3.2. Evolution des
troubles
Certains auteurs suggèrent que la progression de la
maladie soit associée à une évolution rapide des troubles
neuropsychologiques110. D'autres, au contraire, constatent une
évolution extrêmement discrète des troubles cognitifs.
Ainsi, Dunbar et collaborateurs132 ont étudié
l'évolution des performances neuropsychologiques de patients ARC
(AIDS-Related- Complex, CDC groupes IVA et IVC2) évoluant (progresseurs)
ou n'évoluant pas (non-progresseurs) vers un SIDA déclaré.
Le suivi longitudinal de ces patients a montré, d'une part, que les deux
groupes de patients séropositifs, progresseurs et non progresseurs,
étaient plus ralentis et présentaient plus de troubles
attentionnels que des patients séronégatifs; d'autre part, les
progresseurs montraient une tendance (non statistiquement
vérifiée) à être plus ralentis que les non
progresseurs.
Les troubles cognitifs modérés correspondent au
ralentissement psychomoteur, aux déficits de mémoire verbale
épisodique118, 133, ainsi qu'aux déficits des
fonctions exécutives et attentionnelles108. Les fonctions
cognitivo-motrices les plus sensibles concernent la dextérité
manuelle et la coordination bi-manuelle, la fluence et la mémoire
verbale, les temps de réaction et les fonctions attentionnelles. Les
fonctions frontales sont plus atteintes chez les patients avec SIDA
déclaré que chez les séropositifs asymptomatiques, ce qui
pourrait suggérer que les déficits frontaux, comme les
déficits visuo-spatiaux, ne soient pas caractéristiques des
stades précoces de la maladie mais plutôt des stades
tardifs133. Enfin, chez les patients au stade de SIDA, sans troubles
cognitifs, un ralentissement moteur discret est un signe constamment
observé.
3.3. Le
ralentissement psychomoteur
L'importance capitale de la valeur prédictive du
ralentissement psychomoteur dans l'apparition d'une démence a
déjà été mentionnée plus haut. Certains
auteurs suggèrent que les tests de temps de réaction seraient les
plus sensibles, en faveur d'un déficit central de rapidité
motrice ou psychomotrice99, 134.
Des études de suivi longitudinal de cohortes de
patients séropositifs ont permis de démontrer que l'augmentation
des temps de réaction psychomoteurs est le signe précurseur le
plus significatif de l'évolution des troubles mineurs vers une
démence91. En effet, si les différentes études
peuvent aboutir des conclusions différentes concernant les performances
aux tests cognitifs, elles montrent une remarquable cohérence quant
à l'effet de l'infection par le virus sur le ralentissement moteur et/ou
cognitif dès les stades précoces de la maladie. Une étude
récente sur la contribution des différents tests
neuropsychologiques dans le tableau des troubles cognitifs montre que les
troubles moteurs, associés aux troubles mnésiques, expliquent
à eux deux la majorité des tableaux de
détérioration135.
L'importance de la valeur prédictive du ralentissement
moteur dans l'apparition d'une démence a été
récemment confirmée par le suivi prospectif de patients. Dans un
suivi longitudinal de 9 ans de patients séropositifs, Sacktor et
collaborateurs136 ont montré que les patients asymptomatiques
qui présentaient un ralentissement psychomoteur avaient plus de risque
d'évoluer vers un SIDA et/ou de développer une démence.
Baldeweg et collaborateurs95 remarquent que l'EEG topographique
montre que l'activation anormale de plusieurs aires motrices est un signe plus
sensible que les mesures des tests psychomoteurs comportementaux.
Les études menées après l'introduction
des combinaisons thérapeutiques antirétrovirales ont
montré l'influence de ces molécules dans l'augmentation de la
vitesse psychomotrice137, 138, cependant, y compris chez les
patients traités par des antiprotéases, le ralentissement
psychomoteur reste associé a une plus grande
mortalité139 (voir chapitre 3, titre II).
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