III - Des cartographies d'indicateurs statistiques qui
confortent le constat de l'I.N.S.E.E.
A) - Les densités de population en
1990.
A travers cette cartographie, nous allons vérifier le
principe évoqué en première partie, selon lequel la
population française est actuellement concentrée sur des espaces
relativement restreints, notamment dans le cadre d'une urbanisation et d'une
périurbanisation croissantes, générant ainsi un mouvement
de contraction de cette population.
L'observation attentive de la cartographie
présentée ici montre qu'il y a bien un rapprochement entre Pau et
Tarbes, rapprochement qui s'effectue par la coalescence de leurs couronnes
périurbaines et rurbaines respectives. Le phénomène est
d'autant plus flagrant que pour Tarbes (et ses différentes couronnes),
les densités de population sont plus fortes à l'ouest qu'à
l'est, ainsi que le long de l'Adour.
Le rapprochement entre Pau et Tarbes est favorisé par
plusieurs facteurs. Ne pouvant pas tous les énumérer (car tous ne
sont pas connus, et parce que nous n'avons pas procédé à
un recensement exhaustif de ces derniers), nous citerons seulement les plus
connus et les plus importants à nos yeux. Ainsi, la faible distance
entre les deux villes joue un rôle fondamental et majeur dans la
formation de cet "espace urbain" (35 kilomètres séparent
seulement les deux préfectures), ce qui est renforcé par la
présence d'infrastructures routières, favorisant le
développement des espaces interstitiels (logique aréolaire ; la
R.N. 117, par exemple) et autoroutières, favorisant surtout les espaces
inter-urbains (logique réticulaire ; l'A. 64, par exemple). De
même, les processus de périurbanisation et de rurbanisation
évoqués auparavant
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
ont aussi participé (et participent encore) à cette
logique de mise en place d'une (relative) continuité urbaine entre Pau
et Tarbes. En effet, la périurbanisation (et la rurbanisation) joue ici
un rôle important. "Désormais, l'originalité du
processus réside moins dans sa nouveauté que dans
généralisation à tous les espaces compris dans un
périmètre dont les contours s'éloignent sans cesse de la
limite traditionnelle des villes, quelle que soit leur taille et quelle que
soit leur rang dans la hiérarchie urbaine".
Enfin, les zones d'emplois de Pau et de Tarbes sont
étendues et contiguës (ce qui favorise encore plus les
rapprochements), quant aux bassins de vie (toujours de Pau et de Tarbes), ils
forment, pour l'I.N.S.E.E., un réseau de villes (ce qui constitue un
autre exemple de relations inter-départementales et
inter-régionales).
Or, nous n'observons pas le même phénomène
entre Pau et le district Bayonne-AngletBiarritz (B .A.B.), ce dernier
étant pourtant inscrit dans le département des
Pyrénées- Atlantiques. La distance plus importante entre les deux
pôles (un peu moins d'une centaine de kilomètres) est à
l'origine de cette situation, où à partir d'Orthez (un peu
après en fait) les densités de population sont inférieures
à 40 habitants par kilomètre carré, et ce sur une dizaine
de kilomètres environ. Certes, cette situation peut être imputable
en partie aux effets de seuil liés à la discrétisation des
données cartographiées en quatre classes, mais cependant il est
évident que la distance joue un rôle essentiel.
Ainsi, à travers cet exemple, nous vérifions (en
partie) le phénomène de concentration de la population sur des
espaces relativement restreints, notamment au niveau des principaux pôles
urbains (français), ce qui contribue à créer des
agglomérations multipolaires quand ces dernières sont proches les
unes des autres.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
B) - L'évolution de la population entre 1962 et
1990.
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limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
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limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
L'analyse de ces quatres cartographies, dans une perspective
diachronique, montre relativement bien le rapprochement démographique
(ou la synchronie dans l'évolution de la population) entre Pau et
Tarbes, et ce sur une période de 28 ans. En effet, nous observons sur
les deux premières cartographies, l'existence d'une "vallée
bleue" entre ces deux villes moyennes, le bleu traduisant une
évolution négative de la population entre les deux
périodes considérées. Le phénomène est
surtout perceptible dans la deuxième cartographie, où se
dégage un cordon (de quelques kilomètres) plus ou moins
rectiligne de communes subissant un baisse de population ; il est à
remarquer d'ailleurs que ce cordon se situe à-peu-près à
mi- chemin de Pau et de Tarbes, sa partie est retrouvant localement la double
limite départementale et régionale, cette dernière
épousant plus ou moins fidèlement le rebord oriental du plateau
de Ger.
A partir de la période 1975-1982 et surtout 1982-1990, la
tendance s'inverse. La "vallée bleue" évoquée
précédemment se comble progressivement, ce que la
discrétisation des données en six classes traduit bien. En effet,
à partir de ces deux périodes, la majorité des communes
connaissent une évolution positive de leur population. Nous n'observons
alors plus de vide entre Pau et Tarbes, mais au contraire une continuité
urbaine (ou connurbation), favorisée, semble-t-il, par les mêmes
raisons avancées pour le la cartographie précédente.
Démographiquement ces deux villes moyennes se sont donc
rapprochées depuis 1975, ce que la cartographie des densités de
population analysée auparavant souligne bien.
Or, si à partir de 1975 nous observons un rapprochement
(dans les comportements démographiques) entre Pau et Tarbes, les quatres
cartographies que nous présentons ici ne montrent pas de
phénomène similaire entre Pau et le district
Bayonne-Anglet-Biarritz. En effet, toujours à partir d'Orthez il demeure
sur une douzaine de kilomètres une bande où l'évolution de
la population entre chaque période de recensement est constamment
négative (d'où une densité de population beaucoup plus
faible qu'entre Pau et Tarbes). Une fois de plus nous estimons que le
rôle de la distance est fondamental dans la compréhension du
phénomène analysé. Cette dernière, quand elle est
trop importante, limite les processus de périurbanisation et de
rurbanisation liés au développement des principaux pôles
urbains que constituent respectivement Pau, Bayonne-Anglet-Biarritz et Tarbes.
En effet, les aires d'influences de chacun de ces pôles sont sensiblement
les mêmes, mais la distance importante entre Pau et le district B .A.B.
ne permet pas la coalescence et le rapprochement que nous observons entre Pau
et Tarbes. Il y a donc un effet de seuil lié à la distance qui
rend ainsi impossible la répétition du même
phénomène Pau-Tarbes entre Pau et le B.A.B.
A travers cet autre exemple, nous vérifions (toujours en
partie, notre analyse se focalisant volontairement sur un secteur
d'étude précis) que les processus d'urbanisation et de
périurbanisation (de rurbanisation aussi, mais dans une moindre mesure)
tendent à accentuer le caractère hétérogène
de la répartition de la population sur l'ensemble du territoire national
français.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
C) - Les migrations domicile-travail hors de la
région en 1990.
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limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
A l'inverse des deux cartographies concernant l'évolution
de la population entre 1962 et 1975, la cartographie présentée
ici met en évidence un "plateau rouge-marron" qui
témoigne
de déplacements domicile-travail hors de la région
d'appartenance relativement élevés. Le fait majeur à
souligner est que la majorité des communes concernées par ces
migrations se situent surtout dans le département des
Pyrénées-Atlantiques. L'explication est relativement simple : la
limite régionale passe beaucoup plus près de Tarbes et de Lourdes
que de Pau. Ce faisant, les habitants des communes limitrophes ont tendance
à travailler dans la zone d'emploi la plus proche (Tarbes,
associée à celle de Lourdes). Le plateau de Ger traduit donc ici
physiquement, du moins dans sa partie centrale et orientale, l'augmentation du
nombre de communes connaissant un pourcentage relativement élevé
de personnes travaillant dans la région voisine (ne serait-ce que par
rapport aux communes voisines).
Cette dernière cartographie constitue un
élément supplémentaire de mise en évidence des
relations de complémentarité et de proximité
s'établissant entre Pau et Tarbes, entre le Béarn et la Bigorre.
Elle est ainsi complémentaire du constat établi par l'I.N.S.E.E.
(le Z.A.U.).
De même, elle souligne bien que la mobilité des
hommes génère des territorialisations différentes de
celles qui se développaient avant que l'automobile ne se
démocratise (et que les emplois ne deviennent de plus en plus en
rares).
Ainsi, de nombreuses dynamiques géographiques se
développent indépendamment du maillage politico-administratif (en
l'occurrence ce sont ici des mailles départementales et
régionales), ce dernier constituant une discontinuité statique
majeure. Les processus d'expansion urbaine graduelle (périurbanisation
et rurbanisation), de mobilité géographique croissante (de type
domicile-travail, qui génèrent des mouvements pendulaires
journaliers), et les relations de proximités fonctionnelles et
d'échanges (entre pôles urbains), mettent en évidence un
espace socio-économique dont les logiques d'organisation et de
structuration (toujours dans le secteur d'étude qui nous
intéresse) sont relativement indifférentes aux logiques
politico-administratives de gestion et de contrôle du territoire. Dans
cette perspective, la limite politico-administrative majeure entre Pau et
Tarbes semble a priori obsolète, en séparant deux
agglomérations que les pratiques spatiales des habitants tendent
à réunir.
Finalement, au regard des nouvelles cartographies
présentées précédemment, le constat de l'I.N.S.E.E.
paraît pertinent et objectif. Entre Pau et Tarbes s'opére donc un
rapprochement résultant de causes locales, par rapport au secteur
d'étude considéré (proximité géographique et
spatiale, rôle des infrastructures de transport, par exemple), et aussi
de causes générales (phénomène de
périurbanisation et de rurbanisation favorisées, entre autres,
par la démocratisation de l'automobile).
Cette transgression croissante de la limite soulignée par
l'I.N.S.E.E. ("espace urbain") est donc le fruit de la logique qui veut
que la proximité géographique favorise les proximités
fonctionnelles et les stratégies d'alliances territoriales (bien
entendu, il y a des exceptions à la règle...). Les mailles
départementales et régionales sont donc ici inadaptées aux
réalités (factuelles) du terrain. Ces quelques cartographies
témoignent de logiques qui transgressent ces limites
politico-administratives, posant ainsi le problème de la pertinence de
ces dernières qui ne sont plus cohérentes par rapport aux
nouvelles compétences dévolues à l'État.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
La deuxième sous-partie, en l'occurrence, va montrer
comment cette règle s'applique relativement bien au secteur
d'étude qui nous intéresse.
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