohérences techniques et organisationnelles observées.

B- Les incohérences techniques et organisationnelles

Les insuffisances techniques et organisationnelles qui entravent le placement des cadres béninois dans les OI sont la résultante de la lourdeur qui caractérise le fonctionnement de l'administration en général (1). A ce facteur, se greffent des erreurs de procédure (2).

62 Circulaire n°3 121/SG, op. cit.

63 Ibidem.

1) Les problèmes liés à la lenteur administrative

L'administration publique béninoise est caractérisée par « des lenteurs et lourdeurs fantaisistes et inutiles »64 dans le traitement et l'acheminement des dossiers. Ces lenteurs se répercutent sur les résultats obtenus en termes de promotion internationale des cadres65. Le circuit administratif à suivre pour répondre aux avis de vacance de poste est exagérément long surtout quand l'on tient compte du délai très court (parfois quelques jours)66 qu'offrent les organismes internationaux aux potentiels candidats. En effet, il existe une multiplicité de structures intervenant dans le traitement des dossiers. Il s'agit notamment du:

- Ministère des Affaires Etrangères qui reçoit les avis et les achemine en direction des structures concernées ;

- Ministère du Travail et de la Fonction Publique qui se charge de les diffuser, de recueillir les candidatures, de les traiter et de les transmettre à l'organisme concerné;

- Ministère du Développement, de l'Economie et des Finances dont l'avis est parfois requis. A l'époque où existait un Ministère du Plan séparé de celui de l'Economie, son avis était aussi sollicité ;

- Ministère de tutelle de tout Agent Permanent de l'Etat désireux de postuler.

En raison de la complexité de cette procédure, très peu de fonctionnaires bénéficient de la position de détachement prévue par la loi no 86-0 13 du 26 février 1986 portant statut des agents permanents de l'Etat en ses articles 103 et suivants. En 1987, ils étaient évalués à une trentaine67. Ce nombre est passé à une centaine en 199868. Depuis lors, les données n'ont pas sensiblement évolué.

En sus des difficultés administratives, se posent des problèmes de déficit informationnel. Aussi bien les étudiants (pouvant bénéficier de stage) que les cadres

64 Conseil des ministres (Bénin), compte rendu n°20/SGG/Com/Extra/2006 du 25 novembre 2006. [En ligne] Disponible sur : http://www.gouv.bj/conseil des ministres top.php. (Page consultée le 26 novembre 2006).

65 Cf. Gervais Houndékindo, (1998) « Réflexions sur le placement des cadres dans les organisations interafricaines », Mimographie.

66 Nous avons pu constater lors de notre stage de fin de formation au MAE que certains avis de vacance de poste n'y parviennent que la veille de la date limite de dépôt des dossiers de candidature.

67Isidore Bio, Robert Djimon Zantan, op. cit, p: 37

68 Cf. Gervais Houndékindo, op. cit.

30 disposent d'assez peu d'informations concernant les énormes potentialités offertes par les nouvelles technologies de l'information et de la communication pour obtenir des postes. En effet la plupart des OI diffusent les avis de vacance de poste en ligne et y reçoivent directement les dossiers de candidature dès lors qu'il s'agit de postes sélectifs. Au demeurant, les contacts personnels sont autant de ressources dont il faut savoir judicieusement faire usage.

A tous ces facteurs, il faut ajouter les erreurs dans la gestion des dossiers de candidature.

2) Les insuffisances dans la présentation et le suivi des

dossiers

Les erreurs du point de vue de la présentation et de la conduite des dossiers se révèlent, essentiellement, à trois niveaux.

Le premier est celui du ciblage des postes à briguer et des candidats à y positionner. La réalité qui prévaut jusqu'aujourd'hui consiste à laisser les cadres rechercher eux-mêmes des postes, à s'autoproclamer candidats, à entamer des démarches avec plus ou moins de maladresse et à «obliger le gouvernement à endosser leurs candidatures et déployer à cette fin des moyens au dernier moment»69. Cette démarche a montré ses limites; car les candidatures autoproclamées peuvent contenir des `'vices cachés' '70 . Ces vices peuvent être liés soit à la personnalité même du candidat (dont le curriculum vitae peut être incompatible avec le profil recherché), soit aux négligences et légèretés dont il a pu faire montre dans sa carrière professionnelle.

Le deuxième niveau, c'est celui de la présentation proprement dite des candidatures. Si les difficultés ne sont pas perceptibles pour ce qui concerne les postes statutaires, elles se révèlent au niveau des postes politiques (électifs) et se rapportent à la méconnaissance des procédures propres à chaque institution. Ainsi par exemple, à l'Union Africaine, c'est l'individu (intuitu personae) qui est candidat avec bien sûr l'appui de son pays. En revanche, selon les dispositions de l'article 18 du traité de

69 Ministère des Affaires Etrangères, (2006) « Placement des cadres béninois dans les OI, document cadre », Cellule d'Analyse Stratégique, Mimographie.

70 Entretien M. Francis LOKO, ancien ambassadeur du Bénin au Canada.

31 Lagos régissant la CEDEAO, c'est l'Etat membre qui est candidat. Ainsi, c'est l'Etat qui se fait d'abord élire pour occuper tel ou tel autre poste. Une fois cette étape franchie et l'accord de principe obtenu, il désigne trois (3) de ses ressortissants pour subir une interview devant un comité restreint de sept (7) ministres. Ce comité statue, proclame les résultats par ordre de mérite et les soumet à la conférence des Chefs d'Etat à qui appartient la décision finale. Cette procédure propre à la CEDEAO amène les Etats candidats à entourer les noms de leurs postulants au poste de Secrétaire Exécutif d'une totale discrétion. La non observance de cette précaution, combinée à la méfiance de certains Etats, qui reprochaient au Bénin d'avoir introduit le «mal démocratique»71 dans la sous région, et à son candidat d'oeuvrer à son expansion en prenant part à des conférences régionales sur l'Etat de droit, furent, entre autres, les raisons de l'échec du Bénin à ce poste en 199372.

Le troisième niveau, le dernier qu'il est important de mettre en exergue, a trait à la sous estimation de l'importance des parrainages des grandes puissances et de la `'diplomatie de couloir». L'obtention de postes politiques est la consécration d'un travail de lobbying savamment organisé. Malgré leurs atouts considérables, certains postulants béninois perdent, au détriment de la nation tout entière, des portefeuilles d'envergure internationale. Ce fut notamment le cas en 1987 où le postulant béninois échoua au poste de Directeur général de la FAO. En effet, son concurrent, riche de ses expériences -il était Directeur général sortant- et fort du soutien de certaines puissances occidentales, offrit, la veille du scrutin, un somptueux dîner aux délégués africains73, dîner durant et après lequel, aucune commodité mondaine ne fut de trop. Le lendemain, à la sortie du vote, ce dernier était reconduit à la tête de l'Organisation74. De tels exemples foisonnent et démontrent l'efficacité de ce que l'on appelle par euphémisme, la `'diplomatie du chéquier» et de bien d'autres pratiques, se situant souvent à la limite

71 Le Bénin a été le premier Etat au sud du Sahara à réussir une transition démocratique sans effusion de sang. Cet évènement fut perçu comme un précédent dangereux par certains dirigeants d'alors car il avait inspiré chez des opposants à leur régime (de parti unique), des espoirs de construction d'un Etat de droit dans la sous région ouest africaine ; ceci d'autant plus qu'ils bénéficiaient du soutien moral de l'intelligentsia béninoise. Lire à ce sujet Jean-Luc Aplogan, « Bénin, une démocratie apaisée », In Le Monde diplomatique [En ligne] Disponible sur < http://www.monde-diplomatique.fr/1997/1 1/APLOGAN/9489> (page consultée le 10 novembre 2006).

72 Cf. Gervais Houndékindo, op. cit ; entretiens avec des autorités du MAE.

73 A l'époque, le candidat béninois bénéficiait pourtant, officiellement du moins, du soutien des pays africains. En effet, lors du XXIIè sommet de l'OUA tenu à Addis Abeba en juillet 1986, les Chefs d'Etat et de Gouvernement ont adopté la résolution CM/1053 (XL, IV) faisant de M. Moïse Mensah le candidat unique de l'Afrique.

74 Entretien avec M. Isidore Monsi, Secrétaire général adjoint du MAE.

Pour plus de détails sur la portée de la diplomatie lors des élections des responsables d'institutions internationales, lire : Pierre-Edouard Deldique, (2003) «Faut-il supprimer l'ONU ? » Paris : Hachette Littératures, P : 265.

32 de l'illégalité. Tout diplomate doit pourtant s'illustrer dans cet `'art» au risque de voir ses projets souvent échouer75.

Mais pour ce faire, il faudrait disposer de ressources financières conséquentes.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams