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Le rétablissement de l'Etat de droit dans une société en reconstruction post-conflictuelle: l'exemple de la sierra léone

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par Jukoughouo Halidou Ngapna
Institut des Droits de l'Homme de Lyon & Université Pierre Mendès France de Grenoble - Master 2, Recherche, Histoire du Droit, Droit et Droits de l'Homme 2007
  

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B. Le rôle de la décentralisation dans la redistribution des richesses

La tradition administrative de la Sierra Léone emprunte beaucoup à l'administration coloniale britannique. Le gouvernement s'appui sur les leaderships locaux pour asseoir son autorité et faire appliquer les lois et règlements. Depuis l'indépendance, l'architecture organique de l'administration a peu évolué avec la conservation des chefferies traditionnelles, les villes à statut particulier et districts. La Local Government Act de 2004 réaffirme l'attachement de la Sierra Léone à cette tradition et perfectionne l'harmonisation de cette pratique administrative en accordant aux conseils locaux et régionaux des pouvoirs importants dans l'exécution des nouvelles compétences qui sont les leurs.

La Sierra Léone compte 19 Conseils régionaux ou locaux321(*) qui eux-mêmes sont divisés en 34 chieftancies. Ces Conseils sont dirigés par des gouvernements locaux de 12 membres au moins322(*) élus au suffrage universel pour 4 ans. Le gouvernement local est la première autorité politique et administrative au niveau local. Ayant à sa tête un président élu parmi les membres, c'est le lien entre la population et le gouvernement central, le président du gouvernement local représente le Président de la république et les ministres. Il est chargé de poursuivre les objectifs gouvernementaux et veiller à l'exécution des lois. Officier de police judiciaire, il concoure à la prévention et à la répression de la délinquance eu niveau local.

Selon la loi sur les gouvernements locaux de 2004, ceux-ci ont pour mission de « promouvoir le développement local », assurer la redistribution des richesses nationales en mettant en oeuvre des projets financés par les ressources budgétaires de l'Etat et issus des impôts, taxes et redevances locales323(*). Le rôle des gouvernements locaux dans la redistribution des richesses et l'efficacité gouvernementale s'examine par le biais des pouvoirs à eux octroyés par la loi, des ressources dont ils disposent et du contrôle qu'exerce le gouvernement central sur eux.

· Le pouvoir législatif et règlementaire des gouvernements locaux 

Les gouvernements locaux sierra léonais ont, sous réserve du respect de la Constitution, la compétence de légiférer (les lois émanant des Gouvernements locaux seront nommés ci-après bye laws) dans les domaines du commerce et du développement de la région de leur ressort. La loi de 2004 (art. 90 § 2-a) précise que ces bye-laws peuvent concerner les infractions pénales. Ce sont en effet des peines ne pouvant excéder 500 000 leones (125 € environ) et les peines de prisons de six mois au maximum. Le gouvernement peut aussi infliger des amendes de 5 000 leones par jour pour des récidives et ce, quelque soit le montant de l'amende finale.

Au niveau économique, les gouvernements locaux légifèrent sur les taxes et les plans de développement locaux. Trois mois avant la fin de chaque exercice, ils déterminent l'assiette, le taux d'imposition et les contribuables pour toutes les taxes locales. Dans la préparation du budget annuel de la région, les gouvernements locaux approuvent les plans de développement locaux après consultation des résidents de leurs régions, des agences gouvernementales, des ONG ou organisations internationales qui ont intérêt à travailler dans la région en question. Pour ce faire, et comme l'article 86 de la loi le prévoit, un comité technique doit être mis en place pour concevoir les projets et les soumettre à l'Assemblée plénière du gouvernement local.

Les gouvernements locaux prennent des textes à caractère réformateur : si une coutume ou tradition locale entrave le développement de la localité, le gouvernement a le pouvoir de l'abolir ou de la réformer en adoptant une bye-law après consultation des autorités traditionnelles de la région (article 94). Un contentieux peut être ouvert devant le ministre de tutelle.

Les textes des gouvernements locaux ayant force de loi sont soumis à une procédure de validation originale : après adoption de la loi locale, elle est transmise au ministre dont l'objet de la réglementation fait partie du champ de compétences. Celui-ci saisit l'Avocat général pour consultation sur la constitutionnalité de la bye-law (article 92-2). Dans le cas où cette dernière est jugée anticonstitutionnelle, le ministre la retourne au gouvernement local dans les 90 jours avec ses observations ; elle est réexaminée selon la même procédure en tenant compte des observations. Si la loi est jugée constitutionnelle, elle est retransmise au chef du gouvernement local qui y appose un contreseing et la dépose au bureau du Parlement qui la publie au journal officiel (art. 92-4) en Anglais ou dans les autres langues de travail du gouvernement local324(*).

Impliquer les gouvernements locaux dans la prise des décisions de validation des projets permet de rapprocher les politiques gouvernementales des populations. C'est aux Gouvernements locaux de choisir les projets qui leur semblent prioritaires et qui permettent de redistribuer eu mieux les richesses nationales, sources de financement des projets.

· Les sources de financement des projets locaux 

''Local councils shall be finnanced from their own revenue collections, from central government grants for devolved functions and from transfers for services delegated from Government Ministries325(*).»

Il ressort de ce qui précède que les sources de financement des projets locaux sont directes ou indirectes. Les sources directes concernent les sommes qui peuvent être collectées directement. Il s'agit, selon l'article 45 (4) des taxes locales, de la taxe d'habitation, des redevances issues des licences d'exploitation accordées aux entreprises exerçant dans les régions, les frais de timbres locaux et les intérêts des dividendes des investissements opérés par les gouvernements locaux326(*). Les gouvernements locaux ont la possibilité de contracter des prêts auprès des ministères après consultation du ministère des finances.

Les ressources indirectes sont celles qui proviennent du Gouvernement central, soit par le budget national, soit par transfert de crédits ou alors par redistribution des revenus issues des ressources naturelles. Au début de chaque exercice budgétaire, le Parlement vote une quote-part qui doit être versée aux conseils régionaux de manière équitable (art. 46). Cette quote-part est complétée par la redistribution des ressources issues de l'exploitation des richesses minières (art. 45 § 4-d et 60). Les transferts de crédits proviennent des délégations de projets par le Gouvernement central. Un ministre peut, après consultation de l'Avocat général, déléguer un projet ou une mission gouvernementale au conseil régional. Celui-ci obtient alors le financement adéquat de la part du ministère. Un rapport moral et financier sanctionnera la fin des travaux.

· Les rapports avec le gouvernement central 

Le gouvernement central exerce sur les conseils régionaux un contrôle de tutelle administrative et financière. Le contrôle administratif consiste en la validation de certains accords (prêts, délégations de fonctions de la part d'une agence gouvernementale, investissements et bye-laws). Les ministres ont le pouvoir de réformer leurs décisions après avis motivé de l'Avocat général. Le contentieux de l'abus de pouvoir peut se faire devant la Haute cour qui siège en premier ressort.

Le Président de la république peut, pour une période de 90 jours maximum, personnellement ou par délégation, exercer les fonctions de chef du gouvernement local après un vote des deux tiers des députés. Cette administration directe peut provenir de la volonté du conseil régional qui, en situation de crise en appelle au Président pour nommer un gouvernement local transitoire. Elle peut aussi provenir de la constatation des abus de pouvoirs répétés de la part du président du gouvernement régional ou encore du prononcé des circonstances exceptionnelles (art. 100).

Au point de vue financier, le Comite des finances régional est chargé de contrôler l'exécution des dépenses et la réalité des travaux sur le terrain. Il est constitué de tous les chefs de gouvernements régionaux et est dirigé par le ministre des finances.

La Sierra Léone a mis sur pied une organisation administrative originale. Pour des besoins d'efficacité, les chefferies traditionnelles héréditaires ont été maintenues et leur pouvoir accru en matière d'exécution des lois et résolutions publiques ainsi que le maintien de l'ordre. Celles-ci participent à la vie sociale et économique de part leur place importance dans les différents organes consultatifs pour la mise en oeuvre des projets locaux. Les gouvernements des conseils régionaux sont quant à eux élus et représentent la vraie voix du peuple. C'est eux qui choisissent les projets prioritaires en accord les chefs, les exécutent et font des rapports au gouvernement central qui est chargé de donner des orientations générales et de coordonner les différentes politiques locales. Une telle organisation administrative suppose l'application des textes et le contrôle de l'autorité judiciaire. La publication des revenus des membres des gouvernements locaux (art. 106) au même titre que ceux du gouvernement central est un premier pas vers la moralisation de la vie publique, aussi bien au sommet de l'Etat qu'au niveau local.

La Sierra Léone avait besoin de la redéfinition du contrat social liant les citoyens entre eux et de la mise en place d'un nouveau pacte républicain liant les citoyens et ceux qui les gouvernent. Avant cela, le tissu social devait être ressoudé et dépourvu de suspicions, rancoeurs et violences. la CVR a servi d'exutoire pour ceux qui avaient besoin de parler de leurs souffrance et de faire connaître les préoccupations et besoins. Elle a servi à donner aux victimes une place importante dans le processus de réhabilitation. Ils ont bénéficié de toute l'attention des membres de la Commission qui a préconisé des recommandations et politiques spéciales à leurs profit. La mémoire des victimes décédées a été honorée par des cérémonies traditionnelles et religieuses. Certains perpétrateurs on eu la possibilité de se réconcilier avec les victimes, complétant ainsi le travail de ma Cour spéciale. Au point de vue politique, la démocratisation de l'Etat et la promotion de la bonne gouvernance sont des motifs d'espoir pour une société en reconstruction post-conflictuelle dont les contours méritent un examen encore plus approfondi.

* 321 Les districts de Bo (3 chieftancies), Bombali (2), Bonthe (2), Kailahun (3), Kambia (2), Kenema (3), Koinadugu (2), Kono (3), Moyamba (3), Port Loko (2), Pujehun (2), Tonkoli (2) et de l'Ouest (aucun) ; les Villes de Bo (un), Bonthe (aucun), Kenema (un), Koidu/NEx Sembehun (2) et Makeni (un) ainsi que celle de la division administrative spéciale de Freetown (aucun).

* 322 La loi prévoit le nombre des membres des gouvernements locaux en fonction de la démographie des régions en question.

* 323 Article 20 de la Loi de 2004 relative aux gouvernements locaux.

* 324 L'article 16 de la Loi de 2004 relative à l'institution des gouvernements locaux prévoit que, bien que l'Anglais soit la langue officielle du pays, les gouvernements locaux peuvent utiliser une langue locale de leur choix, pourvu que celle-ci soit comprise par les populations de la région.

* 325 Article 45 (1).

* 326 Les gouvernements locaux peuvent investir des sommes importantes dans des opérations financières nationales ou internationales sous le contrôle du ministère des finances. Article 64 de la loi relative aux gouvernements locaux.

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"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"