3.6. Les
modèles animaux
Des anomalies sont observées dans les potentiels
évoqués corticaux en réponses à des stimuli visuels
ou auditifs chez le singe et le chat infectés respectivement par le SIV
(simien immunodéficience virus) ou le FIV (félin
immunodéficience virus), comme c'est le cas chez l'homme158.
Le principal modèle animal utilisé à l'heure actuelle est
le macaque Rhésus, pour des raisons de facilité de
conditionnement à des tâches comportementales complexes. Un
modèle félin (FIV) a également été mis au
point159 mais l'étude du comportement chez le chat est
généralement plus difficile à mener que chez le singe et
très peu d'études existent.
L'inoculation du SIV à des macaques Rhésus
conduit à un syndrome d'immunodéficience proche du SIDA
humain160. Les singes Rhésus infectés par le SIV ont
une immunosuppression et développent des troubles neuropathologiques et
neuropsychologiques proches de ceux des humains161. La
différence la plus importante est cependant une progression plus rapide
de la maladie simienne162. Les études comportementales
conduites chez le singe ont un objectif double : 1) déterminer la nature
des déficits cognitifs et moteurs provoqués par l'infection chez
le singe et voir quelles structures cérébrales sont liées
aux fonctions perturbées et 2) mesurer l'efficacité des
thérapies sur ces déficits163. L'utilisation d'un
modèle animal des effets de l'infection par le virus sur les fonctions
cognitives et motrices permet en outre de connaître les performances
cognitives et habiletés motrices des sujets avant l'infection par le
virus, ce qui n'est pas le cas chez l'homme. Cette dernière
donnée est importante car, incontrôlable chez les sujets humains,
elle est source de variabilité interindividuelle et peut être une
des causes de contradiction entre les différentes études (voir
plus haut). En outre, les études conduites chez les modèles
animaux permettent de tester les troubles fonctionnels induits par le VIH-1 en
recherchant notamment les relations avec les modifications de taux de certains
marqueurs biologiques.
Comme chez les patients, l'infection par le SIV provoque des
déficits moteurs dans une très grande proportion des singes
infectés et des déficits cognitifs dans 50% des cas. Les
mêmes anomalies concernant la barrière
hémato-encéphalique, et le relargage de protéines virales
et de substances neurotoxiques sont trouvées158.
3.6.1. Processus mnésiques
Le nombre d'animaux utilisés dans ces études est
très restreint (de 6 à 15 en général) ce qui rend
difficile une présentation de résultats en terme statistiques.
Pour cette raison, nous mentionnerons simplement les tâches pour
lesquelles des déficits ont été répertoriés.
Les tests effectués chez le singe mettent en jeu
différents processus de mémoire visuelle : rétention et
apprentissage d'une discrimination visuelle, mémoire de travail reposant
sur ces discriminations. La reconnaissance visuelle simple, comme chez l'homme,
n'est qu'exceptionnellement affectée163. Les fonctions plus
généralement touchées concernent la discrimination
visuelle (rétention et apprentissage) et la mémoire de
travail.
Il s'agit généralement de tâches
d'appariement de stimuli (MTS); à chaque essai, on présente
à l'animal plusieurs stimuli qui apparaissent un par un sur un
écran tactile; après un délai variable pendant lequel
l'écran est vierge; chaque stimulus-cible, présenté
précédemment est affiché sur l'écran associé
à un nouveau stimulus. Pour obtenir la nourriture, l'animal doit toucher
les stimuli-cibles. Ce test met en jeu la reconnaissance visuelle des stimuli
présentés et la mémoire de travail. Murray et
collaborateurs163 ont ainsi montré que trois singes sur dix
présentaient des déficits dans ce test. Fox et
coll.158 ont mis au point une batterie de tests cognitivo-moteurs
pour le macaque. Dans cet ensemble de tests, la mémoire de travail est
évaluée par une procédure identique à celle
employée chez le sujet humain108. Contrairement à ce
qui est observé chez l'homme, ces auteurs ne mettent pas évidence
de déficits de mémoire de travail chez les macaques
infectés alors que l'exécution d'autres tâches (voir plus
loin) est affectée.
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