Foncier en Afrique : quelle législation foncière comme outil de cohésion sociale et de développement économique ?( Télécharger le fichier original )par W. Paul DABONE Ecole Nationale des Régies Financières du Burkina - Inspecteur des Impôts 2008 |
III-2- L'EXERCICE DU DROIT DE PROPRIETELe droit de propriété est détenu par l'Etat, mais son exercice est confié au Ministre des finances. L'une des raisons de la difficulté de la mise en oeuvre de la RAF provient de ces dispositions. En effet, la propriété de l'Etat a été très peu perçue dans la réalité en raison du fait qu'elle est confiée à une autorité concentrée alors que celui-ci ne dispose pas de moyens humains adaptés (c'est-à-dire revêtu de pouvoir politique) , pour l'exercer effectivement sur le terrain. Parallèlement la loi confère aux autorités communales qui sont des structures décentralisées (et des autorités politiques), la gestion des droits d'usage, issus du droit de propriété. On pourrait caricaturer cette situation en disant que le droit de propriété est à Ouagadougou (lieu de situation du Ministère des finances) tandis que le droit d'usage est partout au Burkina (dans les lieux où sont situées les autorités communales et coutumières). La gestion du foncier étant de la compétence des autorités politiques, les services déconcentrés du Ministère des finances ne peuvent exercer un contrôle efficace de leur gestion. Ces autorités étant de fait, hors du contrôle des structures déconcentrées de l'Etat qui les accompagnent dans leur gestion, le contrôle du respect des dispositions législatives devient difficile. En fonction des éléments déterminants du développement économique que nous venons d'énumérer, nous essayerons à présent de proposer les éléments d'une législation foncière à mesure de les satisfaire et de respecter les impératifs de paix et de cohésion sociale. SECTION 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, COMME OUTIL DE
Pour pouvoir prendre en compte les préoccupations des différents acteurs du développement dans la proposition d'une législation foncière unifiée à mesure de résoudre les effets pervers de la dualité des régimes fonciers appliqués jusque-là, nous ferons dans un premier temps, une présentation sommaire de la situation socio- économique du Burkina. Ensuite nous procéderons à la définition du statut Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - juridique de la terre et du rôle que pourraient jouer les différentes autorités politiques. Enfin nous définirons les droits des différents acteurs en tenant compte des exigences de sécurité foncière. I - PRESENTATION DE LA SITUATION DE LA PAUVRETE AU BURKINA Les statistiques de l'INSD fournissent les informations suivantes sur la population burkinabè. - Population vivant avec moins de 1 $ US/jour : 27,2% de la population totale ; - Population vivant avec moins de 2 $ US/jour : 71,8% de la population totale ; - Population vivant en dessous du seuil de pauvreté (c'est-à-dire disposant d'un revenu annuel ne dépassant pas 82.672 francs CFA) : 46,4% de la population. Selon ces informations, la majorité des pauvres se trouve en milieu rural et mène les activités agricoles ou pastorales. Les couches vulnérables de la population (les femmes, les jeunes et les enfants) sont les plus exposées à la pauvreté. II - LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE Les différents acteurs du milieu rural qui ont participé aux ateliers de concertations sur la PNSFMR ont tous soutenu l'idée que l'Etat ne soit plus l'unique propriétaire de la terre. Mais nous avons expliqué dans cette étude que la loi étant l'instrument des hommes, toutes les personnes physiques qui ont administré la terre jusque-là, ont fini par agir dans leur intérêt (personnel ou politique). Une telle attitude porte atteinte à la cohésion sociale sans laquelle aucune sécurité réelle des droits n'est possible. La difficulté d'accorder le droit de propriété à des structures pilotées par des personnes physiques est encore plus perceptible lorsque l'on considère les exigences de sécurité foncière. De notre point de vue, un lien doit être établi entre la durée de gestion du droit de propriété (par les personnes habilitées à le faire et pour la période pendant laquelle elles répondent vraiment de leur gestion) et celle de l'effectivité du droit accordé aux utilisateurs du foncier. Car la gestion des hommes peut être sujette à conflits, alors que les conflits sociaux peuvent fragiliser la sécurité foncière. En effet, la durée de gestion foncière des hommes est nettement inférieure à celle des besoins de sécurité foncière. Les autorités politiques exercent dans le Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - meilleur des cas, leur fonction le temps d'une vie humaine, mais dans la plupart des cas, sur une période d'une quinzaine d'années tout au plus. La plupart d'entre elles se soucient beaucoup plus de leur propre bien-être pendant cette période, que des conséquences des actes qu'elles posent, dans le futur. La durée légale des entreprises peut quant à elle, aller jusqu'à quatre-vingt dix neuf (99) ans. Certaines entreprises exercent bien au delà de cette durée. La véritable sécurité foncière doit protéger les investissements de ces entreprises tant que durent leurs activités, et donc beaucoup plus longtemps après la période de gestion des autorités politiques, et même au-delà des régimes politiques qui ont institué la loi. Pour ce faire, le droit de propriété doit être détenu par l'Etat en dépit des positions de certains acteurs du foncier. Nous pensons que la faculté de l`Etat à exercer un contrôle de la gestion des droits secondaires par les autres personnes, doit aussi venir de sa détention du droit de propriété. Pour sécuriser les investissements, l'Etat doit octroyer des droits d'usage incontestables sur des périodes suffisamment longues pour rassurer l'investisseur. III- LES ROLES DES DIFFERENTES AUTORITES
POLITIQUES LA GESTION DES TERRES Le Ministre des finances doit être maintenu dans son rôle actuel et doit être compétent sur l'ensemble des terres du Burkina, quelques soient les usages auxquels elles sont destinées. L'unicité juridique de la terre burkinabè, qui résulte de l'unicité d'autorité, en sera préservée ainsi. Mais il devra être appuyé dans l'exercice de ses fonctions par des structures politiques afin que le contrôle de la gestion des structures coutumières et administratives décentralisées soit effectué en temps réel par des structures de même nature. L'exercice du droit de propriété de l'Etat sera ainsi beaucoup plus perceptible. La mise en oeuvre du contrôle que l'Etat doit exercer sur la gestion des structures décentralisées sera ainsi beaucoup plus efficace. La mise en oeuvre de telles dispositions pourrait se faire de manière progressive. Les Gouverneurs pourraient par exemple assumer cette fonction au niveau régional dans un premier temps. Ensuite une partie de leur responsabilité Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - pourrait être conférée à des structures politiques beaucoup plus déconcentrées au fur et à mesure. |
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