Deuxième Partie :
Le contact Pyrénées-Atlantiques et
Hautes-Pyrénées : recompositions territoriales et
discontinuités géographiques entre Pau et Tarbes.
Le contact Pyrénées-Atlantiques -
Hautes-Pyrénées constitue pour nous un exemple concret d'analyse
et de remise en cause de la pertinence du maillage politico-administratif
français, et plus précisemment des mailles départementales
et régionales. L'observation, la mise en perspective et l'étude
de quelques exemples de recompositions territoriales entre Pau et Tarbes, vont
nous permettre, après cette première partie essentiellement
théorique, de voir comment sur le terrain s'organisent les logiques et
les faits que nous avons développés auparavant.
Nous avons choisi cet exemple de par sa proximité et son
originalité. De même, il nous semble, a priori,
représentatif d'un bon nombre de situations similaires dans l'hexagone
(ne serait-ce que par l'observation des densités de population à
l'échelle de la France entière), situations qui participent ainsi
aux nombreuses remises en cause que ce mémoire se propose
d'étudier. En effet, d'autres exemples auraient pu être
étudiés dans ce cadre. Citons, entre autres, Béziers et
Narbonne (respectivement dans l'Hérault et dans l'Aude, et distantes
d'une trentaine de kilomètres), de même certaines villes se sont
associées en réseau de villes : par exemple, Bar-le-Duc /
Saint-Dizier / Vitry-le-François (respectivement dans la Meuse, la
Haute-Marne et la Marne). Enfin, nous pouvons rappeler que certaines grosses
agglomérations françaises ont des limites qui dépassent
facilement celles de leur département d'appartenance (Paris et Lyon,
pour ne citer qu'elles).
Partant de là, le secteur d'étude que nous avons
retenu semble pertinent et représentatif des différentes logiques
retenues. Ce faisant, les deux sous-parties constituant cette étude de
cas s'organisent en fonction de la cartographie de quelques indicateurs
statistiques, et d'une enquête de terrain dont les modalités de
construction et de traitement seront exposées plus loin dans ce
mémoire. Il apparaît ainsi que le constat de l'I.N.S.E.E. (celui
d'un "espace urbain" entre Pau et Tarbes) est objectif et
représentatif de la réalité (compte-tenu des recherches
que nous avons effectuées).
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
L'objectif de cette seconde partie consiste donc à
vérifier certaines de nos hypothèses de départ, et
d'analyser plus finement, à travers cet exemple de Pau-Tarbes, les
transgressions des limites politico-administratives. Il s'agit aussi, dans le
cadre de la méthode hypothético- déductive, de
vérifier le bien-fondé des remises en causes
développées en première partie.
A) - Pau-Tarbes : une limite politico-administrative
majeure transgressée par un "espace urbain".
I - Des Z.P.I.U. au Z.A.U. : le constat de l'I.N.S.E.E.
Le Zonage en Aires Urbaines.
Issu des nouveaux découpages réalisés par
l'I.N.S.E.E. pour permettre notamment une meilleure différenciation
entre l'espace rural et l'espace urbain, le Zonage en Aires Urbaines (Z.A.U.)
associe Pau et Tarbes dans le cadre d'un "espace urbain" qui transgresse
donc parfaitement la limite politico-administrative. Ainsi, récemment
(1996-1997), l'I.N.S.E.E. a proposé de remplacer les Zones de Peuplement
Industriel ou Urbain (Z.P.I.U.) par le Z.A.U., les Z.P.I.U. étant trop
étendues. "L'obsolescence de la définition des Z.P.I. U. et
l'aspect limitatif de celles des unités urbaines on incité
l'I.N.S.E.E. à définir une nouvelle classification du territoire
: le Zonage en Aires Urbaines (Z.A. U.). Basé sur la notion de
pôle urbain et de couronne périurbaine, ce nouveau zonage
permettra d'analyser, à l'aide d'un outil plus adapté, une grande
partie des problèmes liés à l'emploi et à la
métropolisation. Utiles pour les analyses structurelles, les aires
urbaines devraient se révéler précieuses pour les
réflexions sur les politiques de développement local".
Pour permettre une meilleure compréhension des objectif
visés par l'I.N.S.E.E., une définition rapide des principaux
découpages évoqués précédemment s'impose.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Par Unité Urbaine, l'I.N.S.E.E. entend
une ou plusieurs communes sur le territoire desquelles se trouve un ensemble
d'habitations qui présentent entre elles une continuité et qui
comportent au moins 2000 habitants. Une unité urbaine constituée
de plusieurs communes est dénommée "agglomération
multicommunale". Une unité urbaine constituée d'une seule
commune est dénommée "ville isolée".
Les Z.P.I.U., quant à elles, sont les
Zones de Peuplement Industriel ou Urbain. Elles sont
constituées des unités urbaines, des communes dites industrielles
(c'est-à-dire non urbaines, mais offrant des emplois dans de grands
établissements) et des communes dortoirs.
Enfin, le Z.A.U. est donc le Zonage en
Aires Urbaines. Il permet la distinction de deux grands types
d'espaces : l'espace à dominante rurale et l'espace à dominante
urbaine. L'espace à dominante urbaine est constitué de trois
types de communes : les pôles urbains, les couronnes périurbaines
et les communes multipolarisées. Les communes n'appartenant à
aucune de ces catégories sont dites rurales.
* le pôle urbain est une unité
urbaine offrant au moins 5000 emplois sur son territoire, sous réserve
qu'elle ne soit pas sous la dépendance directe d'un pôle urbain
voisin plus important.
* la couronne périurbaine est obtenue par
un processus itératif. Sont agrégées au pôle urbain
toutes les communes qui envoient plus de 40% de leur population active
résidente travailler dans un pôle urbain. Puis, toutes les
communes envoyant plus de 40% de leurs actifs dans la zone ainsi
créée sont également intégrées dans le
périurbain, et ainsi de suite jusqu'à l'arrêt du
processus.
* l'aire urbaine est l'addition d'un
pôle urbain et de sa couronne périurbaine.
* les communes multipolarisées sont les
communes rurales et les petites unités urbaines envoyant 40% de leurs
actifs ayant un emploi vers plusieurs aires urbaines, sans atteindre ce seuil
avec une seule d'entre elles, et qui forment avec elles un espace connexe.
Les pôles urbains, les couronnes
périurbaines et les communes multipolarisées forment
l'espace à dominante urbaine.
L'espace à dominante rurale est
l'ensemble des communes n'appartenant pas aux catégories
précédemment définies.
Ainsi :
Pôle urbain + Couronne périurbaine = Aire
urbaine.
Aire urbaine + Communes multipolarisées =
Espace urbain.
=> Espace national français - Espace urbain =
Espace à dominante rurale.
Ainsi, l'I.N.S.E.E. dans le cadre de ses découpages,
montre clairement que l'espace socio- économique s'organise aussi
indépendamment des mailles politico-administratives. Les
phénomènes de mobilités géographiques (relations
domicile-travail, par exemple) sont ainsi mis en évidence, et s'appuient
donc sur la proximité des principaux pôles urbains.
"Pour une remise en cause du maillage
politico-administratif français ? - Exemple de la
limite départementale et régionale entre Pau et Tarbes."-
Lionel Dupuy, Mémoire de DEA, 1998.
Cependant, nous pouvons nous interroger sur la pertinence et la
validité du seuil retenu dans le cadre du Z.A.U. : ce seuil de 40%
abaissé à 35% ou 30% offre-t-il une cartographie comparable
à celle liée aux 40%. Pourquoi d'ailleurs 40% ?
Malgré tout, l' "espace urbain" Pau-Tarbes
représente le 20° "espace urbain" le plus peuplé de
France (= 348000 habitants en 1990), le 18° le plus dynamique (= 0,39% de
taux annuel de variation de la population entre 1982 et 1990), et le 12°
le plus attractif (= 0,18% de taux annuel de variation dû au solde
migratoire entre 1982 et 1990).
D'ailleurs, "l'intensification des liens
inter-régionaux dans cette zone est clairement démontrée
par le repositionnement de l'aire urbaine de Pau vers Tarbes entre 1982 et
1990, au détriment de la partie ouest de l'aire".
Cette typologie de la dynamique géo-démographique
de l'"espace urbain" Pau-Tarbes n'a pas pour but de classer ce dernier
dans un "hit-parade" des espaces urbains les plus dynamiques (attractifs
ou peuplés) en France, mais de montrer comment les pôles urbains
français entretiennent des relations (de tous ordres) qui se
développent indépendamment du maillage politico-administratif.
Cet "espace urbain" Pau-Tarbes nous interroge ainsi une
fois de plus sur la pertinence des mailles départementales et
régionales, dont nous allons décrire maintenant
l'établissement entre les Pyrénées-Atlantiques et les
Hautes-Pyrénées.
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