Foncier en Afrique : quelle législation foncière comme outil de cohésion sociale et de développement économique ?( Télécharger le fichier original )par W. Paul DABONE Ecole Nationale des Régies Financières du Burkina - Inspecteur des Impôts 2008 |
II - 6 - LA SPECULATION FONCIERELe phénomène des « nouveaux acteurs » que décrit M. Bonoudaba DABIRE3, Ministre Délégué Chargé de l'Agriculture dans un écrit, est une autre conséquence de cette liberté non contrôlée accordée aux responsables coutumiers. M. DABIRE explique : « depuis une dizaine d'années environ, le Burkina connaît un phénomène nouveau qualifié de phénomène des « nouveaux acteurs ». Il s'agit d'un processus d'accaparement de grandes superficies de terres dans les villages (plusieurs dizaines ou plusieurs centaines d'hectares) par des élites urbaines. Les données collectées indiquent que la plupart des « nouveaux acteurs » ne sont pas en mesure de mettre en valeur les superficies acquises et que les objectifs de spéculation foncière ne sont pas absents de leurs stratégies d'accumulation foncière. » Il convient de préciser ici que les nouveaux acteurs acquièrent les terres auprès des responsables et propriétaires fonciers coutumiers et requièrent ensuite l'attribution auprès de l'administration. Tous les superficiaires, satisfaits de la transaction préalable, signent le procès verbal de palabre et autorisent ainsi l'administration à procéder aux formalités d'attribution. L'exclusivité du droit de propriété sur les terres burkinabè n'a en définitive été conférée à l'Etat par la RAF que pendant sept (7) ans. Le mode de gestion du droit de propriété constitue l'élément fondamental permettant de différencier tous les régimes fonciers qui se sont succédés au Burkina de la période coloniale à nos jours. L'harmonisation de la gestion de ce droit a par ailleurs été perçue par la plupart des 1 Loi n° 014-96/ADP du 23 mai 1996, portant Raf, article 156 2 Loi n° 014-96/ADP du 23 mai 1996, portant Raf, article 155 3 www.icarrd.org `'Problématique de la gestion du foncier et du développement durable au Burkina faso. Quelle politique de sécurisation foncière ?», Bonoudaba DABIRE, page 3. Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - législateurs comme un impératif obligatoire qui garantit la cohésion sociale et le développement économique. Pourquoi les diverses tentatives d'instaurer un régime foncier unique n'ont-elles pas abouti ? Nous essayerons de répondre à cette interrogation, par une analyse du statut juridique de la terre burkinabè. Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - CHAPITRE 3 : ANALYSE DU STATUT JURIDIQUE DE LA Le `'statut» est l'ensemble des dispositions qui fixent les règles de fonctionnement d'une matière donnée1. Quant à l'adjectif `'juridique», il désigne ce qui relève du droit2. Le statut juridique de la terre peut donc être défini comme l'ensemble des règles de droit qui fixent les conditions d'utilisation de la terre. A qui appartient la terre du Burkina ? Qui détient le pouvoir de définir les règles de gestion du foncier au Burkina ? L'une des ambitions de la RAF était d'unifier le statut juridique de la terre en conférant à l'Etat la propriété exclusive des terres et en devenant l'unique texte de loi qui règlemente l'ensemble des ressources foncières. Un quart de siècle après l'institution de la première version de la RAF, force est de constater que cet objectif n'a pas été atteint. En effet, face aux insuffisances de la RAF, plusieurs textes de loi ont vu le jour pour règlementer la gestion de ressources foncières relevant déjà de la RAF. On peut citer de manière non exhaustive les textes suivants à titre d'illustration. - La loi n°006/97/ADP du 31 janvier 1997 portant Code Forestier au Burkina Faso qui règlemente le régime de l'eau, des forêts, de la faune et des pêches, alors que les dispositions des sections 1, 2, 3 et 4 du Chapitre 3 de la loi 014/96/ADP portant RAF traitent du même domaine. - La loi n°031-2003/AN du 8 mai 2003 portant Code Minier au Burkina Faso qui réglemente la gestion des substances des carrières et des mines en lieu et place des dispositions de la section 5 du Chapitre 3 de la loi 014/96/ADP portant RAF. Quant à la législation foncière coutumière, elle semble avoir gardé la totalité de ses prérogatives. Près d'un demi siècle après l'accession du Burkina Faso à l'indépendance, et plus de vingt ans après la Révolution Démocratique et Populaire (RDP) toutes les tentatives de suppression du régime foncier coutumier n'ont pas réussi à enlever à ce régime d'administration de la terre, sa légitimité aux yeux des populations. Quels 1 Définition du Dictionnaire `'le petit Larousse illustré». 2 Définition du Dictionnaire `'le petit Larousse illustré» Quelle législation foncière comme outil de
cohésion sociale et de développement économique,
adaptée aux réalités socio - sont les points de divergence et de convergence des législations foncières coutumières et règlementaires ? Quelles sont les raisons éventuelles des difficultés d'institution d'une législation foncière unique (section 1) ? Nous examinerons le statut juridique de la terre burkinabè (section 2) par une tentative de réponse à ces différentes interrogations. |
|