II - Pourquoi une limite politico-administrative majeure
?
Pau et Tarbes, respectivement préfectures des
Pyrénées-Atlantiques et des Hautes-Pyrénées, et
distantes seulement de 35 kilomètres environ, sont ainsi
séparées par une double limite politico-administrative,
départementale et régionale. Or, actuellement de nombreuses
relations s'établissent entre les deux villes moyennes, formant ainsi
pour l'I.N.S.E.E. un "espace urbain" (cf commentaire
précédent).
La limite politico-administrative qui sépare le
département des Hautes-Pyrénées de celui des
Pyrénées-Atlantiques correspond parfaitement à la
frontière ancienne entre le Béarn et la Bigorre. D'ailleurs, la
cartographie que présentent Pierre Tucoo-Chala et
Christian Desplat le précise bien : le même trait
noir correspond à la "frontière ancienne
Béarn-Bigorre" et à la "limite départementale
actuelle". Remarquons d'autre part que le tracé de la limite semble
indifférent à la topographie, même si parfois cette
dernière épouse plus ou moins fidèlement la ligne de
rupture de pente formée par le plateau de Ger et son talus oriental
(donc faisant face à la plaine de Tarbes).
Or, cette même cartographie révèle aussi
l'existence de deux enclaves bigourdanes dans le département des
Pyrénées-Atlantiques. "Ce découpage remonte à
l'époque lointaine où les vicomtes de Béarn
annexèrent le Montanérès ; au sein de cette petite
vicomté quelques paroisses étaient propriété
directe des comtes de Bigorre qui les conservèrent jalousement. Les
"enclavés", ainsi qu'aiment à s'appeler les habitants de ces
villages, ont traversé les siècles, et la Constituante respecta
scrupuleusement cet héritage de ce monde féodal dont elle voulait
pourtant abolir tous les vestiges".
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Par contre, les anciennes limites occidentales du Béarn
n'ont joué aucun rôle dans le nouveau maillage proposé, les
trois provinces basques étant rattachées au Béarn pour
former le département des Basses-Pyrénées (renommé
Pyrénées-Atlantiques en 1969). Cet assemblage surprenant
répond ici au désir d'uniformisation du territoire national de
l'Assemblée Constituante, qui ne voulait pas faire du Pays Basque un
département à part entière.
Comme nous pouvons le constater, le processus de
départementalisation a procédé d'une double volonté
: celle du niveau national (la Révolution Française), et celle du
niveau local (les revendications locales ayant été prises en
compte). Si ce nouveau maillage politicoadministratif offrait une certaine
cohérence en cette fin de 18° siècle, eu égard aux
logiques prises en compte, aujourd'hui il est souvent remis en cause, soit de
manière ponctuelle et indirecte, soit de manière plus
systématique et directe : l'observation actuelle des nombreuses
relations fonctionnelles (dues notamment à la proximité
géographique) entre Pau et Tarbes reflète en partie cet
état de fait.
Par la suite, la régionalisation a renforcé cette
rupture politico-administrative entre les deux pôles urbains, donc entre
le Béarn et la Bigorre. En effet, de même qu'en 1790 la
départementalisation sépare administrativement ces anciennes
provinces, en 1961, la régionalisation accentue la scission. Les
Pyrénées-Atlantiques (alors Basses-Pyrénées)
s'inscrivent alors dans la région Aquitaine, les
Hautes-Pyrénées dans la région
Midi-Pyrénées. Bien que se sentant plus proche de Toulouse que de
Bordeaux, Pau (et le département des Pyrénées-Atlantiques)
est quand-même rattaché à l'Aquitaine, la région
Midi-Pyrénées comptant déjà huit
départements.
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